Matt Pokora raconte à Brut comment il a dû faire face, dès son enfance, à la maladie d'Alzheimer qui a frappé son grand-père.
Aujourd'hui il s'engage en faveur de la lutte contre la maladie d'Alzheimer avec la Fondation pour la Recherche Médicale.
Aujourd'hui il s'engage en faveur de la lutte contre la maladie d'Alzheimer avec la Fondation pour la Recherche Médicale.
Catégorie
🛠️
Style de vieTranscription
00:00Quand on arrivait, et que ma grand-mère disait
00:03« Mais c'est Mathieu, c'est ton petit-fils. »
00:06Et il disait « Ah oui, ça va, ça va. Et l'école, ça va ? »
00:10Et je répondais, et 40 secondes après,
00:15« Et l'école, ça va ? » Et cinq fois de suite, jusqu'au vouvoiement, quoi.
00:20Voilà, quand t'as 14 ans et que ton grand-père, il te vouvoie...
00:23Moi, je me rappelle être sorti de la pièce, avoir pleuré...
00:27C'était... Voilà, c'était difficile, ça.
00:29Quand j'ai appris pour l'Alzheimer de mon grand-père,
00:31je devais avoir peut-être 9-10 ans.
00:36Et à ce moment-là,
00:39je me rends pas compte des ravages que peut faire l'Alzheimer.
00:43Je me dis, il va juste oublier certaines choses, etc.
00:47Et puis en fait, avec les années, en grandissant,
00:50je vois qu'on lui enlève sa voiture,
00:53je vois que c'est pas juste des mots qu'il oublie
00:56ou il a rangé ses clés,
00:58il commence à oublier des personnes, des prénoms,
01:03ce qu'il a fait il y a cinq minutes.
01:05Puis après, voilà, ça s'empire.
01:07Et puis il y a aussi des moments de démence,
01:10c'est dur pour l'entourage.
01:12Enfin, c'est toutes ces choses-là qui évoluent après, au fil des années,
01:16jusqu'au jour où je suis arrivé et qu'il m'a pas reconnu.
01:21Là, j'ai compris qu'on attaquait une phase
01:26qui allait être vraiment très difficile pour nous, l'entourage aussi.
01:29Et ce qui était dingue, c'est qu'il me voyait, il me reconnaissait pas,
01:32mais quand je lui montrais les médailles,
01:34puisqu'il était militaire de carrière,
01:36et que je lui disais, raconte-moi l'histoire de chacune des médailles,
01:39il te racontait en détail,
01:41quand il était en Indochine, ses blessures de guerre, etc.
01:47Il se souvenait des souvenirs comme ça, lointains,
01:50mais la mémoire immédiate, c'était fini, quoi.
01:54On a beau avoir traversé des guerres,
01:57s'être relevé après des blessures, s'en être sorti,
02:00être entré auprès de sa famille,
02:02et finalement, c'est une petite saloperie qui vient bousiller ton cerveau.
02:07On n'est pas formé pour gérer quelqu'un qui a des démences
02:10ou qui, dans les premières phases de cette maladie,
02:15n'est pas pris en charge dans un établissement.
02:18Les dernières années de sa vie,
02:21quand il a commencé à être placé en centre,
02:23moi, j'étais sur les scènes et sur les routes,
02:26donc j'étais vraiment plus beaucoup auprès de ma famille.
02:30Et je suis allé une seule fois le voir au centre.
02:36Et c'était terrible.
02:38Le centre, pour moi, c'était de le voir au milieu d'autres personnes
02:42qui retournent à l'état d'enfant, de nourrisson.
02:48Ils sont là à voir mon grand-père comme ça, sur un fauteuil,
02:51les yeux dans le vide, avec de la bave.
02:57Ça, je l'ai fait une fois et j'ai dit,
03:00je suis désolé, mais je ne peux plus le voir comme ça.
03:04Et quelques mois après, il était parti.
03:06Clairement, de le voir comme ça, je me suis dit,
03:10laissez-le partir.
03:12C'était quelqu'un qui était tellement digne, tellement fier.
03:15Il y a aussi cette question-là de se dire,
03:17est-ce qu'il faut maintenir quelqu'un coûte que coûte ?
03:20Moi, je suis de ceux qui sont contre ça.
03:24Quand on dit qu'il y a 900 000 personnes
03:27atteintes de la maladie en France,
03:31il faut multiplier le chiffre par 6, 7, 10,
03:36en fonction des personnes qui se retrouvent autour de la personne atteinte.
03:42Ça fait énormément de gens touchés en France.
03:44Et ça, on ne se rend pas compte de comment c'est dur
03:49pour le compagnon, la compagne de la personne
03:51qui vit au quotidien avec, pour les enfants, pour les petits-enfants.
03:55Il y a une fatigue émotionnelle.
03:58Ça prend beaucoup d'énergie.
04:00C'est beaucoup d'angoisse, d'inquiétude.
04:03C'est se réorganiser,
04:06réorganiser sa vie pour faire en sorte que la personne ne soit jamais seule.
04:11C'est comme surveiller un enfant, après.
04:13Déjà, d'en parler, c'est préparer aussi les gens si jamais ça leur arrive.
04:17C'est de savoir à quoi on peut être confronté
04:21quand un de nos proches est touché par cette maladie.
04:26Pour s'y préparer, il faut savoir
04:29ce qu'implique cette maladie.
04:32Dans quelques années, le chiffre peut passer
04:34de 900 à plus de 2 millions de personnes atteintes.
04:37Et 2 millions de personnes atteintes veut dire
04:41peut-être 12, 13, 14 millions de personnes concernées
04:46par cette maladie.
04:48Donc c'est sensibiliser pour faire avancer la recherche,
04:52pour essayer de trouver des moyens de se débarrasser de ça
04:57ou de le ralentir encore plus
04:59ou de pouvoir vivre avec sans que ça aille jusqu'aux étapes de fin.
05:04Au moins, rendre les choses plus faciles.
05:07Et c'est pour ça que je suis là
05:09et que j'ai voulu prêter ma voix à la Fondation,
05:14que j'ai voulu parler aussi de ce sujet-là, de cette maladie-là,
05:18que ce soit dans mon film ou là,
05:20une fois que le film est passé, continuer le combat.