Au lendemain du vote de la loi immigration, le président du parti Les Républicains Eric Ciotti est l'invité de Sonia Devillers. Il estime que le texte "va dans la bonne direction, pour mieux expulser les étrangers en situation irrégulière et pour limiter l'attractivité de notre modèle social". Mais "il faut respecter le vote", a-t-il notamment lancé après l'interview de la Première ministre Elisabeth Borne sur France Inter qui "confirmait" que des mesures du texte étaient contraires à la Constitution. Éric Ciotti juge cela "très choquant". "La loi a été votée, nous avons discuté des heures entières (...) si la parole du gouvernement et le vote du Parlement n'ont aucune valeur, c'est très dangereux pour la suite", ajoute-t-il. Éric Ciotti explique avoir eu au téléphone Elisabeth Borne mercredi pour lui rappeler ses engagements et lui "dire que ce qu'elle a fait est extrêmement dangereux".
Retrouvez les entretiens de 7h50 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50
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00:00 Sonia De Villere, votre invitée ce matin est députée des Alpes-Maritimes et président
00:04 du parti Les Républicains.
00:06 Y aura-t-il une loi sur l'immigration en 2024 ? Elle est votée, ça oui, elle est votée
00:11 par la majorité des macronistes, par la droite et par l'extrême droite, mais sera-t-elle
00:15 appliquée ? Hier, Premier ministre et Président de la République en appelaient au Conseil
00:19 constitutionnel pour censurer des mesures qu'ils ont pourtant fait voter.
00:23 Hier encore, des départements et des villes promettaient qu'ils les contourneraient.
00:28 Bonjour Eric Ciotti, d'abord on voudrait comprendre, mardi soir vous étiez deux…
00:32 C'est compliqué à comprendre, mais le Président de la République n'y participe pas vraiment.
00:37 Quelque part, donné le sentiment qu'il s'oppose à une loi qu'il a lui-même
00:40 proposée, je crois que ça confine à un grand écart particulièrement hasardeux.
00:47 Particulièrement hasardeux, bon alors on va y revenir.
00:50 Ma première question, c'était pas celle-là, mais si vous voulez on y va direct.
00:54 Ma première question c'était mardi soir.
00:55 Mardi soir vous étiez deux Eric Ciotti, vous étiez deux à crier victoire, mardi
01:02 soir, vous, une victoire historique de la droite, et Marine Le Pen, une victoire idéologique
01:07 du Rassemblement National.
01:08 Alors d'abord, de qui est-ce la victoire ?
01:09 Je crois que c'est la victoire des Français, qui, toutes les enquêtes d'opinion le soulignent,
01:17 soutiennent à plus de 70%, quelquefois sur des mesures qui sont d'ailleurs les plus
01:22 décriées à 80 ou 90%, des dispositions qui sont utiles et qui sont toutes de bon
01:29 sens si on veut reprendre le cours de notre destin.
01:32 Et je note le grand écart, là aussi j'évoquais le grand écart du président de la République,
01:38 mais le grand écart entre les commentateurs et une certaine classe politico-médiatique
01:45 parisienne et ce que veulent les Français.
01:47 Les Français veulent moins d'immigration.
01:49 Et ce message, il doit être entendu.
01:52 Et ce message, c'est celui que je défends depuis des années, parce que cette immigration
01:57 aujourd'hui massive, on ne peut plus l'intégrer et elle est source de grandes difficultés
02:03 pour le pays, social, économique, sécuritaire, communautariste, et c'est ça qu'il faut
02:09 prendre en compte.
02:10 Soit on y tourne le regard, soit on agit.
02:12 C'est ce qu'ont voulu faire les Républicains.
02:14 Ce texte, très largement, c'est le nôtre.
02:17 D'autres se sont greffés dans le vote, c'est leur choix et je respecte le choix.
02:21 C'est le Rassemblement National.
02:22 C'est le Rassemblement National.
02:23 Deux remarques là-dessus.
02:25 Un, j'ai entendu qu'on ne contrait pas les voix du Rassemblement National.
02:30 C'est un déni de démocratie insupportable.
02:34 Un député représente la nation tout entière.
02:37 Sa voix n'a pas à avoir de distinction qu'elle soit de la NUPES ou du Rassemblement National.
02:44 Est-ce qu'il y aurait des députés de seconde zone ? Est-ce qu'il y aurait des députés
02:49 de second rang ? Tous les députés sont députés du peuple de France.
02:53 Et cette sélection, ce tri, ce mot qui est quelque part insupportable en démocratie,
03:01 n'a pas sa place.
03:02 Premier point.
03:03 Donc vous vous enorgueillissez, Eric Ciotti, de voter un texte, main dans la main, avec
03:09 le Rassemblement National ?
