Éric Ciotti, président du groupe UDR à l'Assemblée nationale, était l'invité de BFM ce mercredi 5 mars. Il a notamment été interrogé sur la situation en Ukraine, notamment sur l'envoi de troupes européennes sur le sol ukrainien, sur les négociations entre les États-Unis et la Russie ou encore sur le potentiel retrait de la légion d'honneur de Nicolas Sarkozy après sa condamnation définitive dans l'affaire Bismuth.
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00:00J'accueille dans quelques instants Éric Ciotti, on est en direct, il est en train de s'installer, président du groupe Union des droites pour la République à l'Assemblée Nationale et député des Alpes-Maritimes.
00:11Bonsoir Éric Ciotti, merci d'être avec nous sur BFM TV, on le disait il est 19h21 très précise, dans moins de 40 minutes le chef de l'État Emmanuel Macron va s'exprimer, qu'est-ce que vous attendez de cette allocution ?
00:24J'attends un propos réaliste, j'attends un propos qui contribue à la paix en Europe, qui ne soit pas un propos va-t-en-guerre comme on a eu l'habitude de les entendre,
00:38j'attends un propos cohérent et qui ne soit plus désordonné en allant un peu dans tous les sens avec un président qui au départ parlait de façon permanente à Poutine et puis après voulait envoyer de façon totalement isolée des soldats français à l'Ukraine,
00:58donc il faut une stratégie qui redonne sa place à la France, une puissance d'équilibre telle que l'avait voulu le général de Gaulle, qui puisse parler à tous les interlocuteurs, sans soumission, sans dépendance, sans soumission à la Commission européenne,
01:16j'attends de monsieur Macron qu'il dise très clairement qu'il ne veut pas être l'otage de la présidente de la Commission européenne qui, nous le voyons bien, essaie de profiter de cette crise terrible pour pousser des pions fédéralistes et pour faire en sorte que l'Europe se transforme en se dotant de compétences que les traités ne lui ont pas conférées.
01:39Elle annonce un plan de 800 milliards d'euros pour l'armement, il y aura un sommet extraordinaire qui est prévu demain à Bruxelles. Vous dites que le chef de l'État doit montrer qu'il discute avec toutes les parties, ça veut dire que, est-ce que vous jugez que le président de la République doit à nouveau discuter et échanger avec Vladimir Poutine ?
01:54Mais comment pourrait-on imaginer régler cette crise sans parler avec Vladimir Poutine ? C'est ce qu'ont fait les Américains. C'est ce qu'avait prôné, rappelez-vous, le président Sarkozy à l'été dernier.
02:09Il avait été critiqué, raillé, y compris par Emmanuel Macron, mais lorsqu'on veut établir la paix entre deux belligérants, et moi mon souhait c'est que la paix revienne le plus rapidement possible, qu'il y ait un cessez-le-feu, qu'il y ait des conditions de sécurité pour l'Ukraine parce que l'Ukraine est le pays qui a été agressé, la Russie est l'agresseur, mais nous devons tous aujourd'hui faire preuve de lucidité.
02:33Cette guerre ne peut plus être gagnée par les Ukrainiens, notamment du fait du retrait américain, et donc il faut un cessez-le-feu, il faut que la paix revienne et il faut des conditions de sécurité pour la souveraineté de l'Ukraine, mais dans le réalisme.
02:48– Donc vous dites, la Russie a gagné cette guerre ? – La Russie ne peut pas y avoir de vainqueur à cette guerre, je souhaite qu'à la sortie de ce conflit, l'Ukraine conserve sa souveraineté territoriale, qu'elle ait des conditions de sécurité, il y a aujourd'hui des conquêtes territoriales qui ont été faites par les armes,
03:11il faut que ces territoires qui vont être l'objet des négociations, ne nous le cachons pas, et notamment les régions du Donbass, il faut que l'accord de paix, l'accord de cessez-le-feu parlera, évoquera le statut de ces régions, qui naturellement ne peut pas être le même que celui des autres régions d'Ukraine.
