Cécile Duflot, directrice de l'ONG d'OXFAM France, était l'invitée de BFMTV pour évoquer la question des salaires des grands patrons et des écarts salariaux.
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00:00 Bonsoir Cécile Duflo, merci d'être avec nous, directrice de l'ONG Oxfam,
00:03 ancienne ministre évidemment aux Oxfam France,
00:06 ONG qui a dévoilé aujourd'hui sa dernière enquête sur l'écart
00:09 entre le salaire des grands patrons et celui de leurs salariés,
00:11 écart qui est en train d'exploser, on va en parler dans le détail dans un instant,
00:14 mais juste avant, Emmanuel Macron est donc d'accord avec vous,
00:18 les grands patrons sont des gens déconnectés, c'est le terme qu'il emploie,
00:22 il n'y a plus de débat là-dessus ?
00:24 En tout cas, je pense que c'est une question qui est très largement partagée.
00:27 Le chiffre qu'on a sorti sur le PDG de Stellantis,
00:30 c'est qu'il gagne le salaire moyen de ses propres employés,
00:33 le salaire moyen, pas le salaire des moins bien payés,
00:37 en 3h27, en Paris-Marseille.
00:40 Ça ne marche pas, on a appris…
00:41 Il gagne en 3h27 le salaire moyen annuel de ses employés.
00:44 Exactement.
00:45 Et ce qu'il faut comprendre aussi, c'est que c'est une évolution récente.
00:49 Dans les années 80, l'écart, qui d'ailleurs faisait déjà beaucoup débat,
00:53 c'était de 1 à 40.
00:54 Jacques Calvet, sa feuille d'impôt avait été révélée dans le Canard Enchaîné,
00:57 qui était l'ancien patron de Peugeot.
00:58 L'ancien patron de Peugeot, exactement, ça avait fait un gros scandale.
01:01 L'écart, c'était de 1 à 40.
01:03 Et ils n'étaient pas sur la paille, les patrons des années 80.
01:06 Donc, on voit bien que là, les proportions ont énormément augmenté.
01:09 Et sur ces 10 dernières années, c'est passé de 64 à 97.
01:13 Donc, effectivement, on atteint des proportions qui ne sont plus acceptables.
01:16 On va regarder le trio de tête de votre classement.
01:20 Vous avez pris les 100 plus grandes entreprises françaises.
01:22 C'est ça.
01:23 Et le trio de tête, on l'a.
01:25 D'abord, le patron de, tout en haut, numéro un, le patron de Téléperformance,
01:30 l'Ecole Center, qui gagne 1 484 fois le salaire moyen de ses employés.
01:35 Pour Stellantis, Carlos Tavares Stellantis, c'est Peugeot, Citroën, Fiat, etc.
01:39 C'est 1 139 fois.
01:40 Et le patron d'Assos Systèmes, Bernard Charles, c'est 385 fois.
01:43 Si on prend les deux premiers,
01:45 ils ont énormément, peut-être la majorité de leurs employés à l'étranger.
01:48 Donc, qu'est-ce que ça nous dit du rapport à ce qui se passe en France ?
01:51 Justement, vous notez un point important.
01:53 On ne peut pas le savoir parce qu'il n'y a pas de transparence.
01:56 On avait demandé qu'il y ait cette transparence qui soit instaurée
01:59 dans la loi Pacte sur les écarts de salaire en France par cartil.
02:02 Les 25 % les moins payés et 25 % suivant, etc.
02:06 Pour que justement, on sache et qu'on sache aussi pays par pays.
02:09 De toute façon, nous, ce qu'on défend, c'est que cette logique de s'appuyer
02:13 sur des très bas salaires à l'étranger, ça ne fonctionne pas non plus.
02:16 Mais il y a quand même beaucoup de ces salariés qui sont des salariés,
02:19 pas seulement pour Téléperformance, en France,
02:21 mais pour toutes ces très grandes entreprises.
02:24 Donc, la question, elle est assez centrale parce qu'elle fait aussi
02:28 pression sur les petites entreprises.
02:29 Ce qu'il faut comprendre, c'est que par voie de conséquence,
02:33 il y a une pression qui se fait sur les sous-traitants,
02:35 notamment sur les sous-traitants de l'automobile, où là, pour le coup,
02:37 il y a une compression des salaires qui est très forte.
02:40 Donc, ce système, il dysfonctionne et il n'arrive pas à se réguler.
02:43 Et c'est pour ça que nous, on défend un écart qui soit de 1 à 20
02:46 entre le salaire médian, même pas entre le plus bas salaire.
02:49 Il faut savoir que cette échelle de 1 à 20,
02:51 les banquiers du 19e siècle, les banquiers très libéraux,
02:54 pensaient que c'était l'échelle optimum.
02:55 Oui, une question quand même.
02:57 D'abord, les patrons ont des rémunérations qui varient
02:59 parce que le patron de Stellantis, là, il a eu une augmentation.
03:01 Son salaire avait baissé en 2021.
03:03 Donc, en réalité, si on regarde sur le long terme,
03:05 ça fluctue aussi les salaires des patrons.
03:06 Quand ça baisse chez lui, c'est 30 millions.
03:07 C'est juste un petit préalable, c'est du flot,
03:09 pour remettre les choses en perspective.
03:10 Les actionnaires décident, mais parfois aussi,
03:12 les salaires des patrons baissent.
03:14 Mais une fois qu'on a fait ce constat, parce qu'on entend ce que vous dites,
03:18 il y a effectivement grand écart entre les salaires.
