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00:00Et alors de l'amour, de l'amour, il va aussi en être question avec l'une des romancières les plus lues de France depuis les gens heureux
00:07lisent et boivent du café. Ces 11 romans traduits en 35 langues se sont vendus à plus de 5 millions d'exemplaires
00:14et elle publie aujourd'hui même, aujourd'hui, son douzième roman, Les Renaissance. Bonjour Agnès Martin-Lugand.
00:20Bonjour. Merci beaucoup d'être avec nous, je suis très heureux de vous rencontrer, d'autant que j'ai l'impression d'avoir passé le week-end avec vous.
00:27J'étais seule chez moi, je me suis fait complètement embarquer par ce roman, je ne l'ai pas lâché du week-end, alors que c'est quand même 450 pages.
00:34C'est un beau roman, c'est un beau bébé.
00:37Est-ce que c'est quelque chose d'ailleurs que vous avez en tête en permanence pendant l'écriture de tenir le lecteur en haleine ?
00:44En fait, ça se fait pas consciemment.
00:46Quand je commence à écrire, je connais pas la fin.
00:51Mes premiers, je connaissais, j'avais un plan hyper détaillé, et depuis mon septième, en fait, je finis par me lancer dès que je sens que j'ai une petite base et je laisse les personnages me guider.
01:03J'ai un rapport assez schizophrénique avec eux, donc je les laisse m'apprendre au fur et à mesure ce qu'il en est de leurs réactions, de leurs histoires.
01:11Il y a quand même des petites techniques pour nous faire rester, non ? Vous avez pas l'impression ?
01:15Je pense qu'il y a forcément des choses qui se sont mises en place dans ma manière de penser lorsque j'écris qui font que les événements s'enchaînent ou les découvertes de certains éléments de leurs histoires arrivent.
01:27Mais c'est souvent après coup, en fait. Une fois que je retravaille mon texte, une fois qu'il est terminé, que je prends conscience de ce que j'ai mis en place d'une manière absolument naturelle.
01:38Instinctive. Et alors vous arrivez à nous tenir en haleine avec l'histoire d'une romancière qui est en panne d'inspiration.
01:43Après avoir connu le succès depuis plusieurs années, là c'est la page blanche pour elle, cette romancière.
01:50Elle est comme vous une ancienne psy, donc forcément on ne peut pas s'empêcher de penser que c'est un petit peu vous que vous décrivez dans ce roman Agnès Martin-Lugand.
01:58Pour la petite histoire, je m'étais toujours promis de jamais écrire sur une romancière.
02:02Et puis Rebecca m'est tombée dessus parce qu'au bout d'un moment j'ai compris qu'il fallait que le personnage de Lino raconte son histoire à quelqu'un d'autre que moi.
02:11C'est pour ça que je vous dis quand je suis un petit peu schizophrénique avec eux, vous en avez la preuve.
02:16Et puis je me suis dit, tant qu'à faire, va jusqu'au bout, c'est une ancienne psy.
02:19Alors ce qu'elle a de moi Rebecca, je dirais que plutôt j'aurais pu frôler ce qui lui est arrivé.
02:25C'est-à-dire l'angoisse de la page blanche ?
02:27Elle c'est carrément la page blanche puisqu'elle n'arrive plus à écrire depuis plus de deux ans quand on la rencontre au début du roman.
02:33Mais voilà, moi au bout de dix ans, j'avais un rythme de un roman par an et j'ai eu la chance d'entendre le signal d'alerte,
02:42de me dire fais attention, fais attention à ton écriture, fais attention à toi, n'oublie pas de te nourrir pour nourrir ton écriture.
02:49Et finalement, le personnage de Rebecca m'a permis de mettre des mots sur cette bascule qui peut s'opérer à un moment.
02:56Et après voilà, elle m'a offert d'écrire sur la création littéraire.
03:00Qu'est-ce que c'est décrire ? Qu'est-ce que c'est le rapport avec ces personnages ?
03:04Parce que cette romancière Rebecca, ce qui va la nourrir, c'est qu'un soir elle va rencontrer par hasard dans un café Lino
03:12et elle va être sa confidente le temps d'une soirée.
03:15Il va lui raconter comment il a laissé s'échapper l'amour de sa vie.
03:19Et en fait, ça va réveiller chez cette romancière la flamme de l'écriture.
03:24Pour la première fois, en fait, elle n'a pas besoin de tout inventer.
03:27Elle veut raconter l'histoire de cet homme.
03:29Oui, oui, oui. Elle a toujours jusque là, elle avait toujours créé des personnages.
03:33Et là, en fait, elle se rend compte qu'elle a rencontré un homme qui est un personnage de roman plus vrai que nature.
