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Clique, c'est présenté par Mouloud Achour, tous les jours à 19h45 en clair sur CANAL+ ! 

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Transcription
00:00 Bonsoir, Simon Bernard. Je vous présente Cléa De Wecker.
00:02 - Enchantée. - Bonsoir.
00:03 Simon, vous êtes cofondateur et président de l'association Plastique Odyssée.
00:07 Vous êtes parti, on vient de le voir dans le documentaire,
00:09 pendant trois ans à bord de ce navire pour lutter contre la pollution plastique.
00:13 Au départ, il n'y avait même pas de bateau.
00:15 Vous avez vraiment tout fait de vos mains.
00:16 Ça paraît hyper artisanal et pourtant, ça a fonctionné.
00:20 C'est vrai qu'on partait de pas grand-chose.
00:22 On était tout juste sortis d'école.
00:24 On faisait encore plus jeune que maintenant.
00:26 Donc, on s'est dit, il faut faire nos preuves.
00:27 Et on a commencé par construire un tout petit bateau de 6 mètres,
00:30 vraiment de nos mains,
00:33 jusqu'à arriver, sept ans plus tard, à avoir ce bateau
00:36 et à partir en expédition.
00:38 Pour le sujet qui nous concerne, c'est quand même se rendre compte
00:40 qu'en 2050, la masse des plastiques sera égale à la masse des poissons
00:44 dans l'océan. Chaque minute, 19 tonnes de plastique
00:46 sont déversées dans l'océan.
00:48 Vous expliquez que c'est impossible aujourd'hui de dépolluer les océans
00:51 parce que les microparticules restent au fond.
00:54 Et on se rend compte que la tâche est immense.
00:56 Qu'est-ce qui vous motive, alors ?
00:58 Moi, ce qui me motive, c'est de voir toutes ces solutions concrètes.
01:00 Parce que oui, on montre des photos de déchets.
01:03 Et moi, je suis quand même très souvent dans des décharges.
01:05 Mais on peut voir des images incroyables.
01:07 Mais en fait, ce qu'il faut le rappeler, votre job,
01:09 ce n'est pas de ramasser le plastique.
01:11 C'est d'aller là où il y a de la pollution
01:14 pour analyser, trouver des solutions
01:16 et connecter des jeunes dans le monde entier
01:17 qui oeuvrent dans le même sens.
01:18 Exactement. Et c'est surtout rencontrer des entrepreneurs,
01:21 des initiateurs qui font déjà des trucs incroyables.
01:25 Et c'est ça qui nous motive tous les jours.
01:26 C'est encore apprendre et découvrir
01:29 et d'être inspiré par des entrepreneurs.
01:31 On voit ici au Liban, à Dakar, partout dans le monde.
01:34 C'est quoi la solution la plus incroyable qui vous a marqué ?
01:37 Au Brésil, ça fait sept ans qu'on travaille sur le sujet.
01:40 On a vraiment découvert encore un truc.
01:42 C'est une entreprise qui fabriquait les tôles ondulées.
01:45 On peut voir beaucoup dans les Caraïbes et en Afrique aussi,
01:48 à partir de sachets qui ne sont normalement pas recyclables,
01:51 tous les sachets de chips, de dentifrice et tout,
01:53 par une technique super simple avec de la vapeur d'eau.
01:55 J'avais jamais vu ça avant et personne n'en parle.
01:59 Donc c'était hyper intéressant de documenter ça
02:01 pour pouvoir le partager aussi.
02:02 Il y a un moment très fort, c'est quand vous vous rendez à Dakar.
02:05 Il faut savoir que Dakar, aujourd'hui,
02:06 c'est la deuxième ville la plus polluée au monde.
02:08 Et dans le documentaire, vous y retournez
02:10 pour rencontrer un monsieur qui s'appelle Mustapha Diang,
02:12 qui est leader syndical des pêcheurs.
02:13 Et je voulais qu'on regarde.
02:15 Les usines qui sont installées dans la piscine de Dakar
02:18 déversent le déchet à partir d'ici, vers le fleuve.
02:21 Et le plastique, tout le plastique qu'il y a ici, dans Dakar,
02:25 voilà, surtout ici.
02:28 C'est un dépotoir.
