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00:00Et ce taux public Frédéric commence en musique et à Bourges.
00:07Et oui, parce que le printemps de la ville bat son plein, 49ème édition d'un rendez-vous
00:11qui marque le début de la saison des festivals et pour la soirée d'hier, difficile de
00:16faire mieux en termes de pop rock à la française.
00:19Bonjour Yann Bertrand.
00:20Bonjour Frédéric.
00:21Notre homme au printemps, il y avait hier donc deux noms en grand sur l'affiche pour
00:25deux générations, voire plus hein ?
00:28Oui, voire beaucoup plus car on sait même plus combien de générations a touché Jean-Louis
00:33Aubert, venu à Bourges avec téléphone, figurez-vous, en 1979 et de retour donc une énième fois
00:40en solo hier soir.
00:41Un Jean-Louis Aubert en forme qui fête cette année ses 70 ans sur scène avec toujours
01:02la même envie et une idée très romantique disons du concert.
01:05Pour moi un concert réussi c'est un concert où on perd son jugement.
01:09On voit le maire à côté du boucher, à côté des enfants plus jeunes en train de
01:15danser et de s'oublier et d'oublier leur image et après d'être presque gêné quand
01:20les lumières se rallument en se disant « on m'a vu me lâcher ». Peut-être j'avais
01:24envie que le monde me prenne dans ses bras. J'avais peut-être un problème à l'adolescence,
01:29un problème affectif ou je ne sais pas et on dirait que c'est ce destin qui s'accomplit
01:35un petit peu.
01:36Et comme à chaque fois ou presque, le public a adoré que ce soit les nostalgiques de téléphone
01:41ou les nombreux fans énamorés d'Aubert en solo.
01:44Mais celle qui a conclu la soirée, Yann, c'est une star bien d'aujourd'hui.
01:48Oui Frédéric, l'une des grandes stars sur la scène française actuellement, très certainement
01:53oui car il s'agissait bien de Clara Luciani concluant la journée sous le chapiteau de la
01:57grande scène du W pour sa première date en festival cette année.
02:00Elle qui va en faire des dizaines tout l'été après avoir déjà triomphé un peu partout
02:05depuis le début de l'année avec notamment deux accords Arena de Paris remplis à ras-bord.
02:09Et vous étiez Yann avec elle dans sa loge peu avant sa montée sur scène hier notamment
02:13pour savoir si elle s'était habituée à tous ces grands concerts, on l'écoute.
02:17Alors on ne s'habitue pas aux grandes scènes.
02:20Par contre, ce à quoi on s'habitue, c'est à l'esprit hyper bon enfant du printemps de Bourges.
02:25Oui, et non seulement on s'y habitue mais en plus il y a quelque chose d'assez addictif.
02:28Moi je sais que dès que j'ai su que j'étais programmée sur ce festival-là, j'étais hyper
02:31excitée à l'idée de retrouver cette ambiance vraiment singulière.
02:35C'est super particulier et puis c'est...
02:37Moi je crois que c'est ma saison préférée, la saison des festivals.
02:39Donc là de me dire qu'il y a le lancement, qu'il y a le feu vert, c'est hyper excitant aussi.
02:45Mais ça veut dire aussi quelque part, une date sur laquelle on se rode un peu.
02:49Parce que c'est la première fois qu'on va faire un schéma un petit peu particulier
02:53pour le concert qui est un petit peu réduit, la scéno qui n'est pas exactement pareil.
02:58Donc c'est aussi un peu un challenge ce soir.
03:00Vous savez, moi je crois qu'il n'y a jamais rien qui me rassure.
03:02Je crois que je suis sous le temps dans le questionnement, etc.
03:05Puis ça fait tellement partie de moi que ce n'est pas si grave.
03:07Là où je suis certaine d'avoir fait les bons choix, c'est que j'ai fait les choix qui me correspondaient et qui me ressemblaient.
03:11Je n'aurais pas pu faire autrement.
03:13Je crois que j'avais besoin de faire ce disque-là à ce moment donné de ma vie.
03:16Et puis je ne peux pas regretter ça parce que j'avoue que les disques, c'est un peu comme des photographies.
03:21C'est un instant T et le disque est arrivé, quand il devait arriver, il ressemble à ce à quoi il devait ressembler.
