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Mexique _ Fentanyl, le nouveau poison des cartels _ Arte Reportage

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00:00 ...
00:09 Musique douce
00:11 ...
00:15 -Voici à quoi ressemblent certaines rues
00:17 du centre de San Diego, en Californie.
00:19 ...
00:23 Des centaines de tentes.
00:24 ...
00:27 Des personnes sans domicile, désorientées,
00:30 dont beaucoup sont victimes d'un même mal,
00:34 l'addiction au fentanyl.
00:35 -C'est très simple.
00:37 Il n'y a qu'à faire ça.
00:40 ...
00:42 -David a 32 ans.
00:44 Cela fait un an et demi qu'il vit dans la rue.
00:46 -J'en prends à peu près trois fois par jour.
00:50 J'ai pas assez d'argent pour en acheter autant que je voudrais.
00:54 J'en prendrais plus si je pouvais.
00:56 ...
00:58 -L'année dernière, son meilleur ami est mort d'une overdose de fentanyl.
01:02 Il y a trois ans, sa fiancée avait subi le même sort.
01:05 ...
01:08 -Ca fait vraiment peur.
01:11 Tu vois des gens coucher par terre,
01:13 qui respirent plus.
01:15 ...
01:16 Certains meurent d'overdose dès leur première prise.
01:19 ...
01:23 -D'où vient cette drogue surpuissante
01:25 qui tue 70 000 personnes par an aux Etats-Unis ?
01:28 Comment le fentanyl a-t-il supplanté en moins de 10 ans
01:31 presque toutes les autres substances
01:33 produites par les narcotrafiquants ?
01:35 Pour le comprendre, il faut d'abord se rendre ici,
01:39 le Sinaloa, sur la côte ouest du Mexique,
01:43 le berceau des plus grands cartels mexicains.
01:46 C'est là qu'ils ont fait leur fortune,
01:48 avec la marijuana d'abord,
01:50 puis est venu le temps des dérivés de l'opium,
01:53 puis des méthamphétamines,
01:54 avant que le fentanyl ne débarque avec fracas sur le marché.
01:58 Ces deux hommes ont vécu ce bouleversement.
02:01 Flavio, 23 ans, ici, à gauche,
02:04 fabriquait cette drogue mortelle.
02:06 Orlando, 36 ans, la transportait vers la frontière
02:09 avec les Etats-Unis.
02:11 Ils sont aujourd'hui tous deux en cure de désintoxication
02:14 et espèrent se réinsérer à leur sortie.
02:16 Avec eux, nous allons retracer la route du fentanyl
02:20 au Mexique.
02:21 -J'ai vu le fentanyl arriver en 2017.
02:26 Ca a été comme une épidémie.
02:28 On a commencé à voir des morts partout.
02:31 -Flavio n'a jamais consommé de fentanyl,
02:35 mais travaillé à son contact aurait pu le tuer.
02:38 -Au début, j'étais chargé de faire les paquets de pastilles
02:44 pour les envoyer aux Etats-Unis,
02:46 mais j'ai commencé à avoir des problèmes.
02:49 C'est une substance qui est toxique
02:52 par simple contact avec la peau.
02:54 Tu en sens les effets.
02:56 On connaît très bien les dangers,
02:59 mais ça n'importait pas.
03:01 On aurait dû utiliser des gants de latex,
03:04 des masques, des uniformes à manches longues.
03:07 On aurait dû se couvrir intégralement
03:09 pour éviter le contact,
03:11 mais on ne le faisait jamais.
03:13 Mes mains commençaient à peler
03:16 et je devenais accro.
03:17 Tous les matins, j'arrivais le premier
03:20 pour faire les paquets de pastilles
03:22 parce que j'avais besoin de cette sensation.
03:25 -Kuliakan, capitale du Sinaloa.
03:33 Victor et ses collègues enquêteurs de la police
03:36 ont reçu un appel d'une entreprise de messagerie
03:39 qui dit avoir repéré des colis suspects.
