Pascal Praud revient pendant deux heures, sans concession, sur tous les sujets qui font l'actualité. Aujourd’hui, Pascal Praud reçoit le philosophe et ancien ministre de l'Éducation nationale, Luc Ferry. Ensemble, ils reviennent sur toute l'actualité politique du moment : la nomination de Gabriel Attal à Matignon, le nouveau gouvernement, les prises de parole du président de la République.
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00:00 - Europe 1. - Europe 1, il est 11h05.
00:02 - C'est Christophe Landry.
00:04 - Europe 1, 11h, 13h, Pascal Praud.
00:09 - Et pour poser vos questions, notre invité Luc Ferry, vous pouvez composer le 01-80-29-21, de 11h à 13h.
00:15 - Luc Ferry, vous allez être gentil déjà avec le micro.
00:17 - Oui, oui, j'ai mis justement, non, non, mais justement, j'ai le mettre là où il faut.
00:21 - Et c'était page 184, vous écoutiez une dame qui donnait les 7 conseils thérapeutiques propres au moelle.
00:27 - Ah, terrifiant.
00:28 - Elle a dit qu'elle a augmenté significativement notre taux de bonheur mesurable.
00:33 - Et elle disait cultiver la gentillesse. Elle a raison quand même, si vous êtes gentil avec les uns et les autres, c'est pas mal.
00:38 - Si vous voulez dire qu'il vaut mieux être gentil plutôt que méchant, je crois qu'il n'y a pas besoin de faire 50 ans de philo
00:42 - ni de sortir de Polytechnique pour dire une banalité pareille.
00:45 - Mieux vaut être jeune, beau et riche que vieux, laid, pauvre. Enfin, je peux vous en faire comme ça pendant une heure si vous voulez.
00:49 - Non, c'est pas ça. Je ne crois pas à l'idée de bonheur.
00:52 - Voilà, je crois que nous avons des moments de plaisir, des moments de joie.
00:56 - On a même des plages de sérénité dans la vie.
00:59 - Et je dirais que la seule définition du bonheur qui tienne un peu la route, c'est la possibilité de la joie.
01:04 - C'est quand je me réveille le matin en me disant que la joie n'est pas impossible.
01:07 - Peut-être que je vais rencontrer un ami, je vais prendre un café.
01:10 - Mais le bonheur qui est défini, vous pouvez prendre n'importe quel dictionnaire philosophique ou Larousse standard.
01:17 - Le bonheur, c'est l'idée, c'est ça que nous vendent aujourd'hui les marchands de bonheur, de psychologie positive et de développement personnel.
01:23 - C'est l'idée qu'on arriverait à un bonheur définitif et qui serait complet.
01:28 - C'est ça qu'ils nous vendent, parce qu'il ne dépendrait que de nous-mêmes.
01:32 - Par exemple, il y a un livre de Frédéric Lenoir, qui par ailleurs est un ami, on a le droit d'être en désaccord,
01:37 - dans lequel il explique, en reprenant les thèses stoïciennes, que le bonheur ne dépend que de notre vie intérieure.
01:44 - Il va jusqu'à dire, il y a un chapitre entier là-dessus, qu'on pourrait être heureux à Auschwitz.
01:47 - Je pense que c'est totalement faux.
01:50 - Je pense que le bonheur dépend énormément des autres.
01:53 - Moi j'ai trois filles, si une de mes filles va mal, mon bonheur il est carbonisé.
01:58 - Et je ne parle même pas si elle mourrait, disons les choses franchement.
02:01 - Et donc il faut un cuit de bulot pour croire au bonheur.
02:03 - Encore une fois, le bonheur c'est simplement la possibilité de la joie, c'est déjà énorme.
02:08 - Mais l'idée qu'on va nous vendre un bonheur éternel sur cette terre, parce qu'il ne dépendrait que de nous,
02:14 - seul le chef du camp d'Auschwitz peut être heureux à Auschwitz, c'est encore j'en doute.
02:18 - Parce qu'il faut déjà être vraiment une belle ordure.
02:21 - Et donc je crois qu'on est en train de nous vendre quelque chose qui est faux,
02:25 - et qui est illusoire, qui rend les gens malheureux paradoxalement, parce que c'est culpabilisant.
02:29 - Et pourquoi on nous vend ça ? C'est ça qui est très important.
02:31 - Mais c'est qui ce "on" ? Moi je n'ai pas l'impression que c'est qui ce "on".
02:34 - C'est les plus grandes ventes en France et dans tout l'Occident.
02:36 - Donc les plus grandes ventes de livres en France, c'est la psychologie positive et la théorie de la développement personnel.
02:43 - Vous prenez les têtes de série aux Etats-Unis, puisque ça nous vient évidemment des Etats-Unis,
02:48 - dans les listes de best-sellers, c'est toujours, toujours, toujours,
02:52 - psychologie positive, développement personnel, c'est ce qui marche le mieux.
02:55 - Et tout mon livre est fait, non pas pour dire ça, qui est une banalité,
02:58 - parce qu'encore une fois, il faut un QI de bulot pour ne pas comprendre ça,
03:00 - mais c'est pour expliquer d'où ça vient.
03:02 - Et ça vient, c'est le sous-titre qui est important à mes yeux dans le livre,
03:06 - ça vient du fait que les idéologies de l'après, le bonheur après, se sont effondrées.
03:12 - En été, le troisième petit cochon est devenu le premier, pourquoi ?
03:15 - Le troisième petit cochon, il travaille d'abord, il construit sa maison en dur, et puis il va s'amuser après.
03:22 - Le premier, il veut s'amuser tout de suite, et il ne veut pas travailler,
03:25 - et c'est ce que nous vivons, pourquoi ? Parce que le communisme et le catholicisme se sont effondrés en France.
03:30 - C'était des idéologies de l'après.
03:32 - Pour les communistes, le bonheur, c'était après la révolution.
03:34 - Pour les catholiques, c'était après la mort.
03:36 - Je vous donne les chiffres, parce que tout est là, et je ne comprends pas qu'on n'en parle pas plus,
03:40 - parce que ça explique tout ce qu'on vit aujourd'hui.
03:42 - En 1950, il y a 45 000 prêtres diocésains en France.
03:47 - Les prêtres diocésains, ce sont ceux qui enseignent dans les églises, qui prêchent pardon.
03:52 - Il en reste 4000 aujourd'hui.
03:54 - 95% des français étaient baptisés, ils sont 30% aujourd'hui.
04:00 - 4% seulement des français vont régulièrement à la messe le dimanche.
04:03 - Et le communisme, c'est pareil, 30% des français étaient communistes en 1950, ils sont 3% aujourd'hui.
04:09 - Les idéologies de la presse sont effondrées.
04:11 - Pour les enfants, le bonheur, c'était après la classe.
04:13 - Pour les salariés, c'était après la retraite.
04:15 - Pour les communistes, après la révolution.
04:17 - Pour les catholiques, après la mort.
04:18 - Je vais vite, mais c'est ça.
04:20 - On est passé du troisième petit cochon au premier, et du coup,
04:23 - la psychologie positive et les marchands de bonheur ont remplacé les grandes religions,
04:28 - de salut terrestre et de salut céleste.
04:30 - Et la question, c'est pourquoi, qu'est-ce qui s'est passé pour qu'en 50 ans,
04:34 - il y ait cet effondrement, qui change tout à nos vies.
04:38 - La réforme des retraites, le psychodrame, le "be quit",
04:41 - c'est-à-dire 50 millions d'américains ont quitté leur job,
04:44 - si je n'ai qu'une seule vie, si je n'ai pas deux vies,
04:47 - si je n'ai qu'une seule vie, je ne vais pas la perdre pour la gagner.
04:50 - Il manque 200 000 personnes aujourd'hui dans la restauration et l'hôtellerie.
04:54 - Pareil dans les poids lourds, les conducteurs de poids lourds de bus, etc.
