Pour les deux ans du Panier RTL, les prix de plusieurs produits ont largement augmenté à cause de l'inflation. Rémy Oudghiri, sociologue et directeur de sociovision, filiale de l'IFOP, explique comment les Français ont adapté leur consommation face à la hausse des prix.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin du 09 novembre 2023 avec Jérôme Florin et Marina Giraudeau.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin du 09 novembre 2023 avec Jérôme Florin et Marina Giraudeau.
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00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL. Les trois questions du petit matin. Bonjour Rémi Oudguiri.
00:09 Bonjour. Vous êtes sociologue, vous êtes le directeur général de
00:14 sociovision du groupe IFOP. Ça fait donc deux ans exactement que nous mesurons ici à RTL chaque mois l'évolution des prises alimentaires.
00:21 13 produits de consommation courante, c'est notre panier RTL. Et globalement sur deux ans il coûte près de 8 euros de plus
00:29 pour un panier aujourd'hui qui vaut un peu plus de 31 euros. Vous qui observez à la loupe les comportements des consommateurs,
00:35 comment font les gens 8 euros de plus en deux ans ?
00:39 Eh bien ils se sont adaptés, c'est vraiment ce qu'on voit, vraiment un changement profond des comportements.
00:46 Sur l'alimentaire en particulier ce qui se passe c'est qu'il y a plusieurs comportements qui se sont installés dans la durée. D'abord on se prive,
00:53 on se prive d'un certain nombre de biens, c'est à dire qu'on réduit la consommation de viande. La viande est
00:58 notamment la viande rouge est la plus touchée, c'est assez spectaculaire. On se prive aussi de poissons, c'est à dire qu'on en mange moins.
01:05 Et également on se prive de produits sucrés, là aussi on en achète moins. Ça c'est la première réaction.
01:11 La deuxième adaptation c'est qu'on va vers les promotions, on va vers les réductions.
01:16 On se met à réutiliser de façon massive la carte de fidélité, enfin on cherche véritablement
01:21 à faire le maximum d'économies, à trouver les meilleures affaires.
01:26 Un troisième comportement qu'on observe c'est qu'on va aller vers des marques qui sont quand même
01:32 qui promettent de la qualité
01:35 mais qui sont moins chères. Et en particulier aujourd'hui les marques distributeurs
01:38 vivent un véritable hache d'or parce qu'elles ont une image qui ne cesse de s'améliorer
01:43 et en même temps elles sont moins chères que les grandes marques. Et puis enfin il y a un dernier comportement qui est assez
01:48 révélateur aussi de la période. Il y a une sorte de déclassement dans la consommation, c'est à dire qu'on va vers une moindre qualité.
01:56 Et là évidemment ça crée des frustrations, on est obligé d'aller vers des produits
02:00 moins chers et donc
02:03 on dégrade la qualité pour garder la maîtrise de son budget.
02:07 Donc on réduit son budget. Est-ce qu'on réduit plus son budget que lors de la crise de 2008-2009 par exemple ?
02:14 Oui je pense que le phénomène est beaucoup plus spectaculaire. En fait il faut bien comprendre ce qu'on vit actuellement
02:23 est inédit depuis les années 70 en réalité parce que c'est une inflation qui est très haute et surtout qui est durable. Ça fait deux
02:30 ans maintenant, l'alimentaire étant le plus touché mais ça touche également d'autres secteurs. Donc le budget alimentaire
02:35 doit absolument être maîtrisé et je ne parle pas des autres budgets. On sait très bien que
02:41 une des variables d'ajustement aujourd'hui c'est le vêtement. Le vêtement souffre énormément de la période actuelle. Les gens n'achètent
02:47 plus ou moins ou achètent de la seconde main de façon massive.
02:51 Et puis on part moins en vacances. On continue à s'accorder ce plaisir mais on part moins.
02:56 C'est vraiment quelque chose qui est, par rapport à la crise de 2008-2009, qui a été un choc en effet.
03:02 Tous nos indicateurs avaient bougé de façon très significative
03:05 mais deux ans après on voyait déjà une amélioration. Là on voit véritablement
03:10 que les français se sont installés dans l'idée que ce scénario allait durer. Donc le premier poste de dépense qui trinque là c'est l'alimentaire
03:17 devant tous les autres ? Oui alors
03:22 c'est à dire que c'est dans l'alimentaire qu'il y a véritablement une adaptation très forte. Après quand vous demandez aux gens
03:27 quel est le premier poste que vous sacrifiez, en réalité ils vous disent les sorties.
03:31 En fait la période est intéressante, c'est à dire que les gens se ressentent sur leur foyer, se ressentent sur leur
03:37 réseau de proximité, font des choses ensemble et essayent de moins sortir pour moins dépenser.
03:42 Quels sont les produits perdants de l'inflation ?
03:47 J'ai cité la viande et le poisson, il faut citer également le bio.
03:52 Il y a véritablement quelque chose d'assez
03:57 sensible que nous observons, c'est que rappelez-vous il y a encore trois ans, le bio,
04:03 les produits écologiques étaient considérés comme étant dans le sens de l'histoire d'une certaine manière. On ne voyait pas comment cette dynamique
04:11 très forte allait pouvoir s'arrêter. Ce qu'on voit véritablement depuis 2021, maintenant 2022 et 2023, c'est évident,
04:18 c'est que les gens
04:20 réduisent sensiblement leur consommation de produits bio. En fait ce qui est en train de se produire c'est qu'il y a toujours un noyau dur
04:26 de consommateurs bio qui est souvent un
04:28 consommateur urbain plutôt aisé.
04:32 Voilà, si on veut simplifier en effet. Il y a le cercle qui s'était
04:38 démocratisé, le deuxième cercle si vous voulez, de la classe moyenne qui avait envie de consommer des produits de qualité, bons pour la santé, etc.
04:44 Les produits bio sont réputés en la matière. Eux sont obligés de revoir leurs ambitions à la baisse. Et donc c'est là où aujourd'hui
04:51 le chiffre manque à l'appel. Merci beaucoup Rémi Oudguiri, sociologue et directeur général de
04:57 Sociovision qui décortique les comportements des consommateurs face à l'inflation. Merci beaucoup, bonne journée.
05:03 Cette interview est à retrouver sur l'appli RTL.
05:06 [Sous-titres par Nathalie Chassol]