• il y a 9 mois
En apparence, Dennis Rader ressemble à une personne normale. Mais sa vie intérieure est frappée d'un imaginaire sinistre.
Transcription
00:00 ...
00:26 ...
00:34 ...
00:42 -Les habitants de Wichita ont vécu dans la peur de BTK,
00:46 ce tueur qui ligotait, torturait et tuait ses victimes.
00:50 Et ça a duré 30 ans, de 1974 à 2005.
00:54 ...
00:59 -Je le voyais comme un criminel redoutable.
01:01 Il avait échappé à des centaines d'enquêteurs sur des décennies.
01:05 ...
01:11 -Tout le monde voulait voir cet homme, savoir qui il était
01:15 et particulièrement comment il avait pu commettre 10 meurtres,
01:19 dont 2 meurtres d'enfants.
01:21 ...
01:45 -Il régnait un tel silence dans la salle d'audience
01:49 qu'on aurait entendu une mouche se poser sur une feuille de papier à 1 km.
01:52 Dennis Rader était au centre d'un véritable cirque médiatique
01:56 et tous les projecteurs étaient braqués sur lui.
01:59 Son égo démesuré adorait ça.
02:02 Il savourait chaque seconde.
02:04 ...
02:09 -Il n'a exprimé aucun regret,
02:12 aucun malaise en évoquant ce qu'il avait fait.
02:15 ...
02:23 -C'était une blague ou quoi ?
02:25 Je regardais le procès et je me disais,
02:28 alors c'est lui, le tueur de femmes ?
02:30 ...
02:36 -En regardant le procès de Dennis Rader diffusé à la télévision,
02:40 les gens ont eu l'impression d'avoir le fin mot de l'histoire.
02:44 Mais pour moi, l'histoire ne faisait que commencer.
02:47 -Vous avez un message prépayé de...
02:51 -Dennis L. Rader.
02:53 -Détenu à Centre pénitentiaire du Kansas.
02:56 Pour accepter cet appel, tapez sur étoile ou dites "OK".
03:00 -Quand vous vous êtes retrouvé devant le juge Waller
03:03 et qu'il vous a demandé de raconter vos crimes en détail,
03:06 qu'avez-vous ressenti à ce moment-là ?
03:09 -Je voulais être exact et expliquer ce qui s'était passé
03:13 et les gens ont été surpris que je parle autant.
03:16 Ils ont cru que je voulais faire du spectacle.
03:19 -Que ressentiez-vous au moment où vous parliez ?
03:22 -L'impression de vider mon sac, de relâcher la pression.
03:26 -D'accord.
03:27 -Je m'appelle Catherine Ramsland
03:31 et je suis professeure en psychologie criminelle.
03:34 J'échange avec Dennis Rader depuis plus de 10 ans
03:37 dans l'espoir de comprendre ce qui l'a mené à devenir
03:41 l'un des tueurs en série les plus célèbres des États-Unis.
03:45 -Il tenait Wichita sous sa coupe à l'époque.
03:48 -Rader voulait que les gens se sachent observer.
03:51 Il voulait qu'ils se sentent épiés par lui en permanence.
03:55 -C'est terrifiant.
03:57 -Il me paraît essentiel d'arriver à comprendre
04:00 ce qui conduit certains individus à commettre de telles atrocités.
04:05 Qu'est-ce qui les pousse à choisir cette vie ?
04:09 Dans quel état psychique sont-ils pour agir ainsi ?
04:13 -L'histoire n'est pas terminée.
04:15 Parce qu'on ignore encore, enfin, moi, en tout cas,
04:18 ce qui a poussé Dennis Rader à devenir le monstre que l'on connaît.
04:22 Personnellement, je ne sais toujours pas. Et vous ?
04:25 -Je crois que si.
04:27 -Qu'est-ce qui t'a rendu aussi malade dans ta tête ?
04:33 -Dennis Rader est un monstre.
04:35 C'est la lie de l'humanité.
04:38 Et je refuse qu'on referme la page avant de comprendre pourquoi.
04:43 Pourquoi a-t-il décidé un jour de devenir un tueur ?
04:48 -C'est la première fois
04:50 que Rader s'exprime en détail sur ce sujet.
04:54 Pourquoi voulez-vous faire connaître votre histoire ?
04:58 -Principalement pour aider des gens comme vous
05:01 à comprendre un esprit sombre et torturé.
05:04 J'ai mené une vie normale,
05:06 et pourtant, j'étais profondément torturé.
05:08 C'est la fameuse question à un million de dollars.
05:11 Pourquoi j'ai fait ça ?
05:13 -Tous les tueurs en série présentent des caractéristiques
05:17 qui un jour font qu'ils ou elles deviennent des monstres.
05:20 Plus on aura d'informations à leur sujet,
05:23 mieux on comprendra ce qui les a fait passer à l'acte,
05:26 et plus il sera facile d'éviter ces catastrophes.
05:29 Musique de tension
05:31 ...
05:39 ...
05:46 -Je m'intéresse aux tueurs en série depuis 30 ans, maintenant.
05:49 Je crois que c'est en partie dû au fait que,
05:52 quand j'étais petite, un tueur en série sévissait dans mon quartier.
05:56 C'était avant qu'on invente la terminologie de "tueur en série".
06:00 Les amis de mon frère avaient retrouvé le corps
06:02 de sa première victime dans leur ferme.
06:06 -Un étudiant de l'Université de Michigan
06:08 a été chargé aujourd'hui
06:10 de l'un des sept tueurs de l'université
06:13 dans l'arrière-ville de l'Anne-Arbor.
06:15 John Collins, étudiant de l'Université.