03:29Et c'est la même chose pour le premier et le deuxième.
03:31Donc je n'ai aucun regret.
03:33Je me sens en perpétuel combat assez trop fort, mais en tout cas travail.
03:39J'ai encore plein de choses à prouver et j'ai encore plein de choses à offrir, je crois.
03:53Clara Luciani donc hier à Bourges et toute autre chose à présent Yann.
03:56Parce que Bourges, on le sait, c'est aussi un joli écrin pour les formats originaux.
04:01Et ici au printemps, on appelle cela, comme ailleurs, finalement des créations.
04:05C'est assez français comme on s'est confié.
04:06Voilà, c'est un mot tout à fait français.
04:08Des concerts, des spectacles, des formats originaux et parfois détonnants.
04:12L'histoire du printemps de Bourges, depuis 49 ans, en est jalonnés.
04:16Prenez par exemple les Kuln variations proposées hier par Edouard Ferlet.
04:21Le pianiste s'est vu proposer de travailler autour du mythique Kuln concert,
04:25le concert à Cologne, de Keith Jarrett, l'album de piano le plus vendu au monde.
04:30Et l'une des performances improvisées les plus époustouflantes.
04:34Son travail à lui, à Edouard Ferlet, tourne notamment autour de l'intelligence artificielle.
04:39Depuis 10 ans, il développe un logiciel et un piano pianoïde, comme il l'appelle,
04:44capable de jouer sans pianiste, sur scène, à côté de lui, à la simple force de l'IA.
04:49Une proposition vertigineuse mais très réussie.
04:53Sur le papier, super, j'ai dit « Yes » tout de suite.
04:56Après j'ai commencé à réfléchir, je me suis dit « Oula, je me suis embarqué dans un truc pas possible ».
05:00Et c'est vrai que ça m'a fait un peu peur et je suis passé par plein de phases de doutes,
05:04surtout avec l'IA en fait et aussi avec Edouard.
05:06Mais ça, je connaissais déjà un petit peu ces questionnements
05:09parce que j'ai travaillé beaucoup sur des compositeurs comme Bach,
05:11ou plein de compositeurs russes, classiques ou ça, où il fallait démystifier un petit peu le personnage
05:16pour se dire « Voilà, moi je fais mon travail, même si j'admire le grand pianiste, improvisateur et compositeur. »
05:22Voilà, on essaie de se mettre un peu sur le même pied des salles quelque part.
05:26Et c'est vrai que ce concert ne pourrait pas fonctionner avec un humain à la place de pianoïdes.
05:29C'est un dispositif qui est vraiment fait pour jouer avec un robot.
05:39Un robot, donc, comme une démonstration de ce que l'intelligence artificielle peut apporter de bénéfique au créateur,
05:46à l'opposé de l'autre création de ce printemps, aujourd'hui,
05:50autour d'une figure des plus charnelles, à la voix envoûtante et bien humaine,
05:54celle de la diva égyptienne Oum Khalsoum.
05:57Première création de l'histoire du printemps de Bourges en langue arabe,
06:18avec Camélia Jordana, Swad Massi, Natacha Atlas et beaucoup d'autres grandes voix
06:24pour rendre hommage à la plus grande figure musicale du monde arabe.
06:27Une création, d'ailleurs, qui sera également jouée cet été au Festival d'Avignon,
06:30alors que je suis agressé par un pollen, excusez-moi.
06:33Allez-y Yann, ça me permet de signaler le temps que le pollen vous en débarrassiez, chère Yann,
06:42que Oum Khalsoum, donc hommage ce soir, on a vu à quel point c'était original, important,
06:47première fois d'une personnalité de la musique arabe qui sera rendue hommage.
06:52Une autre soirée aussi plus éclectique, Fatboy Slim et un Français qu'on connaît bien aussi.
06:58Ouais, il y aura Fatboy Slim et il y aura un certain MC Solar qui est aujourd'hui au printemps de Bourges.
07:06C'est un habitué du festival, c'est aussi évidemment l'un des parrains du hip-hop en France.
07:11Un bref de batterie coule sur la FM, il se mêle à mon sang et fait de moi un phénomène étrange.
07:17La cadence à fleurs de peau, 5, 4, 3, 2, 1...