04:59 - Et les métaverses, vous savez, Horizon World de méta,
05:04 - des centrales andes, Sandbox, etc. vont marcher,
05:08 - parce que les gens vont chercher un bonheur ici et maintenant,
05:11 - dans le virtuel plutôt que dans le réel.
05:13 - Donc je ne développe pas tout ça, c'est dans mon livre évidemment,
05:16 - mais je pense qu'on vit une faille dans la civilisation,
05:19 - et qui est très problématique, parce qu'en Chine et en Russie,
05:21 - ce n'est pas comme ça qu'on pense.
05:23 - Je n'ai posé qu'une question, il est 11h10.
05:25 - C'est terrifiant, pardon, je m'arrête.
05:27 - Mais il est possible que je sois un peu au chômage,
05:30 - parce qu'on dit toujours que je parle beaucoup.
05:32 - Non, non, non, pardon, Pascal, je suis désolé,
05:34 - mais il fallait expliquer les choses.
05:36 - Mais vous êtes formidable, le mot "frénésie" d'ailleurs, veux-tu dire ?
05:39 - Oui, c'est ça, c'est "frénétique".
05:41 - La frénésie du bonheur.
05:42 - En fait, bonheur tout de suite, maintenant, ici et maintenant.
05:44 - Et vos marchands de bonheur, ils disent "ah mais on va vous proposer ça en 15 leçons",
05:48 - les coachs, les psychologues positifs qui vont dire "ah mais en 15 leçons,
05:51 - vous allez y arriver, c'est très facile, il suffit de se centrer sur sa vie intérieure".
05:55 - "Devenez narcissique et sauvez votre peau".
05:57 - Le narcissisme est une crapulerie sans nom.
06:00 - La pause.
06:02 - Le narcissisme est une crapulerie sans nom.
06:04 - Une crapulerie sans nom, oui.
06:06 - La pause, cher Luc Ferry, qui est avec nous.
06:08 - A tout de suite, et on reviendra pas...
06:10 - Alors je salue DJ Fab.
06:12 - Bonjour Pascal, c'est un bonheur d'être avec vous.
06:14 - Voilà, si vous pouvez nous donner quelques chansons légères de bonheur.
06:18 - Comme d'habitude.
06:20 - Je pense à des gens comme, je sais pas, Carlos, par exemple, nous faire...
06:24 - Ah oui, j'ai préparé des petites choses.
06:26 - Voilà, des petites chansons légères, et puis je salue, alors,
06:28 un des garçons les plus philosophes que je connaisse,
06:30 puisqu'il fait, comme Monsieur Jourdain, de la philosophie sans le savoir,
06:34 c'est Monsieur Boubouk, qui s'occupe de la page Facebook.
06:36 - Bonjour à tous !
06:38 - Alors, franchement, la rencontre, Olivier Guenec, Luc Ferry...
06:42 - Ah, c'est exceptionnel !
06:44 - Là, excusez-moi, mais là, je pense qu'on peut faire du monde cet après-midi avec ça.
06:48 Je pense qu'on peut faire quelque chose.
06:50 Je vous le dis comme je le pense,
06:52 Olivier Guenec face à Luc Ferry.
06:54 - Ah mais je suis geek en plus, donc on va s'entendre.
06:56 - Oui, alors, c'est un garçon exceptionnel.
06:58 - Un pari faux.
07:00 - Allons doucement, il va être déçu, sinon.
07:02 - Oui. - A tout de suite.
07:04 - Vous écoutez Pascal Proévaut sur Europe 1.
07:06 - Europe 1.
07:08 - Je suis le vagabond, le marchand de bonheur.
07:12 - Les compagnons de la chanson, Fred, mais là, je veux bien, 11h14...
07:16 - Il a vu mon âge, c'est pour ça.
07:18 - Non, mais il y a une chanson qui est très bien, et c'est Luc Ferry qui le dit,
07:22 celle de Balavoie, de Le Chanteur.
07:24 - Oui, j'aimerais bien réussir ma vie.
07:26 - L'idée, c'est quand même que vous puissiez échanger avec les auditeurs.
07:30 Et Benjamin est avec nous.
07:32 Donc Benjamin, il a 25 ans, donc ça c'est intéressant.
07:34 Qu'est-ce qu'on dit à un jeune de 25 ans ?
07:36 Vos filles ont quel âge, Luc Ferry ?
07:38 - Cette âge-là. Ma Clara a eu 23 ans hier,
07:40 et Louise a 25 ans,
07:42 et j'ai une grande fille qui a 33 ans.
07:44 - Et elles sont heureuses ?
07:46 - Elles sont merveilleuses et elles sont heureuses.
07:48 - Qu'est-ce que vous leur avez dit,
07:50 quand elles avaient 4 ans, 5 ans, 10 ans ?
07:52 Qu'est-ce que vous leur disiez à vos filles ?
07:54 Vous le direz après, parce que Benjamin est un peu pressé,
07:56 et il veut également vous poser une question.
07:58 Benjamin, bonjour.
08:00 - Oui, bonjour.
08:02 - Qu'est-ce que vous faites dans la vie ?
08:04 - Alors moi je suis gestionnaire d'entreprise, et du coup j'ai 27 là, depuis peu même.
08:06 - Ah bon ?
08:08 - Ben tout augmente.
08:10 - J'adore, j'ai ta gueulette.
08:12 - J'en ai quelques-unes en magasin.
08:14 - Moi aussi, moi aussi, rassurez-vous.
08:16 - D'abord, est-ce que vous êtes heureux, Benjamin ?
08:18 - Oui, bien sûr.
08:20 - Est-ce que vous diriez que vous êtes heureux ?
08:22 Et c'est quoi pour vous être heureux ?
08:24 - Alors, ah, ça c'est une vraie question que je me suis posée,
08:26 il y a un petit moment même.
08:28 Pour moi, c'est être en accord avec soi-même au jour le jour.
08:30 Voilà, ça c'est la réponse que j'ai trouvée de mieux,
08:32 quand je me suis posé la question.
08:34 - Mais est-ce que ça dépend,
08:36 par exemple, je ne sais pas si vous êtes amoureux en ce moment ?
08:38 - Oui, par exemple.
08:40 - Vous êtes amoureux d'un garçon,
08:42 ou vous êtes amoureux d'une fille ?
08:44 - D'une fille qui est enceinte d'un petit garçon.
08:46 - Ah oui, donc il y a quelque chose qui arrive,
08:48 et qui va provoquer un bonheur
08:50 sans doute important pour vous.
08:52 Alors, la définition du bonheur,
08:54 telle que le dit, ou tel que l'a dit Benjamin,
08:56 être en accord avec soi-même.
08:58 - Mais il vient de dire le contraire en même temps,
09:00 puisqu'il a dit qu'il était amoureux de quelqu'un,
09:02 donc il est sorti de lui-même.
09:04 Et qu'il attend un bébé
09:06 qui va le faire sortir de lui-même encore beaucoup plus.
09:08 Vous allez voir Benjamin,
09:10 ces petites choses qui arrivent comme ça,
09:12 de manière plus ou moins prévue,
09:14 ça vous a fait penser à un bébé ?
09:16 - De manière plus ou moins prévue,
09:18 ça vous arrache des sentiments qu'on n'a jamais connus
09:20 avec les personnes qu'on a aimées pareil.
09:22 On a beau avoir aimé ses parents, ses frères et soeurs,
09:24 ses femmes, ses maîtresses,
09:26 ses maris, ses amants, ce que vous voudrez,
09:28 les enfants vous arrachent des sentiments
09:30 qui sont infiniment plus puissants
09:32 et qui vont totalement sortir de vous-même.
09:34 C'est-à-dire que les enfants,
09:36 ils vous font sortir de vous-même,
09:38 ils ont cesse d'être égoïstes,
09:40 et ils vous rendent responsable
09:42 de quelque chose d'autre, de quelqu'un d'autre
09:44 en l'occurrence que vous-même.
09:46 Et donc ce qui est beau dans l'amour,
09:48 et c'est ça qui fait que même si les choses vont pas bien en France
09:50 aujourd'hui, et qu'on est en déclin,
09:52 l'amour sauve.