03:41 -C'est du fentanyl.
03:44 -Une seule saisie,
03:46 près de 15 kg de pastilles blottées.
03:48 De quoi tuer la population d'une ville moyenne.
03:52 -Contrôle positif.
03:54 -Ces saisies sont très fréquentes.
03:59 On fait deux ou trois contrôles par semaine
04:02 et la majorité sont positifs.
04:05 -Pendant la pandémie de Covid,
04:07 de nombreuses entreprises de messagerie
04:10 sont apparues au Mexique,
04:11 avec des protocoles de contrôle parfois peu efficaces.
04:15 Une aubaine pour les narcotrafiquants.
04:18 -Au début, ils essayaient
04:20 au moins de les camoufler un temps soit peu.
04:23 Mais ici, ils les ont simplement mis
04:25 dans de petits sacs à dos, prêts à prendre.
04:28 Ils ne se donnent même plus la peine de les cacher.
04:31 Ils comptent sur les grandes quantités qu'ils envoient
04:34 pour que la majeure partie passe entre les mailles du filet.
04:38 -Et c'est un casse-tête pour Victor et son équipe.
04:41 Le fentanyl pur n'est pas considéré
04:43 comme une drogue, mais comme un analgésique surpuissant,
04:47 utilisé avec la plus grande prudence
04:49 dans le milieu hospitalier.
04:51 Il est importé de Chine,
04:53 tout comme les autres ingrédients qui composeront les pastilles,
04:56 dont aucun, pris séparément, n'est illégal.
04:59 -On est encore aveugles
05:01 sur toute la première partie de la chaîne de production.
05:04 Les saisies qu'on fait sont des saisies de produits finis,
05:08 de pastilles qui sortent du laboratoire
05:10 vers la clientèle.
05:12 Avant le laboratoire, ce sont des ingrédients
05:14 qui circulent en petite quantité,
05:16 et ils sont difficiles à repérer pour nous
05:19 et se confondent avec n'importe quel ingrédient pharmaceutique.
05:23 On a beaucoup de mal à les localiser.
05:25 -Ces paquets portent l'image du mayo zambada,
05:28 un fameux narco mexicain.
05:29 Mais ce peut être un faux indice,
05:31 destiné à brouiller les pistes des enquêteurs.
05:34 On peut fabriquer jusqu'à un million de pastilles
05:37 avec un seul kilo de fentanyl.
05:39 Coût de production estimé par unité, un centime d'euro.
05:42 Prix de vente dans les rues des grandes villes américaines,
05:46 10 euros en moyenne.
05:47 Qui est à la tête de ce jute trafic ?
05:49 Pour les enquêteurs, il n'y a pas l'ombre d'un doute.
05:53 C'est encore le tristement célèbre cartel du Sinaloa
05:56 qui mène le jeu d'ici à la frontière.
05:58 La toute-puissante organisation cofondée par le Chapo Guzman,
06:02 incarcéré aux Etats-Unis,
06:04 qui a fait sa carrière en tant que chef de police,
06:07 est aujourd'hui divisée en plusieurs factions
06:09 qui maintiennent entre elles une paix armée.
06:12 -On appartient à une génération
06:14 qui a baigné dans le narcotrafic.
06:16 Je ne suis pas du tout contre le cartel du Sinaloa,
06:19 parce qu'il nous protège.
06:21 Je trouve ça bien qu'il veille à ce qu'aucune autre organisation
06:25 ne vienne et commence à extorquer, à kidnapper, à voler.
06:29 Je soutiens ce cartel, tant qu'il nous protège en retour.
06:32 -Le réel effet de la situation
06:34 est qu'il y a un réel effet de protection.
06:37 Pour créer un laboratoire,
06:39 il te faut un investissement de 20 millions de pesos environ.
06:42 Mais après, tu en tireras des bénéfices
06:45 de 80 ou 90 millions par mois.
06:47 Donc il est indispensable d'avoir le soutien
06:50 d'un puissant cartel pour commencer.
