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00:0011h-13h, Pascal Praud sur Europe 1.
00:03Annie Dupéret, bonjour !
00:04Bonjour !
00:05Et vous êtes là pour votre livre « Respire, c'est de l'iode » aux éditions du Seuil.
00:10Et vous éditez au Seuil depuis toujours ?
00:13Depuis 53 ans, j'ai compté.
00:16Je suis entrée effectivement comme auteure au Seuil, j'avais 24 ans,
00:20avec François-Régis Bastide, que vous avez peut-être connu,
00:24et puis j'ai fait deux romans, et puis après j'ai mijoté ce livre,
00:28le livre que je devais écrire un jour,
00:30qui est à propos de la mort de mes parents et de ce déni du deuil que j'avais,
00:35Le Voile Noir, et là je l'ai fait avec Louis Gardel.
00:39Et puis quelques autres livres, et puis après Frédéric Morat,
00:42et puis maintenant une nouvelle éditrice.
00:45Donc voilà, je n'ai jamais vu aucune raison de quitter le Seuil.
00:49Et vous y êtes bien.
00:50Alors à chaque fois qu'on vous voit, on est surpris par votre énergie,
00:53votre vitalité, votre bonheur de vivre.
00:55Et puis on parlait des rencontres tout à l'heure,
00:57et c'est vrai que cette vie, on peut vous envier forcément,
01:00puisque vous avez rencontré tellement de gens qui sont dans l'histoire artistique française.
01:05Ah bah oui, ça c'est des choses que les moins de 50 ans, comme dirait l'autre.
01:08J'ai eu le bonheur, vu mon grand âge, de connaître de grands acteurs,
01:11qui étaient aussi de Solide Déconneur, Rochefort, Marielle, Bedos, Ladoux, Belmondo, Perrier, Brasseur.
01:16Est-ce que la vie c'est d'abord des rencontres ?
01:18Oui, c'est d'abord des rencontres, et puis si vous voulez, je suis rentrée dans ce métier,
01:26moi qui me destinais à la peinture, en fait j'étais au Beaux-Arts,
01:30et je suis rentrée un petit peu, je ne dis pas par hasard au conservatoire,
01:33mais parce que j'écrivais déjà beaucoup, pour continuer à étudier des textes.
01:37Donc, et ça à 15 ans, et en fait, je n'avais sur le métier d'actrice aucun investissement.
01:48Et c'était pas tant.
01:50Je vais vous dire, n'avoir aucune projection idéale de soi dans l'avenir,
01:54pour devenir la grande actrice, ou avoir le grand rôle, c'est formidable.
01:58Parce qu'on prend les choses comme elles viennent,
02:00et comme on n'a pas du tout d'ambition comme ça, de projection de soi,
02:07ça évite les jalousies, ça évite les déceptions.
02:10C'est peut-être ça aussi, bon, il se trouve que...
02:13Mais vous êtes servi depuis toujours, effectivement, par un physique exceptionnel.
02:17Ben, il y a eu ça, il y a eu ça.
02:20C'était très drôle d'ailleurs, quand Yves Robert et Jean-Louis Dabadi
02:25sont venus au théâtre dans ma loge me proposer un éléphant sa trompe,
02:29Yves, qui avait été le producteur d'un film que j'avais fait,
02:33m'a dit, écoute Annie, on sait que tu cherches le contre-emploi,
02:37le rôle différent qui va te sortir de composition,
02:41qui va te sortir du rôle de grande belle jeune femme,
02:44et ben on est désolé, on va te proposer exactement le contraire.
02:47Vous savez qu'il y a des gens qui regardent quasiment une fois par mois
02:49Un éléphant s'a trompé énormément.
02:51C'est le doudou des français.
02:52C'est incroyable.
02:54La veille du confinement, un éléphant sa trompe,
02:58ça va nous les anesthésier.
03:00Là.
03:01Et les tontons flingueurs dans la foulée.
