Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin avec Jérôme Florin et Marina Giraudeau du 29 août 2024.
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00:00RTL, au cœur de l'actu.
00:04Au cœur de l'actu, c'est donc le nouveau nom de ce rendez-vous au plus près de l'info.
00:08Information encore dominée par le choc ce matin, la colère et les questions.
00:13Trois jours après la mort de ce gendarme de 54 ans, Eric Comine à Mougins,
00:18percuté par un chauffard multirécidiviste, chauffard mis en examen hier notamment pour
00:23meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique.
00:27La France a tué mon mari par son excès de tolérance.
00:30Ce sont les mots de sa veuve qu'on réécoutait tout à l'heure.
00:33Ce sont les politiques, mais c'est aussi la justice qui est visée par ses propos.
00:38Bonjour Valérie Odile Dervieux.
00:40Oui, bonjour.
00:41Merci d'être avec nous en direct ce matin.
00:43Vous êtes magistrate à la Cour d'appel de Paris.
00:45Vous êtes membre du Conseil national d'unité magistrat SNMFO.
00:48Est-ce que vous vous êtes sentie visée par ses propos ?
00:52Je me suis sentie visée comme tout le monde s'est sentie visée.
00:57D'abord, je ne me permettrai pas de contester ou de discuter les mots d'une victime.
01:03On ne le fait jamais.
01:05La situation est dramatique.
01:07Sa situation mérite tout notre respect et nous incite bien évidemment à la réflexion et à l'action.
01:13Notre syndicat travaille avec le syndicat de police, avec les policiers pour pouvoir améliorer les choses.
01:20On a fait des propositions.
01:22Il est impossible de se dire que c'est juste de la colère.
01:27Et puis, il est impossible de ne pas réfléchir effectivement à la manière dont les choses sont traitées.
01:34Des statistiques, de l'analyse et de l'action bien sûr.
01:38Alors, je cite toujours madame Comine.
01:41Quelle est la suite pour ce meurtrier ?
01:43Déferrement immédiat en attente de jugement, trois repas chauds par jour, aide sociale dans les geôles.
01:48Puis, il y aura une réduction de la peine, la remise en liberté.
01:51Puis, il recommence.
01:53C'est comme ça que ça va se passer en fait ?
01:55En fait, au-delà de ces propos qui pourraient laisser à penser que selon la formule consacrée à la prison,
02:01c'est le club med, que rien ne va passer et que la détention provisoire et les sanctions ne servent à rien.
02:07Moi, ce que je vois dans ces déclarations, c'est ce que nous on constate chaque jour.
02:13C'est-à-dire un manque de lisibilité des peines.
02:18Le législateur met la pression sur les magistrats.
02:24Un, pour que les gens n'aillent pas en prison.
02:26C'est normal puisque la prison est la dernière des peines susceptibles d'être appliquées.
02:30Et deux, pour que dès qu'une peine soit prononcée, elle soit transformée.
02:34Déjà nous, on a du mal techniquement à appréhender les choses.
02:39Et comment vous voulez que le citoyen comprenne ce qui se passe ?
02:42On va prononcer une peine de prison.
02:44La juridiction prononce une peine de prison.
02:46Motive la peine, une peine de prison ou une autre.
02:48Et immédiatement après, voire la même juridiction va transformer
02:52ce qui vient d'être décidé et motivé en autre chose.
02:55Donc moi, ce que je pense, c'est un appel à la justice mais aussi au législateur
03:00de simplifier et de clarifier les choses.
03:03Non mais le législateur décide de la loi,
03:06mais au final, c'est les magistrats qui vont décider d'une remise de peine,
03:09pour bon comportement, etc.
03:11C'est comme ça que ça se passe, c'est le magistrat au bout du compte.
03:13Alors là, je vous arrête effectivement.
03:15Le magistrat décide, le magistrat doit motiver,
03:18mais le magistrat ne peut pas forcément faire ce qu'il veut.
03:21L'obligation de transformer la peine en autre chose,
03:24c'est une obligation légale.
03:26Madame Derieux, est-ce que la justice est trop laxiste ?
03:29C'est ça la question de fond.
03:30Sont-ils assez punis ces gens-là ?
03:35On a des statistiques sur les refus d'obtempérer,
03:39on a une analyse sur les peines qui sont impliquées,
03:41on a des textes qui prévoient de la prison,
03:44des retraits de permis obligatoires,
03:46des saisies et des confiscations de véhicules.