06:18 -Le coupable était John Norman Collins.
06:20 Il était surnommé "le tueur d'étudiantes"
06:23 parce que des étudiantes de deux campus différents
06:26 avaient été enlevés et assassinés.
06:28 L'affaire m'avait fascinée.
06:31 J'avais suivi tous les rebondissements
06:34 de l'enquête dans les journaux.
06:36 Je voulais en savoir plus sur les tueurs en série.
06:39 Puis, plus tard, en grandissant,
06:43 je suis devenue professeure en psychiatrie
06:45 et j'ai pris conscience du peu d'informations
06:48 dont on disposait sur les criminels de ce genre.
06:51 Alors, j'ai voulu contribuer à ce savoir.
06:55 J'ai publié 68 livres et j'en ai quatre en préparation actuellement.
06:59 En plus d'écrire sur les tueurs en série,
07:02 j'enseigne et j'encadre des formations auprès de policiers.
07:06 J'exerce une grande variété d'activités
07:09 en lien avec les connaissances que j'ai acquises
07:12 sur les tueurs en série.
07:13 La fascination autour de ces criminels
07:17 a fait naître toutes sortes de légendes autour d'eux.
07:20 En réaction à cela, j'ai choisi de me pencher sur des affaires
07:24 qui montrent le caractère factice de ces légendes.
07:26 Les forces de l'ordre doivent en prendre conscience
07:29 pour ne pas écarter le profil de certains suspects
07:32 trop rapidement lors d'une enquête.
07:34 -Kathryn Ramsland est l'une des expertes
07:38 les plus qualifiées sur le sujet des tueurs en série.
07:41 Grâce à elle, on arrive mieux à détecter
07:44 certains comportements précoces
07:46 qui pourraient mener à des profils de ce type.
07:48 Et on peut apporter de l'aide à ces personnes
07:51 avant qu'ils ne soient trop tard.
07:53 -Quand Dennis Rader a enfin été arrêté
08:01 et qu'on a vu arriver devant le juge
08:04 cet homme dégarni, vieillissant et bedonnant,
08:08 j'étais très curieuse de savoir comment réagirait les journalistes.
08:13 ...
08:30 -Les médias ont cherché à faire rentrer Dennis
08:33 dans le moule des tueurs en série qu'on imagine habituellement.
08:36 Seulement, c'était un père de famille
08:39 qui allait à l'église avec un travail.
08:41 C'était un pied de nez total
08:43 aux stéréotypes construits depuis des années par le FBI.
08:47 ...
08:52 Si j'ai voulu travailler avec lui,
08:54 c'est notamment parce que cet homme était une anomalie
08:57 dans le paysage des tueurs en série.
08:59 Il y avait sans doute des informations à en tirer.
09:02 ...
09:05 Parce qu'il n'est pas le seul.
09:07 ...
09:09 Il y en a, des gens qui ont une famille,
09:11 qui vont à l'église, des "monsieurs" ou "madame tout le monde",
09:15 traversés par les mêmes pensées que lui
09:18 et qui, parfois, passent à l'acte.
09:20 ...
09:22 Il me paraît donc important de les comprendre, d'une part,
09:25 mais aussi de les prendre en charge
09:28 avant qu'ils ne deviennent des tueurs en série.
09:30 ...
09:34 Mes premières interactions avec Dennis Rader
09:37 ont été assez intéressantes.
09:39 Il appréciait mes diplômes et mes qualifications.
09:42 Ça lui donnait le sentiment d'être pris au sérieux.
09:46 Mais en même temps, il voulait me tester.
09:49 Il m'a demandé de résoudre des codes
09:53 parce qu'il aimait en utiliser lui-même.
09:56 ...
09:58 Il a commencé à m'envoyer des coupures de magazines
10:02 et d'articles de journaux avec de drôles d'annotations
10:06 et des choses entourées.
10:08 Il avait écrit, quelque part,
10:10 "J'ai compris que vous aimiez les recettes de cuisine,
10:13 "surtout les plats en trois couches."
10:16 J'ai trouvé ça étrange,
10:18 surtout que je ne fais jamais la cuisine.
10:21 Alors, des plats en trois couches,
10:23 je n'ai pas trop saisi ce qu'il voulait dire.
10:26 J'ai décomposé tout l'alphabet,
10:30 A, B, C, D, E, F.
10:32 Puis, j'ai regardé chaque coupure de journal
10:35 annoté ou entouré
10:37 qui correspondait aux lettres A, B, C et D.
10:41 Et j'ai tout noté.
10:43 Puis, j'ai regardé les mots qu'il avait entourés.
10:48 Il y avait les mots "bœuf",
10:50 "tanguy", qui veut dire "acide",
10:52 "king", qui commence par un K.
10:55 Et là, j'ai compris.
10:57 Son plat en trois couches, c'était BTK,
11:01 les initiales de "bind", "torture" et "kill".
11:04 Quand je lui ai rendu le code en lui demandant la suite,
11:08 il a reconnu,
11:10 non pas que j'avais trouvé la clé de son code,
11:13 mais que j'étais prête à jouer.
11:15 Votre vie imaginaire
11:17 comptait plus à vos yeux que la vie réelle ?
11:21 Dans une certaine mesure, oui.
11:23 Mon imaginaire était toujours présent, jamais bien loin.
11:27 Je pouvais sentir le son de la musique.
11:30 Je pouvais sentir le son de la musique.
11:33 Je pouvais sortir de l'un pour entrer dans l'autre,
11:36 à ma convenance, très rapidement.
11:39 Je pense qu'il est très précieux
11:41 de comprendre Dennis Rader,
11:43 de comprendre ce qui l'animait,
11:45 ce qui l'a poussé à commettre ces actes.