03:02Il y a une scène que j'adore,
03:03parce qu'on l'a vu 12 millions de fois,
03:04c'est quand Jean Rochefort est manifestement intimidé,
03:10il a son costume trois pièces,
03:11il vous voit pour la première fois,
03:13et il dit,
03:13« Ah, je suis... »
03:15Vous voyez la scène,
03:16il dit,
03:16« Ah, je ne veux pas être comme ça, etc. »
03:19Et je trouve que cette scène est tellement formidable,
03:21et la chance là aussi que vous avez,
03:23c'est des acteurs,
03:24c'est une génération d'acteurs dont vous faites partie,
03:26qui est exceptionnelle.
03:28Et elle était formidable.
03:29Elle était formidable.
03:30Et ils sont tous curieusement,
03:33c'est drôle,
03:33j'avais présenté au César le prix du scénariste,
03:39et je suis contente d'avoir ça,
03:40et c'était, je crois que c'est Rochefort qui venait de partir,
03:46c'était juste avant le confinement, je crois,
03:49et j'ai dit,
03:51c'est très curieux,
03:52parce qu'ils sont tous morts pour des raisons différentes,
03:55mais comme s'ils s'étaient tous donné le mot
03:57de partir avant,
03:59de ne pas voir ce qu'on est en train de vivre.
04:00Tu vois,
04:02c'était comme s'ils s'étaient donné le mot,
04:04allez,
04:05vaut mieux se tirer maintenant.
04:07Bon,
04:07c'était la génération des années 30,
04:09ils étaient tous nés dans les années 30,
04:11et c'est vrai qu'ils sont tous partis.
04:12Je ne parle pas que de ça,
04:13c'est vrai que ce bouquin,
04:15il m'est venu comme ça.
04:16Le bouquin,
04:16il est formidable,
04:17parce qu'en fait,
04:17c'est votre vie,
04:18vous parlez de tout,
04:18par exemple,
04:18vous parlez de la mère que vous êtes,
04:20vous parlez,
04:21alors on connaît Sarah Géraudot,
04:22bien sûr,
04:23et c'est bien,
04:24sans doute,
04:25d'avoir une fille
04:26qui fait le même métier que soi,
04:28vous avez dû être fière de ça,
04:29qu'une formidable comédienne,
04:31en plus c'est compliqué,
04:32peut-être,
04:32c'est à la fois simple,
04:33c'est toujours pareil,
04:34c'est à la fois simple,
04:35et parce que ça...
04:36Ça ne l'est plus,
04:36parce que maintenant,
04:37elle est partie pour une si belle carrière,
04:39mais au début,
04:39oui,
04:40au début,
04:41oui,
04:41Sarah,
04:41je dois dire en préambile
04:43que pour une femme
04:43qui avait eu si peur
04:44de se décider à donner la vie,
04:46le fait d'être enceinte
04:47fut un bonheur absolu,
04:49d'abord par chance,
04:50ou hasard de constitution,
04:52il me fut épargné
04:53toutes les nausées et malaises
04:55qui accompagnent souvent cet état.
04:56Mais parfois,
04:57on dit un comédien,
04:58une comédienne,
04:59c'est très retourné sur soi,
05:00etc.
05:00Bon,
05:01on peut quand même s'occuper
05:02de ses enfants
05:02et puis faire qu'ils deviennent
05:03ce qu'ils sont devenus.
05:05Mais à l'époque,
05:06on travaillait,
05:08heureusement,
05:08j'avais ma tante
05:09qui m'a élevée,
05:10dont je parle aussi dans le livre,
05:12ma tante qui m'a élevée,
05:13qui m'a aidée,
05:14il y avait quelqu'un,
05:15et c'est vrai qu'on travaillait,
05:18ils savaient qu'on travaillait,
05:19qu'on partait,
05:20je suis partie en tournée,
05:21moi,
05:21avec les enfants,
05:22effectivement,
05:22donc c'était pas forcément facile,
05:24mais on assumait ça.