03:38Avec le peu qu'il lui a confié de lui.
03:42Et elle sent en fait, le lendemain matin, elle se réveille et elle se dit qu'elle a envie de connaître la suite.
03:47Donc, elle commence à réécrire, elle voit qu'elle arrive à réécrire.
03:52Et du coup, elle se dit, il faut que je sache la suite.
03:54Il faut qu'il me donne des éléments sur sa vie.
03:56Donc, elle va traverser la France pour rejoindre Lino, sans le prévenir.
03:59Lui faire lire les premières pages de ce qu'elle a écrit.
04:02Et depuis, ça faisait deux ans qu'elle n'avait pas écrit.
04:05Et au départ, Lino, il est furieux.
04:07Il est hors de question qu'une personne raconte sa vie.
04:10Ce qui peut se comprendre.
04:12Ce qui peut très bien se comprendre.
04:13Sauf qu'il va se mettre à lire ses pages et qu'en fait, il va être touché.
04:16Il va être touché par son écriture et puis il a lui-même envie de continuer à se confier à elle.
04:20Oui, lui découvre à l'occasion de ce premier chapitre
04:23qu'il lit que c'est peut-être la solution
04:26en retraversant son histoire,
04:29de s'en sortir une bonne fois pour toutes.
04:31De passer à autre chose.
04:32De faire sa psychothérapie, en fait.
04:34Exactement.
04:35Ou d'essayer de comprendre pourquoi il en est arrivé là, 25 ans plus tard.
04:38Pour le lecteur, vous utilisez un procédé assez original, Agnès Martin-Lugand.
04:43Parce qu'en cours de récit, on va avoir un des chapitres du roman de Rebecca.
04:49Donc il y a comme un livre dans le livre.
04:51Mais je rassure tout le monde, on suit tout ça très facilement.
04:53Mais c'est assez original comme procédé.
04:55En fait, quand le personnage de Rebecca m'est tombé dessus
04:58et qu'on prit qu'elle allait se remettre à l'écriture,
05:02là je me suis dit, tu t'es quand même mis dans un truc un peu compliqué.
05:06Parce que je me suis dit, tu ne vas pas pouvoir faire l'impasse
05:09sur le roman de Rebecca.
05:11Il va bien falloir...
05:12Il faut partager les écrits de Rebecca.
05:14Il va bien falloir que tu les écrives.
05:15Donc je me suis dit, d'accord, c'est pas un roman que je vais écrire, mais deux.
05:19Et en fait, ça a été...
05:23Quelque part, je n'avais pas le choix.
05:25Mais ça marche très bien.
05:26Et c'est venu naturellement.
05:28Avant que j'arrive au moment où je devais écrire ce premier chapitre de Rebecca,
05:33je me disais, Rebecca ne doit pas écrire comme moi.
05:36Donc il fallait quand même que nos styles soient différents.
05:41Mais comme j'avais réussi à la connaître un petit peu avant d'arriver à l'écriture de ce chapitre,
05:47quand je me suis lancée dedans,
05:49c'est sorti d'une manière assez évidente.
05:51Ça fonctionne parfaitement.
05:53Il y a de très nombreux rebondissements en vous.
05:55On n'a évoqué que le début du livre,
05:57les premières pages des Renaissance.
05:59Votre douzième roman, Agnès Martin-Lugan,
06:01qui paraît aujourd'hui en librairie chez Michel Laffont.
06:05Dans un instant, on va se plonger dans vos choix musicaux, Agnès Martin-Lugan,
06:08parce que visiblement, vous écrivez tous vos romans en musique.
06:12A tout de suite sur Europe 1.
06:13Vous écoutez Culture Média sur Europe 1, 9h30, 11h, avec Thomas Hill et avec votre invité ce matin, Thomas.
06:19Vous recevez Agnès Martin-Lugan pour son douzième roman, les Renaissance.
06:23Alors, il est tout chaud parce qu'il sort aujourd'hui.
06:25Il est disponible dans toutes les librairies aux éditions Michel Laffont.
06:28Moi, je le découvre parce que j'avais les épreuves.
06:30Vous l'avez en vrai avec sa belle couverture.
06:33Je le montre sur Europe 1.fr.
06:35On parlait tout à l'heure avec le patron de Spotify.
06:38Vous, Agnès Martin-Lugan, depuis votre premier roman,
06:42on peut retrouver sur les plateformes d'écoute les playlists de chacun de vos romans.
06:46Vous écrivez toujours en musique ?
06:47Toujours.
06:48Chaque scène a son morceau qui lui est dédié.