02:29 Nous ne sommes pas étonnés, nous, les pêcheurs,
02:32 quand nous allons à haute mer,
02:34 et que nous trouvons des îlots de plastique.
02:37 Nous ne sommes pas étonnés,
02:38 parce que nous savons que ça provient de la plage.
02:40 Alors, après ce doc, vous décidez, après cette rencontre,
02:44 de fabriquer une pagaie.
02:46 Pourquoi une pagaie ? Est-ce que vous pouvez nous expliquer ?
02:48 C'est vrai que Mustapha, qui est vraiment un personnage
02:50 hyper charismatique, il avait déjà cette idée en tête.
02:53 Et il me disait, "Mais attends, on coupe des arbres tous les jours
02:56 pour faire des pagaies ?
02:57 À côté de ça, on pêche du plastique dans nos filets.
02:59 Est-ce qu'on peut pas faire quelque chose avec ce plastique ?
03:01 Est-ce qu'on peut pas faire une pagaie ?"
03:03 Et donc, ça s'est fait, mais super rapidement,
03:05 à bord de notre bateau laboratoire.
03:06 En 24 heures, on avait bricolé un prototype de pagaie,
03:10 qu'on peut voir, et on était partis sur une pirogue.
03:13 Elle était quand même très lourde, donc un peu d'amélioration,
03:16 mais c'était incroyable de pouvoir vraiment prototyper rapidement
03:20 et arriver à une solution concrète.
03:21 Quand on marchait sur la plage, tous les pêcheurs nous regardaient.
03:24 Tous les pêcheurs avaient envie de prendre cette pagaie
03:26 qui est en plus assez colorée.
03:28 -C'était marrant. -Quand Pauline annonce le chiffre
03:29 en expliquant qu'il y a quasiment bientôt
03:32 autant de poissons que de plastique,
03:34 comment vous faites pour garder la foi ?
03:36 Comment vous faites pour rester optimiste, en fait ?
03:38 Moi, je crois que de base, je suis quand même hyper un peu optimiste,
03:42 naïf, candide,
03:44 et j'ai toujours aimé m'intéresser aux problèmes
03:48 parce qu'il y a des solutions à imaginer,
03:50 pas parce que c'est un problème et que je me dis
03:52 "Tiens, il faut sauver les océans, il faut sauver la planète."
03:54 Moi, depuis tout petit, je voulais être inventeur,
03:56 donc c'est ça qui me passionne, c'est créer des choses,
03:58 inventer, craquer des problèmes,
04:00 et donc c'est pour ça que ça me passionne.
04:01 Moi, dès que je vois des déchets, je suis trop content.
04:03 Je me dis "Ah, génial, qu'est-ce qu'on va pouvoir faire avec ?
04:05 OK, il y a ce déchet-là, mais là, on est dans ce contexte-là,
04:08 mais ces bouteilles, peut-être qu'on peut en faire de la fibre
04:10 pour faire des oreillers."
04:12 J'adore réfléchir et inventer des trucs.
04:15 Ce qu'il y a de très fort dans le documentaire,
04:16 c'est qu'évidemment, vous mettez en connexion
04:18 toutes ces intelligences autour du monde
04:19 et qu'à chaque fois, c'est le même motus operandi,
04:21 vous arrivez, il y a des montagnes de déchets
04:23 avec des gens en détresse,
04:24 mais qui, à la fois, sont très soulagés de vous trouver là
04:27 et vous réfléchissez ensemble pour leur apprendre.
04:29 C'est quoi la prochaine étape ?
04:30 Le bateau, vous me disiez, il continue de naviguer.
04:33 C'est ça. Là, c'est vrai que le documentaire,
04:35 on voit juste quelques escales, les premières escales,
04:37 mais depuis, le bateau a traversé l'Atlantique,
04:40 et puis là, en ce moment, on est en Amérique du Sud,
04:42 donc on a découvert un nouveau continent.
04:44 Il est actuellement en Colombie, le bateau.
04:47 Et donc, on apprend à chaque fois énormément.
04:49 On a découvert des experts du recyclage en Colombie,
04:52 dans des quartiers de Bogotá.
04:54 Il y a quand même vraiment cet échange-là
04:56 où on continue d'apprendre énormément.
04:57 Est-ce qu'il faut encore manger du poisson ?