07:20Voilà, MC Solar, ce soir, donc on l'a compris, sur la scène à Bourges, au printemps de Bourges,
07:27Yann Bertrand, vous éloignez des pollens, vous profitez quand même bien de la soirée qui va venir.
07:32Yann Bertrand, notre envoyé spécial au printemps de Bourges.
07:35On entendait au début de la semaine, d'ailleurs sur France Info, le directeur du festival nous dire
07:39qu'il fallait s'adapter à un budget un peu plus contraint que les années précédentes.
07:43On a vu que l'imagination, d'une certaine manière, est au pouvoir et le maire de la ville est en ligne avec nous aussi
07:48parce que, d'une certaine manière, ça va être bientôt le printemps toute l'année à Bourges.
07:52Bonjour Yann Gallu.
07:56Bonjour.
07:57Je pense évidemment à 2028 où Bourges sera capitale pendant toute l'année européenne de la culture.
08:03Avant de voir avec vous si les restrictions financières peuvent avoir un impact sur un tel événement,
08:08un mot d'aujourd'hui, chez vous, à Bourges, le budget de la culture, vous y touchez ou pas ?
08:13Non, non, on n'a pas du tout touché au budget de la culture, c'est un choix politique.
08:17Il a même un petit peu en augmentation.
08:19Mais c'est vrai que la perspective d'être capitale européenne de la culture en 2028
08:24nous a fortement aidés dans le débat politique en ce moment
08:28parce que tous les élus dans toute la France sont confrontés à des restrictions budgétaires.
08:32Nous, on a affirmé que la culture était essentielle.
08:35On n'a pas touché au budget.
08:36On ne l'aurait sûrement pas touché, bien entendu, même si on n'avait pas été capitale européenne
08:40parce que c'est un vrai choix politique.
08:42Comme je vous ai dit, il est même un petit peu en hausse.
08:45Mais c'est vrai que cet événement nous permet d'affirmer la priorité de la culture
08:49pour la ville de Bourges et pour l'ensemble du territoire.
08:51Parfois, on dit qu'il faut choisir.
08:53On parle notamment de la nécessité de réarmer la France.
08:56On sait à quel point, dans votre ville et dans votre région, du côté de Bourges,
08:59l'industrie de l'armement est importante.
09:01Vous vous dites qu'on n'est pas obligé de choisir entre l'un et l'autre.
09:04Moi, j'ai cette chance-là.
09:06Mais je ne suis pas sûr que tous mes collègues aient cette chance-là.
09:09Et c'est justement le fait qu'on a besoin, je le pense, en France,
09:13de réaffirmer que la culture ne doit pas être la variable d'ajustement
09:17des baisses de dotations de l'État
09:19et de la situation financière que notre pays traverse.
09:22Vous savez, je le redis, la politique, c'est des choix financiers,
09:26c'est des choix budgétaires.
09:27Et moi, je pense que la culture est un des piliers du pacte républicain,
09:32comme l'éducation.
09:33Et donc, il faut absolument continuer à affirmer dans notre pays,
09:37département par département, ville par ville,
09:40qu'il faut continuer à privilégier la culture
09:43parce qu'on peut considérer qu'elle coûte cher,
09:45mais elle rapporte énormément.
09:47Elle rapporte le vivre ensemble, elle rapporte le relationnel,
09:50elle rapporte le fait que les enfants puissent s'éveiller dans ce cadre-là.
09:55Et on voit les répercussions d'un tel festival que nous avons actuellement.
09:59Et on voit aussi les répercussions de ce que va être Bourges 28
10:02parce que ça va durer un an.
10:03Pendant un an, la ville de Bourges va être traversée par Bourges 28.
10:07C'est déjà aujourd'hui, monsieur le maire, excusez-moi,
10:09il y a déjà appel à projets, je crois,
10:11et des nombreux projets qui ont été soumis.
10:13Oui, vous avez parlé de Oumkalsoum,
10:16vous avez parlé de Marc Ferlet à l'instant.
10:18Ce sont des projets qui ont été montés dans le cadre de Bourges 28.
10:21Et au-delà du festival, il faut savoir que Boris Vedel,
10:24qui est le directeur du printemps de Bourges,
10:27sera le commissaire artistique de l'inauguration de la cérémonie d'ouverture.
