L’INTERVIEW D’AYMERIC. C’est le seul acteur à avoir passé la barre des 10 millions de spectateurs en France avec quatre films différents ("Les Visiteurs", "Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre", "Les Bronzés 3", "Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ?"). Christian Clavier est populaire. Très populaire. Même après 50 ans de carrière. À l’occasion de la sortie en salle du film de Philippe Mechelen "Le Routard", j’ai pu discuter avec lui de son métier de comédien, de l’humour français, du Astérix d’Alain Chabat ou de son passage chez Loris Giuliano. Une conversation long format dans laquelle il a pu montrer sa cinéphilie comme sa franchise. Dans la bonne humeur, évidemment.
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Court métrageTranscription
00:00Pourquoi vous avez ces pompes ?
00:01Ces pompes, c'est mes baskets.
00:03Et lui, vous l'avez reconnu, c'est Christian Clavier.
00:05C'est ignoble.
00:06Ça n'a aucun chic, c'est immonde.
00:08On a des très grands pieds en plus.
00:09C'est pas harmonieux, quoi, vous voyez ?
00:11Parce que c'est des gros pieds et des grands pieds dans des pompes immondes.
00:14Avec Christian Clavier, on a discuté de plein de choses.
00:17Son métier de comédien, son passage chez Lloris Giuliano, Pierre Ninet.
00:20L'idée, il est très très bon en comédie.
00:22Jonathan Cohen.
00:23C'est un tout petit peu un télo pour moi, Jonathan Cohen.
00:25Quentin Dupieux.
00:26Le premier film, c'est formidable.
00:27Le deuxième aussi, après, c'est toujours sur le même...
00:30Qu'est-ce que vous jouez ? Je joue une porte.
00:32Un bouton de porte, ce qui est différent.
00:34Cette discussion s'est tenue à l'occasion de la sortie en salle du Routard.
00:37Son dernier film, réalisé par Philippe Mechelin, avec Hakim Djémili dans le rôle principal.
00:41Tatin.
00:42Yann Tatin.
00:42Dis-le dans l'ordre, mon grand, parce que t'es pas James Bond.
00:44T'as juste le nom d'une tarte aux pommes, toi.
00:46C'est vrai.
00:47Vous l'aurez deviné, c'est une comédie.
00:48Yann, tu m'as menti.
00:49Pour ne rien rater de nos vidéos, abonnez-vous à la chaîne de Brut.
00:52Et pour l'interview d'Emerick avec Christian Clavier, c'est maintenant.
00:57Prenons Les Visiteurs, un film que tout le monde a vu.
01:00Le fameux OK, comment on en arrive à ça ?
01:03C'est très simple et très compliqué.
01:06C'est-à-dire que nous avions eu un producteur qui nous a quittés, d'ailleurs,
01:10parce qu'il n'a pas voulu faire le film, parce qu'il n'a pas compris.
01:12Quand on avait écrit OK, il avait dit,
01:13« Dis donc, vous auriez pu vous fouler plus sur les dialogues. »
01:16Ah ouais ?
01:17Le mec avait la vista.
01:18Il n'a pas compris.
01:19Et comme il ne lisait pas les situations,
01:22il ne lisait que les dialogues éventuellement drôles ou pas drôles,
01:25ou drôlatiques,
01:25il ne comprend pas que ce que comprend Jacouille la Fripouille,
01:29qui est un cerf, qui est un valet,
01:32il se trouve dans le monde moderne,
01:33et il s'aperçoit que dans le monde moderne,
01:35il est beaucoup plus libre,
01:37qu'on le considère, qu'il a une existence.
01:40Et dans ce monde moderne, les gens passent leur temps,
01:42quand ils sont d'accord, à se dire « OK, OK ».
01:44Et donc pour lui, c'est la clé.
01:45Le « OK » est la clé du monde moderne,
01:48la clé de sa liberté.
01:50– Est-ce qu'au moment où vous l'écrivez,
01:52est-ce que vous imaginez que ça va être repris dans les cours de récréation ?
01:55– Non, non, ça, Dieu merci, on ne s'imagine pas ça, parce que sinon…
01:57– Il n'y a pas un instinct où on se dit, ça, ça marche, ça, c'est drôle ?
01:59– Non, non, mais bien sûr que c'est drôle,
02:01on le voit.
02:05Jean-Marie a eu un doute,
02:06parce que justement,
02:08comme on avait des problèmes de financement sur ce film,
02:10il n'y avait pas beaucoup d'argent,
02:11et à un moment le film devenait un peu long,
02:13et donc il y avait une pression des financiers pour nous dire,
02:15« Coupé ».
02:17Bon, et donc il s'est dit,
02:18« Est-ce que je coupe ça ou pas ? »
02:20parce qu'il avait eu un doute,
02:21par rapport à ce qu'avait dit l'autre andouille.
02:24Et donc il va voir sa monteuse,
02:25qui était en train de monter le film,
02:27et il lui dit,
02:28« Qu'est-ce que tu penses du « OK » ? »
02:31Et elle lui fait,
02:32« Mais c'est simplement inénarrable ! »
02:35Et il a dit, « OK, on n'y touche pas ».
02:36– Ça a tenu à peu de choses, finalement.
02:39– Mais ça tient à peu de choses, les films.
02:40– J'ai lu d'ailleurs que, en fait,
02:42Jean-Marie Poiré,
02:43il a sorti un livre récemment,
02:44où il revenait un peu sur toute sa carrière,
02:46il a fait des interviews,
02:47et il a dit qu'en fait,
02:47les visiteurs, il n'y a que vous qui croyez.
02:50C'est vrai ça ?
02:50Il n'y a que vous qui vous y croyez ?
02:51– Oui, enfin, lui et moi.
02:53Nos deux, oui, nos deux.
02:54– Mais c'est terrifiant,
02:55si on écoute ça, c'est-à-dire que c'est quand même…
02:57– Non, c'est la vie du cinéma.
03:00C'est la vie du cinéma.
03:01Il faut être certain de ce qu'on fait,
03:03et parfois on a raison,
03:05parfois on a tort,
03:06mais on est possédé par ce qu'on fait.
03:08Et on le connaissait.
03:09Moi, il m'a présenté une histoire
03:10qu'il avait écrite quand il avait 18 ans,
03:12il y a une histoire très très triste,
03:14mais fantastique.
03:16Et il m'a dit,
03:16est-ce que tu crois qu'on peut en faire une comédie ?
03:18Je lui ai dit, je crois, oui, allons-y.
03:20On est partis, on a pleuré de rire
03:21en écrivant le scénario,
03:22donc évidemment, on y croyait.
03:23– Est-ce que pour vous,
03:24ça fait sens de parler de comédie française ?