11:48 S'il existait davantage de personnes
11:50 suffisamment qualifiées pour repérer ces traits
11:54 chez une personne,
11:56 ces facettes qui aboutissent parfois à des comportements criminels
12:00 ou à des maladies de la bactérie,
12:02 imaginez les vies qu'on pourrait sauver grâce à ces experts.
12:05 Je pense que ce serait bien
12:07 que vous puissiez dire ce que vous avez sur le cœur.
12:11 Votre santé décline, et à mon avis,
12:13 cela vous ferait du bien de dire ce que vous avez à dire.
12:16 Vous êtes d'accord avec ça ?
12:18 Oui, je crois.
12:20 On décrit souvent Wichita comme une grande petite ville.
12:28 On ne se rend pas compte de sa taille, en réalité.
12:31 Wichita est la plus grande ville du Kansas.
12:35 C'est un endroit où il fait bon vivre.
12:38 Les gens sont très chaleureux.
12:40 C'est une petite ville avec la mentalité qui va avec,
12:45 où chacun connaît son voisin,
12:47 et elle se trouve en plein milieu du pays.
12:50 Dennis Rader a grandi à Wichita.
12:58 Puis, il a déménagé dans la banlieue de Park City,
13:01 où il s'est marié.
13:03 Quand j'écris un livre sur quelqu'un,
13:06 je veux me rendre sur place.
13:08 Je veux voir avec ses yeux,
13:10 connaître les odeurs,
13:12 sentir la brise.
13:14 Je veux voir son lieu de travail,
13:16 faire le trajet jusqu'à chez lui.
13:18 J'essaie vraiment de me glisser dans la peau de cette personne.
13:22 Ça m'aide à mieux comprendre sa psychologie.
13:25 Je veux voir son corps,
13:27 ça m'aide à mieux comprendre sa psychologie.
13:29 -Bonjour. -Bonjour, Dennis.
13:32 Je suis à Wichita.
13:34 Je n'y étais pas retourné depuis 2016.
13:37 Vous êtes prêt ?
13:39 -Je crois, oui. -D'accord.
13:41 -Dennis Rader est incarcéré
13:43 dans la prison de haute sécurité
13:45 d'El Dorado, au Kansas.
13:47 Il a sa propre cellule,
13:50 séparée de la majorité des autres détenus.
13:53 Mais il peut quand même utiliser un téléphone.
13:57 -Je vais boire un verre d'eau, je reviens.
14:00 J'ai la bouche sèche.
14:02 C'est le stress.
14:04 -D'accord.
14:06 Pour écrire mon livre,
14:09 j'ai dû obtenir la permission
14:11 des familles de victimes
14:13 qui ont créé une association.
14:15 Dennis Rader a accepté
14:17 de céder les droits sur l'histoire de sa vie
14:20 à l'association des familles de victimes,
14:23 dans le cadre d'une décision de justice.
14:25 Par conséquent, Dennis Rader ne touchera pas d'argent
14:28 sur le livre quand il sortira.
14:30 A quoi ressemble votre cellule ?
14:33 -C'est une cellule de 4 mètres sur 3,
14:37 en béton.
14:39 -La meilleure façon de communiquer avec un criminel,
14:42 c'est de ne porter aucun jugement.
14:44 C'est la règle numéro un.
14:46 Il faut être capable d'écouter ce qu'ils ont à dire,
14:50 peu importe ce qu'ils disent.
14:52 -Le béton est tout fissuré, alors je le regarde
14:55 en cherchant des formes humaines.
14:57 Je cherche d'abord les yeux,
14:59 et à partir des yeux, je dessine des bonhommes.
15:03 J'en ai dessiné des centaines par terre.
15:06 Je les appelle "monstres des cavernes".
15:11 -Pour autant, je ne dois pas dévier de mes objectifs
15:14 quand je l'écoute.
15:16 Je fixe un certain déroulement
15:18 auquel je me tiens pendant nos entretiens.
15:21 C'est pour ça que vous vous surnommez "monstre des cavernes" ?
15:25 -Oui.
15:27 Les gens disent que je suis un monstre,
15:29 et j'imagine que c'est vrai.
15:31 Un genre de Dr. Jekyll et Mr. Hyde.
15:33 -Denis Rader aime manipuler les gens.
15:36 Je sais parfaitement que,
15:39 même si je communique avec lui depuis longtemps,
15:42 il pourrait très bien essayer de se servir de moi
15:45 pour telle ou telle raison.
15:47 Donc, je ne baisse jamais la garde.
15:49 ...
15:54 -Denis Rader avait 28 ans
15:56 quand il a assassiné 4 membres de la famille Otero.
15:59 En apparence,
16:01 Denis Rader était un homme tout ce qu'il y avait de plus normal.
16:04 Il avait vécu toute sa vie à Wichita,
16:06 à l'exception de 4 ans passés
16:08 dans l'armée de l'air américaine de 1966 à 1970.
16:12 -J'ai rencontré la famille Rader avant de rencontrer Denis.
16:20 On allait dans la même église luthérienne.
16:23 ...
16:25 -Un jour, en 1970,
16:27 Denis est rentré du service militaire.
16:29 C'était un événement dans le quartier.
16:31 Tous les gens qui fréquentaient l'église depuis longtemps
16:35 le connaissaient bien. A son retour,
16:37 tout le monde est venu prendre de ses nouvelles,
16:39 lui demander où il allait travailler.
16:42 Il y avait un panier de basket près de chez nous.
16:45 Denis et ses frères venaient souvent jouer.
16:47 Denis était mauvais perdant.
