L'INTERVIEW D'AYMERIC. Pour les 50 ans de TF1, j’ai eu l’opportunité de discuter avec le présentateur de Koh-Lanta, Denis Brogniart. C’était la première fois que ma route croisait la sienne. Je l’ai trouvé très sympa, passionné, à l’écoute. Notre discussion fut spontanée, animée, détendue et souvent marrante, me semble-t-il. J’imagine que les fans de Koh-Lanta apprécieront. J’ose croire que ceux qui ne connaissent pas ou peu l’émission seront aussi intéressés. Je l’espère en tout cas, j’ai travaillé pour. Aymeric
Catégorie
📺
TVTranscription
00:00:00Denis, tu peux nous faire le A?
00:00:02L'oeil de poisson, globalement, ça n'a pas beaucoup de goût.
00:00:04L'épreuve des potons, c'est une spécificité française
00:00:06qui a été conçue par Yann Le Gac,
00:00:08le père Fouras de Fort Boyard.
00:00:10Tu connais Survivor? Oh mon dieu,
00:00:12j'adore Survivor. Pourquoi tu parles de Survivor?
00:00:14Et là, c'est là que je lui dis, tu connais Jeff Probst?
00:00:16Jeff Probst, incroyable hoste
00:00:18pour Survivor depuis de nombreuses années.
00:00:20Je suis le français Jeff Probst. Non.
00:00:22Oui. Non. Oui. Non.
00:00:24Bonjour Denis Brouillard. Bonjour.
00:00:26Bienvenue sur Brut, on est chez TF1. Ouais.
00:00:28TF1 qui fête, c'est 50 ans. Dans cette salle même,
00:00:30j'ai interviewé Gilles Boulot, récemment,
00:00:32le présentateur du 20 heures de TF1.
00:00:34Il y a un truc qui me frappe, c'est qu'entre Gilles Boulot et vous,
00:00:36vous êtes quand même, je ne sais pas ce qu'ils servent à la cantine de TF1,
00:00:38mais franchement, vous êtes 57 ans, vous ne les faites pas du tout.
00:00:40Gilles, il est un peu plus âgé que moi.
00:00:42Oui, à 53 ans. On a un point commun,
00:00:44c'est qu'on est des boulimiques de sport
00:00:46et de course à pied et qu'on essaye,
00:00:48plus les années passent,
00:00:50de faire attention à nous.
00:00:52Je pense qu'on a, on essaye
00:00:54d'avoir une vie relativement saine.
00:00:56Le sport, c'est vraiment un truc qui vous caractérise.
00:00:58On va en parler, on va parler de vous.
00:01:00Moi, je suis embêté parce que je te tutoie et tu me vouvoies.
00:01:02Alors, parlons-en. Parce qu'on en parlait juste avant
00:01:04que la caméra s'allume.
00:01:06Je disais, moi, j'étais en train de vous voyer.
00:01:08Vous me disiez, ouais, comme tu veux, machin. On va se tutoyer.
00:01:10Mais c'est une question qui m'interroge.
00:01:12Et alors, tu me disais, je te tutoie,
00:01:14que toi, justement, au début, tu n'étais pas trop branché
00:01:16tutoiement et je ne voulais pas.
00:01:18Et je trouvais qu'on excluait un peu
00:01:20le téléspectateur ou l'auditeur.
00:01:22Et puis, je suis revenu là-dessus.
00:01:24Parce que, voilà, le tutoiement,
00:01:26c'est un peu...
00:01:28Ce n'est pas une marque de familiarité.
00:01:30C'est peut-être créer une forme de proximité
00:01:32avec toi, mais aussi avec ceux qui nous écoutent.
00:01:34Alors, j'ai un peu bossé le dossier
00:01:36Denis Brogniart. Je vois, tu as des fiches. J'ai plein de fiches.
00:01:38Je les montre. Pas de questions. J'écris pas mes questions,
00:01:40mais j'écris des fiches. Ah bon, tu as des fiches, mais sans questions.
00:01:42Ouais. J'ai des trucs marqués.
00:01:44Là, par exemple, je lis mes fiches.
00:01:46Si je lisais mes fiches, je dirais...
00:01:48Vous l'avez dit dans plusieurs de vos interviews, parce que je n'en ai regardé pas mal.
00:01:50Alors là, tu commences à me vouvoyer le mou.
00:01:52Ah merde, c'est vrai. On repart sur le dessus.
00:01:54Tu m'as dit,
00:01:56quand tu croises des gens dans la rue, en fait, ils te disent
00:01:58trois choses. La première, ils te disent, en général,
00:02:00que tu es plus grand qu'en vrai.
00:02:02Et c'est vrai. Tu fais 1m91. Donc, je confirme.
00:02:04Effectivement, tu fais plus grand qu'à la télé.
00:02:06Et puis, il y a deux trucs qui reviennent.
00:02:08C'est le A. Enfin, même le A.