06:53 -Dans le Sinaloa, le narcotrafic, c'est une culture,
06:59 une économie, presque un art de vivre.
07:02 Pour des villages entiers, cultiver la marihuana
07:05 fut pendant des décennies une alternative à l'immigration,
07:08 comme ici, dans les campagnes du sud de l'Etat.
07:11 -Tu as fait du fromage ?
07:14 Ah oui, t'en as fait deux. Et du fromage frais.
07:17 -Enfant, Armando accompagnait ses parents
07:19 dans les champs de cannabis.
07:21 -Mon père a vécu ce grand changement.
07:23 Il est passé des cultures vivrières avec mon grand-père
07:27 à la culture de la marihuana pour la vente.
07:30 -Armando travaille aujourd'hui
07:32 pour des organisations de défense de l'environnement.
07:35 Il revient au village pour voir ses parents.
07:38 Ici, la présence de narcotrafiquants
07:40 n'a pas été synonyme de criminalité. Au contraire.
07:43 -Dans le Sinaloa, je ne sais pas.
07:48 -Mais ici, précisément, c'est pas vrai.
07:51 Les narcos ne sont pas de mauvaises personnes.
07:54 -Il y en a, oui.
07:55 -Mais ce sont des gens bien, des gens très bien,
07:58 qui sont très bien au service. Ils proposent toujours de t'aider.
08:01 Si quelqu'un tombe malade, ils t'aident financièrement,
08:04 ils te prêtent ou même te donnent de l'argent.
08:07 C'est ce que j'appelle des gens bien.
08:09 Et Lupillo, c'est le meilleur de tous.
08:12 -Lupillo, alias Lupe Tapia,
08:13 une des principales figures du cartel du Sinaloa
08:16 vivait dans les parages.
08:18 Il fut arrêté en février dernier
08:20 au cours d'une opération musclée des autorités
08:23 qui a fini en fusillade.
08:24 -Lupe Tapia, pourquoi m'as ponché ?
08:27 -C'est un gars qui a fait des maladies.
08:29 -Il est un gars qui a fait des maladies.
08:31 -Lupillo, Lupillo, c'est une personne fine.
08:34 -Lupillo, Lupillo, c'était une crème d'homme.
08:37 Tout le village l'a pleuré. Moi aussi, je l'ai pleuré.
08:40 Car on nous a d'abord dit qu'il avait été tué.
08:43 ...
08:48 Il restera sans doute en prison toute sa vie.
08:51 Mais ici, il était apprécié de tous.
08:53 -Lupillo, les gens l'appréciaient beaucoup.
08:56 Il est aussi connu pour blanchir l'argent de la drogue
08:59 dans des entreprises de transport.
09:01 -Les narcos nous aident beaucoup.
09:03 Ils génèrent beaucoup d'emplois. Des milliers de personnes.
09:06 -Pourquoi ? -Parce qu'ils ont de quoi payer.
09:09 Ils créent des entreprises, ils embauchent à tour de bras.
09:12 Si je veux créer ma petite entreprise,
09:14 comment je vais pouvoir prospérer si je commence avec 3 fois rien ?
09:18 -Malgré des décennies de culture de la marihuana,
09:21 la famille d'Armando n'est jamais sortie de la pauvreté.
09:25 -Tin, tin.
09:26 -Ici, il y avait 2 pistes d'atterrissage clandestines
09:31 pour que les narcos emmènent les paquets.
09:33 C'était un sacré business.
09:36 L'argent coulait à flot pour ceux qui trafiquaient la marihuana.
09:40 -Marihuana, en particulier.
09:42 -Jusqu'en 2007, quand Isaias, le père d'Armando,
09:46 a définitivement jeté l'éponge.
09:48 -J'ai arrêté de le faire
09:53 parce que c'était pas si rentable que ça pour les gens qui la produisaient.
09:57 C'était surtout rentable pour ceux qui trafiquaient.
10:00 On n'a jamais roulé sur l'or, ici.