03:20 Comment on fait ? On est dans une économie concurrentielle, libérale,
03:22 avec des actionnaires qui, par définition,
03:24 sont souverains sur la rémunération qu'ils accordent à leurs patrons.
03:28 Emmanuel Macron l'a dit,
03:29 l'État ne peut pas administrer le salaire des patrons.
03:31 Vous dites, il faut faire une échelle de 1 à 20.
03:33 Comment vous faites ? Vous contraignez les entreprises privées en disant,
03:36 vous administrez l'économie ?
03:37 Enfin, comment on fait ?
03:37 Mais on administre l'économie.
03:39 Les salaires en France, ils sont gérés par des accords de branche,
03:41 dans l'immense majorité des entreprises.
03:42 Mais là, c'est des multinationales.
03:43 Il y a un salaire minimum. D'accord ?
03:45 Oui, mais c'est des gens qui sont payés en France.
03:46 Là, on parle d'entreprises qui payent leurs salariés en France.
03:49 Ils sont régi par le droit de français.
03:51 S'ils sont licenciés, ils pourront aller devant les prud'hommes françaises.
03:54 Donc, on a été capable, avec le temps,
03:58 d'instaurer des règles, notamment un salaire minimum.
04:01 Et je peux vous dire que le débat autour du salaire minimum,
04:03 c'est intéressant de s'en souvenir,
04:05 il était aussi tendu que celui qu'on pourrait imaginer sur le salaire maximum,
04:08 en disant, ce n'est pas possible.
04:09 Ça ne peut pas être le même salaire minimum dans toutes les entreprises.
04:12 Il faut regarder le débat autour du salaire minimum.
04:14 Ça doit être en fonction de la productivité, etc.
04:16 Donc, si on peut le faire, d'ailleurs, Dominique Pottier a déposé
04:20 une proposition de loi, très clairement, qui d'ailleurs est plus restrictive
04:24 que notre recommandation, sur le fait de plafonner,
04:29 entreprise par entreprise, dans le cadre d'accords d'entreprise,
04:32 l'écart de salaire possible entre le plus bas et le plus haut.
04:35 Mais ça sera contourné par la part du variable.
04:37 On a un peu sur les bas salaires, la participation, l'intégration,
04:39 mais il y en aura évidemment énormément sur les hauts salaires.
04:41 Alors, on peut intégrer le variable, parce que le variable,
04:45 il répond aussi à des questions qui sont des questions légales.
04:49 Mais ce qui est intéressant, et ça, ça s'appuie sur un autre rapport
04:52 que nous avons fait précédemment, c'est que la part de salaire variable
04:55 de ces grands patrons, de plus en plus, elle est très liée à du court terme.
04:59 Elle est liée à la performance financière des entreprises
05:02 et donc aux intérêts des actionnaires.
05:03 Ce qui est un problème pour les entreprises elles-mêmes,
05:06 parce que ça pousse les dirigeants à avoir une logique extrêmement court-termiste.
05:10 Pas forcément, et pour le coup, ce n'est pas Oxfam qui le dit,
05:13 c'est aussi des dirigeants d'entreprises qui disent qu'ils sont sous la pression
05:15 de résultats d'ultra court terme, alors que parfois, si vous devez investir,
05:19 vous devez le faire sur plusieurs années.
05:20 Et puis, parallèlement, ces entreprises vont faire face à un défi
05:24 qui est celui de la transition écologique.
05:25 Il faut qu'elles arrivent à le financer, qu'elles arrivent à avoir cette stratégie.
05:28 Et elles iront voir ailleurs, si vous administrez les choses de cette manière-là.
05:31 Elles iront placer leur siège ailleurs, éventuellement leur fusil ailleurs.
05:35 Il y a beaucoup de ces entreprises, des entreprises du BTP,
05:38 des entreprises de l'eau, leur activité, elle est sur le territoire français.
05:43 Il y a beaucoup de ces entreprises.
05:44 Le patron a le siège, vous allez les placer ailleurs.
05:46 Oui, mais alors, ça, c'est un autre sujet.
05:47 Oui, bien sûr, vous avez raison.
05:48 Ça s'appelle notamment l'évasion fiscale.
05:50 Quand vous produisez des sous...
05:52 Ou de l'optimisation.
05:52 Quand vous produisez des sous...
05:54 L'université nationale peut décider de s'installer dans un pays qui lui est plus avantageux.
05:56 Exactement.
05:57 Et vous n'y pouvez rien.
05:58 C'est pour ça que...
05:58 Alors, d'abord...
05:59 On est dans un système libéral.
06:00 Alors, je veux revenir.
06:03 Depuis un certain temps, a été mise en place une imposition minimum pays par pays.
06:07 Ça n'était pas le cas.
06:08 Donc, on considère que c'est un premier pas.
06:11 Et quand on portait ce débat sur l'imposition minimum pays par pays il y a dix ans,
06:16 on nous répondait exactement la même chose que ce que vous dites.
06:18 Impossible.
06:19 Comment vous imaginez qu'on puisse mettre un taux d'impôt minimum ?
06:22 Il y avait des pays, les purs paradis fiscaux, c'était zéro.
06:24 Maintenant, c'est le cas.
06:25 Donc, le tuyau existe.
06:27 Ensuite, évidemment, il faut que ce taux remonte pour que ce soit pas un plancher pour tout, partout.
06:32 Mais il y a d'abord un chemin à faire en Europe.
06:34 Le vrai sujet aujourd'hui, c'est qu'il y a des pays,
06:36 les Pays-Bas, l'Irlande, qui agissent, le Luxembourg, quasiment comme des paradis fiscaux
06:40 et qui poussent effectivement à ces stratégies-là.
