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Transcription
00:00Nutella, Folavril, Anal, Clafouti ont été refusés par l'état civil
00:04parce qu'ils sont partis du principe que c'était préjudiciable pour l'enfant.
00:07Le prénom, c'est vrai que c'est la première chose qu'on dégaine en maternelle.
00:11Les parents essayent vraiment de faire en sorte que le prénom soit une marque de singularité.
00:16Il faut savoir qu'en 1900, il y avait seulement 1700 prénoms et aujourd'hui, il y en a 35 000.
00:21Kevin, Cindy et Pamela, par excellence, ce sont des prénoms des années 90
00:25parce que c'est Alerte Malibu, parce que c'est Danse avec les loups de Kevin Costner.
00:28C'est très dangereux d'utiliser un prénom américain
00:31parce que ce sont souvent des gens très beaux, esthétiquement très mis en valeur.
00:37S'appeler Cindy et être en surpoids dans la cour de récré, ça peut rapidement virer au drame
00:41parce que, évidemment, Cindy Crawford et la petite fille étaient montrées du doigt
00:45parce qu'elle s'appelait comme un mannequin et elle n'avait pas la taille mannequin.
00:48Kevin est un prénom qui a énormément vieilli, très vite.
00:51En 1991, on dénombrait des dizaines de milliers de Kevin en France.
00:55C'était un véritable phénomène de société.
00:57En 1994, il était déjà presque éteint.
00:59Et il est même fort probable que certains prénoms très en vogue aujourd'hui,
01:03type Alma et Mathéo, deviennent complètement ringards dans 20 ans,
01:07mais redeviennent à la mode dans 40.
01:09Moi, j'ai appelé ma fille Angèle, par exemple.
01:11C'est le prénom de ma grand-mère que j'adorais.
01:14Aujourd'hui, Angèle, qui portait le prénom d'une vieille Corse,
01:17porte le prénom d'une star. Pour combien de temps ?
01:19Il faut faire attention au prénom fantôme, le prénom d'un enfant mort.
01:23Il faut éviter. L'enfant mort a son prénom, l'enfant vivant a le sien.
01:27Il faut aussi se méfier des devoirs de loyauté.
01:32Je pense à Yves Alexandre, qui portait le prénom de ses deux grands-pères.
01:35Un grand-père était très aimé, l'autre était détesté,
01:37mais ils l'ont quand même appelé du prénom du grand-père détesté.
01:40Ça peut donner lieu chez l'enfant à des confusions et une difficulté de trouver sa place,
01:45notamment auprès de la fratrie.
01:46Je pense à Huguette, par exemple, qui disait
01:49« Ma mère a laissé tranquille mes sœurs, en les appelant à l'époque Sylvie, Françoise,
01:55des prénoms de l'époque. Et moi, elle m'a filé vraiment le prénom de la grand-mère. »
01:59À la fois, c'est une sorte de privilège,
02:02et à la fois, c'est se retrouver aussi en décalage
02:05par rapport à des gens qui ont des prénoms dans la norme.
02:07Je dirais qu'il faut toujours se méfier de notre narcissisme.
02:10On appelle un enfant d'un prénom parce qu'on aime ce prénom,
02:13mais il faut toujours avoir une certaine distance,
02:16c'est-à-dire, par exemple, l'appeler comme « soi »,
02:18il y a quand même quelque chose qu'on dit à l'enfant.
02:20On pourrait aussi se dire que donner un prénom un petit peu plus froid,
02:25on va dire, ça peut laisser l'enfant tranquille, en quelque sorte.
02:28Mais dans le même temps, s'il n'y a pas de narcissisme du tout,
02:31ces parents qui appellent leur enfant comme tout le monde,
02:33ça questionne aussi, dans la mesure où un enfant doit être quand même,
02:37malgré tout, investi.
02:39On doit aimer son prénom.
02:41C'est toute la difficulté de trouver un prénom qui soit à la fois singulier, inventif,
02:46et à la fois assez banal pour passer inaperçu par moment.
02:50Le prénom, c'est un condensé de représentation qui en dit très très long sur l'individu.
02:57C'est un condensé de représentation qui soit à l'enfant de l'enfant de l'enfant de l'enfant de l'enfant.

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