03:26Est-ce qu'on parle d'humour belge,
03:27on parle d'humour britannique,
03:28mais c'est quoi l'humour français ?
03:29– L'humour français,
03:29moi je trouve que nous sommes…
03:31le comique de situation, de dialogue,
03:34c'est ce qu'on appelle l'esprit français,
03:35et d'arriver à faire rentrer une partie de la vie
03:38qu'on traite en comédie,
03:40il y a les Italiens et les Français.
03:42Voilà, nous sommes cousins germains là-dessus,
03:44les Italiens sont extrêmement forts
03:45avec la Comédia dell'Arte,
03:47d'ailleurs la troupe de Molière
03:48est une troupe italienne,
03:49et le cinéma italien qu'on a adoré,
03:52moi, Dino Risi ou Ettore Scola,
03:55pour moi, on n'a rien à envier
03:57à Scorsese ou à Coppola.
04:00Je trouve que la comédie parle du réel,
04:02pour être clair,
04:03et que les Italiens sont capables de faire ça,
04:04on a été très très influencés par ce cinéma-là,
04:07et on aime ça,
04:08et on aime cette dimension-là.
04:10Donc elle arrive,
04:11il y a un mort dans les bronzés,
04:13tout le monde l'a oublié,
04:14mais Croton mort.
04:15Papi Fédéralisant se passe avec la Gestapo
04:18qui n'est pas loin,
04:19Junio est une ordure de la Gestapo,
04:20il est tout à fait digne de la combe Lucien,
04:23de la combe Lucien Pauli Salomand.
04:26Donc, je n'ai toujours pensé
04:28que les grands sujets pouvaient faire…
04:33Les visiteurs, c'est un film sur la descendance,
04:34est-ce que vous ressemblez à votre arrière-arrière-arrière-arrière-grand-parent ?
04:39Si vous trouvez une photo ou un tableau,
04:41et que vous mettez la même coiffure que lui,
04:42vous allez lui ressembler,
04:43en fait, vous n'avez pas tellement bougé.
04:44Dans Cocorico, c'est très intéressant le rapport de classe.
04:47Il est là tout le temps.
04:49Il est très important pour l'auteur.
04:50Et donc, il se joue.
04:54Et il représente quelque chose pour les spectateurs.
04:57Et je trouve ça très intéressant.
04:59Donc, les gens qui pensent que,
05:00un, c'est facile de faire de la comédie,
05:02deux, que ça ne veut rien dire,
05:04sont fort étranges.
05:05Ce qui est absolument affligeant aujourd'hui,
05:08c'est qu'aujourd'hui,
05:08à partir du moment où on a un sujet sérieux et nécessaire,
05:11le film, eh bien, c'est faux.
05:13Comment est-il traité ?
05:14Si c'est Kubrick, c'est absolument magnifique.
05:16Si c'est Tartampion qui vous ennuie pendant une heure et demie,
05:20ce n'est pas parce qu'il dénonce tel type de choses à dénoncer
05:23que le film est intéressant.
05:24C'est faux.
05:25Chez vous, on a le sentiment qu'il y a quelque chose de très français.
05:28Mais en y réfléchissant, je ne sais pas.
05:31Parce que, par exemple, vous avez beaucoup bourlingué.
05:34J'ai même entendu que vous disiez
05:35que vous étiez un enfant de la mondialisation.
05:37Qu'en fait, je ne sais pas dans quelle mesure
05:39vous vous sentez français.
05:40Est-ce que vous représentez un esprit français ?
05:42Comment vous s'y dites ?
05:42Oui, la culture française et l'esprit français, bien sûr.
05:45L'esprit de Jean Poiré, l'esprit de Michel Serrault,
05:48l'esprit de Molière, l'esprit de Fédo.
05:50L'esprit de Fédo, c'est simple.
05:52Vous avez dans le fil à la pâte, au début,
05:54on parle d'un type qui s'appelle Ignace de Fontanet.
05:57Tout le monde dit, mon Dieu, ce qui sent mauvais.
05:59Vous êtes méchant, il ne ferait pas de mal à une mouche.
06:01Ça dépend à quelle distance il lui parle.
06:03Et on sonne et on fait M. Ignace de Fontanet.
06:07Le mec rentre et vient de parler à 2 cm.
06:09Et là, tu te retournes au public et tu fais,
06:11et simplement, sur un regard, la salle est par terre.
06:15C'est absolument d'une méchanceté extraordinaire.
06:19C'est-à-dire que Mondi nous disait avant,
06:21quand on a commencé à répéter cette pièce avec Villeray,
06:24il nous a dit, vous allez interpréter des personnages
06:25avec lesquels vous ne dîneriez pas,
06:28qui sont sans pitié les uns avec les autres.
06:30Donc c'est un vrai rapport social.
06:33Ce n'est pas qu'une mécanique de rire.
06:35Ça décrit un monde.
06:36Ça décrit un monde et des rapports dans ce monde.
06:38Donc on parle de la nature humaine, donc c'est passionnant.
06:40C'est quelque chose, moi j'ai le sentiment, qui vous caractérise.
06:42C'est que jamais vous cherchez à sauver votre personnage.
06:46Vous êtes dans le personnage.
06:48Il faut aller au bout de son personnage.
06:50Mais du coup, j'ai le sentiment qu'il y a un effet qui n'est pas de votre fait.
06:54Mais j'ai l'impression que les gens vous confondent avec vos personnages.
06:56Oui, c'est vrai.
06:57C'est tout à fait juste.
06:57Ils se disent que Christian Clavier, c'est le...
06:59Ils ont pensé que c'était Jaco, ils ont pensé que c'était Claude Verneuil,
07:01ils ont pensé que c'était Napoléon,
07:03ils ont pensé que c'était Jérôme des Bronzés.
07:05Bien évidemment.
07:06Mais moi, c'est rien de tout ça.
07:07Ça veut dire que j'ai bien fait mon boulot.
07:09C'est tout.
07:09Quand on ne vous confond pas, c'est que vous avez mal joué.
07:12Pardon.
07:13Bien sûr.
07:14Les gens, ils me disent, ben oui, c'est un bourgeois de droite
07:16parce qu'ils vous ont vu dans les derniers films.
07:18Mais en fait, Jaco, il ne s'est pas du tout un bourgeois de droite.
07:21Bien sûr.
07:22Et dans le prochain film, dans le million que je joue avec Ryan Bensetti,
07:25je joue un serrurier qui est totalement dominé
07:28par un jeune loup du BTP.
07:31Et vous en foutez ?
07:32Que les gens aient cette image de vous qui est fausse.
07:35de passer le cap.