06:43 Mais on peut très bien aller vers le chemin de l'harmonisation fiscale.
06:45 Ce n'est pas une fatalité du tout cette situation.
06:47 On a avancé sur certains sujets.
06:49 Vous savez, les résidents citoyens américains, pardon, les citoyens américains,
06:53 même s'ils ne sont pas résidents ou qu'ils habitent dans le monde,
06:56 ils sont preneuves de leurs impôts aux États-Unis.
06:58 Donc, les règles telles qu'elles existent aujourd'hui, on peut aussi les faire évoluer.
07:02 Il y a plein de règles qu'on connaît qui n'existaient pas.
07:04 Mais justement, c'est celui du flot.
07:05 Vous parlez d'un cadre européen que beaucoup de gens appellent de leur vœu,
07:09 et ce depuis très longtemps.
07:10 Cette nécessité justement d'avoir une forme d'uniformisation de l'impôt.
07:14 Les Irlandais sont absolument contre.
07:16 Vous évoquiez les Pays-Bas.
07:18 Ça freine des cas de fer.
07:19 On voit bien qu'il n'y a pas de volonté politique, premièrement, sur cette question.
07:22 Deuxièmement, qu'est-ce que vous répondez aussi aux gens qui disent
07:25 « Mais pour pouvoir attirer les meilleures stratégies pour ces entreprises
07:29 qui sont des entreprises internationales,
07:31 on est sur un marché concurrentiel mondial.
07:33 Et on ne les attirera pas avec des cacahuètes. »
07:36 Surtout que l'écart de salaire, notamment aux États-Unis,
07:38 il est quatre fois plus important que celui qu'il y a en France.
07:41 C'est à fois 400 par rapport au salaire moyen.
07:43 Deux réponses.
07:43 Premièrement, ce qui se passe aux États-Unis.
07:45 Il faut quand même se rendre compte qu'aux États-Unis,
07:46 on est dans un pays, un des pays les plus riches et plus puissants du monde,
07:50 où l'espérance de vie s'effondre.
07:51 Une baisse effrayante, c'est le terme des démographes, de l'espérance de vie.
07:55 Pour des raisons qui sont liées à un mal-être social considérable.
08:02 Et puis il y a une pandémie de drogue.
08:05 Mais une société où vous avez une pandémie, comme vous dites, de suicides,
08:11 d'overdoses, la limite entre l'overdose et le suicide,
08:15 de mort par arme à feu.
08:18 Tout n'est pas lié, pardon, Cécile Duflo, à l'écart des salaires
08:22 entre les patrons et les salariés.
08:23 Je peux terminer ?
08:24 C'est une société extrêmement inégalitaire, extrêmement violente,
08:27 qui crée une pression sur la société.
08:29 Alors, si vous ne me croyez pas moi,
08:30 je vous conseille de lire un épidémiologiste qui s'appelle Robert Wilkinson,
08:34 qui a écrit un livre pour montrer que les sociétés les plus inégalitaires
08:37 sont celles dans lesquelles la santé publique est le plus dégradée.
08:40 Y compris chez les riches, chez les pauvres, tout le monde,
08:43 mais y compris chez les riches.
08:44 Parce que sans doute, il y a une situation de stress, de tension.
08:47 Donc oui, les États-Unis, une société très inégalitaire,
08:49 avec des conséquences sur l'état de la société elle-même.
08:52 Mais pardon, sur l'argument de "il faut attirer les meilleurs patrons,
08:55 donc il faut les payer mieux que les meilleurs salariés".
08:56 Je vais vous répondre sur les Pays-Bas et je vous réponds sur les meilleurs patrons.
08:59 Sur les Pays-Bas, Oxfam, qui est une organisation internationale,
09:02 existe aussi aux Pays-Bas et il y a beaucoup de gens,
09:04 et aux Pays-Bas et en Irlande, qui disent la même chose.
09:06 Qui disent que, de leur point de vue,
09:08 ce n'est pas supportable qu'on maintienne ce système.
09:10 Mais ils ne sont pas au pouvoir.
09:11 Mais ils ne sont pas encore au pouvoir.
09:13 Et d'ailleurs, on n'a pas vocation à l'être quand on est Oxfam.
09:15 Mais les choses bougent.
09:16 Comme je vous dis, le débat sur l'imposition minimale pays par pays,
09:19 ça semblait totalement utopiste il y a dix ans.
09:21 Les choses sont en train de changer parce que,
09:23 y compris le FMI et la Banque mondiale considèrent
09:26 que les inégalités sont sans doute un des périls les plus importants.
09:28 Le marché mondial, je vous réponds à votre dernière question,
09:31 le marché mondial des dirigeants,
09:32 en fait, il y a déjà un marché français.
09:34 Quand on a plafonné la rémunération des dirigeants d'entreprise
09:36 à environ 500 000 euros, on a dit "Ah ouais, mais là, foutu !
09:40 Les entreprises publiques, foutu, on ne va plus pouvoir avoir les bons".
09:43 Eh bien, manque de bol, il y a des très bons,
09:45 y compris des grands patrons qui ont quitté,
09:47 je pense au patron de la Banque postale, par exemple,
09:50 qui a quitté la Société générale,
09:51 qui a amputé son salaire de manière considérable
09:54 pour diriger la Banque postale.
09:55 Je pense au patron d'EDF qui a quitté une entreprise industrielle
09:58 et qui a magistralement amputé sa rémunération.
10:01 Pourquoi ? Parce que les grands patrons,
10:03 ce qu'ils aiment surtout, c'est leur qualité
10:04 et certains ont effectivement du talent, c'est patronner.