10:32Donc tout rayonne dans ce sens-là.
10:35Nous sommes déjà en train de nous mobiliser
10:37et nous avons lancé, l'association qui maintenant pilote Bourges 28,
10:41qui s'appelle Bourges 28, a lancé des appels à projets
10:44parce que justement, moi je veux bien sûr qu'il y ait des grandes signatures nationales
10:47et internationales pendant cette année,
10:49mais que tout le territoire, toute la vie culturelle
10:52puisse participer de cet événement.
10:55Nous avons 400 projets locaux qui ont été déposés le 15 avril dernier,
10:59donc il y a quelques jours.
11:00Donc vous pouvez garantir que l'heure qui est ici ou là aux restrictions,
11:04les années qui peuvent être difficiles,
11:06encore on voit 2026 en termes de dépenses,
11:08ça ne jouera pas du tout sur Bourges 2028 et ce qui est prévu ?
11:13Écoutez, nous avions hier la chance d'avoir Achadati
11:16qui était présente au festival
11:18et elle a confirmé l'engagement de l'Etat
11:20parce qu'il faut bien comprendre,
11:22c'est bien sûr Bourges qui a été désignée
11:24après un long processus par un jury européen,
11:26mais c'est la France qui organise Bourges 2028.
11:29Donc c'est notre année, à nous la France,
11:32et vous connaissez l'impact de la culture française au niveau européen,
11:35il est clair qu'on ne peut pas réussir cette année Bourges 2028.
11:39Donc au moment où je vous parle, il n'y a pas de volonté de la part de l'Etat,
11:43je le redis, Rachida Dati est derrière nous,
11:46le gouvernement est derrière nous,
11:47il n'y a pas de volonté des partenaires de réduire la voilure par rapport à Bourges 2028.
11:52Nous avons cette chance-là.
11:53Et bien, engagement pris, on suivra ça de près.
11:55Bien évidemment, Bourges 2028, il reste un peu de temps,
11:58mais les projets c'est dès maintenant.
12:00Merci beaucoup Yann Gallu d'avoir pris quelques minutes sur France Info.
12:02Merge de Bourges.
12:03Merge de Bourges.
12:08Et comme pour une Frédéric Plassin,
12:10celui qui a photographié Paris et les Parisiens comme personne.
12:13Évidemment, Robert Douaneau, des bistrots aux enfants, aux amoureux.
12:17Son regard sur Paris a fait le tour du monde et marqué des générations,
12:20mais ça faisait 20 ans qu'aucune grande exposition
12:23n'y avait été consacrée dans la capitale.
12:25Bonjour Anne Chepot.
12:26Bonjour Frédéric.
12:27C'est dire l'événement au musée Mayol en ce moment,
12:30avec cette rétrospective, qu'est-ce qu'on peut y voir ?
12:33Eh bien, l'exposition du musée Mayol avec 400 photos
12:36couvre l'ensemble de la carrière du photographe des années 30 aux années 90.
12:40Une dizaine de thèmes ont été retenus,
12:42certains déjà largement développés,
12:44comme vous en parliez celui de l'enfance,
12:46qui ouvrent l'exposition, d'autres beaucoup moins.
12:49On découvre par exemple les créations personnelles de Robert Douaneau,
12:52collages et montages originaux réalisés dans le secret de son atelier.
12:56Il laisse ici libre cours à sa fantaisie.
12:59On découvre aussi ses photos sociales,
13:01un volet de son travail peu connu,
13:03photos de mineurs dans les profondeurs de la terre à Lens,
13:06d'ouvriers, de prostituées, de personnes en grande précarité,
13:09et son regard est toujours bienveillant.
13:11Il y a aussi ce rapprochement passionnant
13:13entre les photos que Robert Douaneau a faites en banlieue dans les années 40
13:17et celles qu'il réalise en 1984 pour la mission d'Atar.
13:21Dans les années 80, on s'aperçoit que l'humain a disparu.
13:25Mais Robert Douaneau, c'est aussi ce photographe qui répond à des commandes
13:28pour le magazine Vogue.
13:30Des filets de mode, portraits d'artistes dans leur atelier,
13:33à commencer par Picasso et la célèbre photo des pains de Picasso,
13:37la plus vendue au monde, paraît-il, avec bien sûr le baiser de l'Hôtel de Ville.