16:50 C'était une brute.
16:52 C'était arrogant.
16:54 Il aimait jouer au plus grand, au plus fort.
16:57 Vous voyez le genre.
16:59 -En 1970,
17:01 Denis Rader a terminé son service militaire.
17:04 Il avait 25 ans.
17:06 Il est retourné vivre dans le Midwest,
17:09 un monde où les valeurs familiales sont primordiales.
17:14 Là-bas, l'important dans la vie,
17:16 c'est d'aller à l'église tous les dimanches,
17:19 d'avoir un travail, de se marier
17:21 et de fonder une famille.
17:23 Ses parents lui ont présenté une jeune fille
17:26 qui fréquentait leur église.
17:28 Denis l'a rencontrée
17:31 et ils se sont mariés assez rapidement.
17:34 Quelles attentes aviez-vous vis-à-vis du mariage ?
17:37 Quelle image vous vous faisiez du rôle de mari à l'époque ?
17:40 -Ce qui comptait pour moi, c'était l'amour.
17:43 J'étais très amoureux de ma femme et je le suis encore.
17:46 Je garde de très beaux souvenirs avec elle.
17:49 Je crois que pour ça, je suis comme n'importe quel autre homme.
17:53 Quand on tombe amoureux, la seule chose qu'on veut,
17:56 qu'on espère, c'est de pouvoir se marier
17:58 avec la personne qu'on aime.
18:01 -Il y a une question qui revient souvent.
18:04 Les tueurs en série,
18:06 sont-ils vraiment capables d'aimer ?
18:09 Il faut savoir que ces criminels ont un cerveau de psychopathe,
18:14 c'est-à-dire que leurs émotions sont très superficielles.
18:18 Leur capacité à traiter des informations morales est déformée.
18:23 Quand Dennis Rader évoque son amour pour une autre personne,
18:28 il désigne sûrement par là un sentiment
18:31 qu'il a éprouvé très rarement.
18:34 Rader a décroché le travail de ses rêves, comme il dit,
18:37 à Cessna, dans la construction d'avions.
18:40 Mais peu de temps après, il l'a perdu.
18:43 Ca a été un échec très dur à encaisser.
18:47 Il n'a pas compris pourquoi il avait été licencié.
18:50 Et en plus, il devait subvenir aux besoins de sa femme.
18:53 Vous aviez ce travail à Cessna que vous adoriez, n'est-ce pas ?
18:56 Et ensuite, vous avez été licencié.
18:59 Ca a été difficile pour vous ?
19:02 -Ca m'a mis un coup énorme.
19:06 C'est à cause de ça que je suis rentré par effraction
19:09 dans une maison pour la première fois.
19:12 Le jour de mon licenciement, d'ailleurs.
19:15 -Pourquoi ? Pourquoi votre licenciement vous a poussé
19:18 à rentrer chez des gens par effraction ?
19:21 -J'étais en colère contre le système.
19:25 Et ce soir-là, l'occasion a fait le larron.
19:28 Je suis allé rôder dans les rues
19:31 et je suis rentré dans une maison pour la première fois.
19:34 -Au profilage, on parle de criminels
19:37 plus ou moins organisés, et le fonctionnement de Dennis Rader
19:40 correspond au style des criminels organisés.
19:44 C'est-à-dire qu'ils planifient et qu'ils s'entraînent.
19:47 Dennis s'est d'ailleurs entraîné à casser des fenêtres
19:50 et à s'introduire dans des maisons d'inconnus
19:53 jusqu'à ce qu'il estime qu'il était prêt.
19:56 Il se chronométrait et se familiarisait
19:59 avec l'emploi du temps de ses victimes
20:02 pour mieux réussir son coup.
20:06 -Cette personne n'avait rien à voir avec votre licenciement.
20:09 Pourquoi passer vos nerfs sur quelqu'un qui n'a rien fait ?
20:12 -Parce que je voulais faire quelque chose d'immoral.
20:15 C'était une façon d'évacuer ma frustration.
20:18 -Et ça a marché ?
20:20 -Oh non, ça a été pire.
20:24 -Quand il s'est fait licencier,
20:27 il était tellement en colère qu'il a voulu commettre
20:30 un acte destructeur pour se venger de la société.
20:33 Et cela impliquait d'enfreindre la loi.
20:36 Ça l'a soulagée.
20:40 Ça lui a donné l'impression de reprendre le contrôle.
20:43 Et il s'est senti prêt à passer à des actes
20:46 beaucoup plus graves et mortels.
20:49 -Je vivais avec ce côté sombre de moi-même
20:52 depuis longtemps déjà. Et le volcan entrait enfin en éruption.
20:56 -En 1974, Wichita n'était encore qu'une ville du Midwest
21:07 relativement grande, de 250 000 habitants environ.
21:10 La plupart des gens travaillaient dans l'agriculture ou l'aviation.
21:15 Les crimes, ça n'existait pas chez nous.
21:18 De temps en temps, il y avait bien un cambriolage ou un vol,
21:21 mais les crimes de fous furieux, ça se passait sur la côte est
21:24 ou ouest, mais pas à Wichita, dans le Kansas.
21:27 -On est arrivés à Wichita quand mon père a quitté la région.
21:30 Il avait été enceint par un homme.
21:34 -On est arrivés à Wichita quand mon père a quitté l'armée de l'air.
21:37 Il avait trouvé un emploi à Cookerfield.
21:41 On était 5 enfants dans la famille.
21:44 J'étais l'aîné.
21:47 Ensuite, il y avait Chelsea, c'était l'artiste de la famille.
21:50 Elle écrivait de la poésie et dessinait beaucoup.