10:07 Et donc, c'est surtout ça qui les intéresse.
10:09 En revanche, c'est vrai qu'ils se comparent beaucoup
10:11 avec cette question de l'inflation des rémunérations.
10:14 Mais je suis absolument certaine
10:16 qu'il y a des gens qui ont la passion
10:18 de la direction d'entreprise et de la stratégie
10:19 et qui n'ont pas besoin de gagner 30 millions d'euros par an.
10:22 Cécile Duflo, il y a deux aspects dans ce que vous dites.
10:24 Il y a l'explosion de la rémunération des patrons
10:26 et dans le même temps, les revenus des salariés
10:27 qui n'augmentent pas assez vite.
10:28 Et là aussi, Emmanuel Macron est d'accord.
10:33 Il faut pouvoir gagner plus par la rémunération des salariés
10:35 et par le travail.
10:36 Et donc, il y a une dynamique des salaires à recréer
10:38 dans notre pays et des carrières.
10:40 Ça, ce n'est pas le gouvernement qui fera ça.
10:41 C'est pour ça qu'on a engagé cette négociation
10:43 et qu'on va devoir maintenant gérer au niveau interprofessionnel
10:45 et branche par branche.
10:46 Donc maintenant, il faut qu'on arrive à recréer
10:48 une dynamique salariale qui peut exister
10:49 parce qu'on a certains de nos voisins qui l'ont
10:51 et qui arrivent à mieux payer leurs travailleurs.
10:53 Pauline, question qui concerne beaucoup de ceux
10:55 qui nous regardent ce soir.
10:55 Est-ce que les salaires ont augmenté plus vite
10:57 ou moins vite que l'inflation ces derniers temps ?
10:59 Ils ont augmenté très clairement moins vite que l'inflation.
11:01 Effectivement, c'est pour ça qu'on retrouve d'ailleurs
11:03 en marge des cortèges sur la réforme des retraites,
11:05 ces revendications sur des hausses de salaires.
11:07 On les retrouve partout.
11:08 Effectivement, ces salaires, ils n'ont pas augmenté
11:10 au rythme de l'inflation.
11:11 On va regarder les chiffres pour 2022.
11:13 C'est ceux qui ont été consolidés par le ministère du Travail.
11:15 Regardez, vous voyez qu'en moyenne,
11:16 les salaires ont augmenté de 3,8 %,
11:19 donc on est très en dessous de l'inflation qui était de 6 %
11:21 au 31 décembre 2022.
11:24 Alors, les seuls qui ont augmenté un tout petit peu
11:25 au-dessus de l'inflation, c'est le SMIC,
11:27 puisqu'il est indexé justement sur l'inflation.
11:29 Pour le reste, les ouvriers et les employés, c'est 4,5 %
11:32 et les cadres, 2,8 %.
11:34 Et puis, il y a une note un tout petit peu plus optimiste
11:36 du côté de la Banque de France cette semaine
11:38 qui indique que pour 2023, les hausses de salaires négociées
11:41 dans les entreprises sont en moyenne de 4,4 %,
11:44 mais là aussi, on est en dessous du SMIC.
11:46 Alors, à qui la faute ?
11:48 En dessous de l'inflation.
11:50 À qui la faute ?
11:50 Qu'est-ce qu'il faudrait faire pour résoudre tout ça ?
11:52 Alors, on a entendu Emmanuel Macron, il dit
11:55 "En fait, l'État, il ne peut rien faire, finalement,
11:57 c'est aux employeurs et aux syndicats de négocier entre eux".
12:01 Alors, ce qu'on voit, c'est qu'en Europe,
12:02 tout le monde se pose la même question.
12:04 Et en Allemagne, il y a eu un combat assez long
12:06 ces dernières semaines du côté de l'Allemagne
12:09 avec des manifestations, des grèves sans précédent.
12:12 Et finalement, ça a mené à une augmentation de 5,5 %
12:16 pour les fonctionnaires, là, c'est les salariés du secteur public.
12:19 340 euros en moyenne de plus sur la fiche de paie,
12:22 c'est quand même conséquent, c'est d'ailleurs sans précédent en Allemagne.
12:25 Donc voilà, là, ça a marché, ça a fonctionné,
12:27 mais ça a été un combat effectivement très rude,
12:29 des négociations très rudes entre syndicats et l'État.
12:31 C'est le secteur public.
12:32 Mais pardon ?
12:33 C'est le secteur public en Allemagne.
12:34 Absolument.
12:35 Mais c'est celui de Flo ?
12:36 Pardon, mais en juin, il y a eu des grèves massives en Allemagne,
12:38 dans le milieu de l'industrie,
12:39 qui ont conduit en fait à des hausses de salaire de 6, 7, 8 %, enfin voilà, c'est pas...
12:44 Emmanuel Macron vous dit ce soir, comme pour les patrons,
12:46 "Bah c'est pas nous, c'est pas l'État,
12:48 ce sont les entreprises qui décident des salaires".
12:50 Alors, c'est vrai, mais ce qui décide beaucoup des salaires,
12:54 c'est les accords de branche,
12:55 et notamment les échelons dans ces accords de branche.
12:58 Et le gouvernement peut contraindre à la négociation, à la remise...
13:03 Il y a des accords de branche, celui des hôtesses d'accueil par exemple,
13:07 et ils n'ont pas été rediscutés depuis plus de cinq ans,
13:10 et tous les échelons, il y en a cinq, ils sont tous au niveau du SMIC,
13:13 parce que le SMIC a monté et aucun n'a augmenté au-dessus.