10:02 -Mais tu n'étais pas libre de vendre à qui tu voulais.
10:06 C'est eux qui voulaient acheter la marchandise.
10:09 -Oh non, parfois, on avait le choix.
10:11 Il y avait quelques fois plusieurs narcos pour acheter la récolte.
10:15 -OK, mais je veux dire, tu n'avais pas allé de toi-même vendre ailleurs
10:19 et tu ne décidais pas du prix.
10:21 Le prix, c'est eux qui le fixaient. -Oui, oui.
10:23 -De 70 euros le kilo la meilleure année
10:27 à 8 euros à la fin de l'ère de la marihuana,
10:29 la famille d'Armando est revenue sans regret
10:32 vers l'élevage et l'agriculture.
10:34 -Celle-là va bientôt mettre bain.
10:37 Celle-là aussi.
10:38 ...
10:41 -Elles sont belles, papa.
10:43 -Elles sont grosses, toutes celles qui vont avoir un voût.
10:46 -Le plan qu'on a en tête,
10:50 c'est de planter des arbres fruitiers,
10:52 parce qu'on veut que ces terres restent à nous.
10:55 On n'a pas envie de partir.
10:58 -Dans les campagnes du Sinaloa,
11:00 c'était souvent les militaires qui inspiraient la peur,
11:03 bien plus que les narcos.
11:05 -Maintenant, les militaires se comportent un peu mieux,
11:08 mais en ce temps-là, ils arrivaient,
11:10 ils attrapaient n'importe qui, ils le passaient à tabac.
11:13 C'est arrivé qu'ils embarquent certains dans leur camion
11:17 et qu'ils ne reviennent plus, plus jamais.
11:19 -Ils ont tout détruit, ils ont détruit leur corps.
11:22 -Ici, on n'a aucun respect pour eux.
11:24 C'était des abus à répétition pendant des années.
11:28 ...
11:30 -Depuis les années 1970, les militaires mexicains,
11:33 avec l'appui des Etats-Unis, ont sillonné la région
11:36 pour détruire les champs de marée ruana ou de pavot.
11:39 Aujourd'hui, ils ne se donnent plus cette peine.
11:42 Les drogues d'origine naturelle sont rayées de la carte
11:45 par le raz-de-marée du fentanyl.
11:47 Orlando a vécu cette révolution en tant que narcotrafiquant.
11:51 -J'ai commencé à vendre de la gomme d'opium à Culiacán.
11:56 Et après, je l'ai trafiquée jusqu'à la frontière.
11:59 J'ai gagné beaucoup d'argent.
12:02 J'achetais de la gomme à très bas prix,
12:05 mais je la vendais encore bien.
12:06 Puis, le fentanyl est arrivé.
12:10 Il a complètement remplacé l'opium naturel.
12:13 Tout le monde a commencé à me demander des pastilles.
12:16 Alors, j'ai dû chercher des fournisseurs à Culiacán.
12:19 ...
12:26 -Tout passe au synthétique.
12:27 Plus besoin de main-d'oeuvre dans les campagnes,
12:30 plus besoin d'attendre la saison des récoltes.
12:33 Ce sont les bénéfices du narcotrafic qui s'embollent,
12:36 alors que les revenus des communautés rurales s'effondrent.
12:39 -Oh, attention ! Ca glisse !
12:43 -En un rancho de Durango,
12:46 Según tenían controlado
12:49 Diez hectares de amapola
12:52 Que una gente había sembrado
12:55 De 800 a 1 000 kilos
12:58 De goma habían calculado
13:02 -L'opium, c'est précisément ce qui est venu remplacer le fentanyl,
13:07 qui appartient à la famille des opioïdes de synthèse.
13:10 -Como atravesado...
13:12 -Juan Rosé vient prêter main-forte
13:14 dans l'une des dernières parcelles de pavot de la région.
13:17 -Il y avait 4 parcelles,
13:21 mais il ne me reste plus que celle-là.
13:24 Le prix s'est effondré.