07:37Non, ce n'est pas que j'ai passé le cap.
07:39Comment vous dire ?
07:40Je ne me regarde pas jouer.
07:42Les gens pensent ce qu'ils veulent.
07:44D'abord, je suis extrêmement discret,
07:47particulièrement peu disert.
07:51Donc personne ne sait véritablement ce que je pense
07:53ou je cite qui je suis.
07:55Sur cet esprit français, il y a un bon exemple quand même.
07:57C'est quand vous avez fait le remake des Visiteurs aux États-Unis
08:01où vous jouiez avec...
08:03Et ça n'a pas trop marché, quoi, en tout cas.
08:05Non, parce que les Américains l'ont bousillé.
08:06Ils sont incapables de faire ça.
08:08Le type qui a écrit le film, qui était John Hughes,
08:10et qui est Breakfast Club et des Home Alone,
08:14un jour arrive et me dit, voilà, ça ne va pas être possible
08:16que vous ayez les dents pourries.
08:19Et je lui dis, mais pourquoi, John ?
08:21Il me dit, mais notre public ne l'acceptera pas.
08:23Je lui dis, mais alors le film est foutu.
08:25On n'arrive plus au Moyen-Âge, c'est fini, c'est terminé.
08:27Ils n'ont pas compris.
08:28Quand ils font le remake, c'est Nora Ephron,
08:30elle est très très bonne.
08:31Nora Ephron, c'est Wenary Matsali.
08:33Ils font le remake du Père Noël est une ordure.
08:35Ça s'appelle Mixed Nuts.
08:37Je vous incite à le voir, vous allez voir une grosse grosse daube.
08:40Ils n'ont rien compris.
08:41La première des choses qu'ils ont fait dans l'adaptation,
08:43c'est de faire que ça se passe à Los Angeles,
08:45le soir de Noël.
08:47C'est qu'il y a l'erreur fondamentale.
08:48Comment vous refusez les gens ?
08:51Quand il y a de la neige dehors et qu'il fait très froid,
08:53et quelqu'un vous dit, est-ce que je pourrais rentrer
08:55pour passer un tout petit moment avec vous ?
08:57Vous avez tendance à ouvrir facilement.
08:59Quand il fait 18...
09:02Donc ils ne comprennent rien à l'humour, les Américains.
09:05C'est un pays...
09:06Il y a des comédies qui sont pas mal,
09:07les comédies américaines, non ?
09:08Je ne suis pas un fan du tout.
09:10C'est overplay.
09:11Ah oui ?
09:12C'est très très overplay.
09:13Qu'est-ce qui vous fait marrer comme comédie aujourd'hui ?
09:15Il y a plein de comédies.
09:17Si, il y a un truc très très réussi américain aujourd'hui
09:19qui est The White Lotus.
09:20Ah, dans la série.
09:21Voilà, ça c'est remarquablement bien foutu.
09:25C'est-à-dire que quand même dans l'épisode 4 de la série 3...
09:28Bon, là, on a coupé parce que Christian Clavier
09:30spoilait complètement l'épisode.
09:31Ça me régale ça.
09:33Je vais regarder ce soir l'épisode du lundi.
09:36Parce que c'est l'épisode 5
09:37et ça me plaît de voir quelles sont les nouveautés de l'épisode 5.
09:42Julien Hervé regarde ça comme moi, celui qui a écrit Cocoréco.
09:46Donc on se retrouve là-dedans.
09:49Je ne sais pas comment vous dire.
09:50C'est un régal à jouer.
09:53Et chez les Français, qu'est-ce qui vous fait rire dans le cinéma français ?
09:55J'ai adoré tous les gens qui m'emploient.
09:58Je me régale avec eux.
09:59De Chevron, la première lecture de Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu,
10:03honnêtement, c'est le voiturier.
10:04C'est étourdissant.
10:06C'est facile à jouer.
10:08C'est notable.
10:08Et d'ailleurs, ça a été souvent dit dans vos interviews,
10:10effectivement, vous transmettez,
10:12vous jouez avec des jeunes générations, etc.
10:13Mais je me suis dit qu'en fait,
10:16il y a beaucoup d'acteurs assez populaires aujourd'hui,
10:19comme Pierre Ninet, Adèle Exarchopoulos, Jonathan Cohen, tout ça.
10:22Et on ne vous a jamais vu avec eux.
10:23Et en préparant cette interview, je me dis que ça me ferait quand même marrer d'avoir un duo.
10:26L'idée, il est très, très bon en comédie.
10:28Donc lui, je pense que ça serait tout à fait intéressant.
10:31Ah oui ?
10:32Pierre Ninet et Christian Clavier dans un film, c'est vrai que ça serait…
10:34Lui, il a pleuré de rire, il a vraiment beaucoup, beaucoup…
10:37Je ne dis pas que les autres n'ont pas de talent,
10:38mais il y en a certains.
10:40Si vous voulez, les gens qui sont très, très branchés sur leur narcissisme,
10:43c'est très compliqué pour eux, la comédie.
10:45De long ne m'a jamais fait beaucoup rire, pour être honnête.
10:48C'est vrai que c'est bien.
10:48Bon, voilà.
10:51Et Pierre Ninet, qu'est-ce qui vous plaît, chez lui ?
10:52Vous avez vu sa série avec le metteur en scène qui est dépassé, là ?
10:55Fiasco ?
10:56C'était ça.
10:57Oui, alors il y a Fiasco, il y a Casting.
10:58C'est Star Roulé.
10:59Oui.
11:00C'est très bon.
11:01Ok.
11:02Et donc Pierre Ninet, Jonathan Cohen, ça c'est des gens qui vous…
11:05C'est un tout petit peu intello pour moi, Jonathan Cohen.
11:07Ah oui ?
11:08Parce que c'est vrai que c'est assez intéressant que vous…
11:10Jérôme Commandeur, formidable.
11:11Il y a beaucoup de comédies qui, effectivement, sont un peu intello.
11:17Je ne sais pas comment dire les choses.
11:19Cérébrales, un peu cérébrales.
11:20Voilà, cérébrales.
11:21Elles se regardent un peu jouer.
11:22Oui.
11:23Vous, personne ne va dire que vos comédies sont cérébrales.
11:25Vos comédies…
11:26Non, mais moi, ce n'est pas du tout narcissique.
11:28Dans les acteurs et les actrices, vous avez une frontière très importante entre les narcissistes
11:33et ceux qui ne le sont pas.
11:34Il y a les deux qui ont tous du talent.
11:36La question n'est pas d'opposer l'un à l'autre ou de dire l'un c'est mieux que l'autre,
11:39mais c'est complètement différent.
11:41Et comment vous le reconnaissez entre les narcissistes et les non-narcistes ?