13:17 Et ça, c'est tout à fait possible, d'obliger à la renégociation.
13:21 Ensuite, ce qu'il faut comprendre, c'est que dans le même rapport que nous avons publié,
13:25 on a montré qu'en gros, la valeur ajoutée des 100 plus grandes entreprises,
13:29 elle a doublé en 10 ans.
13:30 Mais la part consacrée au salaire est passée de 61 % à 51 %.
13:35 C'est-à-dire que ça explique donc,
13:37 effectivement, qu'il n'y a pas eu une hausse des salaires,
13:39 qui accompagne la hausse de la richesse de ces entreprises.
13:43 C'est aussi parce qu'on a gagné en capital, je pense, en robotisation, en machines,
13:46 il y a moins de salaire à payer, c'est aussi pour ça.
13:48 On continue de travailler sur le sujet,
13:49 parce qu'on est en parallèle avec des records de dividendes.
13:52 Donc la question de la part travail et la part capital,
13:54 est-ce que c'est de la capitalisation ou est-ce que c'est de la distribution ?
13:57 Il y aura un autre rapport d'Oxfam.
13:58 Exactement. On va continuer, parce qu'il faut aller au fond du sujet.
14:00 Mais on a quand même...
14:02 Et ça fait le lien avec la rémunération.
14:05 On s'est rendu compte qu'il y a vraiment cette espèce d'accord tacite
14:08 entre les plus hausses rémunérations d'une entreprise
14:10 et la distribution massive de dividendes,
14:12 où les actionnaires et les dirigeants ont intérêt lié,
14:15 et que c'est pas...
14:17 C'est évidemment au détriment des salariés,
14:19 mais parfois aussi au détriment de l'avenir de ces entreprises.
14:21 Pardon, un mot, les retraites chapeau, c'est fini ?
14:24 Ça a vraiment été supprimé ?
14:25 Il y a plein de...
14:27 Il faut expliquer le principe.
14:28 Oui, c'est-à-dire qu'en gros, un dirigeant qui partait jusqu'à la fin de sa vie,
14:32 il touchait à l'argent en complément de sa retraite normale,
14:34 et donc il pesait sur l'entreprise,
14:36 même 30 ans...
14:37 C'est la voix qu'il a dégirée, j'ai vu que vous lui versez à Vignon.
14:38 Exactement.
14:39 Et l'autre chose, c'est qu'il y a tout un pas de dispositifs,
14:42 que ce soit les dispositifs de parachute versés au patron,
14:46 même quand ils sont débarqués.
14:48 Enfin...
14:48 Et défaillants.
14:49 Et voilà.
14:50 Il y a aussi des comités de rémunération,
14:52 où finalement les membres des comités de rémunération
14:55 décident de la rémunération de quelqu'un
14:57 qui va être membre de son propre comité de rémunération.
14:59 Donc quelque chose parfois d'assez incestueux.
15:01 Donc ce qu'il faut, c'est remettre un peu de modération.
15:04 Et de bonheur.
15:05 Juste pour un peu de modération.
15:06 Monsieur Picot, hier mercredi,
15:09 Elisabeth Borne présentait sa feuille de route de ses 100 jours,
15:12 et elle parlait d'un dispositif de partage de la valeur
15:16 qui a été annoncé.
15:18 Elle parlait d'une loi qui devrait être débattue au Parlement avant l'été.
15:21 Est-ce que ça pourrait être un cas ?
15:22 Qu'est-ce que vous attendez de ce projet de loi éventuel
15:26 sur le partage de la valeur ?
15:27 Justement, on pense vraiment qu'il y a plusieurs choses.
15:31 D'abord, de ne pas distribuer l'intégralité du bénéfice des entreprises.
15:34 D'en garder une part importante,
15:36 soit en direction des salariés, mais surtout pour investir,
15:39 et en particulier dans la transition écologique.
15:40 Il faut savoir qu'avant le Covid,
15:42 il y a des entreprises qui ont été bénéficiaires pendant des années
15:44 et qui avaient tellement distribué
15:46 qu'elles n'avaient même pas un euro de réserve
15:48 pour pouvoir faire face à la crise.
15:49 Alors en France, les entreprises ont été beaucoup aidées,
15:51 mais aux États-Unis,
15:52 les entreprises de la restauration, par exemple,
15:54 elles avaient tellement...
15:55 En fait, elles avaient gagné beaucoup d'argent,
15:56 mais elles avaient tout cramé, tout reversé à leurs actionnaires.
15:59 Du coup, elles ne pouvaient même pas faire face à la situation.
16:01 Donc, cette première règle-là,
16:03 qu'est-ce qu'on fait des bénéfices ?
16:05 Est-ce que c'est possible et légitime
16:07 qu'une entreprise qui ne fait pas de bénéfice
16:09 distribue quand même des dividendes ?
16:11 Il y a quelque chose en fragilisant ses propres réserves.
16:13 C'est-à-dire qu'il y a l'intérêt de l'entreprise et de son avenir.
16:15 Ensuite, il y a le partage de la valeur
16:18 entre les salariés et au sein des salariés.
16:21 Et je pense qu'une des choses qui pourrait être vraiment intéressante,
16:23 pour le coup, ça ne coûte aucun argent,
16:25 et c'est très facile,
16:26 c'est de justement faire la transparence sur ces écarts de salaire.
16:29 Comme ça, on saurait vraiment,
16:30 est-ce que tout le monde en a profité ?