05:28On travaillait,
05:29donc,
05:29ils devaient l'accepter,
05:30ils n'étaient pas plus malheureux que ça
05:31et plus mal élevés,
05:32quoi.
05:33Il y a toujours un mystère
05:34chez un comédien,
05:35il y a des excellents comédiens
05:37et puis ils ne touchent pas le public.
05:39Et vous,
05:39avec effectivement
05:40les feuilletons de TF1,
05:42une famille formidable,
05:43notamment.
05:43Ah bah oui, oui, oui.
05:44Qu'est-ce qui fait,
05:45à votre avis,
05:46qu'on devient
05:47une vedette populaire ?
05:50Je ne sais pas,
05:51il y a eu les familles formidables.
05:52Il y a eu les familles formidables
05:53dont je raconte
05:54le hasard inouï
05:55qu'a été
05:56ces familles
05:58quand elles sont tombées
06:00dans ma vie
06:00au moment où je finissais
06:02d'écrire Le Voile Noir.
06:04On m'annonce
06:05un début de tournage
06:06le lendemain du jour
06:07où j'avais promis
06:08de rendre mon livre.
06:10Trois films
06:11alors que j'en voulais un
06:12pour m'alléger un peu
06:14le moral
06:15qui allait quand même
06:15à la fin du livre
06:16un peu lourd.
06:18Et je rencontre
06:18le metteur en scène
06:19qui allait créer
06:20cette chose-là
06:21et on découvre
06:21en quatre phrases
06:22qu'on est orphelin
06:24de père et de mère
06:24au même âge.
06:26Et là,
06:27je dois dire
06:27qu'on a tous les deux
06:28tourné la tête en haut
06:29en disant
06:30trop bien organisé.
06:32Trop bien organisé là.
06:33Il y a...
06:34C'est...
06:35Moi, je...
06:36Moi qui ne crois pas
06:38forcément à un dieu,
06:39je crois au mystère.
06:41Et dans ce mystère,
06:43il y a des anges.
06:44Il y a des anges.
06:45J'ai eu tellement
06:45de hasard inouï
06:47comme ça
06:47que j'ai écrit un livre
06:48qui s'appelle aussi
06:49Le rêve de ma mère
06:49où effectivement,
06:52je me suis dit
06:52c'est pas possible.
06:54Ma mère qui a dû abandonner
06:55parce qu'à l'époque
06:56c'était comme ça.
06:57Quand on avait un enfant,
06:58on quittait son travail,
06:59on était retour à la maison.
07:01Et ça ne lui allait pas du tout
07:02à ma maman
07:03qui a été élevée
07:03dans un cirque
07:04qui était...
07:05Et je me suis dit
07:07si ça trouve,
07:08de là-haut,
07:09j'ai fait tout ce qu'elle aurait.
07:11Elle m'a conduit
07:12à faire tout ce qu'elle aurait aimé faire.
07:15Pour quelqu'un
07:15qui ne croit pas en dieu ?
07:17Mystère.
07:18Oui.
07:18Le mystère.
07:19Le mystère.
07:20Parce que si un dieu existe,
07:21il ne doit pas être fier de lui.
07:24On ne sait pas
07:25si un dieu existe
07:26ou si il n'existe pas.
07:27On espère qu'il existe.
07:29On espère qu'il existe quand même.
07:31Qu'il y a quelque chose.
07:33Vous faites...
07:34Alors, évidemment,
07:35il y a la comédienne.
07:37Vous disiez
07:37que vous vouliez peindre,
07:39vous écrivez,
07:40vous avez fait des romans,
07:41vous avez fait des récits.
07:43Et puis,
07:44il y a un spectacle
07:44Viens Poupoule
07:45au théâtre de la Michaudière.
07:47du 15 avril au 6 août prochain.
07:51Non, non, c'est juste
07:51qu'on a une représentation exceptionnelle.
07:53Oui, le 6 août, pardonnez-moi.
07:53Le 15 avril, mardi, là.
07:55Exactement.
07:55À la Michaudière, on chante.