11:43C'est-à-dire que vous allez au bout des rôles et vous ne vous faites pas de cadeaux
11:46et les autres se font toujours des cadeaux.
11:48C'est impossible de ne pas avoir la bonne coiffure, vous voyez.
11:50C'est impossible que Redford n'ait pas la mèche.
11:53D'accord.
11:53D'accord ?
11:54Hoffman, il a une tête stupéfiante dans Redman.
11:57Tu vois ?
11:57Voilà la différence, les deux.
11:59Je comprends.
11:59Voilà, après tu choisis.
12:01Et quelqu'un comme Quentin Dupieux, je me suis posé la question,
12:02qui a un univers très barré, c'est trop intello ou pas pour vous ?
12:06C'est un petit peu un truc, je trouve.
12:09Oui.
12:09C'est une façon polie de dire, pas forcément, quoi.
12:13Le premier film, c'est formidable, le deuxième aussi.
12:16Après, c'est toujours sur le même…
12:17Ça devient un gimmick, quoi.
12:18Oui, c'est un gimmick, voilà.
12:20Qu'est-ce que vous jouez ?
12:20Je joue une porte, un bouton de porte, ce qui est différent.
12:24Bon.
12:24Un pneu.
12:25Un pneu, j'adore.
12:27Parlons juste des plateformes.
12:29Vous savez que maintenant, les gens, ils regardent les films en x2 ou x1,5.
12:32Netflix s'est plafonné à x1,5.
12:34C'est-à-dire ?
12:35C'est-à-dire qu'on ne met pas en vitesse normale, on met en vitesse 1,5, plus rapide.
12:39Ah, d'accord.
12:39Comme ça, le film d'une heure et demie, il dure…
12:41Souvent, sur Netflix, ça ne vaut pas plus, ça.
12:45Oui.
12:45Mais est-ce que ça change la façon de faire des films, ça ?
12:47Oh, de toute façon, j'ai toujours pensé, moi,
12:49qu'avoir du tempo et du rythme dans les films était important,
12:52car les gens regardaient tellement de films
12:54qu'ils ont incroyablement…
12:56Ils devancent les histoires.
12:58Donc, le problème des films qui ne sont pas des chefs-d'oeuvre absolus
13:02et même ceux qui en sont d'avant, qu'on voit de temps en temps,
13:06c'est le rythme qui est trop lent.
13:08Donc, vous connaissez, vous avez compris ce qui va se passer pour les personnages
13:11avant même qu'eux ne commencent à le jouer.
13:14Donc, c'est un peu dommage.
13:15Maintenant, il ne faut pas être non plus dans un truc frénétique tout le temps
13:17parce que c'est pénible.
13:18Mais j'allais dire que vos films à vous,
13:20Les Visiteurs, par exemple, qui datent de 93, je crois,
13:24en fait, on ne le mettrait pas en 1,5 parce qu'il est rapide.
13:26En fait, le rythme…
13:27Oui, on a toujours pensé, nous, qu'avec un rythme rapide, avec Jean-Marie,
13:30c'est ça qui permettrait aux gens de voir le film deux fois.
13:32Parce qu'il ira très les choses.
13:34Je crois que Jean-Marie Poirier avait cité Capra.
13:36J'ai lu son autobiographie.
13:37Oui, Capra disait toujours, après une très, très bonne prise,
13:40après un certain nombre de prises, une très bonne prise,
13:42il disait, c'est formidable, elle est géniale.
13:44Écoutez, on va la refaire, mais en 20 secondes de moins.
13:47C'est ça.
13:47Et il écrit dans son autobiographie, il dit qu'en fait,
13:49il s'était rendu compte en assistant au film dans les salles de cinéma
13:52que quand il y avait plein de gens autour, le visionnaire…
13:54Les gens comprennent plus vite.
13:56C'est ça.
13:57Les gens comprennent plus vite.
13:58Parce que vous êtes porté par ça, ça vous est arrivé.
14:01L'émotion vient plus vite.
14:03Et donc, du coup, il faisait jouer ses acteurs de manière plus rapide,
14:06quitte à ce que ce ne soit pas…
14:06Plus rythmé, pas plus rapide.
14:08Parce que sinon, ce n'est pas bon.
14:09Ça, tout le problème.
14:11Est-ce que vous, c'est une considération que vous avez ?
14:13C'est-à-dire, quand vous faites plusieurs prises,
14:14vous les faites à des vitesses différentes ?
14:16Non, je ne me regarde pas jouer.
14:18Après, c'est au metteur en scène de dire,
14:19ça me plaît, ça ne me plaît pas, je refais.
14:21Moi, je suis le personnage.
14:23Donc, je n'ai pas du tout de regard sur moi en train de jouer.
14:25Jamais, jamais, jamais, jamais.
14:27Ça, c'est de la mauvaise technique.
14:28Vous savez, c'est comme le mec qui dit,
14:29je sais, tu me prends combien là ?
14:32Je suis au 40.
14:33Ça, c'est totalement bidon.
14:34C'est le type est mauvais qui fait ça.
14:36C'est phénoménal.
14:37Parce que vous dites que vous en fichez de votre image,
14:39mais j'ai un peu de mal à le croire.
14:41Si on est acteur, on fait quand même attention
14:42à la façon dont on nous regarde quand même.
14:44Vous, vraiment, vous vous en foutez complètement
14:45de la façon dont on les joue ?
14:46– Mais non, mais je suis un autre personnage.
14:47Je n'ai pas de problème avec l'image du personnage.
14:50Mais sinon, que se passe-t-il ?
14:52Comment vous pensez qu'un type comme Feinus
14:54joue le personnage d'Alice de Schindler ?
14:56Comment il fait ?
14:58Comment vous pensez que dans Das Fall,
15:01pour jouer Hitler, comment il fait ?
15:05Sinon, vous ne jouez plus ces personnages-là
15:06parce qu'ils ne sont pas bien.
15:09Ce n'est pas notre métier, quoi.
15:11On n'est pas là pour juger nos personnages.
15:13On est là pour les interpréter.
15:14Si tu le juges, je fais un autre boulot.
15:17– Et ça, vous avez toujours réussi, ça,
15:18ou vous l'avez appris avec le temps ?
15:20– Je l'ai appris avec le temps,
15:21mais c'est difficile.
15:22Évidemment, parfois, on se retient,
15:24il y a de la pudeur, il y a des choses comme ça.
15:26Mais à ce moment-là, c'est là où le métier est compliqué.
15:28– Est-ce qu'il y a des films, par exemple,
15:29que vous regrettez d'avoir fait ?
15:31– Non, non, non, il y a des mauvais films,
15:35mais je ne regrette jamais d'avoir fait des films.