03:37– Qu'est-ce que vous pensez si ce soir le chef de l'État confirme qu'il est prêt à envoyer des troupes européennes et donc des soldats français, non pas pour combattre, mais pour maintenir la paix une fois qu'un accord a été trouvé ?
03:46– Je suis totalement hostile à l'envoi de troupes pour combattre, et je suis hostile à l'envoi de troupes dans le climat actuel, si demain un accord de paix généralisé est établi, s'il y a des conditions de sécurité qui appellent à une force de paix ou de maintien de la paix sous mandat de l'ONU ou de l'OSCE, pourquoi pas ?
04:13Avec une participation généralisée, cette question peut être posée, mais à ce stade, elle est prématurée, elle est même dangereuse, et dangereuse pour nos soldats, parce qu'il n'y aura pas de garantie de sécurité pour nos troupes, et je ne pense pas qu'elles aient quelque chose à faire dans ce moment en Ukraine.
04:32– Placer l'Europe sous le parapluie nucléaire européen, ça vous y êtes favorable ou pas ?
04:36– Je suis totalement opposé, on ne partage pas la doctrine de dissuasion, rappelons-nous d'où elle vient.
04:43– Même si c'est le Président de la République française qui garde le pouvoir d'appuyer sur le mouton ?
04:46– Elle vient de la volonté du Général de Gaulle.
04:49– Mais le Général de Gaulle avait évoqué l'Europe dans ses intérêts vitaux.
04:52– Dans ses intérêts vitaux, mais il évoquait de toute façon le principe même de la dissuasion nucléaire, c'est de ne pas dire à ceux qui pourraient subir nos foudres dans quel cadre elles pourraient être mobilisées.
05:05C'est le principe de la dissuasion, mais même ouvrir ce débat est extraordinairement dangereux, ça ouvre droit à une forme de fédéralisme européen.
05:15François Fillon l'a rappelé dans une interview remarquable dont je salue la hauteur de vue parce que c'est un vrai homme d'État.
05:24François Fillon a parlé de coûts d'État permanents de la part de Madame von der Leyen qui va au-delà des prérogatives de tous les traités européens.
05:35Et il a parlé de cette folie, de l'idée même de partager la dissuasion nucléaire.
05:41La dissuasion nucléaire c'est ce qui fait de notre pays encore une grande puissance alors que sur bien des domaines elle est déclassée,
05:49au plan économique, au plan sécuritaire, au plan de l'influence.
05:52Éric Ciotti, vous évoquez l'interview donnée par François Fillon à Valeurs Actuelles, il dit aussi, je cite François Fillon,
05:59« Zelensky n'est pas le héros irréprochable magnifié par des Européens auxquels il procure le frisson d'un combat pour la liberté par procuration.
06:08Zelensky a sa part de responsabilité dans le déclenchement de la guerre et il refuse aujourd'hui d'arrêter une guerre qu'il ne peut pas gagner. »
06:15Est-ce que vous aussi vous considérez que Zelensky a sa part de responsabilité dans le déclenchement de cette guerre ?
06:20Moi je crois que l'analyse globale de François Fillon est équilibrée et pertinente et lucide.
06:26Donc vous diriez que Zelensky a une part de responsabilité ?
06:29Il faut dire les choses. Aujourd'hui Zelensky voulait poursuivre ce conflit. Donc ce que dit François Fillon, personnellement j'y adhère.
06:40Et est-ce qu'il a une part de responsabilité dans le déclenchement de la guerre Zelensky ? Oui ou non ?
06:43C'est une question qui est posée. Cette guerre n'aurait jamais dû être déclarée.
06:49Il y a une histoire et il y a des responsabilités.
06:52Est-ce que Zelensky a une part de responsabilité ?
06:53La Russie est l'agresseur. Mais il y a eu le non-respect des accords de Minsk. Il y a eu des fautes aussi du côté ukrainien.
07:05Même si, je le redis, l'agresseur c'est la Russie.
07:10Comme certains responsables républicains, est-ce que vous estimez que Volodymyr Zelensky est le dernier obstacle à la paix ?