13:41Dont on ne dira pas si elle est cette photo du baiser de l'Hôtel de Ville
13:45ou pas à Obizé Mayol dans cette exposition.
13:48Toutes les photos sélectionnées notamment par les deux filles de Robert Douaneau.
13:52Bonjour Francine Desrudiles.
13:53Bonjour.
13:54Vous avez donc avec votre sœur Annette,
13:56avec la commissaire de l'exposition Isabelle Benoît,
13:58plongé dans ses archives avant de dire quels ont été vos critères
14:02pour choisir ces 400 photos ou environ.
14:04Je crois qu'il y a une masse de 450 000 photos de Robert.
14:08Mais c'est quoi, ça s'appelle une addiction ça ?
14:10Un petit peu, ça s'appelle aussi un gros travailleur.
14:14Et finalement on commençait à travailler très jeune.
14:18Donc il a commencé à travailler à 16 ans.
14:20Il s'est arrêté le jour où il est entré à l'hôpital.
14:22Et il avait 81 ans.
14:24Et je ne l'ai jamais vu sans un appareil photo.
14:27Oui c'est ça.
14:28Donc addiction peut-être, peut-être.
14:30Il y a peut-être quelque chose d'un peu étrange
14:33dans cette manière d'être obsédé par l'appareil photo.
14:36Vous avez été parfois à ses côtés,
14:38travaillé à ses côtés dans une agence de photos.
14:40C'était quoi, épuisant et passionnant en même temps ?
14:43Épuisant ?
14:44Vous savez, je crois que ce qui est épuisant, c'est l'ennui.
14:48Par contre, quand on fait des choses très intéressantes,
14:52non, ça n'a aucun intérêt d'être épuisé.
14:54Par contre, on travaille beaucoup.
14:56Ben oui, c'est vraiment...
14:57Je vais tenir des propos très moraux.
14:59J'ai appris à travailler beaucoup.
15:00Et je trouve qu'il n'y a pas grand-chose de plus marrant
15:03que de travailler beaucoup.
15:04Le choix, venons-en à ça, des photos 350,
15:07quels critères ?
15:08Un douano plus méconnu, c'était ça aussi votre volonté
15:11d'ouvrir un douano moins connu ?
15:13On avait vraiment envie d'échapper à son image
15:16un peu conventionnelle de photographe,
15:19avec toujours un espèce de sourire un peu niais à la bouche.
15:22Il était tellement autre chose que ça.
15:25Et il revendiquait le goût du bonheur,
15:29le goût de donner le bonheur.
15:31Ça, c'est certain.
15:32Il n'aimait pas s'apesantir sur la difficulté de la vie
15:38que tout le monde traverse.
15:39Il n'y a pas de vie sans drame.
15:41Il les montrait, par contre.
15:43Il faisait toujours un constat des lieux
15:47devant lesquels, en général, les objectifs se détournaient à l'époque.
15:53Maintenant, la photographie sociale existe.
15:55Regarder la réalité en face, c'est effectivement une dimension sociale
15:58qui n'est pas toujours forcément associée à un douano.
16:00Qui n'a pratiquement jamais été associée à lui,
16:04alors que c'était le gros de son travail.
16:06Mais c'est normal, parce qu'il représentait
16:09le photographe de l'amour, du bonheur de Paris, etc.
16:13Donc, on recherchait.
16:14À l'agence, je voyais les photos qui sortaient toujours.
16:16C'était celle-là qui a été demandée.
16:18Les autres existaient.
16:19Elles étaient dans des boîtes.
16:20Elles étaient parfaitement classées, répertoriées, légendées, etc.
16:23Mais personne n'en voulait.
16:24Il y a un risque de faire comme Amélie Poulain avec Dono ?
16:27Un sépia ?
16:28Il avait son risque, Amélie Poulain.
16:31Il n'y a pas de doute.
16:32Et on essaye de le faire échapper à ça.
16:34Ce n'était pas un personnage nostalgique du tout.
16:38Mais il y a une phrase de Queneau que j'aime bien,
16:42qu'on met dans l'exposition d'ailleurs.