15:37Ça vous apprend toujours quelque chose,
15:38vous rencontrez des gens, vous avez cru que…
15:41il ne faut pas…
15:43– Il y a des mauvais films,
15:44mais est-ce que vous, vous avez déjà été mauvais ?
15:46– Certainement, il y a toujours des moments
15:48où on n'est pas forcément à l'aise,
15:49où on n'a pas bien dirigé,
15:51où on n'a pas le bon truc, bien sûr.
15:53Il faut toute une technique,
15:55il faut tout un travail, toute une expérience.
15:57Il faut beaucoup, beaucoup d'éléments
15:58pour arriver à le jouer correctement,
16:00pour arriver à le jouer, tout simplement,
16:02et donc pour arriver à le transmettre.
16:04Et ça, c'est la satisfaction du travail bien fait.
16:08C'est ça que j'ai appris.
16:09dans un métier que je ne connaissais pas,
16:12que je rêvais de faire,
16:13et qui est un miroir aux alouettes.
16:15C'est-à-dire que les gens pensent pouvoir le faire facilement,
16:17alors qu'en fait, c'est très complexe.
16:19C'est un mélange d'instinct, de technique et de talent,
16:23et c'est totalement passionnant,
16:28mais on est un instrument.
16:29Tzila Shelton, qui a joué à Tati Daniel,
16:32qui était notre prof,
16:33nous a toujours dit,
16:34nous a toujours formés pour être des interprètes.
16:36On ne discute pas avec l'auteur,
16:39on l'interprète, on le joue, on le donne.
16:42Ça, c'est très, très passionnant.
16:43Je n'accepte les scénarios
16:44que quand je pense qu'ils sont très bien écrits.
16:48Parce qu'à ce moment-là, c'est très simple.
16:50Vous travaillez votre texte,
16:51et le personnage va rentrer petit à petit en vous.
16:53Il faut du temps.
16:55Il faut le temps de trois, quatre semaines de travail,
16:59tous les jours, tous les jours, tous les jours.
17:00Et petit à petit, il commence à vous posséder,
17:04et le personnage prend possession de vous.
17:06Et après, évidemment, vous allez améliorer ça avec un costume,
17:10avec un maquillage, avec une moustache,
17:12avec un machin, un truc qui va vous amuser.
17:14C'est en plus, c'est très utile, une démarche,
17:16c'est très utile, tout ça va venir en plus.
17:18Mais ça va venir presque naturellement.
17:20Le travail de base, c'est le sens du personnage.
17:24Toute la problématique du jeu, c'est ça.
17:26Fais-le.
17:27Moteur, vas-y.
17:28Il n'y a pas de déclaration d'intention.
17:32Vous voyez ce que je veux dire ?
17:33Vous cherchez, vous, la déclaration d'intention.
17:35Je vais faire comme ci, comme ci, comme ça.
17:37Généralement, apparemment, vous dites ça,
17:39et que vous avez répété, vous faites l'inverse.
17:43Ou vous n'arrivez pas à le faire.
17:45C'est pas ça que je n'aime pas trop répéter,
17:47même devant la caméra.
17:49Je trouve que c'est tellement plus intéressant d'arriver
17:51et de ne pas savoir ce qui va se passer.
17:53J'ai vu que, pour Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu,
17:55le premier jour de tournage, je vous l'avais dit,
17:57en fait, vous ne vouliez pas rencontrer les personnages des gendres dans le film.
18:02Non.
18:02C'est tout à fait différent.
18:03Ce n'est pas la bonne histoire.
18:05Dites-moi.
18:05La bonne histoire, ce sont les gendres qui ont voulu me rencontrer,
18:08tous les acteurs, en disant,
18:10on aimerait beaucoup dîner avec lui un soir avant de commencer le film.
18:13Donc, Philippe de Chevron m'appelle en me disant,
18:15ils aimeraient beaucoup te voir.
18:17Je n'ai pas question.
18:18J'ai bien compris qu'ils avaient des jetons
18:19et qu'ils voulaient me rencontrer pour casser la glace.
18:22Et je lui dis, on ne va pas avoir le bon là.
18:24Ce qui va être formidable, c'est de se retrouver.
18:26La Mehdi qui joue le film dans le film, dans le routeur,
18:28qui est extrêmement drôle.
18:30Donc, il avait le trac.
18:31Et donc, je me retrouve au maquillage avec lui.
18:33Il est à côté de moi.
18:34Je joue donc son beau-père.
18:36Et on ne s'est pas rencontrés.
18:37On va jouer ensemble.
18:38Et il est mort de trac.
18:39Et il se retourne vers moi et il me fait simplement...
18:41La seule chose qu'il arrive à me dire, c'est
18:42vous êtes très beau.
18:44C'est tout ce qu'il me dit.
18:46Et donc, après, on a discuté, on est devenu...
18:50Bien évidemment, on se rencontre toujours très profondément
18:53quand on joue ensemble.
18:54Mais on a joué immédiatement juste
18:56parce qu'ils m'ont vu comme le beau-père.
18:58C'est-à-dire qu'ils sont arrivés avec une crainte
19:00comme quand sa fiancée te dit
19:01tu vois, mes parents, mon père est charmant.
19:03C'est un petit peu difficile, mais ça devrait bien se passer.
19:06La porte s'ouvre.
19:07C'est De Niro dans Meet the Parents.
19:12C'est-à-dire que le mec arrive en faisant...
19:14Vous êtes plutôt chat ou plutôt chien ?
19:17Ah, nous, on aime beaucoup les chats.
19:18Nous, on est très chien ici.
19:19Bon, le mec s'est trompé.
19:20C'est absolument formidable.
19:22Là, c'est parti fort.
19:24Et donc, il faut avoir...
19:26C'est un son.
19:28C'est s'accorder comme un orchestre symphonique
19:30dans lequel le premier violon accorde les autres.
19:34Et à ce moment-là, le type lance
19:37et il se passe quelque chose.
19:41Sinon, il ne se passe rien.
19:42Après avoir les caméras, 22 personnes,
19:44vas-y, machin et tout, tout est ennuyeux.
19:47Moi, je déteste le non-jeu.
19:49Je trouve qu'il faut faire disparaître le jeu
19:51en incarnant, mais il faut se mettre en situation
19:53de se jeter à l'eau.
19:55qu'il se passe quelque chose, quoi.
19:59En termes de plaisir, pour vous,
20:01quand on joue au théâtre, j'imagine le plaisir
20:02de passer la réaction du public.
20:04Oui.
20:04Mais moi, j'ai la réaction de l'équipe.
20:06Puisque comme je ne répète pas,
20:08ils ne savent pas ce qu'ils vont me voir.