03:10 Il y a des députés de la majorité.
03:12 Il y a des députés LR qui ont fait ce texte.
03:17 Je le souligne.
03:18 Comment ça s'est passé ? Nous avons voté la motion de rejet.
03:21 Je l'ai décidé avec Olivier Marlex.
03:24 Les députés LR ont voté une motion de rejet pour dire non, nous ne voulons pas le texte
03:30 de gauche sorti de la Commission des lois, totalement dénaturé.
03:34 Nous voulons revenir au texte des Républicains tel qu'il était sorti du Sénat, avec des
03:39 dispositions courageuses, fortes, puissantes, qui peuvent endiguer ces flux migratoires
03:45 qui deviennent insupportables et qui peuvent, et je dis bien peuvent parce qu'il y a
03:51 des nuances.
03:52 J'ai toujours dit que ce qui était nécessaire, c'était une grande réforme constitutionnelle,
03:56 approuvée par référendum.
03:58 Néanmoins, ce texte va dans la bonne direction pour mieux expulser notamment les étrangers
04:05 en situation irrégulière et pour limiter aussi l'attractivité de notre modèle social.
04:11 Justement, quand le RN dit que ses idées ont gagné, est-ce qu'ils n'ont pas raison ?
04:15 En parlant de la priorité nationale au sujet de l'accès aux prestations familiales,
04:19 aux aides aux logements, etc.
04:20 Marine Le Pen déclarait sur le principe que le concept est validé.
04:24 Est-ce que vous validez le concept ?
04:25 Moi j'ai toujours défendu, quelles que soient les positions des uns et des autres,
04:30 depuis que je suis député, le fait que les étrangers qui arrivent en France ne puissent
04:37 pas disposer lorsqu'ils ne travaillent pas, c'est-à-dire lorsqu'ils ne paient pas
04:41 de contributions.
04:42 Il y a une distinction très claire, et elle est toujours là dans ce texte, entre ce qu'on
04:46 appelle les prestations contributives, c'est-à-dire un salarié, naturellement il a droit à l'assurance
04:51 maladie, naturellement il a droit au chômage, naturellement il a droit à la retraite.
04:55 C'est la contrepartie de ces cotisations.
04:57 Quelqu'un qui ne travaille pas, qui sollicite l'arrivée en France, ne peut pas bénéficier
05:04 des mêmes droits dès la première minute que quelqu'un qui est en France depuis des
05:09 années.
05:10 D'ailleurs ça existe, vous savez, le RSA, ce n'est pas nous qui l'avons fait, il
05:15 faut cinq ans avant de le toucher.
05:17 Les allocations familiales, il y a un délai de carence, il faut six mois.
05:21 Nous disons la même chose pour les autres prestations sociales, il faut allonger ce
05:26 délai parce que nous sommes le pays, en matière de prestations sociales, le plus généreux
05:32 d'Europe pour les étrangers.
05:34 Et ça veut dire que les étrangers, quand ils veulent venir en Europe, ils privilégient
05:38 la France parce qu'il y a cette générosité.
05:40 Et cette générosité, elle n'est plus possible.
05:43 Eric Ciotti, 32 départements dirigés par la gauche, comme le Lot par exemple, des municipalités,
05:49 vous avez entendu la maire de Strasbourg au journal de 7h, annonce qu'ils n'appliqueront
05:53 pas certains articles qu'ils jugent indignes.
05:55 Qu'est-ce que cela vous inspire ?
05:57 On est dans une république bananière, il y aurait des petits rois-telés locaux qui
06:02 décideraient de ne plus appliquer les lois de la république.
06:05 C'est de la sédition.
06:06 Ces personnes se mettent hors des lois de la république.
06:09 Tout le monde doit appliquer la loi de la république et a fortiori quand on est élu.
06:15 Donc tout ça, c'est de la communication, c'est ridicule, ça peut être sanctionné
06:20 par la loi et c'est naturellement contraire à tout principe légal.
06:25 Quand Laurent Wauquiez, qui est président de la région Rhone-Alpes et membre éminent
06:29 des républicains, refuse d'appliquer la loi zéro artificialisation nette, comment
06:34 vous appeliez ça ?
06:35 Ce n'est pas la même chose.
06:36 C'est une capacité d'adaptation qui est dans les mains des régions.
06:41 Là, on est dans une loi de la république qui s'applique à tout le monde.
06:44 Sur la zone zéro artificialisation nette, c'est les régions qui vont fixer les zones
06:51 qui sont concernées.
06:52 Le président de la région dit "je n'appliquerai, ces zones n'existeront pas".
06:58 Ça n'a rien à voir, c'est sa capacité d'appréciation.
