"B*te de cheval", "femme fontaine" : Camille Aumont Carnel démonte ces expressions utilisées au quotidien et nous explique pourquoi elles sont problématiques.
Son livre "Les mots du Q", publié aux éditions Le Robert, sort le 5 octobre.
Son livre "Les mots du Q", publié aux éditions Le Robert, sort le 5 octobre.
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00:00 "Avoir une p**** de cheval", "perdre sa virginité" ou encore "être une femme fontaine",
00:03 ces trois expressions qui sont problématiques, qu'on utilise tous et toutes au quotidien,
00:06 et je vais vous expliquer pourquoi.
00:07 Avoir une p**** de cheval, c'est l'illustration même d'une société,
00:11 d'une pression de la performance et d'une dictature de la performance
00:14 qui est quand même très très présente aujourd'hui,
00:16 qui plus est renforcée par toute l'industrie mainstream de la pornographie
00:20 où vraiment en fait si on n'a pas un pénis de 24 cm,
00:23 on va nous mettre automatiquement dans la catégorie un petit peu des mauvais coups.
00:26 Moi je l'ai déjà ressenti avec tout un tas de partenaires
00:27 qui presque s'excusaient de pas avoir une p**** énorme.
00:30 Faut pas complexer vis-à-vis de ça.
00:31 Ça ramène en plus de ça l'acte sexuel et la personne à un truc animal
00:35 et ça nous éloigne d'un truc qui est censé être sincère,
00:37 qui est censé être dans l'émotion, qui est censé être joyeux,
00:39 qui est censé être dans le consentement.
00:40 On va pas commencer à shamer des p**** de cheval,
00:43 mais j'ai pas non plus envie de shamer les personnes qui n'ont pas de p**** de cheval.
00:46 Voilà, on prend tout le monde et tout le monde nous prend.
00:48 "Quit" de "la femme fontaine" ou encore "être une femme fontaine",
00:51 on est dans le parfait exemple de l'objectification des femmes.
00:54 Nous ne sommes plus une personne, nous sommes des choses.
00:56 D'autant plus que l'aspect fontaine apporte une dimension complètement spectaculaire au phénomène.
01:01 Moi, pour avoir échangé avec des centaines de femmes et de personnes qui étaient dans cette situation-là,
01:04 ils m'ont dit "en fait, ça vient complexer parce que moi, parfois, ça ressemble pas du tout à une fontaine,
01:07 en fait, ça ressemble plus à trois petites gouttes d'eau".
01:09 Si tu n'y arrives pas et si tu n'arrives pas au stade où en fait, c'est une énorme flaque d'eau par terre,
01:14 c'est pas grave.
01:15 Pour la plupart, ça se passe pas forcément comme ça.
01:17 Cette expression, j'ai tendance à peut-être la mettre de côté
01:19 et plus utiliser la terminologie qui sort de l'anglais, qui est squirtée,
01:23 qui du coup, ramène pas ça à un phénomène mais à l'action d'être en train de.
01:26 Et je trouve ça beaucoup plus intéressant, moins complexant.
01:29 Et je sais pas, moi, je vois des fontaines, j'ai pas envie de ressembler à ça, quoi.
01:31 Quand on parle du mot "les règles", je crois que c'est le phénomène physiologique de mon corps,
01:34 le moins régulier, le moins réglé qui existe.
01:37 Ça arrive un jour plus tôt, un jour plus tard.
01:39 Parfois, elle dure 7 jours, parfois, elle dure 10 jours, parfois, elle dure 2 jours.
01:41 Je préfère appeler les règles les irrégulières
01:44 pour être un petit peu plus en phase avec les fonctionnalités, les caractéristiques du phénomène, quand même.
01:48 Les protections hygiéniques.
01:51 Est-ce que c'est pour protéger la vue des autres ?
01:53 Est-ce que c'est pour protéger les banquettes dans le métro ?
01:55 Est-ce que c'est pour protéger mes draps ? Est-ce que je ne sais pas.
01:57 Est-ce que c'est pour me protéger moi-même de mes propres règles ?
02:00 C'est limite une aisance sociale menstruelle.
02:02 J'ai plus l'impression que toutes les fois où on a fait des tâches en public, ça nous posait problème.
02:06 Je sais pas vous, moi, quand je fais des tâches chez moi, je me sens pas honteuse.
02:09 Donc le phénomène, c'est véritablement les autres.
02:11 Hygiénique vient en plus de ça ramener la notion d'hygiène, la notion de saleté.
02:15 Moi, quand je parle d'hygiène et de protection potentiellement hygiénique,
02:18 j'ai envie de parler d'éponge, j'ai envie de parler de serpillière,
02:20 de choses qui sont là pour protéger de la saleté, pour nettoyer de la saleté.
02:23 "Perde sa virginité".
02:25 On entend par là qu'il y a pénétration, qu'il y a eu perforation presque,
02:30 alors qu'une sexualité peut commencer bien avant ça.
02:32 Moi, j'ai eu l'impression de "perdre ma virginité" bien avant le fait d'avoir des rapports avec pénétration.
02:37 Et moi, ce qui m'embête un petit peu en plus de ça,
02:39 c'est que "perdre sa virginité" quand je sais pas, à 16-17 ans,
02:42 c'est comme si en fait on mettait un pied dans la sexualité
02:44 et qu'on était déjà en train de perdre quelque chose.
02:46 C'est comme si c'était presque une monnaie.
02:48 C'est ok pour faire partie de cet espace-là
02:50 et faire partie de cette grande catégorie des personnes qui sont sexuelles maintenant,
02:54 mais il y a un prix à payer et le prix à payer, c'est que tu perds quelque chose.
02:57 Toi, tu perds quelque chose pour la donner à quelqu'un
02:59 et la personne en plus de ça, en face, est vachement flattée que tu lui aies offert ta virginité.
03:04 Alors en fait, tu perds rien du tout.
03:05 Il n'y a pas de marchandise qui se passe.
03:07 La sexualité, c'est vraiment un moment, un espace-temps qu'on décide de partager.
03:11 Donc quitte de juste faire du sexe, kiffer, jouir, orgasmer,
03:15 échanger des fluides, je ne sais pas.
03:16 Genre, kiffer quoi.
03:18 [BIP]