20:09Donc, votre plaisir, c'est de faire réagir l'équipe, quoi.
20:12Ben, évidemment.
20:13Et j'ai donc des réactions
20:15qui sont très intéressantes et qui me guident.
20:18Et donc, c'est la même chose.
20:20Sauf que le public est plus près,
20:21puisque la caméra est plus près.
20:22Ou loin, d'ailleurs.
20:24Ça, c'est autre chose.
20:24Et vous êtes tombé sur des équipes
20:27qui ne réagissaient pas par fatigue,
20:28par je ne sais quoi.
20:29Oui, parfois des fatigues.
20:31Mais dans l'ensemble, ils sont très attentifs.
20:32Ils sont très bons, les équipes.
20:34Ils vous aident beaucoup.
20:35Donc, dans l'ensemble, c'est très intéressant.
20:38Ils sont là tous les jours.
20:40Ils aiment ça.
20:40Ils sont passionnés de cinéma,
20:42de faire des plans, des éclairés,
20:43de mettre des micros,
20:44que ça s'entende bien,
20:45que le son soit pur.
20:46Donc, ce sont des gens
20:47qui ont une très haute technicité.
20:49Et en même temps, il faut les surprendre
20:51avec ce que va être l'histoire
20:52et les personnages du film.
20:53Sinon, il s'ennuie.
20:55Vous imaginez ça ?
20:5632 jours de tournage dans lequel...
20:58Quel ennui !
21:00J'ai vu que vous aviez un coach.
21:02Alors, je crois que ce n'est pas tout à fait nouveau,
21:04mais quand même, c'est...
21:05C'est un répétiteur, si vous voulez.
21:07Plus qu'un coach.
21:08Parce qu'il ne m'indique pas comment jouer,
21:10mais il me donne la réplique quand j'apprends.
21:13J'ai lu aussi, alors dites-moi,
21:15peut-être que je me trompe.
21:16En fait, quand vous arrivez sur le tournage,
21:17vous avez beaucoup bossé avant.
21:18Vous connaissez votre texte,
21:20mais également le texte des autres acteurs.
21:21Et oui, puisqu'il me l'a donné.
21:22Donc, je ne joue pas, j'incarne le personnage.
21:25C'est pour incarner le personnage que je fais ça.
21:27Ce n'est pas pour jouer.
21:28Il faut supprimer la notion de jeu.
21:31La caméra est magnifique
21:32puisqu'elle vient se mettre à l'intérieur de vous.
21:35C'est exactement la même chose que jouer au théâtre
21:37où il y a beaucoup d'énergie,
21:38mais on projette.
21:40Là, il n'y a pas besoin de projeter.
21:40La caméra vient vers vous.
21:41Sauf les sentiments.
21:42Sauf les...
21:43À ce moment-là, vous le poussez.
21:46Mais il faut être le personnage.
21:49Il faut qu'à l'état d'écoute,
21:52le personnage soit là.
21:53C'est Rochefort qui m'avait dit...
21:55La première fois qu'il était dans un casting de pub.
21:57À l'époque, on faisait de la pub pour arriver à vivre
22:00parce qu'on gagnait peu dans les cafés-théâtres.
22:02Il me fait faire un casting
22:03et moi, je m'étais préparé.
22:04J'avais le texte.
22:05Donc, j'étais tout à fait nerveux.
22:10Et il me dit, après la première prise,
22:13il me dit, tu sais,
22:14ce qui est important à savoir,
22:15c'est que l'écoute est aussi importante
22:17que quand tu parles.
22:19Et à ce moment-là, j'ai compris que c'était les deux.
22:22C'est-à-dire que si vous m'écoutez
22:23et que vous ne clignez pas trop des yeux,
22:25ce que vous faites beaucoup en ce moment,
22:26vous allez prendre de la présence.
22:28Et c'est ça qui est intéressant.
22:30Alors, moi, je ne suis pas acteur.
22:31Je ne me rends pas compte forcément comment ça marche.
22:32Bien sûr.
22:33Un acteur, il y a effectivement le plan
22:36quand la caméra est sur lui.
22:37Et puis, il y a le plan quand c'est le contre-champ,
22:39quand elle est sur l'autre.
22:41Est-ce que vous êtes toujours là ?
22:42Est-ce que les acteurs sont toujours là ?
22:43Les acteurs, enfin, moi, je suis toujours là.
22:45Les acteurs ne sont pas toujours là.
22:46C'est une erreur.
22:47Il faut toujours être là.
22:48C'est Bernard Blier que je voyais,
22:50qui était toujours là.
22:51Ce qui est fascinant, c'est votre durée.
22:5450 ans de carrière, et en plus, au top.
22:56Alors, il y a eu des hauts, des bas.
22:57Mais quand même, il y a eu différentes phases
23:00avec différents types d'humour.
23:01Et pourtant, j'ai l'impression que vous arriviez
23:02à chaque fois à être dedans.
23:04C'est une analyse qui vous parle ou pas du tout ?
23:07Oui, parce que c'est ce que les gens disent.
23:09Donc, je regarde, mais j'ai toujours tendance à regarder
23:12quel va être mon prochain film
23:13plutôt que de regarder tous ceux qui sont derrière.
23:15Donc, le côté 50 ans de carrière, c'est très flatteur.
23:18Donc, je suis très honoré et très flatté.
23:20Sincèrement, de ce que vous dites.
23:22Je ne méprise pas du tout.
23:23Je n'ai pas de condescendance.
23:24Mais j'évite de regarder.
23:25Je suis comme ça, moi.
23:27C'est le prochain projet.
23:29Il y a pas…
23:30Je me mobilise beaucoup.
23:31Et donc, je vais éviter de faire l'analyse de moi-même.
23:34D'abord, je n'ai pas été éduqué comme ça.
23:37J'ai une pudeur tout à fait naturelle,
23:39très importante par rapport à ça.
23:41Je déteste les gens qui se répandent
23:43parce qu'ils ont eu un problème dans leur vie
23:44et qui vont à la télévision.
23:46Ah, c'est à vous, vous expliquez à quel point…
23:48Ça, ça me prend la tête à un point que vous n'imaginez pas.
23:50Je ne vais donc pas le faire.
23:51Quand je dis c'est à vous,
23:52c'est parce que c'est un clin d'œil,
23:54c'est pour les emmerder.
23:55Mais sinon, j'aurais pu dire une autre émission.
23:57Il y en a plein, il n'y a plus que ça.
23:58Il n'y a plus que ça.
23:59C'est-à-dire que c'est épouvantable.
24:01On m'a, toute mon enfance,
24:02chaussée avec des chaussures avec deux pointures de moins.