07:17Je ne sais pas. Mais en tout cas, nous avons un devoir de lucidité.
07:20Ce qui s'est passé avec…
07:22Vous dites « je ne sais pas ». Je vous arrête. Ça veut dire que vous considérez que Zelensky est un obstacle à la paix ?
07:26En tout cas, nous verrons bien les conséquences de cette scène qui a traumatisé le monde dans le Bureau Oval à Washington.
07:36Mais en tout cas, cette scène a peut-être fait bouger des lignes. Elle a choqué. Elle a été brutale pour un président qui défend son peuple.
07:45Mais est-ce que c'est Zelensky qui en est responsable ?
07:46Et c'est légitime. Mais en tout cas, je crois qu'il y a… On voit, moi, il y a une forme de réal politique qui doit s'imposer pour aller vers la paix.
07:55Et nous voyons depuis cette scène que les lignes ont bougé, que le président Zelensky a fait des ouvertures, qu'il a lancé un appel à ce que la paix s'installe et que les États-Unis prennent leur part.
08:11Donc, quelque part, si on regarde que les objectifs, on a pu être choqués. J'ai été choqué par la brutalité de cette scène. Mais nous verrons bien à la sortie.
08:22Ma question, Éric Ciotti, c'était est-ce que Volodymyr Zelensky est un obstacle à la paix ? Vous avez dit peut-être. Est-ce que oui ou non, Volodymyr Zelensky est un obstacle à la paix ? Oui ou non ?
08:30Nous verrons comment il se comporte dans les jours qui viennent. Dans les jours qui viennent.
08:34Oui ou non ?
08:35Non, il peut être l'artisan de cette paix. Il peut être l'artisan de cette paix, mais s'il ne s'obstine pas à poursuivre une guerre par tous les moyens, alors que, malheureusement, militairement, elle est aujourd'hui, sans les Américains,
08:53et notamment sans les défenses anti-aériennes patriotes qui ouvriraient une très grande fragilité pour les troupes ukrainiennes, cette guerre, elle ne peut plus être gagnée.
09:03Est-ce qu'à vos yeux, Donald Trump est toujours un allié ou est-il devenu un adversaire de la France ?
09:07Nous avons une histoire avec les États-Unis qui fait des États-Unis un allié, mais nous ne reposons pas sur les États-Unis.
09:16Ça a été la ligne gaullienne, je l'ai dit à la tribune de l'Assemblée nationale.
09:20Moi, je suis gaulliste, et depuis le général de Gaulle, on n'a rien inventé de plus intelligent en matière de doctrine diplomatique.
09:29Celle qui faisait de la France une puissance d'équilibre, qui pouvait parler à l'URSS d'hier comme elle pouvait parler aux États-Unis.
09:36Ni vassal des États-Unis, ni soumis à la menace soviétique ou russe aujourd'hui.
09:44C'est cette ligne qu'il faut conserver avec notre dissuasion nucléaire, avec notre siège au Conseil de sécurité des Nations Unies.
09:52C'est la ligne gaullienne.
09:54Dernière question. Vous avez évoqué son nom tout à l'heure, Nicolas Sarkozy.
09:57On a appris dans la journée que le grand chancelier de la Légion d'honneur a annoncé qu'il retirerait très prochainement sa Légion d'honneur à Nicolas Sarkozy
10:05en raison des règles qui sont prévues, comme il a été condamné définitivement. Qu'est-ce que vous en pensez ?
10:10Je suis extrêmement choqué. Ce n'est pas n'importe qui. C'est un ancien président de la République qui a servi son pays.
10:17C'est le président de la République actuelle qui est le grand chancelier de la Légion d'honneur.
10:22Je suis choqué par le propos du chancelier aujourd'hui de la Légion d'honneur.
10:27Ce n'est pas lui décider. C'est au président de la République.
10:30J'espère que le président de la République aura la dignité de ne pas commettre cette offense à l'égard du président de la République, Nicolas Sarkozy,
10:39parce que ça serait aussi, quelque part, offenser la France et son histoire.