09:54 Mais l'amour sauve quand il est l'amour
09:56 d'autre chose que soi. C'est pour ça que je déteste
09:58 le narcissisme. On est tous narcissiques,
10:00 forcément. On a un corps biologique,
10:02 il faut s'en occuper, et puis bon,
10:04 comme disait Freud, le cher moi, il est quand même
10:06 toujours présent. Mais ce qui est beau dans l'amour,
10:08 c'est pour ça que je déteste
10:10 cette idée de la psychologie positive
10:12 qu'il faut n'aimer que soi-même,
10:14 ou aimer soi-même pour pouvoir aimer les autres. C'est pas vrai.
10:16 - C'est pas vrai ça ? - Non, c'est pas vrai.
10:18 - On peut aimer les autres sans s'aimer soi ?
10:20 - Non. On n'est pas obligé de passer de l'autre côté du cheval.
10:22 Se détester soi-même
10:24 est une catastrophe. Les gens les plus dangereux
10:26 sont les gens qui se détestent. Mais ça, c'est
10:28 une banalité à nouveau. Mais vous n'êtes pas obligé
10:30 de passer de l'autre côté du cheval. - Oui, mais ils ne le savent pas forcément,
10:32 qui se détestent. - Oui, mais vous n'êtes pas obligé d'être narcissique pour autant.
10:34 Narcisse, c'est celui qui n'aime
10:36 que lui-même. Il faut absolument lire,
10:38 lisez ça, c'est trois pages, c'est génial,
10:40 dans les métamorphoses de vide.
10:42 Narcisse, c'est le contraire du sage.
10:44 Socrates. Narcisse est
10:46 beau dehors, magnifique. Il séduit
10:48 toutes les jeunes filles, mais il est
10:50 laid dedans. Il est égoïste. Il est narcissique,
10:52 évidemment. Il va nous donner naissance
10:54 à une fleur, le Narcisse.
10:56 En grec, Narcos, c'est
10:58 le sommeil de la mort. Il va mourir, évidemment,
11:00 à force de se regarder jusque
11:02 dans le fleuve des enfers. Et il est
11:04 l'atroce d'une méchancée sans fin.
11:06 Il va rendre amoureuse
11:08 de lui la nymphe Écho.
11:10 Écho,
11:12 ça va donner d'ailleurs le mot "écho" en français,
11:14 qui va en mourir. Il ne reste plus que
11:16 sa voix qui se répercute dans les montagnes,
11:18 et c'est l'écho d'Écho,
11:20 si je puis dire. Et donc Narcisse
11:22 va leur rendre malheureuse, et ses soeurs
11:24 des nymphes vont appeler
11:26 Némésis, la déesse de la vengeance, pour se
11:28 venger de Narcisse, et il va en mourir.
11:30 Et Socrate, il est laid et beau.
11:32 - Plus prosaïquement, Benjamin...
11:34 - Donc c'est pas que l'amour
11:36 avec soi, c'est pas que l'harmonie avec soi.
11:38 C'est ça que je voulais lui dire.
11:40 - Je l'ai compris. Mais Benjamin, vous,
11:42 vous trouvez qu'il y a aussi une part
11:44 de sacrifice à faire ?
11:46 - Alors, moi,
11:48 quand j'entends le mot "narcissisme",
11:50 ça me fait penser à l'individualisme
11:52 du monde moderne, de notre monde
11:54 contemporain, que moi je déplore
11:56 amplement.
11:58 Alors, la chose
12:00 qui... Je le déplore,
12:02 et voilà, c'est
12:04 quelque chose qu'on peut s'indigner
12:06 tous les jours, mais il y a un moment aussi, il faut réfléchir
12:08 un peu aussi à notre modèle de société,
12:10 c'est-à-dire que le contraire
12:12 de l'individualisme, c'est de la
12:14 communauté, et
12:16 on a, entre autres dans notre
12:18 pays, pris un modèle un peu
12:20 anglo-saxon, voire un nord-américain,
12:22 de l'universalisme. Il y a un moment,
12:24 il faut pas s'étonner que
12:26 notre société, elle plonge dans l'individualisme,
12:28 et que
12:30 les gens regardent leur nombril.
12:32 De l'autre côté, on se
12:34 plaint de quelque chose, et je pense que ça devrait
12:36 être un élément
12:38 qui devrait retenir un peu notre attention,
12:40 c'est la perte du roman
12:42 national. Moi, la notion de
12:44 sacrifice, on se la pose tous les jours, et puis c'est
12:46 un sujet qui est en train de revenir sur la table.
12:48 Moi, je pourrais me sacrifier pour mon pays, pour ma famille,
12:50 pour quoi que ce soit, mais
12:52 à raison, en fait, que
12:54 on donne du sens au sacrifice, et le sacrifice
12:56 il se fait par la communauté. - Et aujourd'hui, effectivement, il est peut-être
12:58 moins présent qu'il n'était
13:00 avant. Mais la question que vous posez
13:02 est intéressante sur l'individualisme.
13:04 C'est une banalité de dire
13:06 "aujourd'hui, les gens sont plus individualistes
13:08 qu'hier", etc.
13:10 Est-ce que c'est vrai ?
13:12 Est-ce qu'au fond,
13:14 Luc Ferry, les choses
13:16 changent, ou pas ?
13:18 Est-ce que les sociétés sont
13:20 si différentes que cela ? Parce que
13:22 quand vous lisez, justement,
13:24 les grands auteurs, quand vous lisez
13:26 les classiques, etc.,
13:28 il y a quand même des permanences sur...
13:30 - On reste des humains.
13:32 Donc, ça, c'est certain.
13:34 - Trop. - Non, c'est pas ça
13:36 qui a changé. C'est le
13:38 cœur de mon livre, pardon d'y revenir, mais c'est
13:40 ce que j'appelle "La spiritualité laïque". Quand j'étais
13:42 gamin, en 68, j'avais 17 ans,
13:44 il y avait deux grands foyers de sens en politique,
13:46 c'était la nation à droite, et la
13:48 révolution à gauche. Tous mes copains étaient
13:50 révolutionnaires à gauche, et tous mes amis
13:52 de droite, il y en avait très peu d'ailleurs, étaient...
13:54 Le journal des Gaulis s'appelait "La Nation".
13:56 Pierre Charpy, vous vous souvenez, qui était un type très chinois.
13:58 - La lettre de la nation. - La lettre de la nation.
14:00 C'était la nation à droite, et c'était les foyers
14:02 de sens, comme dans un tableau en
14:04 perspective, vous avez le point de fuite. Ça organisait
14:06 tous les projets politiques particuliers.
14:08 Villepin est encore comme ça, mon ami Dominique.
14:10 La nation, la nation, la nation,
14:12 la France, la France, la France, et puis la révolution,
14:14 la révolution, elle s'est effondrée à gauche.
14:16 Enfin, il aurait... Voilà. Aujourd'hui,
14:18 la vraie question n'est pas là, c'est quel monde
14:20 nous allons laisser à nos
14:22 enfants ? C'est la question de la dette,
14:24 c'est la question de l'écologie, c'est la question de la protection
14:26 sociale, c'est la question de l'école.
14:28 Les grandes questions politiques aujourd'hui
14:30 vont se regrouper autour de cette question
14:32 de l'amour, c'est-à-dire l'amour de nos
14:34 enfants. Les seuls êtres, mais c'est l'humanité
14:36 qui vient, c'est pas mes enfants,
14:38 c'est les nôtres. Les seuls êtres
14:40 pour lesquels nous serions prêts à faire des sacrifices.
14:42 Si j'étais encore en politique, je construirais entièrement
14:44 un programme politique pour
14:46 retrouver du collectif autour de
14:48 cette question des générations futures.
14:50 C'est le seul point sur lequel je suis écologiste.
14:52 - Je suis obligé de vous interrompre régulièrement
14:54 parce que la pause est
14:56 vous demander de mettre le micro devant vous.
14:58 Vous êtes très discipliné !