24:05J'ai énormément souffert des pieds.
24:07– Les acteurs qui se plaignent, quoi.
24:09– Non, des acteurs qui veulent se faire aimer
24:11parce qu'ils ont souffert comme les autres.
24:13C'est totalement bidon.
24:14Nous avons un métier incroyablement passionnant,
24:17totalement incompréhensible pour le grand public,
24:19même si le grand public adore ce que nous faisons.
24:21Donc, on est des privilégiés,
24:23on gagne très bien notre vie,
24:24on est protégés d'un certain nombre de choses.
24:26Et les gens pensent qu'ils vont perdre le public
24:29s'ils ne vont pas expliquer qu'ils sont comme eux dans leurs difficultés.
24:34Ils font de la politique, au mauvais sens du terme.
24:37– Alors, il y a une nouvelle dimension, c'est les réseaux sociaux maintenant.
24:39– C'est ce qu'il y a de pire.
24:40– Les acteurs, on les voit…
24:41– C'est ce qu'il y a de pire.
24:42Donc, il n'y a plus aucun mystère et plus rien.
24:44Et ils sont là, ils changent de femme,
24:46et ils changent de voiture, et ils changent de chien,
24:48et tout le monde doit le savoir au moment où ça se passe.
24:49– Oui, mais alors, d'une certaine façon, vous êtes un privilégié
24:52parce que pour les jeunes acteurs aujourd'hui,
24:54souvent, on va leur demander combien ils ont de followers sur Insta.
24:56– Oui, mais ça n'a aucune importance,
24:58parce qu'ils ont tous essayé, les producteurs,
25:00de prendre ceux qui avaient le plus grand nombre de followers,
25:02et en général, les films ont été des flops.
25:03– Moi, j'avais une question sur la promotion des films.
25:06Est-ce qu'aujourd'hui, ça a changé, justement,
25:07parce qu'il y a de plus en plus de canaux,
25:08il y a Brut, il y a YouTube,
25:10je l'ai vu d'ailleurs chez Loris Giuliano,
25:12dans un taxi.
25:12Comment vous l'avez vécu ?
25:14C'est un peu une nouvelle façon de promouvoir les films.
25:16– Oui, oui, c'est une nouvelle façon de parler.
25:18Je trouve ça pas mal, parce qu'en fait, si tu veux,
25:20tu vas directement au public.
25:22Donc, c'est toujours bienveillant, sur ces chaînes-là,
25:26de cette manière-là, aujourd'hui, comme ça l'était auparavant,
25:29dans les émissions mainstream de la télévision.
25:34Aujourd'hui, comme ils luttent contre les réseaux sociaux
25:37et contre ces chaînes qui leur prennent énormément de parts de marché,
25:41ils sont très en porte-à-faux.
25:43Donc, le rapport avec eux devient de plus en plus difficile, je trouve.
25:48Voilà.
25:48– Vous dites les journalistes ?
25:50– Oui, oui, enfin, les plateaux, quoi.
25:52– Parce que Loris Giuliano, par exemple, c'était près de 4 millions de vues.
25:55Comment vous l'avez vécu ?
25:56C'est assez marrant, la vidéo est assez réussie.
25:58Vous, vous l'avez vécu comment, en le faisant ?
25:59C'est particulier, quand même.
26:00– Oui, j'avais vu Niné et…
26:03– Adélix Arcopolo.
26:03– Oui, j'avais trouvé ça marrant.
26:06Je m'étais dit, allons-y, il est très marrant et très intelligent.
26:09Il est marrant, on peut jouer avec lui.
26:11– Et ça, vous le saviez avant d'arriver,
26:12parce que moi, ce qu'on…
26:13– Je ne savais pas ce qu'on allait faire, mais il ne dit rien.
26:17Donc, on est vraiment…
26:18Mais j'avais vu ces deux autres vidéos, pas en entier, d'ailleurs.
26:22J'avais vu la moitié, je m'étais dit, bon, voilà, c'est ça qu'il fait.
26:25– Et puis, il y a eu un bon feeling,
26:26et finalement, quand vous l'avez fait, vous avez pris du plaisir à le faire.
26:28– Oui, j'ai failli le gifler deux, trois fois.
26:29– Vraiment ?
26:31Un petit mot quand même sur l'Astérix d'Alain Chabat,
26:35parce que c'est devenu un film culte.
26:37Comment vous l'avez vécu, vous, ce tournage-là ?
26:39– C'était très talentueux, Alain est très talentueux.
26:43En plus, il était au top de sa créativité et de sa réalisation,
26:49et il s'est régalé à le faire, donc c'était tout à fait bien.
26:51C'était un film très long, avec beaucoup d'effets spéciaux,
26:53un énorme budget, donc c'était très long.
26:55On était, avec Gérard, on préparait déjà Napoléon,
26:58que Gérard produisait, donc on était occupé dans la journée.
27:03Parce qu'on passait des journées, des longues journées,
27:05on voyait passer des effets spéciaux,
27:07on avait une réplique à dire au fin fond du désert de Warzazat,
27:10donc on avait intérêt à être…
27:12Donc moi je faisais du cheval dans le désert pour me préparer à être à cheval,
27:15et on écrivait, on pensait au scénario, à des scènes,
27:18et puis à appeler des acteurs ou des actrices
27:19pour qu'ils jouent dans cette série internationale incroyable.
27:21Mais en même temps, on jouait à Cérix et Obélix avec tout le monde,
27:24et c'était amusant, voilà.
27:25– Jamel, Edouard Baer, tout ça,
27:26c'est différent finalement de vous, j'ai le sentiment,
27:28ou peut-être que je me trompe ?
27:29Comment le fait de jouer avec ces personnes-là, ça vous a…
27:32– C'était sympa, quoi, c'était une nouvelle génération,
27:35tout à fait sympa, et d'où on était le support,
27:39Gérard et moi, nous étions le support pour que le film tienne,
27:42et qu'après, chacun fasse ce qu'il avait à faire autour,
27:45Jamel particulièrement, qui était très très bon,
27:47et qui était bon, Edouard aussi, mais enfin surtout Jamel.
27:50Et il y avait aussi Diodonné, qui était incroyablement bon à l'époque.
27:53– C'est vrai.
27:54Comment vous le… vous dites que Jamel était bon, par exemple ?
27:58– En quoi il vous a surpris ? En quoi vous le trouviez bon ?
28:00– Non, il avait une nature de comédie, la La Viscomica,
28:03ça ne s'avante pas, on l'a ou on ne l'a pas.
28:06– C'est le rythme ? C'est la présence ?
28:07– Non, non, non, c'est un don.
28:09– D'accord.