06:51Et tant que je n'ai pas trouvé le bon morceau,
06:54celui où je sens qu'il va y avoir une alchimie entre ce que je porte pour la scène et ce qui me fait ressentir,
07:00je n'arrive pas à écrire.
07:01Ou alors, ce que je finis par écrire finit invariablement à la poubelle.
07:04Mais ça vous aide en quoi, la musique, quand vous écrivez une partie ?
07:06C'est vraiment de l'inspiration.
07:08Ça m'embarque dans des émotions encore d'une manière plus intense à chaque fois.
07:13Sans vous perturber ?
07:14Non.
07:15C'est ça qui m'épate.
07:16Non.
07:17Je ne peux pas écrire en silence.
07:19Et à chaque fois que je retravaille mon texte,
07:21je reprends la playlist du début à la fin.
07:24Donc si je dois écouter en boucle un morceau pendant deux heures,
07:28parce que je retravaille un moment du roman pendant deux heures,
07:32ça n'arrête pas.
07:34Je vous propose ce matin justement un petit blind test.
07:37Vous allez essayer tous de reconnaître les chansons.
07:39Et puis vous, Agnès, de vous souvenir à quel roman la chanson est liée.
07:43On commence facile.
07:46Ah bah ça y est, je l'ai.
07:47Vas-y.
07:48C'est Amy Winehouse.
07:49Bien joué !
07:51You know I'm no good.
07:53La vie est facile, ne t'inquiète pas.
07:56Moi, j'avais des gens heureux.
07:57Ah oui, les gens heureux !
07:59Je sais pourquoi je me suis trompée, c'est parce que la suite...
08:02En fait, la vie est facile et la suite des gens heureux.
08:06C'était le personnage de Diane, c'est pour ça.
08:08C'est vrai qu'elle revient souvent dans vos playlists, Amy Winehouse.
08:10Mais en plus, vous choisissez des musiques où il y a des paroles.
08:13On a envie de chanter, donc c'est très compliqué d'écrire en ayant envie de chanter.
08:16La seule entorse...
08:18En général, je n'écoute jamais des paroles françaises.
08:21La seule entorse que j'ai faite, c'est avec Gainsbourg,
08:24dans Désolé, je suis attendue.
08:27Je ne sais pas si vous l'aviez dans votre blind test.
08:29Non, mais j'ai une autre entorse.
08:30Je vous en parlerai tout à l'heure.
08:32Allez, chanson suivante.
08:36On peut reconnaître que c'est sympa.
08:40Petit doute sur le groupe.
08:41C'est Muse ?
08:42C'est Muse.
08:43Supermassive, Black Ball.
08:45Bien joué.
08:46Et vous vous souvenez du roman ?
08:48J'ai toujours cette musique dans la tête.
08:49Exactement.
08:50C'est aussi un groupe qui vous inspire beaucoup, Muse ?
08:52Oui, beaucoup.
08:53Je l'ai beaucoup, beaucoup piqué outé.
08:56Vous écoutez toujours une chanson avant de commencer une session d'écriture
08:59et où vous choisissez au hasard, selon votre humeur.
09:02Comment ça se passe ?
09:03C'est une track ?
09:04C'est une track.
09:05Vous cherchez longtemps.
09:06C'est-à-dire que je trouve que ces plateformes que sont Spotify et Deezer,
09:10c'est quand même un outil absolument extraordinaire.
09:12Parce qu'un morceau vous envoie vers un autre et encore vers un autre.
09:16Vous découvrez des artistes confidentiels
09:19qui parfois n'ont sorti que deux, trois, voire qu'un seul morceau.
09:27Quand je parle d'alchimie, il y a quelque chose qui vibre à l'intérieur de moi.
09:30Et je me dis, oui, ça fait écho par rapport à ce que je projette,
09:34que je vais écrire ou l'état d'esprit du personnage.
09:36C'est génial parce que nous aussi, on peut découvrir plein de choses
09:39en lisant votre roman.
09:40Le suivant.
09:44Agnès, elle a reconnu.
09:45Vous avez reconnu Agnès ?
09:47Richard Kledermann.
09:49Non, non.
09:50C'est un peu plus moderne.
09:52Je ne vois pas.
09:53Moby.
09:54Ah, Moby, bien sûr.
09:58On n'avait pas l'intro au piano.
10:00L'Homme des mille détours.
10:02L'Homme des mille détours, votre précédent roman avant les Renaissance.
10:05Cette chanson, elle revient deux fois, d'ailleurs, dans L'Homme des mille détours.
10:09Et vous indiquez, Agnès Martin-Lugand, dans les Renaissance,
10:11qu'il ne faut pas s'étonner si certains morceaux reviennent plusieurs fois
10:14dans une même playlist.
10:15Ce n'est pas une erreur.