21:53 Joey, c'était un vrai petit gars.
21:56 Il tombait déjà les filles.
22:00 Il était très mignon et il adorait le sport.
22:03 Mon père et ma mère étaient très complices.
22:06 Il y avait énormément d'amour entre eux.
22:09 Ils l'adoraient.
22:12 Tout le monde aimerait vivre une aussi belle histoire.
22:15 Ils ont vécu et ils sont morts ensemble
22:19 en se regardant les yeux dans les yeux.
22:22 J'avais 15 ans, en janvier 1974.
22:27 Il avait neigé
22:31 et c'était le jour de contrôle au lycée.
22:34 J'ai demandé à mon père de m'emmener plus tôt que d'habitude
22:37 pour arriver tôt dans la salle d'examen.
22:40 Danny et Carmen sont venus avec moi
22:43 puisque mon père les conduisait en même temps.
22:46 J'ai fait le contrôle. J'avais tout bien réussi
22:49 et je suis rentré chez moi à pied.
22:53 Je suis arrivé vers la porte de derrière
22:56 et j'ai vu mon chien Lucky dehors dans le froid.
22:59 C'était très inhabituel. J'ai dit,
23:02 "Lucky, qu'est-ce que tu fais là ?"
23:05 J'ai ouvert la porte à l'arrière de la maison
23:08 et j'ai tout de suite vu le sac à main de ma mère
23:12 renversé sur la cuisinière.
23:15 J'ai crié, "Il y a quelqu'un ?"
23:18 J'ai entendu un de mes frères et sœurs dire,
23:21 "Viens, Charlie. Papa et maman nous font une mauvaise blague."
23:24 Je me suis précipité dans le couloir
23:28 et j'ai vu ma mère coucher sur le lit.
23:31 Elle avait été battue.
23:34 Mon père avait une ceinture autour du cou.
23:37 Je sentais la mort et la terreur partout dans la pièce.
23:40 Je le sens encore aujourd'hui.
23:43 Mon cœur s'est arrêté.
23:46 J'ai eu l'impression que quelqu'un m'écartelait la poitrine
23:50 pour m'arracher le cœur.
23:53 J'ai dit à Danny d'appeler la police
23:56 et il m'a hurlé que le téléphone ne marchait pas.
23:59 Alors je lui ai dit d'aller voir les voisins
24:02 et d'appeler de chez eux.
24:05 -La police scientifique et les agents de police de Wichita
24:08 sont arrivés sur les lieux.
24:12 Les trois aînés des enfants otéraux
24:15 ne savaient pas où se trouvaient leurs sœurs de 11 ans
24:18 ni leurs petits frères de 9 ans.
24:21 -En inspectant la maison,
24:24 les policiers ont trouvé le corps de Joey Junior dans sa chambre.
24:27 Le corps de Josephine a été retrouvé
24:31 pendu à une canalisation au sous-sol.
24:34 ...
24:37 -On nous a conduits au commissariat.
24:40 J'ai demandé où étaient Joey et Josephine.
24:43 Puis j'ai vu un policier et un prêtre s'avancer vers moi.
24:46 "Charlie, on doit te dire que Joey et Josephine
24:50 "étaient dans la maison."
24:53 C'était comme si on m'arrachait le cœur une deuxième fois.
24:56 ...
24:59 ...
25:02 Désolé.
25:05 ...
25:09 -Les policiers arrivés sur la scène de crime
25:12 ont remarqué que le chauffage central
25:15 avait été monté au maximum.
25:18 -J'ai augmenté le chauffage dans la maison
25:21 à la température corporelle.
25:24 Je faisais souvent ça.
25:27 -Denis Rader a puisé beaucoup de ses idées
25:31 dans les magazines de faits divers ou les romans noirs.
25:34 Il avait lu quelque part qu'en augmentant le chauffage
25:37 dans une maison, les corps se décomposaient plus vite
25:40 et que cela empêchait par la suite les experts
25:43 de déterminer l'heure exacte du décès.
25:46 -Rien n'avait été volé dans la maison.
25:50 Cela nous donnait la preuve qu'il ne s'agissait pas
25:53 d'une effraction de domicile qui avait dérapé.
25:56 Les meurtres avaient été commis dans le but
25:59 d'en tirer une gratification sexuelle.
26:02 -Les enquêteurs ont retrouvé le corps de Josephine, 11 ans,
26:05 déshabillée en partie.
26:09 Il y avait du sperme sur elle et autour de son corps.
26:12 -Dans les années 70, on était encore loin
26:15 d'exploiter l'ADN dans les enquêtes criminelles.
26:18 Mais les policiers de Wichita ont été d'un sérieux remarquable.
26:21 Ils ont soigneusement collecté et conservé les preuves,
26:24 ce qui fait que des années plus tard,
26:28 avec l'arrivée des techniques d'analyse d'ADN,
26:31 on a pu exploiter ces preuves.
26:34 -Le meurtre de la famille Otero était le premier coup
26:37 d'un malade qui courait toujours,
26:40 quelque part à Wichita ou dans le Kansas.
26:43 Nous, on pensait que c'était un acte isolé,
26:47 comme tous les autres, mais on se trompait.
26:50 -Je vais aller voir ce qui était autrefois
26:55 la maison de la famille Otero.
26:58 C'est là que Dennis Rader a commis ses premiers meurtres
27:02 sur quatre personnes d'une même famille.
27:05 -Bonjour, docteur. -Bonjour.
27:09 -Ravi de vous rencontrer. -Enchantée.
27:12 Vous pourriez me parler de votre expérience ce jour-là,
27:15 quand vous êtes arrivé sur les lieux ?
