"La France a un rôle, une histoire et une responsabilité politique au Rwanda. Et elle a un devoir : celui de regarder l'histoire en face et de reconnaître la part de souffrance qu'elle a infligée au peuple rwandais."
Emmanuel Macron, 27 ans après le génocide rwandais.
Emmanuel Macron, 27 ans après le génocide rwandais.
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00:00Les tueurs qui hantaient les marées, les collines, les églises n'avaient pas le
00:07visage de la France. Elle n'a pas été complice.
00:12Le sang qui a coulé n'a pas déshonoré ses armes ni les mains de ses soldats
00:18qui ont eux aussi vu de leurs yeux l'innommable, pensé des blessures et
00:25étouffé leurs larmes. Mais la France a un rôle, une histoire et une
00:34responsabilité politique au Rwanda. Elle a un devoir, celui de regarder
00:42l'histoire en face et de reconnaître la part de souffrance qu'elle a infligée au
00:47peuple rwandais en faisant trop longtemps prévaloir le silence sur
00:53l'examen de la vérité.
01:01En s'engageant dès 1990 dans un conflit dans lequel elle n'avait aucune
01:06antériorité, la France n'a pas su entendre la voix de ceux qui l'avaient
01:12mise en garde ou bien a-t-elle surestimé sa force en pensant pouvoir arrêter ce
01:18qui était déjà à l'oeuvre. La France n'a pas compris qu'en voulant faire
01:27obstacle à un conflit régional ou une guerre civile, elle restait de fait aux
01:34côtés d'un régime génocidaire. En ignorant les alertes des plus lucides
01:42observateurs, la France endossait alors une
01:47responsabilité accablante dans un engrenage qui a abouti au pire,
01:52alors même qu'elle cherchait précisément à l'éviter. À Arusha, en août 1993,
02:06la France pensait, aux côtés des Africains, avoir arraché la paix. Ses
02:14responsables, ses diplomates y avaient œuvré, persuadés que le compromis et le
02:21partage du pouvoir pouvaient prévaloir. Ses efforts étaient louables et
02:27courageux, mais ils ont été balayés par une mécanique génocidaire qui ne voulait
02:36aucune entrave à sa monstrueuse planification.
02:44Lorsqu'en avril 1994, les bourreaux commencèrent ce qu'ils appelaient
02:50odieusement leur travail, la communauté internationale mit près de trois mois,
02:57trois interminables mois, avant de réagir. Et nous avons tous abandonné des
03:08centaines de milliers de victimes à cet infernal huis clos. Au lendemain, alors
03:18que des responsables français avaient eu la lucidité et le courage de qualifier
03:23le génocide, la France n'a pas su en tirer les conséquences appropriées.
03:33Depuis, 27 années de distances amères se sont écoulées, 27 années d'incompréhension,
03:42de tentatives de rapprochement sincères, mais inabouties, 27 années de
03:48souffrance pour ceux dont l'histoire intime demeure malmenée par
03:52l'antagonisme des mémoires. Alors, en me tenant avec humilité et respect à vos
04:04côtés ce jour, je viens reconnaître nos responsabilités.