28:11J'ai vu aussi qu'il y a eu un film qui était…
28:13que Gérard Junior a travaillé dessus pendant 8 mois,
28:16Astérix et Obélix en Hispanie,
28:17qui était censé succéder avec vous en entendant qu'Astérix.
28:20– Qui était formidable.
28:21– Justement, qui n'a pas eu lieu, qui n'a pas existé,
28:23parce que Ederzo n'a pas aimé le film de Chabat,
28:26de ce que j'ai lu, et donc n'a pas voulu finalement que ce film se fasse.
28:30Mais ça m'intéresse, ce film qui n'a jamais eu lieu, racontez-moi.
28:33– Je ne sais pas de plus que vous,
28:35parce qu'on ne me tenait pas plus au courant de ça,
28:37mais j'ai regretté beaucoup parce que c'était très bon.
28:40Et puis après, moi, je n'ai plus voulu en faire.
28:42– À cause de ça ?
28:43– Pas que à cause de ça, mais en partie aussi,
28:45parce que je me suis dit, bon, ça va, c'est le…
28:48– Moi, ça m'a surpris, c'est-à-dire que j'ai lu que Gérard Junot dit
28:52« j'ai bossé huit mois sur ce film »,
28:54comment on fait pour bosser huit mois sur un film qui ne se fait pas ?
28:57– Ça arrive, il y a des tas de scénarios que moi j'ai écrits longtemps,
29:00puis ça ne s'est pas fait.
29:01Ça fait partie de ce métier, ça.
29:03– La règle d'or, tu ne dois jamais dire que tu travailles pour le Routard.
29:06– Vraiment incroyable !
29:07– Merci !
29:08– On ne dirait personne que je travaille pour le Routard.
29:09– Le Routard, le Routard.
29:11– Oh, merde !
29:12– Le Routard, le Routard !
29:13– On va reparler un peu du Routard de Philippe Mechelin,
29:17et notamment il y a une scène dans ce film en intelligence artificielle,
29:22c'est-à-dire qu'en fait, on vous voit, vous mais plus jeunes,
29:24c'est de l'intelligence artificielle.
29:26Vous l'avez vue, cette scène, j'imagine ?
29:28– Oui, oui.
29:28– Qu'est-ce que vous en pensez,
29:29et qu'est-ce que vous pensez que ça ouvre comme perspective
29:31pour le cinéma, l'intelligence artificielle ?
29:33– C'est très amusant parce que c'est de la magie,
29:35donc c'est très intéressant parce qu'on retrouve l'essence même du cinéma,
29:38c'est-à-dire que c'est la locomotive qui rentre dans la guerre de Perpignan
29:41et le public qui fait, putain, on va se faire écraser,
29:44donc on retrouve quelque chose.
29:45Donc les perspectives, c'est ça,
29:47c'est que ça va nous permettre de re-raconter des histoires
29:49d'une autre manière, en amenant de la magie qui est le cinéma,
29:54le fait de voir sur un écran des gens qu'on pense être vrais.
29:57Donc ça, ça va être très intéressant.
29:59Comment ça se fait, c'est très amusant aussi, mais bon…
30:03– Comment ça se fait d'ailleurs ? C'est une vraie question ?
30:04– Ça, je préfère ne pas vous le dire parce que sinon, on dévoile les…
30:07ça, c'est le côté… voilà, vous voulez tout savoir
30:09pour essayer de le faire vous-même parce que vous pensez que c'est interactif.
30:12Non, c'est fait pour des professionnels.
30:14– Est-ce qu'il n'y a pas des risques quand même ?
30:15Est-ce qu'il y a des gens qui ont peur ?
30:16Est-ce que vous amurez-vous ?
30:17– Les gens ont toujours peur.
30:18– Est-ce que vous clonez ?
30:19– Les gens ont eu peur de la voiture.
30:21– C'est vrai.
30:21– Ils ont peur qu'on aille sur la Lune.
30:23Ils ont peur de tout.
30:24Ils devraient avoir peur d'eux-mêmes.
30:26– Est-ce que par exemple, si vous, on vous clonait ou clonait votre voix
30:29et qu'on vous… après votre mort…
30:32– Non, c'est une question de droit.
30:34Il faut simplement respecter la volonté, soit des gens encore vivants,
30:38soit des ayants droits.
30:39Je crois que la grève qu'ont fait les Américains très longue
30:42et des scénaristes américains pour regarder la propriété de leurs droits,
30:47c'est-à-dire écrire les deux premiers épisodes d'une série
30:49puis les six autres sont faits par l'intelligence artificielle.
30:52C'est normal qu'ils touchent sur les autres épisodes
30:56et qu'ils donnent leur avis.
30:58C'est la même chose.
30:58Donc c'est une question de laisser ou pas la permission.
31:01Mais sinon, pourquoi pas ?
31:03C'est intéressant.
31:04Il peut y avoir quelque chose d'intéressant.
31:06– Dans le routard, dans le film aussi, il y a quelque chose qui m'a frappé.
31:09C'est donc votre personnage revient de manière assez récurrente.
31:12Il y a une sorte de ronique gag.
31:13Alors je ne vais pas spoiler le film,
31:16mais j'ai trouvé qu'il y avait un esprit un peu assez TikTok.
31:18– Je ne connais pas du tout TikTok.
31:21Donc là, je suis un petit peu en dehors là.
31:25À partir du moment où c'est un esprit très TikTok.
31:28C'est chinois TikTok ?
31:29– C'est chinois, oui.
31:31L'idée, c'est des petites scénettes.
31:33C'est des scénettes assez courtes où il faut être tout de suite,
31:36boum, il y a une petite histoire qui se termine assez vite, etc.
31:38– Oui, mais c'est comme ça qu'il l'a écrit, Philippe.
31:41Vous avez raison, c'est tout à fait bien.
31:43Il y a des petits coups de téléphone pour savoir si le type fait bien son boulot.
31:46L'autre me ment et moi, je suis moi-même dans une situation intéressante.
31:50Sinon, ce n'est pas la peine de le filmer.
31:51C'est pour qu'il soit à son bureau et le filmer pour dire comment ça va.
31:54Ça n'a pas l'intérêt.
31:55Donc il est dans le monde entier, notamment.
31:57Moi, c'est ça qui m'a décidé.
31:59C'est la possibilité d'aller chanter aux Champs-Élysées en japonais,
32:04à Tokyo, dans un karaoké, dans un bar karaoké.
32:07Ça, ça m'a plu.
32:07– C'est quoi ? C'est le fait de jouer dans une langue étrangère ?
32:10– C'est le fait de faire des bêtises, mon vieux.
32:12– Voilà, c'est une mauvaise raison.
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