27:17 -On ne se doutait pas une seule seconde
27:19 de ce qui était arrivé dans cette maison.
27:22 Je voyais des policiers courir partout
27:24 et personne ne me disait rien.
27:26 -Vous connaissiez ces policiers ? -Bien sûr.
27:28 -Et ils vous connaissaient ? -Oui, mais ils m'ont dit
27:31 "Pas le temps de parler, on est occupés."
27:34 En 1974, je travaillais comme photographe pour CAKE TV.
27:37 Tous les journalistes présents
27:42 ont essayé de tirer les vers du nez des policiers.
27:45 Ils ont fini par nous expliquer
27:47 que quatre personnes étaient mortes dans la maison.
27:51 C'était une énorme affaire.
27:53 Quatre personnes assassinées chez elles, à Wichita,
27:56 c'était du jamais vu.
28:10 Les policiers semblaient très secoués.
28:12 La vue des corps des enfants les avait bouleversés.
28:15 Ils avaient vu ce que les enfants avaient enduré.
28:18 N'importe qui serait choqué.
28:21 -Vous vous souvenez du moment où vous l'avez remarqué ?
28:25 -Ca devait être en conduisant ma femme à son travail.
28:29 C'était l'hiver. Il était tombé beaucoup de neige.
28:34 Ma femme n'aimait pas conduire avec le verglas
28:37 et moi, je ne travaillais pas à l'époque.
28:39 Je rodais dans le quartier des Oteros
28:41 quand je l'ai vue, elle, emmener ses enfants à l'école un jour.
28:44 Et je me suis dit que ça pourrait être elle.
28:47 Mon premier fantasme de victime devenait réalité.
28:50 -Quand j'ai pu m'entretenir avec Dennis,
28:55 il a dit qu'il visait la femme, pas les enfants.
28:58 Les enfants n'étaient que des dommages collatéraux.
29:01 Il a dit ça sur un ton tellement pragmatique
29:04 que cette phrase m'a longtemps hanté.
29:07 -Je m'étais focalisé là-dessus.
29:09 Chaque fois que je passais dans le quartier,
29:12 je regardais leur maison. Ca a été progressif.
29:14 -Vous aviez un plan ?
29:16 Qu'est-ce que vous aviez prévu de faire ce jour-là ?
29:19 -J'avais repéré une vieille grange au nord-ouest de Wichita.
29:23 Je voulais kidnapper la femme et l'emmener là-bas.
29:26 Ensuite, je l'aurais pendue.
29:29 Mais M. Otero a tout fait capoter.
29:34 Il n'était pas censé être là, mais il l'était.
29:37 Il y avait une palissade tout autour de la maison.
29:40 J'étais jamais allé voir au-dessus de la palissade.
29:43 Et voilà qu'il y avait des traces de chiens partout.
29:47 J'avais pas pensé à ça, mais je devais quand même agir.
29:52 J'étais déjà lancé.
29:54 Je me suis approché de la palissade,
29:57 j'ai pris ma pince et j'ai coupé la ligne téléphonique.
30:03 -Il ne savait pas que Joseph Otero, père, ne travaillait pas ce jour-là.
30:08 Et il ignorait que la famille avait un chien.
30:11 Mais tout son esprit était focalisé sur sa cible.
30:15 Il avait choisi sa victime, il avait peu de temps pour agir
30:19 et il devait mener son plan à exécution.
30:22 On sait que les tueurs psychopathes
30:25 ont tendance à se focaliser à l'extrême sur une seule chose.
30:29 C'est comme s'ils étaient lancés sur des rails
30:32 et qu'ils ne pouvaient pas s'arrêter
30:36 tant qu'ils n'atteignaient pas leur objectif, quoi qu'il en coûte.
30:40 -Dans vos échanges avec Dennis Raeder,
30:43 vous avez l'impression qu'il vous manipule ?
30:46 -Tout le temps. Mais j'ai toujours su qu'il fonctionnait comme ça.
30:50 -Vous avez étudié un grand nombre de tueurs en série.
30:53 Vous rêvez d'eux, parfois ?
30:55 -Non, parce que je le fais avec beaucoup de détachement.
30:59 -Vous vous arrivez à compartimenter ? -Sûrement, oui.
31:02 -C'est aussi ce que disait Raeder.
31:04 -Il a inventé un terme plus parlant, le cubage.
31:07 C'est l'idée du cube avec ses multiples facettes
31:10 qu'il peut tourner et retourner dans le sens qu'il veut
31:13 quand ça l'arrange, ce qui n'empêche pas les autres facettes
31:17 d'exister par ailleurs.
31:19 -Vous vous souvenez de l'image du cube ?
31:22 La face gentille, la face méchante.
31:25 J'étais un bon père pour mes enfants et un bon mari.
31:28 Je m'investissais à l'église et chez les scouts,
31:31 mais j'ai aussi une face plus sombre.
31:34 Le secret s'est très ancré en moi.
31:38 -Après avoir tué 4 personnes, Dennis Raeder est rentré chez lui.
31:44 Il savait qu'il ne devait rien laisser paraître à sa femme
31:47 et donc il s'est repris très vite.
31:49 Il a réussi à faire comme si c'était une journée normale.
31:55 Qu'il n'était rien arrivé de spécial.
31:59 Sa femme n'y a vu que du feu ce jour-là.
32:02 Elle l'a trouvé normal.
32:04 On peut déduire qu'il a réussi à cuber très rapidement.
32:08 Dennis Raeder et d'autres tueurs en série de son genre
32:15 parviennent à se présenter sous des jours différents
32:18 quand il s'agit d'obtenir ce qu'ils veulent.