07:01 Là, il y a une loi de la république qui s'applique de façon égale sur tout le territoire
07:07 et ne pas l'appliquer, c'est naturellement ahurissant, scandaleux.
07:11 Capacité d'appréciation encore.
07:13 Hier, au micro de France Inter, Elisabeth Borne, sur certaines mesures, comme la caution
07:17 par exemple, demandée aux étudiants, elle allait finalement jusqu'à l'évoquer
07:21 une somme symbolique de 10 euros, n'excluait pas d'y revenir, de s'adapter, de modifier
07:28 la loi.
07:29 Est-ce que ça vous paraît acceptable ?
07:30 C'est très choquant là encore.
07:32 La loi a été votée, nous avons discuté pendant des heures entières avec la Première
07:38 Ministre.
07:39 Cette disposition a été adoptée par le Sénat, elle a été adoptée en commission
07:44 mixte paritaire, elle a fait le fruit d'un accord de la Première Ministre et on viendrait
07:50 renoncer à la parole.
07:52 Je l'ai dit, j'ai appelé la Première Ministre hier, j'ai dit "attention, ce
07:56 que vous faites est extrêmement dangereux, parce que si le respect de la parole n'a
08:01 aucun sens, n'a aucune valeur, si la parole du gouvernement et si encore beaucoup plus
08:07 fort le vote du Parlement n'a aucune valeur, que vont penser les Français ? Ça veut dire
08:11 que d'abord il n'y aura plus aucune capacité de discussion, et je l'ai dit à la Première
08:16 Ministre, pour la suite, la majorité n'est que relative, et même cette majorité est
08:22 de plus en plus fracturée en son sein.
08:25 Donc, où en a-t-elle née ? Comment gouverner le pays dans cette espèce de chaos ?
08:30 Vous lui rappelez qu'elle ne peut plus gouverner sans vous ?
08:38 Je lui ai dit qu'une loi a été votée, que sa majorité n'existe pas, qu'elle
08:45 est de plus en plus fragile, qu'il y a eu un texte, fruit d'un accord, fruit d'un
08:53 vote au Sénat, qu'il faut respecter ce vote.
08:55 Et le Conseil Constitutionnel alors ? Et la gauche saisit le Conseil Constitutionnel ? Et
09:00 le Premier Ministre ? Et le Président de la République s'en remet au Conseil Constitutionnel
09:04 qui pourrait censurer un certain nombre de mesures sur les quotas, sur les prestations
09:10 sociales, sur les droits du sol ? On verra.
09:11 Et ça, qu'en pensez-vous ?
09:12 Nous verrons bien, je ne vais pas préjuger de la décision du Conseil Constitutionnel,
09:17 j'entends des pressions politiques.
09:19 On voit bien qu'il y a une envie du Président de la République que le Conseil Constitutionnel
09:25 se substitue au Parlement.
09:26 Attention !
09:27 Vous sous-entendez que le Conseil Constitutionnel n'est pas indépendant ?
09:30 Attention ! Il y a des membres qui sont nommés par le Président de la République.
09:34 Attention à ce que le Conseil Constitutionnel ne redevienne pas, ne devienne pas une instance
09:40 politique.
09:41 Nous avons toujours dit, et moi le premier, et pour moi c'était impréalable, que nous
09:47 avons besoin en matière migratoire d'une réforme constitutionnelle.
09:51 Et je souhaite pour qu'elle balaie toutes ces oppositions qu'on entend et qui sont
09:56 contraires à la volonté du peuple, que cette réforme soit approuvée par les Français.
10:00 Parce qu'on n'a jamais interrogé les Français pour savoir ce qu'ils veulent
10:04 sur l'immigration.
10:05 Ce n'est pas aux journalistes, ce n'est pas à telle ou telle organisation ou association
10:12 de dire ce que veulent les Français, de juger ce que veulent les Français, de juger le
10:17 Parlement.
10:18 Là ce n'est plus la démocratie.
10:20 C'est un régime particulier qui n'est pas conforme à l'idée que je me fais de
10:25 la démocratie.
10:26 Donc il faudra un jour cette réforme constitutionnelle, notamment sur l'asile à la frontière,
10:32 notamment sur les plafonds migratoires, tout ça sur les expulsions, nous le disons.
10:36 Quand on voit qu'on a dû aller rechercher un Ouzbek qui est dangereux pour la France
10:42 dans son pays, par une décision du Conseil d'Etat qui est conforme au respect des engagements
10:48 internationaux, on marche sur la tête.
10:50 Nos concitoyens ne peuvent pas comprendre.
10:52 La France a respecté le droit international.
10:54 C'est pour ça qu'il faudra changer les choses.
10:57 Merci Eric Ciotti.
10:58 Et merci Sonia De Villers.