07:57Exactement.
07:57Alors, Viens Poupoule,
07:58mais vous allez interpréter
08:00des chansons anciennes ?
08:02Alors, oui, oui, oui, oui,
08:03nous avons un spectacle avec...
08:05Il y a 6 août également
08:05au festival de...
08:06Ramatfeld, c'est pour ça que...
08:08Ramatfeld, le 6 août, voilà.
08:09Ça fait un bout de temps déjà
08:10qu'on a ce spectacle
08:11sur le café-concert
08:13et deux cafés-concerts.
08:14Avec Charlène Duval,
08:16mon camarade et partenaire
08:18et un excellent pianiste.
08:19On a 19 chansons,
08:2018 chansons
08:21de l'époque du café-concert
08:23et on a des interventions
08:24pour expliquer aux gens aussi
08:25qu'est-ce que c'était
08:26que le café-concert
08:27et les personnages
08:28et le comique troupier.
08:30Pourquoi est-ce que les gens
08:31hurlaient de rire
08:31sur un personnage
08:33habillé en troufion
08:33alors qu'il y avait eu
08:34des millions de morts en 70
08:36et des millions de morts en 14 ?
08:38C'est quand même
08:38une époque absolument
08:39troublante, étonnante
08:41dont on sait peu de choses.
08:43Donc on a fait un spectacle
08:44qui est à la fois
08:44culturel, disons-le,
08:47et très drôle
08:48et dont les gens sortent
08:49très heureux, quoi.
08:50Je vois également
08:51que dans ce livre
08:52vous parlez de tout
08:53et notamment de la fin de vie,
08:55disons-le,
08:55les esprits religieux
08:56me diront qu'on n'a pas le droit
08:57de disposer de son sort final
08:59mais Dieu a-t-il ordonné
09:00que la médecine
09:01nous fasse vivre
09:02jusqu'à 100 ans et plus
09:04et dans quel état
09:05le plus souvent ?
09:06Oui, c'est une question
09:07qu'on peut se poser,
09:08effectivement.
09:09C'est vrai que
09:10c'est vrai que
09:12bon, on pense toujours
09:14que si on doit être un jour
09:15quand on est indépendante
09:17et active
09:17comme vous,
09:18je suppose,
09:20moi,
09:20imaginer qu'un jour
09:21je sois
09:22coincée entre quatre murs,
09:25prisonnière de mon corps
09:26quelque part,
09:27de ne pas pouvoir
09:27sortir,
09:29de ne pas pouvoir marcher,
09:29de ne plus pouvoir agir,
09:31d'attendre son petit repas,
09:32d'attendre tout ça,
09:33moi, l'idée
09:34qu'il puisse y avoir
09:35une issue de secours
09:37pour ne pas rester prisonnière
09:38dans ce corps,
09:39moi,
09:39mais complètement,
09:40alors peut-être
09:41je n'aurai pas le courage
09:42de le faire,
09:42peut-être
09:43les circonstances feraient,
09:45mais l'idée
09:46que ça puisse exister,
09:48je trouve que
09:48c'est très soulageant,
09:50c'est pour ça que
09:51oui,
09:51je suis pour le choix
09:53de sa fin de vie
09:55dans le cas
09:56où on le souhaite vraiment,
09:58où on trouve
09:59que ce qu'on vit
09:59est insupportable.
10:00Et quand je dis
10:01que ce livre
10:02qui est formidable,
10:03d'ailleurs,
10:03dont on va rappeler
10:04évidemment le titre
10:05Respire,
10:06c'est de l'iode.
10:07Respire,
10:07c'est de l'iode,
10:08la première phrase
10:08que ma grand-mère
10:09me disait
10:09sur le port de Dieppe
10:10qui puait le gasoil
10:12et le poisson pourri
10:12pour me requinquer
10:14en tant qu'orpheline,
10:15allez,
10:15respire,
10:16c'est de l'iode.