32:21 Il ne s'inquiète pas vraiment des incohérences
32:24 ou des contradictions dans leurs comportements,
32:28 y compris des contradictions morales.
32:31 Il peut très bien dire qu'il ressent de la honte
32:34 ou des remords à un certain moment,
32:36 mais tout ça s'efface en une fraction de seconde
32:39 dès qu'il se présente sous la face de BTK,
32:42 le terrifiant tueur en série.
32:44 A ce moment-là, vous pensiez recommencer
32:48 ou vous vous disiez "C'est bon, je l'ai fait,
32:51 "et maintenant j'arrête."
32:53 -Ca a disparu un moment. C'était la phase de redescente.
32:57 Mais ensuite, c'est remonté.
32:59 Ca doit ressembler à l'effet de la drogue.
33:02 On se drogue, on plane, et puis l'effet s'estompe,
33:06 et alors on veut recommencer.
33:08 -La population de Wichita était complètement traumatisée.
33:12 C'était une petite ville où il ne se passait rien,
33:15 et voilà qu'un jour, une famille se faisait massacrer chez nous,
33:19 dans notre quartier, des gens que l'on connaissait.
33:22 -L'affaire a défrayé la chronique.
33:26 A l'époque, les gens pensaient que c'était une affaire de drogue,
33:30 parce qu'il était tout simplement inconcevable
33:33 qu'on tue une famille comme ça, sans aucun motif.
33:36 -Les quadruples homicides restent encore rares de nos jours.
33:40 Alors imaginez un peu ce que c'était à l'époque.
33:43 Ca n'existait pas. Et imaginez ce que ça aurait pu être
33:48 si on avait fait un peu plus de travail.
33:51 -Ca n'existait pas. Et imaginez l'angoisse que ça a provoqué.
33:55 Les gens étaient scandalisés et terrorisés.
33:58 Les policiers ressentaient une pression énorme,
34:01 d'autant que chacune de leurs pistes débouchait sur une impasse.
34:05 -En 1974, personne dans la police
34:07 n'utilisait encore les mots de "tueur en série".
34:11 La terminologie est apparue des décennies plus tard,
34:14 dans les années 80.
34:16 Imaginez ce que c'était que ces meurtres en série,
34:19 commis sur de parfaits inconnus.
34:21 -Le meurtre de la famille Otero
34:36 a bouleversé tous les habitants de Wichita,
34:40 et leur habitude aussi.
34:42 En tout cas, chez moi, les choses ont changé.
34:45 J'avais jamais notre porte à clés, avant ce mois de janvier 1974.
34:49 -J'en ai appris davantage sur le meurtre au fil des jours
34:55 grâce aux policiers. Ca m'a rappelé les meurtres
34:58 à Roll, Corombo, Texas, dans les années 50,
35:01 dont parle "Le roman de Truman Capote".
35:04 Ca m'a frappé parce que j'avais assisté
35:06 à la pendaison de Hickok et Smith.
35:09 -La famille Clutter s'était faite assassiner
35:14 par deux hommes sortis de prison peu de temps avant.
35:17 Ces deux hommes avaient entendu dire, à tort,
35:20 qu'une famille possédait un coffre rempli d'argent chez elle.
35:23 Les deux compères avaient manigancé un plan
35:26 pour entrer par effraction chez les Clutter.
35:30 Ils étaient entrés et ils avaient tué de sang-froid
35:33 les quatre membres de la famille
35:35 pour seulement quelques dollars et un transistor.
35:38 -La nouvelle du meurtre a secoué tout le Texas.
35:41 Ca a beaucoup marqué Dennis Rader.
35:43 -Vous aviez entendu parler du crime à la radio ?
35:46 -Oui, j'étais en route pour le lycée.
35:50 J'avais 14 ans.
35:53 J'étais en première année.
35:56 Je faisais la route jusqu'au lycée
35:59 avec la fille de mon patron, qui avait un minivan.
36:02 J'avais le béguin pour cette fille. J'aimais bien m'asseoir à l'avant.
36:05 Je me souviens qu'elle était toujours en jupe.
36:09 Ils parlaient du crime à la radio.
36:12 J'ai entendu ça.
36:15 -Dennis Rader a particulièrement été marqué
36:18 par le fait que les victimes avaient été ligotées
36:21 avant d'être assassinées.
36:23 Lui-même aimait serrer une corde autour de sa taille.
36:27 Il aimait cette sensation.
36:30 Dans ses fantasmes, il attachait ses victimes avec de la corde.
36:33 Alors, forcément, le fait que les victimes de la famille Clutter
36:36 aient été ligotées avec de la corde,
36:39 ça l'a attiré.
36:42 -Quand j'ai entendu qu'ils s'étaient fait ligoter,
36:46 ça m'a donné envie de faire pareil.
36:49 Ça faisait écho à mes fantasmes de corde.
36:52 -Quand Rader a tué les Oteros,
36:55 après les meurtres, il a volé une radio,
36:58 comme pour revendiquer un lien, une filiation
37:01 entre lui et les tueurs de Holcombe.
37:04 Il avait aussi volé un transistor.
37:08 Par conséquent, il les avait d'abord bien étudiés
37:11 avant de passer à l'acte.
37:14 Je suis convaincue que la majorité des tueurs en série
37:17 ne sont ni très originaux ni très malins, au fond.
37:20 Ils ont tendance à se renseigner sur d'autres tueurs
37:23 pour s'en inspirer.
37:27 Je crois que Rader a poussé cela à l'extrême
37:30 parce que la plupart de ses actes ou de ses envies
37:33 avaient déjà été réalisés par quelqu'un d'autre avant lui.