15:00 - Non, c'est vrai. Vous savez, j'ai quitté
15:02 l'école en troisième, alors j'ai pas été...
15:04 - Pardon ? En troisième ? - Bah oui, évidemment,
15:06 j'ai fait mes études tout seul, moi.
15:08 - Ah oui ? - Mais oui, par ce qu'on appelait le CNTE
15:10 avant. Le CNED, aujourd'hui.
15:12 Par correspondance, et comme mes parents n'avaient pas fait
15:14 d'études, j'ai fait vraiment tout seul, ouais.
15:16 - Vous avez piqué la mode galère du quartier, quand même.
15:18 - Non, mais non, arrêtez
15:20 de croire que je suis intelligent.
15:22 - Et posez vos questions à l'iférien,
15:24 composant les 0 à 80 20 39,
15:26 21, 11, 13 heures, c'est Pascal Froy et vous
15:28 sur Europe 1.
15:30 - Europe 1, Pascal Froy.
15:32 - Je me présente, je m'appelle
15:34 Henri.
15:36 Je voudrais bien
15:38 réussir ma vie, être aimé.
15:40 - Il a une voix, en plus, très simple.
15:42 - Oui, mais alors, par exemple,
15:44 ces artistes-là,
15:46 l'émotion qu'ils reçoivent
15:48 lorsqu'ils sont sur scène
15:50 doit rendre parfois la vie un peu
15:52 fade, et c'est pour ça que
15:54 c'est le mot de Madame de Staal qu'on cite
15:56 régulièrement, la gloire et le deuil
15:58 éclatants du bonheur, parce que ces émotions
16:00 sont tellement puissantes.
16:02 Comment retrouver dans la vie de tous les jours
16:04 quelque chose de joyeux
16:06 ou d'agréable ? - La créativité,
16:08 quand on a la chance d'être un artiste
16:10 ou un écrivain, la créativité
16:12 ne vous quitte pas. Alors, il y aura
16:14 une grande question qui sera de savoir si
16:16 l'intelligence artificielle va nous remplacer
16:18 aussi dans ce domaine-là, mais pour l'instant
16:20 ça n'est pas le cas, et donc la créativité
16:22 et l'amour, bon, moi j'y reviens, je sais que c'est d'une
16:24 grande banalité, mais l'amour nous fait sortir
16:26 de nous-mêmes, et l'amour,
16:28 il a engendré quelque chose, et c'est ça la vraie
16:30 nouveauté de l'Occident moderne,
16:32 c'est la sacralisation de l'humain.
16:34 Le sacré, c'est le lieu du sacrifice
16:36 possible et du sacrilège. Vous touchez
16:38 un cheveu des gens que j'aime,
16:40 et je suis prêt au sacrifice,
16:42 c'est-à-dire à prendre les armes. C'est ça que nous
16:44 vivons aujourd'hui, c'est pour ça que la nation et la révolution
16:46 sont des projets politiques
16:48 qui sont morts en France, on le voit bien.
16:50 Marine Le Pen n'est pas nationaliste
16:52 comme était Hitler, c'est absurde,
16:54 et Mélenchon n'est pas un bolchevique.
16:56 Aucun des deux ne veut prendre l'Elysée
16:58 par les armes, c'est faux.
17:00 Mais en revanche, on le veut tous.
17:02 - Nicolas est avec nous, c'est un prêtre, je vous interromps,
17:04 autrement vous savez que si je vous interromps pas...
17:06 - Arrêtez de dire que je suis...
17:08 - Vous commencez votre phrase
17:10 à la Tour Eiffel et vous la terminez au péage
17:12 de Dourdan.
17:14 - Bon, Nicolas. - Non, Pascal,
17:16 malheureusement on l'aura juste après le rappel des titres
17:18 d'Émilie Dès. - Ah oui ?
17:20 - Le fait interrompre.
17:22 Luc Ferry, philosophe de son époque...
17:24 - Ah non, vous n'allez pas me gronder encore !
17:26 - Vous êtes agrégé de philosophie, évidemment. - Bah oui, évidemment,
17:28 quand même. Non, je suis agrégé de sciences politiques
17:30 aussi, pardon de me vanter, mais j'ai passé
17:32 les deux diplômes, et je m'en vante
17:34 parce que ça fait tellement plaisir à mes parents
17:36 qui n'avaient pas fait d'études, ils en étaient si fiers
17:38 que je ne peux pas ne pas le dire. - Bon, donc
17:40 on marque une nouvelle pause, c'est ça ? - Bah oui, déjà. - Absolument,
17:42 avant le rappel des titres. - C'est ça. - Il y a beaucoup de pauses.
17:44 - Il y a deux agrégés. - Ah bah il n'y a que ça.
17:46 - Vous êtes agrégé de quoi, monsieur Guénèque ?
17:48 - Ah, de la page Facebook
17:50 "Pascal, prouvez-vous". Abonnez-vous !
17:52 - Ah oui ! - C'est pas mal.
17:54 - C'est un bon début. - Luc Ferry, vous êtes
17:56 abonné ? Vous êtes abonné à notre page Facebook,
17:58 Luc Ferry ? Je ne sais pas s'il m'entend. - Non, est-ce que
18:00 vous êtes abonné à la page Facebook de l'émission ?
18:02 - Est-ce que vous êtes abonné à la page Facebook de notre émission "Europe 1" ?
18:04 - Non, je n'ai plus Facebook ni Twitter X,
18:06 je me suis retiré de tous les réseaux sociaux
18:08 parce que je ne supporte plus
18:10 ce déferlement de bêtises.
18:12 - La bonne heure revient. - La bonne heure revient.
18:14 - 11h13h, vous écoutez "Pascal, prouvez-vous" sur Europe 1.
18:16 - Pascal, prouvez-vous.
18:18 - 11h13h sur Europe 1 avec notre invité
18:20 Luc Ferry et Nicolas qui est en ligne avec nous.
18:22 - Nicolas qui est prêtre, je crois, et qui nous appelle
18:24 régulièrement. Bonjour, monsieur Labbé.
18:26 - Bonjour. - Et merci d'être avec nous.
18:28 - Bonjour, monsieur Proulx. - La question du bonheur
18:30 est une question que vous posez,
18:32 j'imagine, d'abord
18:34 pour le monde ici-bas et puis
18:36 peut-être pour un monde futur.
18:38 - Oui, mais pour le monde
18:40 ici-bas, ça éclaire déjà
18:42 formidablement la vie.
18:44 Et moi, je suis
18:46 persuadé, je crois que le
18:48 bonheur, c'est le...
18:50 On le trouve en donnant
18:52 de soi pour le bien des autres.
18:54 En donnant de...
18:56 Vous voyez, moi, je viens
18:58 d'une génération où
19:00 un peu implicitement, les parents
19:02 transmettaient aux enfants que
19:04 quand on a eu la joie,
19:06 le bonheur de beaucoup recevoir,
19:08 la vie nous fait comme un devoir
19:10 de donner en retour.
19:12 Et ce don
19:14 en retour apporte le...
19:16 Pour moi, apporte le bonheur et en tout cas
19:18 moi, me fait vivre.
19:20 - Écoutez,
19:22 Luc Ferry vous écoute et
19:24 va pouvoir commenter. - Moi, je suis
19:26 entièrement d'accord avec
19:28 vous, cher prêtre.
19:30 Sœur Emmanuelle était ma meilleure amie, elle avait
19:32 écrit un livre qui s'appelait "Le paradis,
19:34 c'est les autres".
19:36 - Oui, l'enfer, c'est l'enfer.
19:38 - Et donc, "Le paradis, c'est les autres", c'était
19:40 vraiment ma meilleure amie, on se voyait très souvent,
19:42 je l'aimais vraiment infiniment, elle était
19:44 formidable. J'ai écrit un livre avec
19:46 le cardinal Ravasi, qui est le ministre de la culture du
19:48 pape, sur la signification du
19:50 message de Jésus pour les non-croyants.