16:32 Là, vous allez vous heurter à un tabou français,
16:33 parce que les gens en France n'aiment pas du tout
16:35 qu'on sache combien ils gagnent et combien leur bureau gagne.
16:38 Non, mais là, c'est un tabou.
16:40 Mais ce n'est pas un gros tabou.
16:41 On parle de savoir les 25%, les moins payés,
16:44 combien ils gagnent en moyenne.
16:45 On ne saura pas qu'ils gagnent quoi.
16:46 Entre 25 et 50, entre 50 et 75.
16:48 Je vous assure, c'est très globalisable.
16:50 Mais justement, vous, vous pourriez briser ce tabou et dire
16:52 combien vous, vous gagnez à Oxfam ?
16:53 Quel est l'écart de salaire à Oxfam ?
16:55 Vous cliquez sur www.oxfamfrance.org et c'est publié.
16:58 Quel est l'écart justement de salaire à Oxfam ?
17:00 3,4 entre le salarié, enfin,
17:03 la salariée la moins payée et la salariée la plus payée.
17:05 En France ou dans l'ensemble du monde ?
17:07 Ah, en France.
17:07 Est-ce que c'est vous la salariée la plus payée ?
17:09 Oui, c'est moi la salariée la plus payée.
17:10 Vous êtes la patronne, donc ?
17:10 Voilà.
17:11 Et je gagne donc 3,4 fois plus.
17:13 Donc, on est très, très loin de 1,20 entre le salaire médian.
17:16 Et c'est normal, on est dans une ONG,
17:18 on ne dit pas que tout le monde doit faire comme nous.
17:20 Et je gagne moins quand j'étais députée, monsieur Barbier,
17:22 et je trouve ça normal.
17:23 C'est un choix de travailler dans une organisation engagée.
17:27 Mais nous pensons vraiment que de la modération,
17:29 d'ailleurs, en fait, il n'y a pas que nous qui disons ça.
17:33 Il y a maintenant une organisation d'entreprise
17:36 et de chef d'entreprise qui, à côté du Medef,
17:39 dit en fait, on peut avoir des règles un peu différentes dans les entreprises.
17:42 Et notamment…
17:43 Pardon, Cécile Huflon, mais quand on prenait les exemples de l'Allemagne
17:45 tout à l'heure avec des manifestations, etc., qui ont abouti,
17:47 est-ce que vous dites aux salariés,
17:49 prenez votre destin en main de ce point de vue-là au niveau des salaires et allez-y ?
17:52 Ils n'ont pas besoin que je leur dise.
17:54 Je pense que l'ensemble des organisations syndicales l'a bien montré.
17:57 Et d'une certaine manière, ce qu'on a vu au travers de la mobilisation sur les retraites,
18:01 c'est aussi ça.
18:02 C'est une demande de justice, en fait.
18:05 L'INAO, ça marche pas mal dans les entreprises.
18:07 Ah mais il y a des entreprises où ça marche très bien
18:09 et puis il y a des entreprises où le dialogue social se passe bien.
18:11 Puis je le dis aussi, pourquoi il faut ces règles,
18:14 notamment sur la distribution ?
18:15 Parce que moi, j'ai eu des échanges avec des dirigeants d'entreprises
18:17 qui disent "mais on n'a pas le choix".
18:18 En fait, on a vraiment le pistolet sur la tempe de la part de notre conseil d'administration,
18:23 y compris sur des stratégies moyen-long terme dans des entreprises,
18:26 notamment industrielles, qui ont des enjeux de transition considérables.
18:30 Vous parliez des retraites à l'instant, vous irez défiler lundi ?
18:32 Oui.
18:32 Premier mai ?
18:33 À Dax.
18:34 À Dax.
18:35 Parce que votre ONG s'est mobilisée aussi
18:38 et s'est prononcée contre la réforme des retraites.
18:41 Oui, comme Greenpeace, comme les Amis de la Terre.
18:43 Je crois que c'est la première fois dans l'histoire que des organisations...
18:46 Alors nous, on a une double approche de la justice sociale et des questions climatiques,
18:50 mais des organisations plus portées sur ces questions de transition écologique
18:54 se sont engagées dans ces mobilisations,
18:56 justement parce qu'il nous semble que les raisons qui ont poussé à prendre cette décision
19:01 sont des raisons extrêmement court-termistes,
19:03 qui justement ne prennent pas en compte la nécessité
19:06 que si on veut faire face aux défis considérables, quels défis climatiques...
19:09 Vous en avez parlé, je vous ai entendu parler de ce qui se passe
19:12 dans les Pyrénées-Orientales.
19:13 Pour une écologiste, pour une vieille écologiste comme moi,
19:16 savoir qu'il y a des éleveurs aujourd'hui
19:18 qui ne savent pas ce qu'ils vont pouvoir donner à boire à leur bête,
19:21 ça me brise le cœur.
19:24 Et donc, je pense que si on veut gagner ce combat du climat,
19:27 il faut aussi qu'il s'accompagne de justice et de lutte contre les inégalités.
19:31 C'est nécessaire, c'est indispensable.
19:33 Et d'ailleurs, le GIEC, dans son dernier rapport, le dit très clairement.
19:36 Et donc, cette question des retraites, elle est totalement liée à la question de l'évolution
19:40 et du changement de modèle qu'il faut qu'on mette en œuvre.
19:42 Soit on le fera de façon volontaire, soit on le fera sous la contrainte.
19:45 Et donc, moi, je demande et j'invite le président de la République
19:48 à faire un pas plus loin.
19:49 Il est choqué, il était déjà choqué l'année dernière.
19:51 Il est président de la République, qui mette ça à l'agenda.
