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Retrouvez « En toute subjectivité » avec Anne Rosencher sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/anne-rosencher-en-toute-subjectivite

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Transcription
00:00En toute subjectivité avec la directrice déléguée de la rédaction de l'Express, Anne Rosanchère,
00:06on reste dans le thème du 1er mai. Anne, vous nous parlez des usines de Jadancourt.
00:11Oui, cela ne vous dit peut-être rien ou alors quelque chose vaguement dans le nord de la France, c'est fait pour.
00:18Jadancourt, c'est la commune fictive imaginée par Pierre-Christin et Enki Bilal
00:22pour leur bande dessinée datant de 1977, aussi géniale que prophétique,
00:28et intitulée « la ville qui n'existait pas ».
00:31Il y est question déjà de la fermeture d'usines dans une commune qui en dépend entièrement.
00:36Le propriétaire vient de mourir et les administrateurs préfèrent désormais reconvertir l'activité dans l'immobilier ou la banque.
00:44L'héritière accepte de les laisser faire à une condition, qu'ils financent une ville sous bulle,
00:50une ville où tous les anciens ouvriers des usines Jadancourt n'auraient jamais besoin de travailler.
00:55Top là, la bulle est édifiée, mais on sent très vite par la magie du dessin,
01:00par la magie des couleurs à la fois vives et inquiétantes,
01:03qu'il y a comme un malaise dans cette ville de carnaval.
01:06D'ailleurs, l'histoire se termine sur la tentative d'évasion de ceux qui veulent se faire la malle, de l'utopie.
01:13L'un d'eux explicite, elle n'existe pas cette ville, elle n'a jamais existé, elle n'existera jamais,
01:19on ne peut pas se foutre en parenthèse du monde.
01:22C'est ce que beaucoup ne comprennent pas quand on parle de désindustrialisation.
01:27On aborde souvent la question par l'aspect macroéconomique du chômage
01:30ou alors par l'aspect social du pouvoir d'achat,
01:33mais la disparition nette de 2 millions d'emplois industriels ces 40 dernières années
01:39constitue en vérité l'un des bouleversements géographiques, culturels, politiques
01:44les plus profonds et les plus brutaux que la France ait vécu ces dernières décennies.
01:49Et nos dirigeants, Anne, ont pensé pouvoir faire sans industrie ?
01:53Oui, c'est cela, ils ont fait un choix.
01:56Car la France a laissé l'hémorragie sévir bien plus que le reste des pays européens,
02:00bien plus que l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, etc.
02:03où la part de l'industrie dans le PIB a certes diminué, mais beaucoup moins qu'en France.
02:09À ceux qui proposent aujourd'hui pour régler le problème de mettre en place un revenu universel,
02:14c'est-à-dire une allocation à vie pour subvenir aux besoins des anciens ouvriers,
02:20propose ni plus ni moins que de mettre cela en parenthèse du monde.
02:25Bien sûr, je n'idéalise pas le passé.
02:27La condition ouvrière n'a jamais été une sinecure.
02:31Mais je suis persuadée d'une chose.
02:33L'industrie, par le statut qu'elle procure, la mixité qu'elle permet,
02:36les richesses qu'elle répartit sur le territoire,
02:38l'industrie est indispensable et d'un point de vue social souvent préférable au sort que l'on réserve aux précaires des services.
02:47L'industrie offrait une place dans la société et une unité dans la souveraineté de la nation.
02:52En ce 1er mai, marqué par les annonces récentes d'ArcelorMittal,
02:56600 postes menacés dans le Nord ou devant Corex, 300 postes supprimés en Isère,
03:01peut-être faut-il rappeler à la gauche des métropoles que son combat fut naguère pour le travail et les travailleurs.
03:07Anne Rosencher, merci.

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