19:52 Moi, je ne suis malheureusement pas croyant,
19:54 mais j'ai une immense
19:56 admiration pour Jésus et pour
19:58 la théologie chrétienne et notamment pour la philosophie
20:00 de l'amour chrétienne que je trouve géniale.
20:02 Et je suis entièrement d'accord avec vous.
20:04 J'aime beaucoup Bernard Kouchner, j'ai beaucoup d'affection
20:06 pour lui, aussi beaucoup
20:08 d'admiration pour lui
20:10 parce qu'il a fait des choses extraordinaires dans sa
20:12 vie. J'ai regardé les lettres
20:14 des humanitaires et c'est magnifique.
20:16 Il y a un petit recueil de lettres
20:18 des humanitaires du monde
20:20 "Médecins sans frontières" et ils expliquent qu'ils ont
20:22 trouvé le sens de leur vie dans les autres,
20:24 dans l'amour des autres. Et ça, je trouve ça
20:26 peut paraître banal, mais ça l'est pas.
20:28 C'est extraordinairement profond en vérité.
20:30 C'est pour ça, encore une fois, que je mène ce
20:32 combat qui peut sembler méchant parfois,
20:34 mais contre les narcisses d'aujourd'hui. J'aime pas
20:36 ça. Je pense que c'est la perversion de l'amour.
20:38 Donc je rejoins sur ce point-là
20:40 tout à fait ce que vient dire le prêtre. - Mais vous pensez qu'il y a plus de narcisses
20:42 et ça c'est un des thèmes
20:44 qui revient régulièrement dans votre livre
20:46 qu'avant. "Je suis convaincu
20:48 que nous vivons un changement d'époque", écrivez-vous.
20:50 "Une faille dans la civilisation dont la grande démission
20:52 est la démission tranquille
20:54 mais plus encore en arrière-fond de cette démission
20:56 la quête frénétique du bonheur
20:58 personnel, l'éloge déculpabilisé
21:00 du narcissisme et du souci
21:02 de soi au détriment du bien commun
21:04 et du souci des autres sont les symptômes
21:06 les plus profonds." Vous pensez que c'est vraiment
21:08 nouveau ? - Oui, je pense que d'ailleurs par rapport à ce
21:10 phénomène-là, qui est très très nouveau,
21:12 qui est vraiment radicalement nouveau, parce que
21:14 je vois, regardez l'histoire des guerres
21:16 1914, la guerre
21:18 de 1940 que mon père a faite, il s'est
21:20 évadé 4 fois dès qu'on a vit, les gens
21:22 acceptaient quand même de mourir pour
21:24 la nation. Bon, quand vous regardez
21:26 par exemple, souvenez-vous de l'histoire du chemin des
21:28 dames par exemple, c'est incroyable,
21:30 le général Nivelle. 400 000
21:32 gamins vont mourir pour prendre une colline aux Allemands,
21:34 aujourd'hui c'est totalement inimaginable.
21:36 Alors par rapport à ce phénomène de narcissisme
21:38 et d'individualisme contemporain,
21:40 il y a ceux qui veulent revenir en arrière
21:42 et sur CNews, vous êtes souvent
21:44 sur cette ligne-là, c'est pas une critique,
21:46 c'est un constat. On revient à la nation,
21:48 la France, la France, la nation. - C'est pas le sentiment que j'aime,
21:50 mais... - Bon, d'accord.
21:52 Zemmour par exemple, c'est quand même... - Zemmour, c'est
21:54 pas CNews. - Un peu
21:56 quand même, non ? - Non. - Bon, d'accord.
21:58 Je vous laisse ça.
22:00 - Non, mais c'est même...
22:02 C'est une voix qui est intervenue
22:04 à un moment donné... - Non, mais je vous écoute
22:06 tous les matins, je vois bien quand même qu'il y a un
22:08 côté "la France décline",
22:10 revenons aux fondamentaux.
22:12 - Je parle de la
22:14 PMA et de la GPA et je suis
22:16 plutôt sur ces sujets-là,
22:18 je crois. - C'est bien, mais vous n'êtes pas...
22:20 Pascal, c'était pas une insulte,
22:22 vous n'êtes pas du tout dogmatique. - Mais je dis pas que c'est
22:24 une insulte, je dis que revenir en arrière,
22:26 non ! - Il y a chez CNews, il y a quand même... Pardon, c'est pas une critique
22:28 du tout, mais il y a un côté
22:30 Finkielkraut, il y a un côté
22:32 Michel Onfray, il y a un côté décadence, on revient
22:34 en arrière. Moi, ce que je défend...
22:36 - Sur l'autorité, par exemple, si
22:38 rétablir l'autorité dans
22:40 une classe, c'est revenir en arrière,
22:42 alors oui, effectivement, je pense que...
22:44 - Non, mais vous pouvez le faire en allant en avant, c'est ça que j'essaye
22:46 d'expliquer dans ce livre. Vous pouvez
22:48 par amour pour vos enfants, donc
22:50 là, on est en avant, on n'est pas en arrière,
22:52 par amour pour vos enfants, vous pouvez comprendre
22:54 que si vous ne leur transmettez pas la loi,
22:56 vous allez les rendre malades.
22:58 Même s'ils veulent être révolutionnaires,
23:00 il faut avoir la loi. L'éducation, c'est
23:02 chrétien, juif et grec, c'est-à-dire
23:04 chrétien, c'est l'amour, d'accord, c'est le plus
23:06 important, mais c'est la loi, c'est Moïse
23:08 et c'est les grecs, c'est les gens littéraires,
23:10 c'est les oeuvres, les grandes oeuvres. Mais si vous ne
23:12 transmettez pas la loi à vos enfants,
23:14 si vous vous contentez de les aimer, ça ne suffit pas.
23:16 - M. Labbé,
23:18 peut-être souhaitez-vous
23:20 trancher notre débat.
23:22 - Écoutez-moi, en vous entendant
23:24 et puis en écoutant ce que
23:26 dit M. Ferry, moi je me dis, il y a
23:28 deux choses qui marquent notre époque. Vous voyez,
23:30 pendant des siècles, les gens
23:32 sont allés voir leur curé
23:34 et leur curé leur ont dit, "Occupez-vous
23:36 des autres, ça vous fera du bien."
23:38 Et maintenant,
23:40 les gens vont voir des coaches de vie
23:42 qui leur disent, "Occupez-vous de vous
23:44 et ça vous fera du bien."
23:46 Eh bien, il ne faut pas s'étonner que
23:48 ça donne une autre
23:50 société, un autre monde.
23:52 Et puis, ensuite de ça, je crois
23:54 très très fort que le miroir
23:56 aux alouettes que nous tend en permanence
23:58 les réseaux sociaux
24:00 fait qu'on se
24:02 prend de plus en plus pour des narcisses, ça c'est clair.
24:04 - Il a raison.
24:06 - On s'admire soi à travers l'image qu'on
24:08 essaye de donner aux autres.
24:10 - Mais je signe des deux mains ce que vous dites,
24:12 cher prêtre. Moi je suis entièrement,
24:14 mais à 1000% d'accord avec vous.
24:16 - On va marquer peut-être une pause et on va
24:18 parler aussi politique, parce que Luc Ferry
24:20 il a plusieurs casquettes. Je citais
24:22 tout à l'heure en commençant l'émission un mot du
24:24 général de Gaulle. On lui demandait, "Est-ce que vous êtes heureux, mon
24:26 général ?" Il aurait répondu, "Vous me prenez
24:28 pour un con." - Oui c'est ça, il l'a vraiment
24:30 dit, oui. Il avait
24:32 tellement raison. C'est exactement
24:34 pardon, alors là je suis un tout petit à
24:36 côté de lui, moi j'ai une immense admiration pour De Gaulle.
24:38 Moi je suis vraiment gaulliste jusqu'au bout des
24:40 ongles, mais il considérait
24:42 l'idée de bonheur comme une absurdité.
24:44 Justement parce qu'il voyait
24:46 très bien que la
24:48 joie qu'on peut éprouver parfois, elle dépend
24:50 des autres et pas simplement de son ombri.
24:52 Et c'est ce que le prêtre vient de dire très bien.