10:18Donc,
10:18vous parlez évidemment
10:20de tous les sujets,
10:22les rencontres,
10:22des petites phrases
10:23qui me sont restées en mémoire.
10:24Mais aussi,
10:25forcément,
10:26hier,
10:26il y avait
10:26la fin
10:28d'une commission d'enquête
10:29consacrée à MeToo
10:30avec des nouvelles recommandations,
10:32avec une nouvelle manière
10:33de procéder parfois
10:35et puis avec ce qui s'est passé
10:37dans le cinéma français.
10:39Bon,
10:39vous avez été témoin de cela.
10:42Je ne sais pas
10:42le regard
10:43que vous portez aujourd'hui.
10:45Vous dites,
10:45je pense profondément...
10:46C'est sûr
10:46qu'il y a eu
10:47des excès,
10:49des impunités
10:50qu'il est absolument légitime
10:52d'arrêter.
10:52Mais vraiment,
10:53complètement.
10:54Et par contre,
10:55je trouve qu'on en fait
10:56beaucoup,
10:56beaucoup dans le sens inverse.
10:58Mais c'est vrai
11:00qu'il y a eu
11:01des excès.
11:02Alors,
11:03c'est vrai que je suis
11:04un cas un peu spécial.
11:06C'est que
11:06une femme,
11:09très intelligemment,
11:10m'a dit,
11:10effectivement,
11:11Annie,
11:11j'ai lu vos livres,
11:12je connais votre vie.
11:13Je sais la manière
11:14dont vous avez réagi.
11:16Vous êtes une survivante
11:18avec une résilience terrible
11:20comme ça.
11:21Elle me dit,
11:21je crois que...
11:22Excusez-moi,
11:23elle s'est excusée,
11:24elle m'a dit,
11:24je crois que vous ne pouvez
11:26pas comprendre.
11:27Parce que vous n'aviez
11:28pas de faille.
11:30Et effectivement,
11:30j'ai tourné avec des...
11:33Notamment un acteur
11:34qui était un prédateur
11:35assez connu,
11:37et j'ai tourné
11:37des scènes terribles
11:38avec lui,
11:38à moitié à poil,
11:39où il y a des violences,
11:41etc.
11:41Et il était,
11:43mais d'une correction,
11:44avec moi.
11:46Mais alors,
11:46c'était...
11:48Voilà,
11:49j'étais...
11:50J'étais trop fort,
11:51j'étais inattaquable.
11:52Je suis en train de chercher
11:52évidemment cet acteur
11:54que par délicatesse
11:55on ne citera peut-être pas.
11:57Si,
11:57je peux le dire,
11:58parce qu'il se trouve que,
11:59tu sais,
12:00j'ai été photographe aussi,
12:01j'ai fait des expos photos,
12:03et que j'avais un magnifique portrait
12:04de Klaus Kinski.
12:06Ah,
12:06c'était Klaus Kinski ?
12:07Klaus.
12:07Et j'ai un magnifique portrait
12:09de lui,
12:10et j'ai appelé sa fille,
12:11tu sais,
12:11quand on fait une expo
12:12ou un bouquin
12:13pour demander l'autorisation,
12:14j'ai eu Nastasia au téléphone,
12:16et quand elle m'a appris
12:17qu'il avait violé
12:18ses deux filles,
12:19en se vantant
12:21que c'était la plus belle chose
12:22qui lui soit arrivée
12:22dans sa vie,
12:23j'ai dit à Nastasia,
12:24cette photo,
12:26je regrette
12:27parce qu'elle est belle
12:27en tant que photographe,
12:28n'existe plus.
12:30Personne ne la verra.
12:31Personne ne la verra.
12:33Parce que,
12:33moi,
12:33je ne savais pas quoi penser,
12:35parce qu'avec moi,
12:35j'avais entendu des trucs,
12:37mais comme avec moi,
12:38il s'était tenu,
12:39il avait senti
12:39qu'il n'y avait pas la faille,
12:40il ne pouvait pas rentrer.
12:41Il ne pouvait pas,
12:42il m'attaquait.
