À l'occasion de la sortie de son livre "Jouer ou tuer" aux éditions Michalon, Isabelle Rome, magistrate pendant 30 ans et ambassadrice des droits de l'homme, revient sur la mécanique d'un féminicide. Pour ça, elle dissèque le contrôle coercitif, ce schéma d'emprise qu'elle estime avoir vu dans "8 ou 9 dossiers sur 10" au long de sa carrière. L'inscription du contrôle coercitif dans la loi est d'ailleurs débattu ce 3 avril au Sénat.
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00:00parce qu'il me semblait important d'expliquer comment se fabriquait un féminicide.
00:05Je suis Isabelle Rohm, ambassadrice pour les droits de l'homme, magistrate pendant plus de 30 ans
00:13et ancienne ministre en charge de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.
00:18J'ai voulu écrire ce livre « Jouer ou tuer » parce qu'il me semblait important d'expliquer comment se fabriquait un féminicide.
00:29Lorsque je présidais les cours d'assises, les notions d'emprise, de contrôle coercitif n'étaient pas connues.
00:35Mais je me disais, c'est curieux, c'est presque toujours le même scénario que je retrouve dans ces dossiers de meurtre de conjoints.
00:44Et en fait, plus tard, j'ai pu découvrir ce qu'était le contrôle coercitif,
00:49c'est-à-dire un ensemble, un cumul de comportements, de propos qui, petit à petit, vont placer totalement l'autre
00:59sous la domination de celui qui exerce ce contrôle et va progressivement l'anéantir.
01:07Dans peut-être 8 ou 9 dossiers sur 10 de dossiers de féminicide que j'ai pu juger, on avait ce mécanisme qui avait été à l'œuvre.
01:15Et je pense qu'il est important, effectivement, qu'il puisse être défini dans la loi,
01:20parce qu'il pourra aussi permettre au juge de statuer, de se référer à ce texte de manière aussi préventive,
01:27c'est-à-dire de répondre déjà à ce comportement avant que celui-ci ne conduise à des choses de plus en plus graves,
01:36voire donc au meurtre ou à l'assassinat.
01:39Les débats sont en cours au Parlement et je suis vraiment très heureuse que le Parlement se saisisse justement de ces questions,
01:46comme il s'est saisi récemment de la question du non-consentement dans le viol.
01:51Et là, aujourd'hui, c'est cette notion de contrôle coercitif parce qu'on voit bien que ce sont des questions de société.
01:57L'essentiel est justement de pouvoir introduire ce terme de contrôle coercitif dans la loi, de le définir, de l'incriminer.
02:09C'est aussi afin de pouvoir justement permettre à la justice de répondre le plus rapidement possible à de telles situations pour éviter le pire.