19:54 Vous savez ce qu'on dit, ce que disent les opposants à la réforme
19:57 et les opposants à Emmanuel Macron, c'est qu'il y a un problème particulier,
20:00 pas uniquement avec la réforme, il y a un problème particulier avec ce président-là
20:03 et avec la manière dont les choses ont été conduites.
20:05 Est-ce que vous dites la même chose ?
20:07 Moi, je connais bien mon pays, que j'aime beaucoup.
20:10 Et je sais que quand vous avez une intersyndicale qui va de solidaire
20:14 jusqu'à la CFTC et qui tient de façon extrêmement solide pendant trois mois,
20:18 quand vous avez des millions de personnes dans la rue,
20:20 quand vous avez des sondages qui sont extrêmement cohérents,
20:24 quand vous avez comme héros de la révolution à l'Assemblée nationale
20:29 Charles de Courson et Bertrand Pencher, il faut débrancher.
20:32 Mais si, je le dis avec beaucoup d'estime,
20:34 je le dis avec beaucoup d'estime pour Charles de Courson.
20:36 On a des désaccords, il a été extrêmement courageux sur la déchéance de nationalité.
20:40 Ça fait partie des gens qui ont une estime de ce qu'est la paix civile
20:44 et de ce qu'est un pays.
20:45 Et donc, en fait, on s'arrête dans ce genre de moment.
20:47 Et vous savez, j'ai été membre d'un gouvernement
20:49 qui a suspendu les cotes à exploits lourds.
20:51 J'étais écologiste et j'ai soutenu cette décision
20:54 parce que la situation était trop tendue,
20:55 parce qu'il y avait un jeune homme qui avait perdu une main,
20:57 parce qu'il fallait mettre du calme.
20:59 Et donc, j'espère que quelqu'un ou lui arrivera à comprendre
21:02 qu'à un moment, en fait, on a fait un pas de trop
21:04 et que la paix civile, c'est prioritaire et qu'il n'y a pas de déshonneur.
21:07 Il y a un problème particulier avec Emmanuel Macron.
21:09 Vous le connaissez en plus, vous l'avez fréquenté
21:11 comme secrétaire générale à la Tour Elysée.
21:12 Techniquement, on a un problème particulier collectivement
21:14 avec le président de la République et c'est lui le président de la République.
21:17 Après, je crois qu'il y a une espèce parfois de biais
21:23 chez certains responsables politiques de croire que le virilisme
21:27 de la posture présidentielle et de résister face à tout le monde,
21:31 c'est nécessaire.
21:32 C'est ce que vous voyez là.
21:33 Mais en fait, avoir de la souplesse, avoir une capacité d'écoute,
21:37 y compris reconnaître qu'on a fait une erreur.
21:38 Vous savez, moi, je me souviens de Barack Obama disant
21:41 "Face camera, I screwed up".
21:43 En français, j'ai foiré.
21:45 Et tout le monde avait trouvé ça grandiose.
21:47 C'est possible.
21:49 Et vraiment, je le dis avec une immense sincérité.
21:51 Moi, je lui dirais merci parce que je pense que ce pays a besoin
21:54 qu'on entende ce qui s'est dit, que quand on demande à des salariés
21:57 d'Orano qui sont à la retraite de revenir travailler
22:00 ou de se voir prélever de l'argent sur leur retraite,
22:04 c'est pas possible, c'est pas professionnel.
22:06 Ça n'existe pas de faire ça.
22:08 À vous entendre, on se dit que vous êtes de retour, Cécile Duflo.
22:10 Mais je suis là, je ne suis pas partie.
22:12 Vous voyez bien ce que je veux dire, de retour en politique.
22:14 Mais en fait, vous savez, la politique, ça ne se fait pas.
22:16 On l'a vu d'ailleurs avec les mobilisations syndicales.
22:19 Ça ne se fait pas qu'à l'Assemblée nationale.
22:21 Ça ne se fait pas qu'avec des responsables politiques.
22:23 Ça se fait quand on essaye d'avoir un profond attachement à des valeurs.
22:27 Et moi, je peux être convaincue par des gens qui ne partagent pas mon point de vue initial.
22:31 Je suis tout à fait consciente que ce qu'on demande,
22:35 cet écart de 1 à 20, pour certains, c'est beaucoup trop important
22:38 et qu'ils nous trouvent trop mous, que d'autres vont nous trouver trop radicaux,
22:41 mais qu'on peut discuter et qu'on va faire face, vraiment, je le dis,
22:45 on va faire face à des enjeux d'une violence très grande.
22:47 Et je le dis aussi pour mes amis écologistes.
22:49 On ne pourra pas dire aux gens, vous aviez qu'à nous écouter il y a 20 ans.
22:52 C'est vrai, il aurait fallu écouter les écologistes il y a 20 ans.
22:54 Mais là, maintenant, on va vivre des moments de deuil.
22:56 Moi, je vous l'ai dit, je vais manifester dans les Landes
22:59 parce qu'un bout de ma vie est dans les Landes.
23:01 Et l'été dernier, j'ai beau savoir que c'était probablement ce qui allait nous arriver,
23:05 voir tomber dans mon jardin des morceaux de cendres de la forêt,
23:09 j'avais le cœur en miettes.
23:11 Quand vous avez des gendarmes qui viennent devant chez vous
23:13 et qui vous disent "vous avez 20 minutes pour partir",
23:15 vous avez beau savoir pourquoi, comment,
23:17 donc on va devoir tous ensemble faire face à ça.
23:19 Et il n'y aura pas besoin de quelques-uns d'eux.