16:44Queneau, dans «Courir les rues » dit
16:46« Il faut que j'aille voir avant que tout ça ne disparaisse. »
16:48Et dans le fond, mon père, c'est ce qu'il a dit tout le temps.
16:50Aller voir.
16:51Aller voir avant que ça ne disparaisse.
16:53Parce qu'il avait une idée très forte.
16:55C'était quelqu'un de certainement plus mélancolique
16:57qu'il ne pouvait souhaiter paraître.
17:00Et il avait un sens de la finitude, mais très très profond.
17:06Il avait un sens du fugitif très profond.
17:09Donc la photo, c'est l'anti-fugitif.
17:11On arrête un moment.
17:13Vous voulez entendre parler votre père de la photo ?
17:15Avec plaisir.
17:16Parce qu'il est tellement associé au Paris en noir et blanc.
17:19Mais il y a eu aussi, Anne en disait un mot dans les années 80,
17:23la banlieue en couleur.
17:24C'était une commande de la DATAR, l'aménagement du territoire en gros.
17:27Et le voilà à bord de sa voiture, à la Grande Borne,
17:30cité qui vient d'émerger à Grigny.
17:32À l'écouter, on saisit tout ce qui est le travail du photographe.
17:35Jusqu'ici à Grigny, j'ai eu une lumière rasante du petit matin.
17:39Et là, je voudrais bien essayer de boire avec cette lumière diffuse
17:44si, comme les volumes seront moins marqués,
17:48la couleur ne va pas ressortir encore davantage.
17:51Ah, la couleur sur fond gris, c'est ça,
17:53qui va être prioritaire par rapport au dessin.
17:56Ah oui, je pense que ce n'est pas une mauvaise idée.
17:59Je vais peut-être être déçu.
18:01On ne sait jamais avec ce métier.
18:04C'est le recyclage quotidien, permanent.
18:07Ben voilà, il a tout dit, Francine Daoudi.
18:09Le recyclage quotidien, permanent.
18:12Chaque jour est différent.
18:13C'est ça.
18:14Et puis, je constate que l'image, c'est très important,
18:16mais le sens, c'est pas mal aussi.
18:17La radio, c'est bien.
18:18Oh là là, c'est très très bien.
18:20Mais on l'entend dans ce qu'il dit.
18:23Je ne sais pas si c'est du perfectionnisme
18:25ou l'idée de se dire qu'à chaque moment, ça peut être mieux que la veille,
18:28et pourquoi pas trouver le bon endroit, la bonne heure et la bonne lumière.
18:32Donc, c'est infini, quoi, en fait.
18:33Il y a ça, mais il y a aussi quelque chose de très important chez lui.
18:37Il faisait confiance au hasard.
18:39Il pensait toujours qu'il fallait laisser son pied dans la porte pour laisser entrer le hasard.
18:45Il pensait toujours que si on attendait, si on avait une patience de pêcheur à la ligne,
18:50si on observait bien, il pouvait se passer quelque chose d'un peu mieux que l'instant d'avant.
18:55Donc, rester des heures et des heures et des heures ?
18:57Il y avait ça.
18:59Il ne fallait pas l'accompagner, parce que ça pouvait lasser.
19:02Je crois qu'il se considérait, d'ailleurs, je crois qu'il parlait de lui comme d'un pêcheur.
19:06C'est ça que vous disiez, pêcheur à la ligne ?
19:08Il était d'ailleurs un pêcheur assidu.
19:10Il aimait beaucoup pêcher, mais il n'aimait pas le terme de chasseur d'images,
19:15parce qu'il n'était pas la chasse.
19:17Mais la pêche, par contre, oui, le mystère de la rivière,
19:20le mystère de l'instant présent où on allait essayer de pêcher quelque chose qui n'est pas apparent.
19:24Oui, c'était lui, ça.
19:26Et moi, j'avoue que j'ai découvert dans ce que disait Incheppo
19:29qu'il avait aussi photographié, pour moi, c'était le photographe, effectivement, de Paris, de ses rues,
19:34du social, populaire, mais pas des célébrités.
19:38Picasso, il a photographié Picasso aussi.
19:41Beaucoup, parce qu'en même temps, c'est un photographe qui gagnait sa vie avec la photographie.
19:46Donc, il attendait les commandes.
