Chaque jour, Romain Desarbres et ses invités font un point complet sur l'actualité.
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00:00 EuropeMedie, Romain Desarbres.
00:05 L'intelligence artificielle c'est le thème de notre vendredi thématique.
00:08 On est avec le docteur Laurent Alexandre, médecin expert en intelligence artificielle.
00:14 Bonjour docteur Laurent Alexandre.
00:16 Bonjour.
00:17 Merci beaucoup d'être avec nous.
00:19 Chaque vendredi un thème sur Europe 1.
00:22 Aujourd'hui le thème qu'on décline toute la journée dans les rendez-vous d'informations, c'est l'intelligence artificielle.
00:28 Bon, vaste sujet.
00:30 J'aimerais qu'on commence par le commencement pour bien poser les bases.
00:34 Est-ce que vous pouvez nous définir l'intelligence artificielle ?
00:38 L'intelligence artificielle c'est un programme informatique qui imite le fonctionnement du cerveau.
00:44 Pour jouer aux échecs, pour jouer aux jeux de go, pour déterminer la forme d'une molécule, pour fabriquer des articles.
00:51 Ces derniers jours a été sorti par OpenEye, une société créée par Elon Musk, un nouveau logiciel qu'on appelle ChatGPT
01:01 qui révolutionne l'intelligence artificielle puisque ChatGPT imite le langage humain de façon extrêmement convaincante.
01:10 Par exemple hier, dans la presse, on m'a demandé un article.
01:13 Je l'ai fait écrire par ChatGPT, ce que j'ai indiqué dans l'article que j'ai remis au journal.
01:19 L'article a été écrit en 17 secondes alors que j'aurais passé 3 heures pour l'écrire.
01:25 On estime d'ailleurs aux Etats-Unis que les rédactions vont se séparer de la moitié de leurs journalistes dans les 3 à 4 prochaines années.
01:33 Donc il y a des enjeux politiques et sociaux très importants au-delà des enjeux technologiques derrière les nouvelles formes d'intelligence artificielle.
01:40 C'est bien noté l'intelligence artificielle.
01:46 L'intelligence n'est pas forcément humaine ?
01:50 Non, on le voit bien. Aucun humain n'est capable de gagner aux échecs ou aux jeux de go face à l'intelligence artificielle.
01:58 Mais bien sûr, l'intelligence artificielle n'est pas autonome.
02:01 Ce sont des hommes qui ont créé, qui ont fabriqué les ordinateurs.
02:05 Ce sont des hommes qui ont écrit les articles, les contenus avec lesquels on éduque l'intelligence artificielle.
02:11 Par exemple, l'intelligence artificielle dont on parle, la Tchad GPT, a été éduquée avec 430 milliards d'articles et de documents
02:20 qui bien évidemment ont été produits par des humains.
02:24 Donc il y a des synergies entre l'intelligence artificielle et l'intelligence humaine.
02:29 L'intelligence artificielle n'est pas autonome, elle n'existe pas sans l'homme.
02:32 Ça sert à quoi ?
02:34 Ça sert à écrire de l'article, mais tout le monde n'est pas journaliste.
02:39 Pour les Français, dans la vie de tous les jours, ça sert à quoi ?
02:44 Alors des applications d'intelligence artificielle, les Français s'en servent tous les jours.
02:49 Quand on ouvre son smartphone, qu'on soit avec un iPhone ou un téléphone sous Android de Google,
02:57 c'est-à-dire la totalité des téléphones utilisés en France, on a plein d'intelligence artificielle.
03:03 Nos téléphones portables fonctionnent à l'intelligence artificielle.
03:07 En matière médicale, l'intelligence artificielle aujourd'hui permet de faire avancer la recherche.
03:12 Par exemple, Google a déterminé en quelques semaines la forme en trois dimensions de 200 millions de protéines.
03:19 Alors que la détermination d'une seule protéine, ça demande des mois et des mois de travail à une équipe entière.
03:26 Ce que l'humanité aurait fait en 2000 ans, Google l'a fait en quelques jours l'été dernier.
03:32 On a une multiplication des applications de l'intelligence artificielle et nous ne sommes qu'au tout début.
03:37 Dans quelques temps, l'intelligence artificielle pourra écrire un livre entier en quelques secondes.
03:43 Donc il faut réorganiser la façon dont on apprend, il faut réorganiser l'école, l'université, la formation.