13:26 Maintenant, la gomme vaut 7 pesos le gramme.
13:29 Les fertilisants sont très chers.
13:31 Avant, elles valaient 35, 36 pesos le gramme.
13:36 -Y ahorita, 7 pesos.
13:39 -C'est presque par nostalgie qu'il continue de rayer le précieux bulbe
13:43 pour en faire sortir la gomme d'opium
13:45 que les narcos transformeront en héroïne.
13:48 -On a juste gardé l'habitude et le goût de le cultiver.
13:52 Mais là, je pense qu'on va arrêter.
13:55 Dans les plus petits villages,
13:59 tout le monde vivait de ça.
14:01 Et maintenant, il n'y a plus aucune autre source d'emploi.
14:04 -Ici, à Surutato, on espère que ces jolies montagnes,
14:09 débarrassées de leur champ de pavot,
14:11 pourront bientôt attirer les touristes.
14:14 En attendant, Juan José retourne lui aussi
14:17 à des cultures traditionnelles, comme la pomme de terre.
14:21 -Elles sont déjà en train de germer.
14:26 Et quand elles sont cuites, c'est un délice.
14:30 Au prix du marché, c'est plus rentable
14:32 de semer de la pomme de terre que du pavot.
14:36 Musique douce
14:38 ...
14:42 -Mais dans certains recoins du Sinaloa,
14:44 la drogue a encore toute sa place.
14:46 Entre les broussailles, une forte odeur d'ammoniaque
14:49 vous prend à la gorge.
14:51 Cet homme nous emmène là où il a travaillé pendant deux ans,
14:54 jusqu'à ce que la police vienne tout démanteler
14:57 il y a trois semaines,
14:58 à un laboratoire clandestin de méthamphétamines.
15:01 ...
15:04 -Ici, on produisait environ 300 kg de méthamphétamines par jour.
15:10 Ce n'est vraiment pas compliqué à faire.
15:13 C'est juste un peu toxique.
15:15 Quand tu respires les vapeurs, tu n'arrives plus à dormir après.
15:19 Ca sent très mauvais.
15:22 -Les cartels mexicains produisent des méthamphétamines
15:26 depuis le début des années 1980.
15:28 Ce furent leurs premières drogues de synthèse.
15:31 Aujourd'hui, ce sont les seuls qui ont survécu
15:33 à l'arrivée du fentanyl.
15:35 Mais leur prix aussi s'est effondré.
15:37 ...
15:39 -Avant, ça valait 10 000 pesos.
15:44 Maintenant, c'est tombé à 2 000 pesos la livre.
15:47 Ca a été une aubaine pour le village.
15:50 Beaucoup sont venus travailler ici
15:53 et personne n'a eu besoin d'émigrer.
15:55 Le travail valait la peine.
15:58 Les gens se construisaient leur maison avec cet argent.
16:01 ...
16:07 -Les saisies de laboratoires de méthamphétamine sont courantes.
16:10 ...
16:14 Comme le montre le hangar de la police du Sinaloa.
16:17 -Maintenant, on trouve beaucoup plus de laboratoires.
16:23 D'ailleurs, tout ce que vous voyez ici, c'est nouveau.
16:26 C'est ce qu'on a saisi en un mois environ.
16:29 ...
16:32 -Mais les laboratoires de fentanyl sont encore très durs à repérer.
16:36 Plus discrets et moins pestilentiels
16:38 que ceux de méthamphétamine, ils peuvent être installés
16:41 dans n'importe quelle maison de ville ou recoin de campagne.
16:44 Les narcotrafiquants confiants proposent souvent
16:47 aux journalistes d'en visiter un, moyennant un droit d'entrée
16:50 de 5 000 dollars.
16:52 Musique douce
16:55 ...
16:57 -Nous remontons du Sinaloa vers la frontière avec les Etats-Unis.
17:01 Tijuana.
17:03 L'un des plus gros points de passage de frontières au monde.
17:07 Ici, le fentanyl est partout,
17:10 en attente de son passage vers les Etats-Unis.