03:49Moi je pense qu'avant de vous dire si c'est trop laxiste ou trop sévère,
03:54parce qu'en fait on reproche à la justice un petit peu les deux,
03:57il faudrait avoir des chiffres, il faudrait avoir des analyses.
03:59Non, l'espèce c'est vraiment le laxisme qu'on reproche à la justice.
04:02Non, mais je pense vraiment qu'il faut se mettre autour d'une table
04:08avec les policiers, ce que nous on fait,
04:11il faut regarder ce qui existe et il faut faire des propositions
04:14pour que 1. ce soit plus transparent,
04:16et 2. que ce soit plus efficace.
04:18Plus transparent parce que des gens comme cette veuve qui s'exprime en ce moment
04:20ne comprennent pas comment fonctionne la justice.
04:22Il se dit c'est pas possible, ce gars multirécidiviste,
04:25il était dans la nature, il était condamné dix fois notamment pour délit routier,
04:29il avait encore son permis, pour les gens c'est incompréhensible.
04:32Non mais je comprends parfaitement,
04:34la délinquance routière est un fait de société.
04:36On l'a vu récemment avec d'autres faits divers,
04:38on ne peut pas continuer à traiter une par une
04:43les infractions qui y sont liées, ça c'est une première chose.
04:46Deuxièmement sur l'efficacité, il faut avoir des analyses,
04:49il faut avoir des chiffres et il faut se poser la question de savoir
04:521. si les peines prononcées sont appliquées,
04:562. comment elles sont appliquées.
04:58En l'état le refus d'obtempérer et aggraver
05:00il est susceptible d'être puni par une interdiction,
05:02une annulation du permis,
05:04pendant une durée maximale de 5 ans.
05:06Est-ce que ça c'est adapté ou pas ?
05:08Est-ce qu'au bout de 5 ans, moi je ne connais pas bien évidemment cette procédure,
05:11et je ne sais pas quelles sont les infractions qu'il a commises
05:15et quelles étaient les peines qui lui ont été appliquées.
05:18Est-ce que la solution ce n'est pas les peines planchées,
05:20on en parle beaucoup, parce que les peines maximales sont rarement appliquées.
05:24En fait mon syndicat, donc l'unité magistrale,
05:29n'est pas du tout opposé aux peines planchées.
05:31Les peines planchées, ça peut être effectivement une solution dans certains cas.
05:35Moi ce que je note, c'est qu'en matière de refus d'obtempérer,
05:38ou de refus d'obtempérer, aggraver,
05:40là c'est homicide volontaire qui a été retenu,
05:42on est quand même dans un autre spectre de peine.
05:46Moi ce que je note, c'est qu'en cas de récidive,
05:50on en court plus et c'est parfaitement normal.
05:53Les peines planchées, il y en a qui disent que ça ne sert à rien,
05:57certains disent que ça n'a rien changé,
05:59on a eu effectivement des évaluations.
06:01Moi je pense que ça donne un message et c'est un important message.
06:04En tous les cas, notre syndicat est tout à fait ouvert à la discussion,
06:09est ouvert pour poursuivre le travail avec les policiers,
06:14parce qu'eux aussi sont dans une seringue qui est quand même un peu compliquée,
06:18dans la mesure où on les met en cause quand ils agissent
06:22ou quand ils utilisent leurs armes pour réagir à des refus d'obtempérer.
06:28Et donc il faut véritablement une analyse globale de la situation
06:33et voir si on est bon ou si on n'est pas bon.
06:35De manière plus générale, moi ce que je dirais,
06:37c'est que la situation de la justice, elle n'est pas claire,
06:40elle n'est pas transparente, notamment vis-à-vis de ces infractions,
06:44et que le premier devoir envers le citoyen, c'est cette transparence
06:50et quand on a une peine, qu'elle soit prononcée, qu'elle soit exécutée rapidement
06:54et qu'ainsi le citoyen ait l'impression qu'il peut appréhender les choses
07:00de manière claire, pas qu'on lui cache des choses
07:02et que les choses sont modifiées derrière son dos.
07:04Merci beaucoup Valérie Odile d'Hervieux, magistrate à la Cour d'Appel de Paris.
07:07Merci d'avoir été avec nous en direct ce matin sur RTL.
07:11Bonne journée.
07:12Merci encore.