24:54 Au fond, c'est, voilà,
24:56 je suis très heureux, j'ai bien fait de venir chez vous, ça me
24:58 remonte le moral. - Bon.
25:00 On va regarder en avant et non pas en arrière
25:02 avec la politique et je vais
25:04 demander à Luc Ferry ce qu'il pense
25:06 évidemment des derniers
25:08 développements du gouvernement.
25:10 A tout de suite. - Et avant la pause, je vous rappelle
25:12 que cet après-midi, c'est Christophe Ondelat
25:14 qui vous donne rendez-vous de 14h à 15h.
25:16 Ondelat raconte
25:18 avec les histoires qui vous ont marqué.
25:20 C'est une semaine exceptionnelle puisque dans Ondelat raconte
25:22 tout à l'heure, eh bien Christophe Ondelat
25:24 vous racontera Alain Delon, sa scolarité chaotique,
25:26 son CAP de charcutier, ses deux années dans l'armée
25:28 et ses premiers pas dans le cinéma. Et demain,
25:30 vous entendrez un récit exceptionnel
25:32 consacré à Gérard Depardieu de son enfance
25:34 à Châteauroux jusqu'à son arrivée à Paris.
25:36 14h-15h, le rendez-vous est pris.
25:38 Ondelat raconte sur Europe 1.
25:40 Europe 1, Pascal Praud.
25:42 Il est où le bonheur ?
25:44 Il est où ?
25:46 Il est où ?
25:48 Il est où le bonheur ?
25:50 Il est où ?
25:52 C'est qui ça ? Christophe Maé !
25:54 Je ne connais jamais pas qui c'est, pardon.
25:56 Vous ne savez pas qui est Christophe Maé ? Non, pas du tout.
25:58 Ah oui, effectivement, là il y a du boulot.
26:00 Vous regardez beaucoup en arrière.
26:02 Non mais j'aime le rock.
26:04 Mais oui, je suis un vrai, j'aime de la country.
26:06 Bon, vous allez écouter Marion Maréchal
26:08 qui était vice-présidente de Reconquête.
26:10 Elle était l'invitée ce matin
26:12 de Sonia Mabrouk et elle parle des anciens
26:14 ministres de l'éducation nationale. Écoutez-la.
26:16 Je pense que c'est une
26:18 polémique qui révèle la colère
26:20 des Français. C'est-à-dire qu'ils ont quand même le sentiment
26:22 que depuis des années maintenant,
26:24 les ministres, parce que disons-le, tous les ministres,
26:26 tous les ministres de l'éducation nationale en particulier
26:28 ces dernières années ont tous leurs enfants dans les écoles privées.
26:30 On a quand même des ministres qui depuis des années
26:32 mettent en place des politiques, ou en tout cas ne font rien
26:34 pour contrer la faillite de l'éducation nationale
26:36 et préservent leurs enfants et leurs progénitures
26:38 de toutes les politiques qu'ils mettent en place
26:40 ou qu'ils ne mettent pas en place en l'occurrence.
26:42 Est-ce que lorsque vous étiez
26:44 ministre de l'éducation nationale,
26:46 vos enfants étaient dans le privé ?
26:48 - Oui, à moitié, oui. Comme
26:50 beaucoup de gens, oui.
26:52 C'est pour des raisons personnelles.
26:54 - Oui, mais tout le monde dit des raisons personnelles.
26:56 Mais chacun les comprend, les raisons personnelles.
26:58 C'est que moi, je ne veux pas que mes enfants
27:00 soient avec d'autres enfants, parfois.
27:02 - Non, c'est pas ça. Il faut arrêter de déconner
27:04 complètement sur le sujet. Depuis la
27:06 loi Langue, le privé
27:08 sous contrat fait partie du grand service public.
27:10 Il est intégré au
27:12 service public. Donc les gens ont le choix...
27:14 - Sauf que le privé choisit ses élèves et pas le public.
27:16 - Exactement. C'est d'ailleurs pour ça...
27:18 - Dans le privé, il y a souvent des meilleurs élèves.
27:20 - C'est d'ailleurs pour ça que le privé a des meilleurs
27:22 résultats que le public. C'est pas du tout
27:24 parce que le privé fonctionne mieux
27:26 ou que les professeurs sont meilleurs.
27:28 C'est parce que la sélection, par exemple à Stanislas,
27:30 la sélection est féroce. Et donc du coup,
27:32 comme ils ne prennent que les meilleurs et qu'ils mettent les meilleurs
27:34 avec les meilleurs, évidemment ça marche mieux.
27:36 Mais encore une fois, mettre
27:38 ces enfants dans le privé sous contrat, je crois
27:40 que 17% des parents le font
27:42 aujourd'hui, c'est à la fois légal
27:44 et moral. Il faut arrêter de se déchaîner.
27:46 Ça tourne à la méchanceté pure et simple.
27:48 Contre cette dame,
27:50 elle a répondu maladroitement parce qu'elle était
27:52 cernée par un journaliste de Mediapart,
27:54 mais elle a, un, parfaitement le droit
27:56 et c'est tout à fait légitime, et deux,
27:58 elle touche un problème qui est réel,
28:00 qui est le problème du remplacement, qui est très difficile.
28:02 Donc qu'elle ait répondu avec maladresse
28:04 et ça peut arriver à tout le monde... - C'est pas maladresse, il est possible
28:06 qu'elle n'ait pas dit la vérité.
28:08 - Mais ça, c'est encore plus maladroit.
28:10 Mais ça veut dire qu'elle ne connaît pas le milieu.
28:12 Quand on connaît le milieu
28:14 de l'enseignement, quand on émise
28:16 l'éducation nationale, on sait que c'est un sujet
28:18 qui est absolument explosif
28:20 et donc, moi je viens à 100 000%
28:22 du public, évidemment, j'étais même boursier
28:24 jusqu'à l'agrégation de philo, j'étais boursier.
28:26 Mais c'est pas le problème, c'est que
28:28 encore une fois, depuis la loi Langle,
28:30 le privé sous contrat fait partie,
28:32 c'était d'ailleurs le leitmotiv de Jack Lang,
28:34 c'est le grand service public, donc il faut
28:36 pas rejeter ça, c'est absurde.
28:38 Et si on a des mauvais
28:40 résultats dans PISA, c'est pas
28:42 parce que le système du service public
28:44 est mauvais, c'est pas vrai.
28:46 Le recrutement par l'AGREG et par le CAPES
28:48 est beaucoup plus difficile, en général,
28:50 que dans le privé, où on peut très bien
28:52 être un professeur sans avoir
28:54 les concours. Mais la vérité,
28:56 c'est qu'on a une
28:58 hétérogénéité des publics qu'on
29:00 ne voyait pas avant, écoutez ça,
29:02 parce que personne ne le dit,
29:04 on a une hétérogénéité des publics qu'on ne voyait pas
29:06 avant parce que les filières de relégation
29:08 existaient dès le primaire.
29:10 Vous aviez un primaire où on...
29:12 Dans mon enfance, on les appelait
29:14 les sélectionnés, et on se moquait d'eux.
29:16 - Oui, les CPPE, le CERF, moi j'ai connu ça, mais est-ce que
29:18 c'est bien que toute une génération aille
29:20 jusqu'au bac, alors que peut-être
29:22 n'a-t-elle pas les moyens
29:24 d'aller jusqu'au bac ? C'est pas dire que
29:26 les gens sont pas intelligents, mais ils sont pas doués simplement pour
29:28 faire des études. Est-ce qu'il faut des sélections ?
29:30 Est-ce qu'à la fin de la troisième, il faut une sélection
29:32 pour entrer en seconde ? Voilà des questions
29:34 qui me paraissent essentielles. - Oui, mais c'est pas
29:36 la bonne question. La bonne question, c'est qu'est-ce qu'il faut
29:38 faire à l'intérieur du collège unique
29:40 pour qu'on ait une diversification des parcours ?
