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Dans son édito du 20/09/2024, Paul Sugy revient sur la situation politique de la France.

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Transcription
00:00Paul Sujit avec nous, toujours un plaisir de vous avoir Paul. 7h50, l'édito politique de Paul, le point de vue de Paul Sujit.
00:08La France dilapide son patrimoine et n'a plus rien su inventer depuis 50 ans.
00:14C'est le message pénible à entendre mais à notre sens réaliste.
00:18Je dis note parce qu'on en a parlé et je sais que vous êtes d'accord.
00:21C'est un message envoyé par Boilem Sansal, écrivain franco-algérien, il vient d'être naturalisé,
00:26et il s'exprime dans le Figaro Magazine, interrogé par Alexandre Devecchio.
00:29La vérité est parfois plus lucide quand elle vient d'un regard extérieur à la France, Paul.
00:34Oui, vous savez Romain, en littérature, la figure exotique de l'étranger que l'on fait promener dans un pays qui est le nôtre,
00:40c'est une figure ancienne, Voltaire la pratique par exemple avec son huron qu'il promène en France pour nous donner une leçon venue de l'extérieur.
00:45C'est une figure rhétorique très utile parce qu'elle permet finalement, par un regard neutre, neuf,
00:50de révéler des vérités qui étaient sous nos yeux et que nous ne voyons pas.
00:54Généralement, c'est pour vanter un ailleurs plus désirable, un exotisme enviable.
00:57Ici, Boalem Sansal nous parle de l'Algérie, l'Algérie d'après la guerre civile des années 1990,
01:03et c'est pour nous dire que la France suit le même chemin.
01:06C'est pour ça que Salson doit être écouté avec beaucoup d'attention,
01:09c'est parce qu'il sait, au fond, ce que devient un pays corrompu qui ne sait plus croire en lui-même.
01:14Dans son nouvel essai, le français, parlons-en, séparé aux éditions du CERF,
01:18il fait à la fois un cri d'amour à la France et en même temps un cri d'alerte et qui, je crois, mérite d'être entendu.
01:22Dans cet entretien que vous citez avec Alexandre Devecchio au Figaro Magazine, il dit
01:25que c'est un pays à la ramasse qui vit sur des gloires passées.
01:28Depuis les années 70, la France des grands jours vit sur le capital,
01:32sur le patrimoine extraordinaire que les Français d'hier, d'avant-hier, ont constitué.
01:36Un capital que nous avions amassé, selon Boalem Sansal, en professant cette foi dans une phrase toute simple, évangélique,
01:43croissez, multipliez-vous et remplissez la terre.
01:45Ce que nous dit, au fond, Boalem Sansal, c'est que nous n'avons même plus envie d'être grand, de croître,
01:50parce que cette envie a été éteinte d'abord par une honte ou une rancune à l'égard de ce que nous sommes,
01:54et notamment la honte postcoloniale et, de fait, la relation avec l'Algérie en dit long aussi sur cette honte-là.
02:00Aussi parce qu'on entend un discours, vous savez, écologiste, apocalyptique, qui dit que finalement,
02:04produire, croître, grandir, c'est précipiter le monde à sa ruine.
02:07Eh bien tout cela, au fond, nous fait renoncer à l'importance de ce que nous avions accumulé
02:10et nous dilapidons ce capital comme le fils prodigue qui se débarrasse en faisant la fête de tout ce qu'il avait
02:16et qui se retrouve nu.
02:17Ce que dit Boalem Sansal, et c'est très beau parce que c'est aussi un écrivain qui nous parle,
02:20c'est que peut-être le plus riche de nos patrimoines, c'est la langue française
02:23et que dilapider la beauté de notre langue, c'est renoncer en premier à ce que nous sommes ou ce que nous étions.
02:28Hélas, il n'y a encore pas si longtemps que cela.
02:30Paul Sugis, ce qui fait la force de l'analyse de Boalem Sansal,
02:34c'est qu'il a connu aussi le déclin de l'Algérie qui nous offre ce miroir pour comprendre notre situation.
02:40Ça, c'est très intéressant.
02:41Oui, et écoutez bien Boalem Sansal parce qu'il est loin de la caricature que l'on peut faire de l'Algérie gangrénée seulement par l'islamisme.
02:46Bien sûr, l'islamisme fait du tort à l'Algérie,
02:48mais pour lui, l'islamisme n'est pas tant la cause que la conséquence des malheurs qui accablent le pays de Boalem Sansal.
02:54La véritable cause, c'est la médiocrité des politiques, notamment des élites.
02:59C'est ce qu'il dit dans ce même entretien.
03:01Même cause, mêmes effets, il compare l'Algérie à la France.
03:03Au lendemain de son indépendance, l'Algérie disposait elle aussi d'un patrimoine unique,
03:07fourni en partie par la nature, en partie par la colonisation qui avait équipé la demeure.
03:11Lasse, ces dirigeants de plus en plus médiocres et corrompus ont dilapidé le patrimoine
03:16et mis l'Algérie sur une ligne de déclin rapide
03:18qui a fait d'elle une proie facile pour l'international islamiste et pour les oligarques internationaux.
03:23C'est aussi le message d'un second écrivain algérien, Kamel Daoud,
03:26qui nous met en garde au risque de passer aux yeux des siens pour un traître.
03:29Oui, dans cette rentrée littéraire, effectivement,
03:31on a deux écrivains algériens qui nous parlent de leur pays avec à la fois beaucoup de tristesse
03:35et aussi cette mise en garde.
03:36Kamel Daoud, lui, nous parle d'une Algérie qui, elle aussi,
03:40s'est faite lacérer par les lames des islamistes.
03:43Et quand il essaye de dire cela, il se met lui-même en danger
03:46puisqu'il est considéré comme un traître dans un très beau texte inédit de sa plume
03:51qu'il a récité à l'émission de la Grande Librairie,
03:53qu'il a appelé « L'éloge de la trahison ».
03:55Il nous explique au fond que la trahison est peut-être importante
03:58justement parce qu'elle est au service de la vérité.
04:00Et il explique que quand un intellectuel occidental pense contre les siens,
04:04il est universel.
04:05Et quand un intellectuel du sud pense contre les siens, c'est un traître.
04:08Et c'est vrai, en France, en Occident,
04:10on a cette idée qu'il faudrait toujours penser contre soi-même,
04:13dépasser notre préjugé culturel.
04:15Et quand un écrivain algérien le fait au sujet, justement,
04:18de sa propre culture, de sa propre histoire,
04:20les siens disent « c'est un traître,
04:22c'est quelqu'un au fond qui fait honte à notre pays ».
04:25Alors Kamel Daoud publie un roman qui s'appelle « Ouris ».
04:27C'est publié chez Gallimard, c'est extrêmement beau,
04:29c'est un roman magnifique, très bien écrit.
04:31« Ouris », vous savez, c'est le nom qu'on donne à ces femmes
04:34que l'on va réserver pour les fidèles qui entreront au paradis.
04:37Sauf que ce que nous raconte Kamel Daoud,
04:38ce n'est pas l'histoire du paradis,
04:39c'est la lente descente aux enfers de l'Algérie.
04:41Et ce qu'il nous dit, c'est que si on n'y prend pas garde,
04:43demain, ça sera la même chose en France.
04:45Merci beaucoup Paul Sujit.

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