17:13 Et on en voit les ravages dans les rues.
17:16 ...
17:18 -Le rapport dit que la personne est inconsciente.
17:21 -Ca doit être une overdose. Tu as qui de dispo, à la base ?
17:24 -Alan est chef d'équipe à la Croix-Rouge.
17:27 Les dimanches sont souvent pour lui les jours les plus chargés.
17:30 -Comment tu t'appelles ?
17:32 -Comment ?
17:33 -Diego ?
17:34 Arturo ?
17:35 -Quand tu nous tiens, Arturo ?
17:37 -T'as quel âge, Arturo ?
17:39 -Asseyons-le.
17:41 -Asseyons-le.
17:42 -Il est 4h de l'après-midi.
17:45 Il vient de traiter son 7e cas d'overdose de la journée.
17:49 L'homme est sonné.
17:51 -Ils étaient désperts ?
17:52 -Son ami, qui a pris la même substance que lui,
17:55 est sous surveillance.
17:57 -Tranquille, garde-à-laire.
17:59 -Euh...
18:00 -Moi, je pensais que c'était de la cocaïne.
18:04 -Mais c'était autre chose, apparemment ?
18:07 -Si.
18:08 -Ca t'était déjà arrivé ?
18:10 -Non.
18:11 ...
18:13 -Tu consommes du fentanyl ?
18:15 -Non, jamais.
18:17 ...
18:19 -Je ne savais pas.
18:21 Je crois qu'ils nous ont vendu autre chose.
18:24 ...
18:27 -Heureusement, Alan assure lui l'antidote
18:30 qui lui a permis de sauver des centaines de vies.
18:33 -On y va. Respire normalement.
18:35 -L'analoxone.
18:36 -Un, deux, trois.
18:38 -Unaloxone.
18:39 -Unaloxone.
18:40 -Listo. -OK.
18:41 -Tu vas te sentir moins engourdi dans un instant.
18:45 -Un, deux, trois.
18:48 -Un remède efficace, mais encore difficile à trouver.
18:51 Alan en profite pour laisser quelques doses
18:53 aux pompiers de la ville.
18:55 -Celle-là a perdu son capuchon, mais je te la donne quand même.
18:59 Tiens, en voilà deux. J'en garde une.
19:02 -Ah, ben, c'est ça.
19:03 -On a vécu une triple pandémie ici.
19:08 Pendant le Covid, on traitait des cas graves
19:10 toute la journée.
19:11 Et à côté de ça, les overdoses pour fentanyl ont explosé.
19:15 Et en plus, tous les conflits liés au trafic de drogue,
19:20 des blessés par balle par dizaine, tout ça allait ensemble.
19:23 -Ils sont à la part tout le temps.
19:25 -Tu peux m'envoyer l'adresse ?
19:28 -Eh, t'es prêt ?
19:31 -Merci, à plus.
19:33 ...
19:36 -Un autre cas d'overdose.
19:38 -Pas de répit, il faut courir vers une autre urgence.
19:43 ...
19:47 -Que fait cet homme dans la vie ?
19:49 -Il est chauffeur routier.
19:50 -Ah, OK. Ca s'est passé vers quelle heure ?
19:53 -Il y a une heure environ.
19:56 -Une heure.
19:57 -Une heure, plus ou moins ?
19:58 -Alan doit utiliser sa dernière dose de naloxone,
20:03 qui, heureusement, fait effet.
20:05 Il se réveille.
20:07 ...
20:10 -Comment il s'appelle ?
20:11 -Fernando.
20:13 -Fernando.
20:14 Comment tu te sens, Fernando ?
20:17 -L'homme est passé à deux doigts de la mort.
20:22 -Fernando !
20:24 Allez, redresse-toi.
20:27 Mets-toi derrière lui.
20:30 -Comment ça va ?
20:32 -Fer. Fer, Fer.
20:34 Fer.
20:36 C'est Guillermo.
20:38 Ecoute-moi.