29:42 Moi, ce que j'avais mis en place, donc que ça,
29:44 c'est vraiment une révolution, à l'intérieur
29:46 du système éducatif, c'est les classes en alternance
29:48 entre le collège
29:50 et puis les entreprises, les lycées
29:52 professionnels et les CFA. Et ça,
29:54 ça marchait génialement. On sauvait des vies
29:56 scolaires des enfants, pour leur dire
29:58 "on va pas te transformer en un
30:00 petit ouvrier dès l'âge de 12 ans,
30:02 mais on va t'offrir la possibilité de
30:04 découvrir des métiers, les découvrir vraiment
30:06 en entreprise, en lycée professionnel". On a
30:08 des très très bons lycées professionnels,
30:10 on a été très bons chefs de travaux, c'est remarquable.
30:12 Vous avez des lycées professionnels
30:14 très variés, comme la taille de pierre,
30:16 vous avez la navigation fluviale à Strasbourg,
30:18 les lycées hôteliers, ma fille a fait
30:20 un lycée hôtelier, bon ça peut être formidable,
30:22 enfin une de mes filles, et donc
30:24 voilà, c'est l'idée de diversifier
30:26 les parcours en offrant la possibilité
30:28 de découvrir des métiers dès la classe de quatrième.
30:30 - Ce qui frappe Luc Ferry, c'est le niveau de culture G.
30:32 Aujourd'hui, des jeunes,
30:34 c'est-à-dire que dans les matières classiques,
30:36 que sont l'histoire, la grammaire,
30:38 l'orthographe, etc.
30:40 Donc là, c'est effrayant ce qu'on rencontre.
30:42 Et puis des gens parfois qui ont Bac +4,
30:44 Bac +5, qui ne savent en gros
30:46 rien. - Et c'est dû à quoi du coup ?
30:48 - 50% des
30:50 25-35 ans ne savent pas
30:52 la date de la Révolution française.
30:54 - Oui, oui, j'ai vu. - Donc c'est dingue.
30:56 Mais ça, je vais vous dire pourquoi, c'est que les professeurs
30:58 ne peuvent pas enseigner
31:00 si l'éducation n'a pas précédé l'enseignement.
31:02 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, dans le nombre de classes,
31:04 c'est plus de l'enseignement, c'est du domptage.
31:06 Si les parents n'ont pas fait le boulot,
31:08 les professeurs ne peuvent pas faire le leur.
31:10 Et ça, c'est le problème fondamental.
31:12 C'est pour ça qu'on a une crise énorme
31:14 des vocations dans l'enseignement.
31:16 C'est parce que beaucoup de jeunes
31:18 et d'étudiants qui ont Bac +4 ou Bac +5
31:20 disent "mais non, je ne vais pas aller me faire torturer
31:22 par des potaches mal élevées à la frontière belge".
31:24 - Madame Boudéa, Castrera vient d'arriver
31:26 à l'instant, me dit-on,
31:28 à l'école Littré.
31:30 - Moi je la soutiens.
31:32 Je lui ai dit, comme ça, si ça lui arrive à ses oreilles.
31:34 Elle a tout mon soutien parce qu'elle a été maladroite.
31:36 Mais tout le monde a le droit d'être maladroit.
31:38 Elle n'a pas
31:40 assassiné une vieille dame.
31:42 Ne confondons pas tout.
31:44 - Manifestement, pendant que vous parlez,
31:46 je vois qu'il y a une sorte de manifestation
31:48 devant. - Évidemment, il y a un comité d'accueil.
31:50 - Il y a un comité d'accueil. Je précise que
31:52 la rue Littré, c'est une petite rue
31:54 de Paris qui est perpendiculaire à la rue
31:56 de Rennes, dans le 6e arrondissement,
31:58 qui est plutôt un
32:00 arrondissement évidemment chic.
32:02 - Une de mes filles y a été.
32:04 - Elle est à gauche en descendance, cette petite
32:06 école. - Exactement. Ma grande-fille y a été
32:08 pendant deux ans, je crois. - Bon, nous marquons une pause
32:10 avant de vous interroger sur la politique générale
32:12 cette fois-ci et d'Emmanuel Macron.
32:14 - Avec une joie non faite. - Par exemple, qu'est-ce que vous poseriez
32:16 ce soir à Emmanuel Macron si vous étiez journaliste ?
32:18 - Oh, rien du tout. Ça ne m'intéresse pas du tout.
32:20 - Non, vous ne pouvez pas dire que ça ne vous intéresse pas du tout.
32:22 - Non, ça fait des années que ça...
32:24 que les interventions de Macron ne m'intéressent plus, non.
32:26 - Bon, à tout de suite.
32:28 - Et pour réagir avec Pascal Praud sur Europe 1, vous composez ce numéro
32:30 en téléphone. - Appelez Pascal Praud au
32:32 01 80 20 39 21.
32:34 - Europe 1. - Pascal Praud et vous.
32:36 - De 11h à 13h sur Europe 1, avec votre
32:38 invité aujourd'hui, Pascal, nous recevons
32:40 le philosophe Luc Ferry, qui a sorti son dernier
32:42 livre, "La frénésie du bonheur", aux éditions
32:44 de l'Observatoire. - Et on va parler évidemment
32:46 un peu politique également, continuer en tout cas
32:48 d'en parler, simplement comme Olivier Guénac
32:50 est là, dit M. Houbouc pour notre émission.
32:52 D'abord, il voulait
32:54 vous féliciter, M. Ferry,
32:56 d'avoir rendu l'enseignement
32:58 primaire obligatoire.
33:00 - Mais je crois qu'il a une mémoire des dates
33:02 avec l'extérieur.
33:04 Puisque... - Oui, puis là, il a
33:06 1883, puisque dans l'institut...
33:08 - Non, mais je ne
33:10 comprenais pas pourquoi vous vouliez me faire venir au studio.
33:12 Ça y est, c'est dit.
33:14 - C'était un test sur les dates. - Il arrêtait pas de me dire
33:16 "mais c'est quand, quand est-ce que tu viens, quand est-ce que tu viens ?"
33:18 - Ah oui, d'accord. - C'est bien, c'est bien.
33:20 - Merci pour ce cadre, c'est bien ma famille.
33:22 - Un mot sur la politique. Vous dites
33:24 "Emmanuel Macron, ça ne m'intéresse
33:26 plus, je n'y crois plus". - Non, je n'y crois plus.
33:28 - Mais ça veut dire quoi ? - J'y ai jamais cru, d'ailleurs.
33:30 - Oui, mais il ne faut croire en rien
33:32 ces prochaines années. - Non, pas du tout, pas du tout.
33:34 - Il n'y a pas une personne politique
33:36 qui a, grâce à vos yeux aujourd'hui... - Moi aussi, beaucoup,
33:38 beaucoup, j'ai beaucoup de... - Un discours, peut-être ?
33:40 - Pas du tout, j'ai beaucoup de... - Une ambition ?
33:42 - Je voterai sans hésiter pour
33:44 Xavier Bertrand, David
33:46 Lysnard, pour un gaulliste,
33:48 quelqu'un qui représentera
33:50 un gaulliste social-démocrate,
33:52 je voterai pour lui
33:54 avec bonheur. Donc, non, non, moi je...
33:56 - Mais vous ne croyez pas à Gabriel Attal ?
33:58 - J'ai beaucoup d'amitié pour Gabriel Attal,
34:00 j'ai beaucoup d'estime pour lui, je pense que c'est un garçon
34:02 très intelligent. Je trouve qu'il a
34:04 une très grande qualité par rapport à son
34:06 patron, c'est qu'il parle simple et clair,
34:08 et qu'il n'est pas prétentieux, ce qui est quand même...
34:10 En plus, il est intelligent, il n'est pas
34:12 brillant comme Macron, il est intelligent,
34:14 c'est pas la même chose. Et donc j'ai grand respect,
34:16 grand estime pour... - Et Emmanuel Macron ?
