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  • 25/03/2025
9 jours après sa naissance, leur fils Élias est décédé. Pauline et Saïd racontent leur histoire, et lancent un appel pour dénoncer le manque de moyens dans l'hôpital public.

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Transcription
00:00Les médecins nous ont accompagnés jusqu'au bout.
00:03Et sans eux, vraiment, on n'aurait pas pu dire au revoir à notre bébé comme on l'a fait.
00:09Le médecin l'a mis dans mes bras et c'est comme ça qu'il est parti.
00:11En fait, quand ils ont compris que vous n'allez pas pouvoir sauver notre fils,
00:15déjà c'est dur pour eux aussi,
00:19même si évidemment c'est encore pire pour nous, on est bien d'accord,
00:25on sent que ce n'est pas facile.
00:28Ils ont l'impression de ne pas y arriver, d'être dépassés par quelque chose
00:32qui est tout simplement la vie, qu'on ne peut pas maîtriser complètement.
00:35À aucun moment, on s'est posé la question
00:38de savoir si notre enfant était bien pris en charge.
00:42C'était pour nous une évidence.
00:44On avait la certitude que ce qui était fait pour Elias
00:50était le mieux de ce qu'on pouvait faire.
00:52Et on a appris récemment qu'en fait, ce n'était pas le cas pour tous les enfants.
00:57Voilà ce qui nous a heurtés.
00:58Mais il faut imaginer, moi, si on m'avait dit que mon gamin
01:02devait être transporté ailleurs, faute de place, je serais devenu fou.
01:06J'aurais trouvé ça absolument insupportable.
01:08Et il se trouve qu'on a eu cette chance, en fait,
01:11à aucun moment, de ne douter de la qualité des soins qu'il a reçus.
01:15Ce qu'il y a aussi, si je peux me permettre, c'est que
01:18peut-être que des dysfonctionnements existaient déjà,
01:21mais simplement, les équipes ne disent pas qu'elles ont enchaîné des gardes
01:27parce qu'il manquait une infirmière et qu'il y a une infirmière
01:31qui a dû en enchaîner deux dans la semaine.
01:33Elles ne disent pas qu'elles n'ont pas pu prendre,
01:37que leurs RTT ne peuvent jamais être prises
01:39ou qu'elles n'ont pas eu certains jours de congés payés.
01:43C'est ça qui est...
01:45C'est-à-dire qu'ils continuent à faire le maximum.
01:47Je pense que quand on y est, même aujourd'hui,
01:49quand l'enfant est dans le service,
01:52les parents continuent à avoir affaire à des médecins et des équipes
01:57autant impliqués que ce que nous, on a connu.
01:59Simplement, la réalité, c'est que derrière, il y a une souffrance
02:02qui s'exprime autant que possible,
02:07mais qui ne semble pas être vraiment entendue par la ministre jusqu'à présent.
02:11Et puis, il y a une inquiétude.
02:14Et cette inquiétude, aujourd'hui, c'est des médecins qui nous disent
02:17qu'ils ont peur de ne pas bien pouvoir remplir leur mission,
02:20de ne plus être en mesure de faire leur travail
02:25pour répondre à la vocation qui est la leur,
02:28et qu'ils préfèrent démissionner de l'hôpital public
02:30plutôt que de mettre en danger leurs patients.
02:33On a reçu de nombreux témoignages depuis qu'on a publié la tribune
02:38et lancé cette pétition,
02:40des parents et des soignants qui nous disent la réalité
02:43de ce qu'ils vivent ou de ce qu'ils ont vécu.
02:45Alors, on peut vous donner un ou deux exemples.
02:47Concrètement, c'est un enfant de 6 semaines qui est en situation de détresse.
02:53Pas de place à Paris.
02:55Ses parents habitent à Paris.
02:56Pas de place à Paris.
02:57Il est transféré à Poissy, à une trentaine de kilomètres de Paris.
03:01A Poissy, son cas s'aggrave.
03:04Ils ne peuvent pas le soigner en réanimation.
03:06Il est transféré à Orléans.
03:07Qu'est-ce que c'est que transporter un enfant d'un point A à un point B
03:14lorsqu'il est en situation de réanimation ?
03:16Je vais vous parler de l'exemple de notre fils Elias.
03:20Il est né au Bluay et il a été transféré immédiatement à Trousseau.
03:24Et en fait, les Bluay et Trousseau sont mitoyens.
03:27Si on avait dû le transférer dans un autre hôpital,
03:30il n'aurait jamais survécu au trajet.
03:33Pour une raison simple, c'est qu'une fois qu'il a été posé dans sa couveuse à Trousseau,
03:38ensuite c'était impossible de le bouger, il n'était plus en état.
03:41Il était trop fatigué.
03:43À un moment, il s'est agi de lui faire un examen, une IRM.
03:46Il fallait le faire descendre de deux étages en ascenseur.
03:50C'était impossible.
03:51Les médecins nous ont dit qu'il ne supportera pas le trajet.
03:53Donc, vous imaginez s'il avait dû faire 20, 30, 200 kilomètres.
03:57Donc, les conséquences concrètes, c'est ça.
03:58C'est qu'en fait, réellement, on met la vie d'enfant en danger.
04:03D'autres exemples, c'est concernant les fermetures de lits.
04:08Au Mans, un service ferme à Tours, deux lits devaient rouvrir en janvier.
04:15Ils ne peuvent pas rouvrir.
04:15Pourquoi ?
04:16Parce que l'hôpital ne parvient pas à recruter les infirmières qu'il faudrait pour rouvrir.
04:21Parce qu'en fait, il y a un élément très important dans ce problème.
04:26C'est que pour des raisons de sécurité, tout simplement,
04:29une infirmière ne peut s'occuper que de trois enfants au maximum.
04:33Et donc, quand on n'arrive pas à recruter les infirmières,
04:35parce que, compte tenu de leurs conditions de travail,
04:39elles travaillent deux jours, deux nuits, des heures sup non payées, etc.,
04:43eh bien, elles sont rémunérées en moyenne à 1 600 euros par mois.
04:49Donc, ces services ne parviennent plus à recruter les infirmières.
04:52Résultat, ils doivent fermer des lits.
04:54Moi, ce que je crains aujourd'hui,
04:55c'est que notre système de santé est en train de s'effondrer sous nos yeux
04:59et que si rien ne se fait aujourd'hui, il va être trop tard.
05:04C'est complètement fou de se dire qu'en fait,
05:06on perd de vue ce qui fait tout simplement l'essentiel
05:10de ce pourquoi on a des services publics,
05:12de ce pourquoi on accepte de payer des impôts,
05:15de ce pourquoi on a un État et des pouvoirs publics.
05:17Nous, on y croit encore à l'hôpital public.
05:21Et d'ailleurs, moi, je vais accoucher dans quelques semaines à Trousseau,
05:24dans cet hôpital, parce que je sais que c'est là
05:28que je vais trouver les meilleures équipes
05:31pour accueillir ce nouveau bébé qu'on attend.
05:34Donc, c'est pour dire qu'il y a quand même de l'espoir,
05:38mais qu'il faut se bouger pour que ça continue à être comme ça.
05:41C'est à Trousseau que notre fils Elias est parti.
05:45C'est à Trousseau qu'on va à nouveau donner la vie.

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