19:48Paris Match a aidé déjà un peu, les ancêtres de Paris Match.
19:51Pas seulement, l'œil, par exemple, qui faisait des numéros spéciaux sur des grands artistes,
19:56lui commandait, c'était Delpire qui était à la manœuvre,
19:59et lui commandait des reportages chez Braque, chez Picasso, etc.
20:02Et il était extrêmement heureux d'approcher ces grands artistes, vraiment.
20:07Et ce qui est incroyable dans l'exposition, c'est que finalement, dans cette partie sur les ateliers d'artistes,
20:12en fait, on s'aperçoit qu'il a photographié à peu près tous les artistes modernes d'après-guerre.
20:17C'est incroyable.
20:18C'est un panorama complet de l'art moderne.
20:21On aurait pu remplir le musée.
20:23Et c'est qu'une sélection.
20:24C'est une sélection très sévère.
20:25Parce qu'on aurait vraiment pu remplir le musée avec ses photos d'ateliers d'artistes.
20:28Il était très heureux dans les ateliers d'artistes.
20:31C'était pas un homme de chaises longues, vous voyez.
20:34Aller photographier les gens en vacances, ça ne s'intéressait pas trop.
20:37Vous travaillez aussi comme vous ?
20:39Vous êtes bien la fille de votre père ?
20:42On essaye.
20:43Mais dans les ateliers d'artistes, il est retrouvé quelque chose qui résonnait en lui, forcément aussi ?
20:47Les ateliers d'artistes, c'est le lieu de travail.
20:49Les gens sont sur leur lieu de travail et sont toujours bien sur leur lieu de travail.
20:53Et puis, il y avait la possibilité, dans une photo, d'avoir les œuvres, d'avoir les outils.
20:59Et donc là, il était parfaitement à l'aise.
21:01Et c'est pour ça qu'on a essayé de sélectionner des photos d'ateliers d'artistes, plus que de portraits d'artistes.
21:07Vous avez eu la gentillesse de dire à quel point la voix était importante et à la radio, elle passait bien.
21:11Il y a un exercice très difficile en radio, c'est d'écrire une photo.
21:14Mais est-ce que vous avez une photo, si vous avez une expo à faire avec une photo de Robert Douaneau ?
21:18En ce moment, parce que les photos préférées, on m'interroge beaucoup là-dessus.
21:22Les photos préférées, ça change.
21:24Ça change avec notre humeur, avec ce qu'on a regardé la veille, avec l'ambiance actuelle.
21:31L'ambiance actuelle, elle n'est pas joyeuse.
21:33L'ambiance actuelle, elle meurt.
21:35Il y a une espèce d'anxiété sociale qui est quand même très grande.
21:39Il y a une photo en ce moment que j'adore dans cette exposition.
21:43Il faut aller la voir.
21:45Ça s'appelle Monsieur Ali à Vitry.
21:48Monsieur Ali, c'est un grand black qui vit dans la rue.
21:54Il a une caravane et cette caravane, il l'a améliorée.
21:59Il a fait pousser un espèce de jardin vraisemblable.
22:02Il décore, il met des objets, etc.
22:05Et mon père lui demande de poser devant sa caravane.
22:08Et Monsieur Ali, il met sa veste.
22:10Il pose devant sa caravane avec une dignité, je le trouve très beau, Ali.
22:14C'est le type même de l'homme qui n'a rien, qui ne possède rien, qui ne représente rien.
22:22Le dénuement mais la dignité.
22:24Mais la dignité toujours.
22:25C'est les années 80 ça ?
22:27C'est quoi de couleur ?
22:28C'est un peu avant, c'est la fin des années 70.
22:31Vous parlez très bien de la photo à la radio Madame.
22:33Vous êtes vraiment très gentille Monsieur.
22:35La fille de Robert Douaneau.
22:36Merci beaucoup l'expo, Anne, au musée Mayol.
22:38Jusqu'à quand ?
22:39Jusqu'au mois d'octobre.
22:40Jusqu'au mois d'octobre.
22:41On a le temps.
22:42Allez-y, précipitez-vous.
22:43Merci.
22:44Et en attendant, écoutez tout public sur franceinfo.fr ou en podcast via l'application
22:49Radio France.
22:50A demain Frédéric Carbone.