34:18 - Non, Emmanuel Macron, c'est quelqu'un
34:20 qui est le roi de la communication,
34:22 qui est brillant, mais
34:24 il a un handicap,
34:26 il n'a pas compris qu'il avait perdu les législatives,
34:28 et que quand on a perdu
34:30 les législatives, il faut faire un gouvernement
34:32 d'union nationale. Le débauchage, les gens
34:34 ne comprennent pas, c'est la folie.
34:36 Le débauchage, c'est le gouvernement le plus débaucheur
34:38 qui soit, comme l'avait dit Rachida Datid,
34:40 les traites de droite et les traites de gauche,
34:42 mais c'est le gouvernement le moins
34:44 union nationale qui soit. Si
34:46 j'étais à la place d'Emmanuel Macron, pour parler
34:48 comme dans les hôpitaux psychiatriques, si j'étais président,
34:50 j'aurais nommé un grand gaulliste à
34:52 Matignon, un grand gaulliste à Matignon,
34:54 mais peu importe. - Ah, mais il n'y en a pas beaucoup des grands
34:56 gaullistes. - Il y en a, il y a
34:58 Xavier Bertrand, il y a David Lissnard, il y a
35:00 Larcher, il y a Raffarin, peu importe.
35:02 J'aurais nommé un grand gaulliste à Matignon,
35:04 il y en a qui sont prêts à y aller, je peux vous le dire, je les connais,
35:06 et j'aurais nommé une vingtaine de
35:08 ministres LR et quelques ministres sociaux
35:10 démocrates qui ont eu le courage de refuser
35:12 de vendre leur âme à Mélenchon. - Comme
35:14 Cazeneuve, par exemple. - Bien sûr, Delga,
35:16 Cazeneuve, j'aurais demandé à Hubert
35:18 Védrine de venir, ça serait toujours mieux
35:20 que ces journées qui ne font que des fautes de Français,
35:22 et donc j'aurais composé
35:24 un gouvernement d'union nationale pour retrouver
35:26 une majorité à l'Assemblée nationale
35:28 sans laquelle on ne peut rien faire.
35:30 Vous avez deux freins à l'action, la dette
35:32 et l'absence de majorité absolue
35:34 à l'Assemblée nationale. Avec une dette
35:36 de 3 000 milliards d'euros et l'absence
35:38 de majorité à l'Assemblée nationale,
35:40 la com' et le sociétal vont
35:42 remplacer la vraie action politique.
35:44 On va faire de l'euthanasie
35:46 et l'avortement dans la Constitution.
35:48 Ça n'a pas de sens, voilà. Et donc
35:50 ça ne m'intéresse pas. Macron n'a pas
35:52 compris que quand on a perdu les législatives,
35:54 il faut faire une cohabitation volontaire.
35:56 Ça, c'était la solution.
35:58 Pas débaucher. Débaucher des gens,
36:00 ça ne sert à rien. La preuve,
36:02 Rachida Dati, elle a été exclue du parti
36:04 dans le quart d'heure. Donc ça donnera pas
36:06 une voix de plus à Macron.
36:08 À l'Assemblée. Voyez ? Ça ne sert à rien.
36:10 - Vous avez dit
36:12 que M. Attal était...
36:14 - Votre ami Fenech a entièrement raison là-dessus,
36:16 entre parenthèses. - Là, vous faites référence
36:18 aux émissions de CNews et Georges Fenech
36:20 qui, effectivement... - On dit exactement la même
36:22 chose, il a entièrement raison. Je dis
36:24 la même chose depuis 6 ans, mais
36:26 ça n'empêche pas de saluer les autres. - Dans certains
36:28 milieux dans lesquels vous faites partie, il est
36:30 de bon ton de ne pas reconnaître
36:32 de l'intelligence aux uns et aux autres.
36:34 Il y a deux ou trois conversations dans Paris,
36:36 il y a effectivement de dire qu'on dort
36:38 4 heures par nuit, et la
36:40 deuxième conversation... - Il adore dire ça.
36:42 - Il s'est dit... - J'adore dire ça.
36:44 - Mais c'est vrai, parce que je... Bon, et la deuxième
36:46 conversation, c'est de dire qu'un tel est un imbécile,
36:48 en tout cas qu'il n'est pas intelligent.
36:50 J'ai rarement vu, en revanche, dans un dîner,
36:52 quelqu'un dire "moi je suis pas très intelligent".
36:54 J'ai rarement vu ça. Alors, je voudrais que
36:56 vous me disiez votre définition, Luc Ferry,
36:58 de l'intelligence.
37:00 - Alors, si je vous parlais de
37:02 l'intelligence artificielle, je dirais que c'est la
37:04 résolution de problèmes. L'intelligence artificielle,
37:06 c'est ça. Maintenant, je crois beaucoup
37:08 à ce qu'on appelle l'intelligence du cœur,
37:10 c'est-à-dire ce qui est lié
37:12 à notre conscience humaine,
37:14 que l'IA n'a pas, que l'intelligence artificielle
37:16 n'a pas. Je pense qu'il y a des gens qui sont
37:18 incapables d'avoir une agrégation de maths,
37:20 d'ailleurs, j'en fais partie,
37:22 mais qui comprennent les autres, qui ont cette
37:24 sensibilité aux autres, qui à mon avis
37:26 est beaucoup plus importante, qui est mille fois
37:28 plus importante que l'intelligence
37:30 pure que l'IA,
37:32 l'intelligence artificielle,
37:34 possède d'ores et déjà
37:36 beaucoup plus que nous, elle est déjà bien meilleure
37:38 que nous. Et donc, elle est
37:40 capable d'écrire des textes en quelques
37:42 secondes, elle est capable de résoudre...
37:44 Mon ami Roland-Alexandre
37:46 m'a envoyé un schéma hier
37:48 qui montre qu'en diagnostic médical,
37:50 non seulement l'IA
37:52 est meilleure que les médecins, mais l'IA
37:54 seule est meilleure que l'IA avec
37:56 un médecin. C'est dingue.
37:58 Mais
38:00 il y a deux types d'intelligence, vraiment,
38:02 il ne faut pas oublier la sensibilité aux autres
38:04 et l'intelligence d'apportement.
38:06 Voilà. Et je pense que
38:08 par exemple, je vois
38:10 Gabriel Attal, cette simplicité
38:12 qu'il a dans l'expression, moi ça me
38:14 touche pour un Premier ministre et je trouve ça
38:16 profondément sympathique parce que ça dit
38:18 quelque chose de lui dans son rapport aux
38:20 autres. - Et bien merci.
38:22 C'était intéressant de vous écouter
38:24 pendant une heure, Luc Ferry.
38:26 - Merci, c'était très intéressant. - Manon, je rappelle votre
38:28 ouvrage, Luc Ferry,
38:30 "La frénésie du bonheur", je ne compte
38:32 pas le nombre d'ouvrages que vous avez déjà écrits.
38:34 - 200. - 200 ?
38:36 - Oui. - Ah oui, effectivement. - Enfin un peu plus
38:38 même, mais bon. - J'ai oublié le nombre exact.
38:40 - Écoutez, ça...
38:42 - Eh bien je travaille, mon ami, c'est ça aussi.
38:44 - Ça fait une belle bibliothèque.
38:46 - Merci. - Merci.
38:48 - Ils sont traduits dans 45 langues, ce qui fait que j'ai une bibliothèque
38:50 qui, je sais plus quoi faire. Ah pardon, vous allez me dire
38:52 que je parle trop. - Mais pas du tout.
38:54 - M. Boubou, lui qui n'a lu, nous dit-il
38:56 qu'un livre, et c'est un livre de Michel Drucker.
38:58 - Eh oui, oui.
39:00 - Oh mais attends, c'est un type bien aussi,
39:02 il est formidable. - Mais oui, oui.
39:04 - Il est un talon fou, cet homme. - Mais bien sûr, exactement.
39:06 - Il a l'air du bien des autres. - Exactement.
39:08 - Il est 11h58, nous marquons une pause et
39:10 nous allons poursuivre, évidemment, cette émission.
39:12 Et remercier une nouvelle fois Luc Ferry.
39:14 A tout de suite. - Merci à vous, surtout. - Vous écoutez pas