04:59 Alors, c'est sûr que je pense qu'en mangeant
05:03 des fruits de mer, des crustacés, on mange beaucoup de plastique.
05:07 C'est sûr. Après, on en retrouve partout.
05:10 À chaque fois qu'on cherche du plastique, on en trouve.
05:12 Dans l'eau, dans la bière, il y a des études.
05:14 À chaque fois qu'on cherche, on en trouve.
05:15 Donc, c'est pour ça que c'est un problème
05:17 qui est beaucoup plus complexe que juste se dire
05:19 "on va le ramasser". -Il y a Léa qui se rappelle
05:20 tous les poissons qu'elle a mangés de cette manière.
05:21 -Oui, c'est ça. Elle fait là.
05:23 -Absolument.
05:24 -Et c'est pour ça qu'il faut aussi parler de réduction,
05:26 parce qu'on parle beaucoup de recyclage,
05:28 mais quand on est dans une des plus grandes décharges,
05:30 à Duqueça, en République dominicaine,
05:32 on voit des montagnes de déchets qui arrivent en permanence.
05:35 On se dit "oui, il faut recycler,
05:37 mais il faut qu'on arrête de consommer autant de plastique,
05:39 parce que sinon, on ne va jamais s'en sortir".
05:41 -Par exemple, si moi, je bois une bouteille d'eau en plastique
05:43 et que je la jette à la poubelle, où elle va ?
05:44 C'est quoi, le chemin ?
05:45 -Ça dépend du pays.
05:46 Ici, on a de la chance, entre guillemets,
05:48 d'avoir quand même de la collecte,
05:50 même si derrière, les déchets sont un peu mis sous le tapis.
05:52 -Ce n'est pas la même chose au Liban.
05:53 -Mais voilà, nous, on s'intéresse à des pays où il n'y a pas ça, justement.
05:56 Ou alors, là, on peut le voir, les camions poubelles arrivent directement sur la mer.
06:00 Ça, c'est une décharge.
06:01 Au Liban, on peut voir les images qui empiètent littéralement sur la mer.
06:06 Donc l'océan est grignoté par les déchets.
06:08 -Qu'est-ce qui vous interpelle, là, dans son histoire, dans son combat ?
06:11 -Il y a quelque chose qui me touche beaucoup, c'est la foi.
06:14 La foi dans l'idée de réussir à améliorer les choses,
06:18 à utiliser ce qui nous apparaît, ce qui est désastreux,
06:21 et d'essayer de le transformer en quelque chose...
06:26 Oui, de quelque chose d'utile.
06:27 Les inventions que vous faites, cette dynamique-là, cette énergie-là,
06:32 je trouve ça très impressionnant et très beau et très...
06:36 Oui, je suis très impressionnée, en fait.
06:38 -Merci.
06:39 -Il y a aussi un truc générationnel, moi, qui me bluffe.
06:42 Moi, j'ai pas grandi avec ces problèmes-là dans la tête.
06:44 Et quand on voit dans le documentaire...
06:47 Vous non plus ? -Non.
06:48 -C'est la jeunesse du monde entier qui est concernée.
06:50 -Mais moi non plus, en fait, bizarrement.
06:52 Même si je suis peut-être un peu plus jeune,
06:54 mais quand j'étais plus jeune, j'étais intéressée par ces sujets-là,
06:59 mais comme je disais, parce que j'aimais bien résoudre les problèmes.
07:02 Mais on n'était pas du tout sensibilisés,
07:04 et c'est en fait en travaillant là-dessus que j'ai rencontré des gens
07:07 et que je me suis rendu compte que le monde avait changé.
07:10 -Merci beaucoup, Simon Bernard. Bravo.
07:12 -Merci. -Bravo pour cette Plastique Odyssée.
07:14 L'Odyssée suit son cours.
07:15 Le documentaire "Plastique Odyssée" sera diffusé mercredi 25 octobre,
07:18 20h55, sur Canal Doc, et quand vous voulez, sur "My Canal".
07:24 Le livre "Plastique Odyssée. Parcourir les océans pour sauver la planète"
07:26 paraîtra le 11 octobre aux éditions Epa.
07:29 Merci beaucoup, Pauline. -Merci beaucoup.
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