23:21 Et on n'aura surtout pas besoin d'un président ou d'une présidente de la République,
23:25 lui tout seul qui saura.
23:26 Il faudra se serrer vraiment les coudes.
23:28 Et je pense qu'il faut le faire maintenant.
23:30 Plus tôt on prendra le virage, plus ce sera facile,
23:33 en tout cas moins ce sera difficile.
23:34 Comment vous jugez vos anciens collègues ?
23:36 Comment vous jugez la NUPES aujourd'hui ?
23:38 Et les filles, on les accuse d'être de bordéliser l'Assemblée nationale.
23:41 Comment vous les voyez, vous ?
23:42 Ils sont à la hauteur de l'enjeu.
23:44 Je pense qu'une des difficultés qu'on voit dans cette période,
23:47 c'est que ce qu'a montré ce mouvement pour les retraites,
23:50 il y avait le pari de dire "les retraites ça n'intéresse personne en fait,
23:53 à part ceux qui vont juste partir à la retraite".
23:54 Les jeunes ils n'en ont rien à faire.
23:56 Les jeunes pourquoi ils se sont mobilisés ?
23:57 Ils le disaient, parce que ce n'est pas juste
23:59 de faire travailler les ébouards deux ans de plus.
24:01 Pas pour eux, parce que quand on a 20 ans aujourd'hui...
24:04 Oui, mais ce que je veux dire c'est que quand vous avez un mouvement comme ça,
24:06 vous attendez un débouché politique qui incarne cette histoire.
24:09 Et cette histoire, effectivement, je le redis,
24:12 elle va de solidaire jusqu'à la CFTC.
24:14 Et elle se parle.
24:15 Et surtout, elle a donné une leçon politique très forte.
24:17 On n'est pas d'accord sur tout,
24:19 mais on peut se mettre d'accord sur quelque chose,
24:20 se faire confiance et se respecter.
24:22 Et si vous voulez que je vous dise qu'en tant que citoyenne,
24:24 juste électrice, je ne vois pas ça dans le champ politique
24:28 qui est celui qui devrait incarner ce débouché politique.
24:31 Oui, aujourd'hui je ne le vois pas.
24:32 Et donc vous souhaitez vous engager davantage.
24:35 C'est long, il y a encore quatre ans d'ici là.
24:37 Mais est-ce que vous souhaitez vous engager davantage dans ce combat politique,
24:41 y compris s'il est besoin que les écologistes ou que la NUPES
24:44 ait besoin de gens qui ont peut-être conçus mines ailleurs,
24:47 qui ont un peu d'expérience, qui ont aussi fait une autre expérience de la politique ?
24:50 Est-ce que vous pourriez être disponible pour revenir à un moment ou un autre
24:54 pour les aider collectivement ?
24:55 Je ne vous crois pas, je n'ai jamais cru aux personnes magiques, etc.
24:58 Et en plus, j'ai tellement entendu des politiques dire
25:01 "je ne me déroberai pas" et des machins comme ça totalement hypocrite
25:04 que ça me saoule et que ça ne me plairait même pas de faire ça une seconde.
25:07 Par ailleurs, je considère que ce que fait Oxfam aujourd'hui est extrêmement utile.
25:11 Le travail qu'on a fait, ce rapport-là, je le montre parce qu'il est gratuit,
25:14 il est disponible sur notre site Internet.
25:16 Vous pouvez aller le lire, c'est un travail de documentation.
25:19 Et l'idée, c'est que chacun s'empare de ce débat.
25:21 Je pense qu'on construit de cette manière-là.
25:23 Et est-ce que ça m'intéresse de dire comment on pourrait faire...
25:26 - Il faut que vous le leviez un peu, pardon.
25:27 - ...pour que ce pays prenne le virage de la transition.
25:31 Et peut-être, pourquoi la France ?
25:33 Pourquoi la France peut-être avant d'autres ?
25:35 Parce que dans l'histoire, il y a eu des moments,
25:37 parce qu'on a une psychologie particulière, parce qu'on est un peu sûr de nous,
25:40 parce qu'on est un peu fier, où la France a fait des choses avant d'autres pays.
25:43 Et ça a envoyé un message.
25:45 Et donc si on était capable justement de répondre par exemple
25:48 à la condamnation pour une action climatique en disant "Allez, on va y aller".
25:51 Et on ne va pas dire "Ah non, mais attendez, il y a les Chinois, etc."
25:53 On va le faire, on va le faire ensemble.
25:55 Je pense qu'on pourrait aussi trouver une énergie collective
25:57 et quelque chose qui ne soit pas du tout cette espèce de rage,
26:01 de déprime et de tension qu'on sent en ce moment dans notre pays.
26:04 - Peut-être deux listes aux Européennes l'année prochaine ?
26:06 - Mais je vous ai dit, franchement...
26:07 - En parlant de la Ticket avec Philippe Martinez, j'ai lu ça.
26:09 - Oui, mais alors, c'est simple.
26:11 Depuis 2017, à toutes les élections, je suis censée faire un truc.
26:15 Donc j'aimerais bien savoir... - Ça finira par arriver.
26:16 - Pardon ? - Ça finira par arriver.
26:18 - Mais ça, c'est parce que vous êtes...
26:19 Vous savez, le pas d'upisme, c'est la maladie des commentateurs politiques.
26:24 - Bon, merci beaucoup. - En tout cas, moi, ce qui m'intéresse,
26:26 c'est qu'on arrive à faire cet écart de 1-20.
26:27 - Et on en a parlé en tout cas ce soir sur BFM TV de ce dernier rapport d'Oxfam.