Sa grand-mère féministe, son départ de Paris, le casting de la Nouvelle Star...
Julien Doré raconte les moments qui ont changé sa vie.
Julien Doré raconte les moments qui ont changé sa vie.
Catégorie
🎵
MusiqueTranscription
00:00Mon ancien patron, il venait me voir dans les bars le week-end
00:02quand je jouais avec mon groupe.
00:04Et d'ailleurs, il me prêtait souvent les véhicules de la société
00:07pour qu'on puisse amener la batterie, l'ampli basse, etc.
00:10Il y a eu un moment qui est hyper beau,
00:14qui est qu'à force de me voir dans les bars le week-end,
00:16il ne comprenait pas pourquoi le lundi matin à 6 heures,
00:18j'étais quand même là sur les chantiers à bosser.
00:21Il a fait un geste qui était hyper symbolique et hyper fort pour moi,
00:26c'est qu'il m'a licencié.
00:26Alors au début, évidemment, je n'ai pas vraiment compris.
00:28Je me sentais fautif et il m'a juste expliqué que s'il le faisait,
00:31c'était pour me permettre de me laisser quelques mois devant moi
00:34pour essayer de trouver ma voix dans la musique.
00:47Quelques semaines après, je crois, il y a eu ce casting à Marseille.
00:51C'est complètement fou parce qu'aussi bien
00:55s'il ne m'avait pas dit ça comme ça,
00:56s'il ne m'avait pas viré de la société où je me sentais très bien.
00:59Si j'avais bossé ce jour-là, non, je ne serais pas allé.
01:04En plus, à l'époque, il faut quand même imaginer que la Nouvelle Star,
01:07c'était big et que la file d'attente, c'était les premières auditions,
01:13donc les premières auditions dans les villes.
01:15Donc, c'était, je ne sais pas, genre 4, 5 heures,
01:21des milliers et des milliers de personnes qui faisaient la file d'attente.
01:23C'était vraiment impressionnant.
01:27Au moment où je déménage, au moment où le camion amène vraiment mes meubles,
01:33enfin mes meubles, je n'avais pas de buffet, je n'avais pas non plus, bref.
01:36Mais bon, mes objets, mes meubles, mes trucs, quoi.
01:40Dans le sud, ça a été troublant parce que c'était un moment où, justement,
01:46la tournée acoustique que j'avais faite après justement la grosse tournée de Zenith
01:51et tout ça, venait de se terminer.
01:53Et en gros, c'était comme une remise à neuf, en fait.
01:58Je n'avais rien à faire.
02:00C'était le début de l'automne.
02:01Oui, j'ai mesuré, mais tout de suite en fait, parce que les plaines,
02:07la nature autour de moi, la forêt derrière moi, en permanence,
02:10et la solitude, celle que je retrouvais aussi.
02:14Je me rendais compte aussi que je n'allais pas faire de musique tout de suite.
02:17En regardant autour de moi, les premiers trucs que j'ai vus,
02:19c'est que la terre qui était autour de moi, les arbres, etc.
02:23J'avais quelque chose à faire, à réapprendre avec mes mains, en fait.
02:27J'avais à réapprendre à bricoler, à savoir bricoler.
02:30Ces retrouvailles-là, c'est mon enfance, c'est mon adolescence.
02:34Je suis parti à 24 ans de ce sud-là.
02:38Et dans ce sud-là, on connaît la terre,
02:41on connaît comment nos anciens, là-bas, travaillaient la terre depuis toujours.
02:45Je veux dire, on connaît la terre, on connaît comment les gens
02:49travaillaient la terre depuis toujours.
02:50Je veux dire, le potager, ce n'est pas une lubie, ce n'est pas un hobby.
02:55C'est une nécessité.
02:56Quand tu as la chance de pouvoir le faire autour de toi,
03:00quand tu as la chance de pouvoir récupérer l'eau,
03:01que ce soit celle de la pluie ou celle qui tombe sur ton toit
03:04et qui est récupérée par des chenots, de simplement la récupérer, etc.
03:07J'ai recommencé à travailler de mes mains dans plein de domaines
03:09à partir du moment où j'ai déménagé parce que je retrouvais un endroit,
03:12un lieu que je connaissais, j'y suis né, là-bas.
03:15Là où je vis, c'est là où je suis né.
03:19Et j'ai ces souvenirs d'enfance et d'adolescence
03:22où oui, on va aider à faire les ventes d'anges, on connaît ça.
03:25On connaît cette nature qui nous entoure et qui nous nourrit.
03:34Il y a eu cette force-là au moment de la mort de mon grand-père
03:39qui, lui, était mineur à la mine d'Alès, justement,
03:43et qui est décédé.
03:45Et à ce moment-là, elle a décidé de s'occuper de toutes les femmes
03:47qui étaient veuves de mineurs
03:49et de se battre pour qu'elles aient des droits, des pensions à la hauteur
03:54simplement de pouvoir vivre, continuer à vivre.
03:58Elle était absolument féministe, on peut évidemment le dire.
04:02Et son combat, les manifestations qu'elle a menées
04:05avec ses camarades de la CGT, etc.
04:07Son combat pour obtenir des droits dans un milieu très masculin,
04:10de décideur à l'époque.
04:11J'ai le souvenir que pendant un long moment,
04:14alors qu'elle avait déjà un certain âge, c'est une formule plus jolie,
04:19elle n'était pas tout le temps disponible.
04:21Parce qu'elle était à la Bourse du Travail à Alès
04:24pour aller aider certaines personnes à remplir leurs papiers
04:26qui, soit ne savaient pas comment le faire,
04:28soit pour qui les démarches étaient complexes.
04:32Parce qu'elle était avec des amis à elle,
04:35à un rendez-vous dans un endroit qui s'appelle Les Fumades,
04:37dans le sud, où elle allait danser beaucoup.
04:39Et c'était des moments très précieux.
04:41Le féminisme était présent aussi chez ma mère, c'est juste.
04:44C'est-à-dire que quand une femme s'engage pendant des années
04:48à défendre les femmes battues, à les accueillir, à les reloger,
04:53à faire en sorte parfois de trouver un job dans une autre ville
04:56pour qu'elles puissent fuir le foyer où c'est d'une rare violence.
05:01Ouais, quand t'entends ces conversations,
05:03quand tu sais que ta mère est en train de faire ça,
05:07que ça fait partie de sa vie,
05:08que c'est quelque chose qui l'a marqué à vie,
05:10je ne sais pas comment dire, parce que tu y penses, ça ne signifie rien.
05:12Ce que je veux dire, c'est que ça fait partie de toi.