12:43Donc,
12:44je ne savais pas quoi penser,
12:45tu vois.
12:46Mais quelle horreur,
12:47effectivement.
12:49c'est essentiel,
12:50c'est-à-dire que
12:51ce qui me frappe,
12:52moi,
12:52dans ces témoignages,
12:54c'est que
12:54ces hommes-là
12:55s'attaquent
12:56à des femmes faibles,
12:59à des femmes tragiques.
12:59Et ils sentent,
13:00le prédateur a un pif
13:02pour sentir la faille
13:03où il va pouvoir y aller.
13:04Et ce qu'on devine,
13:05en vous voyant immédiatement,
13:07c'est qu'effectivement,
13:09vous êtes forte,
13:11bien sûr.
13:12Et lorsque cette femme,
13:14très intelligemment,
13:15vous dit
13:15vous ne pouvez pas comprendre,
13:17elle a raison.
13:18Elle n'a pas tort.
13:19Elle n'a pas tort,
13:20c'est vrai que j'ai été...
13:22Moi,
13:22c'est ça qui me frappe
13:23dans toutes ces histoires
13:24qu'on a souvent entendues,
13:26c'est s'attaquer.
13:27C'est terrible,
13:28d'ailleurs.
13:28Ça en dit beaucoup
13:29sur ces psychologies,
13:31de s'attaquer
13:32à des femmes
13:33qui sont fragiles
13:34et qui sont faibles.
13:37Alors voilà,
13:37j'espère que ce livre,
13:38positif...
13:39Oui,
13:40mais vous êtes
13:40une nature positive.
13:41Et voilà,
13:42je disais,
13:43c'est un livre à sieste.
13:4432 petites phrases
13:45qui donnent lieu
13:46à 32 textes
13:47sur des tas de sujets,
13:48des anecdotes,
13:49des choses comme ça.
13:50Mais vous regardez,
13:52vous visitez le passé
13:53et vous n'êtes pas
13:54ni mélancolique
13:54ni nostalgique.
13:56Non.
13:57Ou en tout cas,
13:57vous ne l'exprimez pas.
13:59Non.
13:59Peut-être y a-t-il
14:00une forme de pudeur
14:02aussi là-dedans
14:03que vous n'avez pas envie.
14:04Mais peut-être
14:05qu'au fond,
14:06de temps en temps,
14:06vous vous dites
14:07effectivement,
14:08le temps a passé.
14:09Comme tout le monde.
14:11Comme tout le monde,
14:12effectivement.
14:12Il y a des matins gris.
14:13Tout le monde
14:14a des matins gris
14:15où tout à coup,
14:15on se dit,
14:15mon Dieu,
14:16dans quel monde on vit
14:17et ceci et cela.
14:18Mais c'est vrai
14:19que j'essaie toujours
14:20de trouver le positif.
14:21J'essaie toujours
14:21de trouver
14:22ce que je peux offrir
14:26aux gens
14:26un petit peu de lumière.
14:29Et ce bouquin,
14:30j'aimerais bien
14:30qu'il fasse ça.
14:32C'est super.
14:33Et puis,
14:34il reste effectivement
14:35celui qui a été
14:36votre compagnon
14:37les films,
14:38le théâtre,
14:39d'un merveilleux acteur
14:40qui avait aussi
14:41beaucoup touché le public
14:42parce que lorsqu'il avait
14:43été malade,
14:44il avait témoigné.
14:45Et c'est vrai
14:46qu'il avait aussi
14:47beaucoup de grâce
14:48en lui,
14:48Bernard Giraudot.
14:49Il était beau,
14:50il était intelligent.
14:51C'est vrai que
14:52j'avais...
14:54Bernard était tellement
14:55difficile,
14:56tellement difficile.
14:58Il avait peur
14:58du bonheur.
14:59Il disait,
15:00quand on était bien,
15:00il disait,
15:01ça y est,
15:01on devient con.
15:02Enfin,
15:02c'est bon.