03:49 Et puis, bien sûr, il va falloir réorganiser l'hôpital et les entreprises,
03:53 parce que l'intelligence artificielle ne va pas dépasser l'homme, mais elle va faire mieux que l'homme de plus en plus tâche.
03:59 Donc il est urgent politiquement, socialement de réfléchir aux impacts sur les régimes sociaux, bien sûr,
04:09 sur l'organisation de la retraite, mais aussi sur la façon dont on va réorganiser massivement le travail dans les années qui viennent.
04:17 Il ne faudrait pas qu'on soit pris au dépourvu par ce tsunami technologique.
04:21 Il faut qu'on prépare les Français, il faut qu'on prépare les entreprises,
04:25 il faut qu'on prépare nos gamins à supporter et à bénéficier de cette immense vague technologique qui est en train de déferler sur nos sociétés.
04:34 C'est enthousiasmant ? Il faut s'enthousiasmer, il faut se réjouir ?
04:39 Je pense qu'il y a beaucoup d'éléments positifs, mais il pourrait y avoir des dangers.
04:44 C'est-à-dire que si on ne forme pas correctement nos gamins, si on ne forme pas les travailleurs qui vont être dépassés par chaque GPT,
04:51 si on n'organise pas la reconversion des journalistes qui vont mécaniquement être moins utiles dans les rédactions dans les années qui viennent,
04:59 on pourrait avoir des désillusions et des problèmes sociaux.
05:02 Il faut qu'on bénéficie de ces technologies-là sans naïveté, de façon lucide, en se préparant au choc.
05:08 Le plus important, c'est la formation, la reconversion, l'adaptation.
05:13 Il ne faut pas qu'on soit pris au dépourvu par la vague technologique.
05:17 Il faut, pour qu'elle bénéficie à tout le monde, lancer un grand plan de formation dans les entreprises, dans les écoles et les universités,
05:24 pour que les Français de demain soient prêts au choc technologique, et puis en bénéficient, au lieu de perdre leur emploi,
05:31 au lieu de souffrir à cause de cette concurrence avec l'intelligence artificielle.
05:36 Mais ça concerne tout le monde.
05:39 Quand l'intelligence artificielle de Google a écrasé la totalité des joueurs de go sur Terre, y compris le champion du monde de jeux de go,
05:47 eh bien, il a beaucoup souffert.
05:49 Et d'ailleurs, il a dit à quel point ça avait été un choc pour lui d'être dépassé par l'intelligence artificielle.
05:54 Et Kasparov, en 1997, qui avait été écrasé à plate couture par l'intelligence artificielle d'IBM, d'E-Blue, a fait une dépression.
06:02 Il a fait une dépression parce qu'il ne supportait pas d'avoir été dépassé par la machine.
06:07 Kasparov, le grand, grand joueur d'échecs.
06:10 Donc, il faut qu'on se prépare psychologiquement, parce qu'il serait très triste que les gens se sentent dépassés,
06:16 et soient déprimés à cause de cette nouvelle concurrence par les machines.
06:20 Donc, il faut que nous nous préparions de manière à être non pas concurrent de l'intelligence artificielle, mais complémentaire.
06:27 Grâce à des outils comme ChatGPT, nous pouvons faire des choses plus vite, nous pouvons les faire mieux.
06:31 En réalité, si on s'y prépare bien, nous pouvons travailler mieux, gagner plus d'argent et faire des choses plus intéressantes en 2025 ou en 2030 qu'aujourd'hui.
06:41 Donc, préparons-nous pour que ce choc technologique soit positif et non pas une source de dépression, comme ça l'a été par exemple pour Kasparov dont je parlais.
06:50 Effectivement, effectivement, effectivement.
06:52 Une vague, vous parlez d'une vague technologique, c'est comme une vague dans la mer.
06:56 Soit on la reçoit en pleine figure, soit on l'accompagne, c'est ce que font les surfeurs et on surfe dessus, elle nous porte.
07:05 Espérons que l'intelligence artificielle nous porte.
07:08 Merci beaucoup, merci beaucoup docteur Laurent-Alexandre.
07:11 On pourrait passer des heures à en parler, on commence à débroussailler le problème, mais voilà, vous vous souviendrez, vous en aurez entendu parler.
07:19 Le vendredi 27 janvier 2023 sur Europe 1 et je rappelle le titre de votre livre, "La guerre des intelligences", signé Laurent-Alexandre.
07:31 Merci beaucoup.
07:32 Une heure moins le quart, 12h45 dans un instant, Louis de Funès qui nous a quitté un 27 janvier, c'était en 1983, il y a 40 ans.