"Elle a été mal comprise par la maison de disques qui a pris ça comme une chanson où je faisais un coming out."
Nicola Sirkis raconte toute l'histoire derrière "3e Sexe" d'Indochine.
Nicola Sirkis raconte toute l'histoire derrière "3e Sexe" d'Indochine.
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MusiqueTranscription
00:00Quand on a commencé le groupe, on nous critiquait beaucoup pour notre tenue, notre maquillage.
00:13C'était tout de suite les réflexions assez homophobes, c'est un groupe de pédés, etc.
00:20C'est un texte très brut, où on dit justement qu'on n'est pas dupes de qui nous traite de qui, qui nous traite de quoi.
00:33On s'en fout, on se prend en main.
00:36Il y avait aussi cette idée de chasse aux sorcières, effectivement l'homophobie encore plus aujourd'hui,
00:42mais à cette époque, en 85, c'est assez présent quand même.
00:46Tout ce qui était différent, que ce soit tenue vestimentaire, attitude, provoquait toujours une sorte de réaction assez difficile.
01:00Ces gens qui critiquent comme ça, je pense que c'est plutôt eux qui ont tout de suite assimilé quelque chose à une sexualité ou à un genre.
01:10Donc la vraie perversité, elle ne vient pas de ce qu'on peut penser, de ce qu'on peut croire, de ce que la société peut croire, mais plutôt de ces gens-là.
01:17Je crois me souvenir que j'ai écrit cette chanson sur le... J'habitais encore chez ma maman, dans ma chambre d'adolescent.
01:25Le texte, je crois que je l'avais écrit vraiment en ingé.
01:29Celui-là, il est venu assez rapidement, c'est-à-dire qu'une fois que j'étais lancé dans la rue des tenues charmantes, maquillé comme ma fiancée.
01:36Au départ, je suis parti sur le masculin féminin de Godard. J'ai toujours adoré les titres de Godard.
01:42On était aussi souvent à Londres, et à Londres, c'était vraiment le paradoxe entre Paris et Londres.
01:48Pendant toute ma jeunesse, je me suis fait poursuivre parce que je m'habillais différemment.
01:54Pas harceler, mais poursuivre violemment, montrer du doigt, etc.
02:01Alors qu'à Londres, n'importe qui peut s'habiller comme il veut, c'est assez incroyable.
02:05Le groupe découvre toujours mes chansons une fois que je les chante en studio.
02:10Et donc, ils ont découvert là, ils ont dit « Waouh ! Mais qu'est-ce que tu dis ? »
02:14Il y en a beaucoup qui ont dit « Mais qu'est-ce que c'est que ça ? »
02:17Elle a été aussi mal prise, mais mal comprise.
02:20Mal comprise par un ou deux membres du groupe et par la maison de disques de Force.
02:25Qui a pris ça comme une chanson où je faisais un coming-out, alors que pas du tout.
02:31C'est une chanson sur la tolérance en général.
02:34« Troisième sexe », à un moment donné, c'était évident.
02:36Le morceau est tellement évident à la mélodie, au texte.
02:40On se prend la main, c'est un peu « I want to hold you hand » des Beatles,
02:43donc c'est tellement mémotechnique.
02:45« Ah non, non, non, mais il ne faut pas sortir ça, c'est une chanson de pédé.
02:48Vous allez perdre tout votre public féminin. »
02:53On en était là, mais d'un autre côté, on peut comprendre après que ces mecs-là,
02:56ils ont fait des boys-band, puisque c'est les mêmes mecs qui ont fait ça.
03:00Donc nous, on a dit que ce n'était pas grave, on allait la sortir quand même.
03:04Je me rappelle une fois, j'étais en voiture.
03:06À l'époque, il y avait Patrick Sabatier sur une chaîne de radio.
03:10Je crois qu'il passait les disques à la demande.
03:13Il y avait une gamine de 11 ans qui disait « Moi, je veux écouter « Troisième sexe ». »
03:17Donc c'était rigolo, parce que là, tout d'un coup,
03:20on est dans une sorte de métaphore où il n'y avait plus de barrière.
03:28C'est devenu un hymne de génération, même maintenant, transgénérationnel,
03:32puisque ça a traversé les époques et c'est toujours d'actualité.
03:36Ce qui est assez fou avec ce titre, sans me jeter des fleurs,
03:39c'est que c'est vrai que le texte est totalement…
03:42Il est permanent, il est intemporel.
03:45Quand je l'ai écrit, je ne pensais pas du tout à ça,
03:48mais c'est vrai que c'est un texte qui n'est absolument pas démodé.
03:51La violence envers l'homosexualité est toujours d'une force incroyable.
03:55Ça a toujours été…
03:58Oui, c'est un combat qui doit être toujours permanent.
04:01Et il n'y a pas plus cool…
04:03Le nombre de gens qui ont pris cette chanson comme une sorte de passeport d'espoir.
04:10Donc c'est plutôt intéressant.