15:03Et moi qui avais eu
15:03des vrais malheurs,
15:04je me disais,
15:04mais comment est-ce
15:05qu'il ne peut pas
15:05comprendre la chance
15:08qu'on a ?
15:09La chance qu'on a quand même
15:10et d'avoir deux beaux enfants
15:11en pleine santé
15:12et d'avoir ceci
15:13et d'avoir cela.
15:13Et non,
15:14il fallait toujours
15:14quelque chose,
15:16un mur pour taper dedans.
15:17Parce que sinon,
15:18on s'ennuyait.
15:19Et c'est le cancer,
15:21alors malheureusement,
15:22il n'a pas compris avec moi.
15:23Oui,
15:23mais c'est...
15:23C'est le cancer
15:24qui lui a fait comprendre.
15:25Oui,
15:25mais il était allé vers vous
15:28pour ça.
15:29Parce que vous étiez vous.
15:30Oui,
15:30peut-être,
15:31parce que j'étais son côté positif,
15:32mais c'était pas facile à vivre
15:34et j'aurais aimé
15:35qu'il le comprenne
15:36sans avoir besoin
15:37d'être malade pour ça.
15:38Et lorsque cette maladie
15:41est arrivée,
15:42il a eu ce sentiment
15:43d'avoir perdu justement
15:44l'essence de...
15:46qu'il avait souvent perdu...
15:47Il a tout compris.
15:47Oui.
15:48Il a tout compris.
15:49On a beaucoup parlé
15:50et il pleurait beaucoup
15:52quand je lui ai dit
15:53des choses qu'il avait dites
15:54ou que là,
15:55il m'a dit
15:55comment j'ai pu dire ça
15:57quand j'ai...
15:57C'est incroyable.
15:58Quelqu'un qui se retourne
15:59comme un gant
16:00tout à coup
16:00et qui,
16:02au lieu d'être en colère
16:03tout à coup,
16:04et c'est la maladie
16:05qui a fait ça
16:06et l'a retourné complètement,
16:08et il a vu tout le positif,
16:09tout ce qu'il avait raté.
16:10Enfin, c'est incroyable.
16:12C'est incroyable.
16:13C'est dommage
16:13que ce ne soit pas moi
16:14qui lui ai fait comprendre.
16:16Mais oui,
16:17c'est des expériences
16:18effectivement de vie.
16:20Cette maladie,
16:21tout d'un coup,
16:22lui fait comprendre
16:23la beauté de la vie.
16:25Mais on est tous...
16:26On dit tous la même chose.
16:28La vie est à la fois horrible
16:29et c'est un miracle.
16:30Très bien, très bien.
16:31Et c'est un miracle.
16:33Mais comment sortir...
16:34Elle peut être horrible
16:35et c'est un miracle.
16:36Et comment sortir
16:37de cette contradiction ?
16:39Peut-être en lisant
16:40vos livres.
16:41C'est ce que je fais moi
16:42depuis toujours
16:43parce que Le Voile Noir,
16:44je me souviens de l'avoir lu,
16:45c'était vraiment un choc
16:47Le Voile Noir
16:48pour ceux qui l'avaient lu
16:49à l'époque
16:50et à chaque fois
16:50vous rencontrer
16:51à travers la lecture,
16:52c'est un bonheur.
16:53Merci beaucoup
16:54Annie Dupéret.
16:55Merci à vous, Pascal.
16:56Vous êtes dans nos vies.
16:57Vraiment,
16:57vous êtes dans nos vies,
16:58vous êtes présentes
16:59et c'est vrai,
17:01vous êtes une figure
17:01comme ça
17:02à travers les années.
17:03Bon, très bien.
17:04J'aimerais que ce soit
17:05un livre qui fasse du bien,
17:05qui soit léger.
17:07Eh bien, en tout cas,
17:08vous nous avez fait du bien
17:09en vous écoutant
17:09pendant ces quelques minutes.
17:10Sous-titrage Société Radio-Canada

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