10:16Non, ce n'est pas une erreur.
10:17C'est que certaines scènes peuvent faire écho entre elles.
10:21Ou c'est vraiment par rapport à un personnage
10:24où ce morceau, finalement, devient hyper récurrent.
10:28C'est-à-dire que ça correspond tellement à la personnalité du personnage
10:31que c'est plus fort que moi, je dois revenir à ce morceau-là.
10:34En fait, vous fonctionnez exactement comme un réalisateur de cinéma
10:37qui imaginerait une bande-son pendant la scène qu'il est en train de réaliser.
10:41Exactement.
10:42Moi, c'est vraiment, je dis, c'est la bande originale de mes romans.
10:44D'ailleurs, c'est très cinématographique, ce que vous écrivez.
10:47Moi, en lisant les Renaissance, je me disais, ça peut être un formidable film demain.
10:51Ça pourrait peut-être.
10:52Vous avez vendu les droits ?
10:53Non, pas encore.
10:55On va se positionner.
10:56Allez, la suivante.
10:58Ah bah oui.
11:00Alicia Keys.
11:01Alicia Keys, Girl on Fire.
11:02J'adore.
11:06À la lumière du petit matin.
11:07Oh la la, elle s'en souvient.
11:08C'est fort, quand même.
11:10C'est libre.
11:11Je pourrais même vous dire qu'elle saigne.
11:13Les playlists sont quand même très longues.
11:15Il y a quand même 12 romans et elle arrive à tous les trouver.
11:18C'est fort.
11:19Alors, l'autre entorse dont je vous parlais, un autre artiste français, le voici.
11:22Il n'y a pas cette voix-là du tout.
11:24Pardon.
11:26Ça, c'est dans quel roman, ça ?
11:27Une évidence.
11:28Allez, bravo.
11:29Encore une bonne réponse.
11:31Alain Bachung, La nuit, je mens.
11:33Je sais en fait pourquoi je l'ai utilisée, celle-ci.
11:35Vous avez réussi à la comprendre ?
11:37Parce que le personnage de Renne, qui est le personnage principal d'Une évidence,
11:41vit dans l'évidence.
11:42C'est une évidence.
11:43C'est une évidence.
11:44C'est une évidence.
11:45C'est une évidence.
11:46C'est une évidence.
11:47C'est une évidence.
11:48C'est une évidence.
11:49C'est une évidence.
11:50C'est une évidence.
11:51Et l'évidence vit dans le mensonge.
11:52Donc c'était assez logique que j'écoute cette chanson.
11:55Je me suis demandé si la raison pour laquelle il y avait aussi peu d'artistes français
11:59dans vos playlists, est-ce que c'est parce que les voix françaises, les mots français
12:03vous perturbent plus dans votre écriture ?
12:04Oui.
12:05Ah oui, oui, très clairement.
12:06Très clairement.
12:07Ce n'est pas parce que je suis anti…
12:10Mais vous écoutez de la variété française, quand même.
12:12Oui, oui, bien sûr.
12:13C'est que là, pour le coup, ça percute de trop entre les mots qui se bousculent dans
12:18ma tête et ce que j'entends chanter c'est pas possible parce qu'en fait je
12:23dirais que c'est même pas une question de... en fait tous les artistes anglophones
12:28que j'écoute je cherche pas le sens de leurs mots c'est vraiment l'atmosphère
12:35musicale qui moi m'absorbe. C'est un coup à écrire du Bachung après.
12:41Une petite dernière et là je voudrais l'artiste et le film où on entend ce morceau.
12:49Vous avez tout ? Miles Davis, l'ascenseur pour l'échafaud.
13:00Quelle culture, l'ascenseur pour l'échafaud, bravo. Et ça c'est dans quel roman ?
13:04Entre mes mains le bonheur se faufile. Encore une bonne réponse, très très forte, très très forte et
13:09ben voilà bravo les Renaissance et votre douzième roman je le rappelle Agnès
13:13Martin, Lugan, il sort aujourd'hui en librairie avec sa petite playlist à la
13:17fin et moi j'ai découvert beaucoup de choses aussi dans cette playlist et
13:20c'est agréable aussi de lire en écoutant vos musiques parce qu'on peut
13:24le faire dans les deux sens évidemment. Moi j'ai des lecteurs qui alors il y en a
13:28qui ne veulent absolument pas essayer, il y en a d'autres qui écoutent la playlist
13:32avant de lire pour essayer de se plonger dans l'atmosphère du roman, il y en a
13:38qui lisent après parce qu'ils n'arrivent pas à lire en musique et il y en a qui
13:41dans l'expérience de tout faire, d'être en immersion totale.
13:46C'est fort !