37:36 Il ne s'est jamais montré très créatif.
37:39 Et pour devenir le tueur en série qu'il rêvait d'être,
37:42 après l'assassinat des Oteros,
37:46 il devait impérativement recommencer à tuer.
37:49 Vous avez tué Catherine Bright,
37:56 peu de temps après la famille Otero.
37:59 Vous n'avez pas pensé sur le moment que c'était trop risqué ?
38:02 -Non, parce que j'avais déjà ciblé la maison
38:06 et tout le reste ne me semblait pas tellement important.
38:09 En plus, elle collait bien avec le type de victime
38:12 que je voyais dans les magazines,
38:15 dans les affaires de meurtre d'étudiantes, par exemple.
38:18 Un jour, je l'ai vue rentrer chez elle
38:21 et je me suis dit, "Tiens, ça pourrait le faire."
38:24 Elle rentre chez elle tous les jours à cette heure-là
38:28 et en plus, ça tombe pendant mon intercours,
38:31 donc ce serait faisable.
38:34 -Denis Rader était étudiant à l'université d'Etat de Wichita.
38:37 Il était marié et il espérait fonder une famille.
38:40 -Tout le monde n'a pas l'aplomb
38:43 de commettre un crime en pleine journée.
38:47 Il faut avoir suffisamment confiance,
38:50 être capable de se fondre dans la masse,
38:53 plus que si on agit pendant la nuit, en tout cas.
38:56 Ça donne une idée de l'état d'esprit de Rader
38:59 et du travail de préparation qu'il faisait avant ces crimes.
39:03 -Vous avez choisi Catherine Bright.
39:06 Combien de temps l'avez-vous surveillée
39:09 avant de passer à l'acte ?
39:11 -J'allais me garer près de chez elle pour vérifier si elle est venue.
39:14 Comme j'ai constaté qu'elle rentrait chez elle tous les après-midi,
39:17 ça m'a donné l'idée de m'introduire chez elle
39:20 une après-midi et d'attendre son retour.
39:23 Ça m'a pris un mois environ.
39:27 -Catherine Bright était une jeune femme de 21 ans
39:30 qui vivait seule.
39:33 Elle avait un frère de 19 ans qui vivait à Valais Centre.
39:36 Un soir, il est allé passer la nuit chez elle
39:39 dans l'idée d'aller faire les boutiques le lendemain matin,
39:42 ce qu'ils ont fait. Jusque-là, rien d'anormal.
39:46 -Pithikey se vantait d'être très méticuleux
39:49 quand il préparait ses crimes, en tout cas, c'est ce qu'il pensait.
39:52 Il savait qui était Catherine Bright
39:55 puisqu'il la surveillait depuis quelque temps.
39:58 Mais il ne s'attendait pas à voir son frère débarquer.
40:01 Le frère est arrivé et Pithikey ne pouvait pas le laisser filer
40:05 parce qu'il s'agissait d'une menace immédiate.
40:08 -C'était un coup de feu.
40:11 ...
40:14 ...
40:17 ...
40:20 ...
40:23 ...
40:27 ...
40:30 ...
40:33 ...
40:36 -Ca, Pithikey ne l'avait pas du tout vu venir.
40:39 Il était là pour tuer Catherine Bright
40:42 et lui infliger tous les sévices qu'il avait imaginés.
40:45 Comment ça, un frère ? Ce n'était pas prévu.
40:49 -Ils ont lutté une deuxième fois.
40:52 Pithikey lui tire dessus à nouveau, pense qu'il est mort
40:55 et retourne agresser Catherine. Mais là, il entend
40:58 la porte de la maison claquer et voit Kevin s'enfuir.
41:01 À ce moment-là, il sait que son temps est compté.
41:05 Il n'a pas pu faire subir à Catherine tout ce qu'il avait prévu.
41:08 Il savait qu'il devait la tuer sans tarder, donc il l'a poignardé.
41:11 -Elle a paniqué.
41:14 Et moi, par pure bêtise,
41:17 je l'ai poignardé.
41:20 J'avais pas envie d'utiliser un couteau, pourtant.
41:23 Je n'aimais pas ça.
41:25 -Dès qu'il a poignardé Catherine Bright,
41:28 il s'est rendu compte de son erreur.
41:31 Lui, il aimait étrangler les gens.
41:34 Les coups de couteau, il n'aimait pas.
41:37 D'ailleurs, il ne l'a plus jamais refait.
41:40 -En plus, comme il s'était enfui,
41:44 la porte était grande ouverte.
41:47 Je l'ai vue descendre les marches en courant
41:50 et aller dans la rue.
41:52 C'était un fiasco total.
41:54 ...
41:57 -À quel moment avez-vous eu l'impression
42:00 d'être devenu un tueur en série ?
42:02 -Je dirais...
42:05 après Catherine Bright.
42:07 -Denis Raeder avait tué à deux reprises,
42:11 à deux moments différents,
42:14 et dans des lieux sans lien apparent.
42:17 Dès lors, il a senti qu'il était entré
42:20 dans le petit cercle des tueurs qui faisaient les gros titres.
42:23 ...
42:39 -Denis Raeder aspirait au titre de tueur en série
42:42 et avec ses deux affaires,
42:46 il devenait BTK.
42:48 ...
42:52 -Il aimait tuer
42:55 et il aimait l'idée d'être un tueur en série.
42:58 Pourquoi aimiez-vous pendre des chats ?
43:01 -Parce que ça m'excitait.
43:04 Il avait beau avoir l'air normal,
43:07 ça vous donne une idée du monstre qu'il était à l'intérieur.
43:10 - C'est ça.