20:39 Tu dois respirer avec ce masque.
20:43 -Le fin tanil a déferlé sur cette ville frontière
20:47 et il s'est même glissé dans la composition des autres drogues.
20:51 -Merci à Dieu.
20:53 Il va bien.
20:56 Il y a une semaine,
21:00 deux très bons amis à moi
21:02 sont morts de verdose.
21:05 C'est dur.
21:08 C'est dur.
21:10 C'est dur d'imaginer
21:11 ce qui leur est arrivé.
21:14 Et maintenant,
21:17 c'est mon frère, à moi.
21:20 C'est dur.
21:24 -Encore une fois, l'homme était persuadé
21:27 d'avoir pris de la cocaïne.
21:29 -Sa famille nous a dit qu'il était chauffeur routier.
21:33 Ils doivent veiller de longues heures de route.
21:36 Ils prennent souvent de la cocaïne pour se maintenir éveillés
21:40 mais souvent, ils ne peuvent pas vraiment savoir
21:43 ce qu'on leur vend.
21:44 Ils prennent un opioïde sans le savoir,
21:46 tombent dans une espèce de torpeur, puis de coma
21:49 et ils arrêtent de respirer.
21:52 -Pour Alan, les ravages du fin tanil
21:54 ne font que commencer au Mexique.
21:56 -C'est un phénomène très grave
21:59 et ça concerne tous les milieux sociaux,
22:01 dans n'importe quel quartier.
22:03 On a eu des cas d'overdose d'enfants.
22:08 -Quel intérêt ont les narcotrafiquants
22:11 à tromper leurs clients sur la marchandise vendue ?
22:14 C'est Flavio qui nous donne la réponse,
22:16 après 6 années passées dans l'élaboration du fin tanil.
22:20 -On pouvait moudre les pastilles de fin tanil
22:23 et ça en faisait une poudre qui ressemblait à de la cocaïne.
22:27 Et parfois, certains lots de fin tanil étaient mal dosés
22:30 et invendables tels quels.
22:32 Mais pour ne pas perdre l'investissement
22:35 que ça représentait, on en faisait de la poudre
22:38 et on la vendait en disant que c'était de la cocaïne.
22:41 -Pour élaborer les pastilles,
22:42 les narcos ajoutent les ingrédients les moins chers
22:46 afin de diminuer les coûts de production.
22:48 Soude caustique, maurora, pastilles hormonales pour le bétail,
22:52 le fin tanil pur représentent moins de 2 mg par unité.
22:56 -Le fin tanil est arrivé sur le marché
23:01 et n'en sortira plus.
23:04 Ils produisent des millions de pastilles par jour.
23:06 Des millions.
23:08 Rien ne va pouvoir arrêter ça.
23:10 -Flavio affirme qu'il fabriquait à lui seul
23:15 entre 200 000 et 300 000 pastilles par jour.
23:18 -Si le dosage est mal fait, tu peux mourir
23:20 avec une seule pastille dès ta première prise.
23:23 -Le danger de l'overdose à chaque prise.
23:28 C'est ce qui guette David et tant d'autres.
23:32 -Ici, dans les rues du centre,
23:35 je dirais qu'environ 3 personnes sur 5 en prennent.
23:39 2 sur 5, 3 sur 5.
23:41 Et ça se trouve très facilement.
23:43 C'est bien plus facile à trouver que, par exemple, l'héroïne.
23:47 On n'en trouve plus du tout, maintenant.
23:50 Musique douce
23:52 -Le cortège de mort du fin tanil
23:54 endeuille chaque jour les Etats-Unis.
23:56 Et le Mexique, autrefois simple pays de fabrication et de transit,
24:00 devient consommateur, lui aussi.
24:02 De plus en plus de paquets saisis par la police
24:05 ne sont plus en partance vers les Etats-Unis,
24:07 mais vers l'intérieur du pays.
24:10 L'ère de cette drogue surpuissante
24:12 semble n'en être qu'à ses débuts.
24:14 ...
24:23 ...

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