00:02:10Peut-être qu'on peut en parler,
00:02:12parce que je sais que si on n'en parle pas, les gens, dans les commentaires, ils vont mettre
00:02:14le A. Mais tu as raison.
00:02:16Tu sais, il y a plein de gens qui pensent que c'est un gimmick
00:02:18que j'ai créé ou que c'était
00:02:20une habitude de langage. Mais pas du tout.
00:02:22Je n'avais pas du tout cette façon de parler.
00:02:24Je disais très rarement A.
00:02:26Sauf qu'il y a un internaute
00:02:28qui a créé un espèce de clip
00:02:30en prenant des extraits
00:02:32d'une candidate de Koh-Lanta,
00:02:34une candidate suisse, à qui je posais
00:02:36une question au conseil. Et c'est vrai que sa réponse...
00:02:38On peut la rappeler, la question, pour ceux qui ne savent pas.
00:02:40La question, c'était... Je pense que même plus moi.
00:02:42Que vous auriez aimé avoir un homme dans votre équipe.
00:02:44Et elle te dit...
00:02:46Ben oui, comme ça, on aurait eu
00:02:48une cabane. Ah oui, c'est ça.
00:02:50Et là, moi, je dis un truc genre... Ah bon, parce que les femmes ne savent pas.
00:02:52Et je fais ce fameux A. Et ça a été vu des dizaines
00:02:54de millions de fois. Et c'est vrai que maintenant, j'en joue.
00:02:56C'est-à-dire que dans les voix off de Koh-Lanta,
00:02:58je le dis. Parfois, je le dis aussi.
00:03:00Mais c'est finalement
00:03:02ce qu'a réalisé comme clip
00:03:04cet internaute,
00:03:06qui a provoqué, chez moi,
00:03:08cette forme de petite habitude.
00:03:10C'est-à-dire que tous les gens me disent
00:03:12à un moment ou à un autre, quel que soit leur âge,
00:03:14Denis, tu peux nous faire le A ?
00:03:16Donc je vais le faire une fois, puis comme ça, on sera tranquille.
00:03:18Le A ! Je suis bien avec toi, chez Brut.
00:03:20Tu sais qu'il y a un truc
00:03:22un peu plus profond, quand même, c'est que ça fait partie de la culture Internet.
00:03:24C'est intéressant de dire culture Internet.
00:03:26La pop-culture, même.
00:03:28C'est un peu Koh-Lanta,
00:03:30pour moi, ça fait partie de la pop-culture, maintenant.
00:03:32C'est Koh-Lanta, alors c'est 23 ans.
00:03:34Plus de 23 ans que tu présentes.
00:03:36Et ça appartient à la pop-culture.
00:03:38Est-ce que tu en as conscience, de ça ?
00:03:40Non, mais je n'ai pas conscience de l'impact de Koh-Lanta.
00:03:42Alors, évidemment, j'en ai conscience quand j'en parle avec des gens.
00:03:44J'en ai aussi conscience, je vais te dire,
00:03:46c'est très symptomatique.
00:03:48Je pense qu'il y a
00:03:50de plus en plus un décalage entre
00:03:52mon âge, 57 ans,
00:03:54et je n'ai pas peur de le dire parce que je suis en forme,
00:03:56puis j'essaie de le rester, et puis l'âge
00:03:58des enfants, des jeunes qui me regardent.
00:04:00Et tu vois, je n'aurais jamais pensé
00:04:02qu'un gamin de 10 ans
00:04:04viendrait me voir et me regarderait comme ça,
00:04:06en me disant, est-ce qu'on peut faire une photo ?
00:04:08J'ai une forme de proximité
00:04:10avec des gens de tous les âges,
00:04:12de tous les milieux socio-culturels,
00:04:14socio-professionnels, des parents, des grands-parents,
00:04:16des enfants, et même des tout-petits.
00:04:18Et j'en veux pour preuve
00:04:20aussi, souvent le classement,
00:04:22qui est un classement qui m'amuse, c'est celui du journal de Mickey
00:04:24où je suis souvent bien placé, parce qu'encore une fois,
00:04:26Koh-Lanta, c'est comme
00:04:28Tintin, de 7 à 77 ans,
00:04:30c'est quelque chose qu'on regarde en famille, avec ses grands-parents,
00:04:32avec ses parents, puis ça fait tellement longtemps.
00:04:34Ceux qui avaient 5 ans
00:04:36quand on a commencé, sont des adultes.
00:04:38Ceux qui avaient 20 ans, ce sont des parents.
00:04:40Voilà.
00:04:42Donc tout le monde regarde Koh-Lanta,
00:04:44tout le monde connaît cette émission,
00:04:46c'est ça qui me fascine, mais j'ai du mal
00:04:48à prendre conscience de l'impact global
00:04:50de cette émission. Je sais que c'est un gros succès
00:04:52et qu'il ne se dément pas d'année en année,
00:04:54et c'est ça qui est génial.
00:04:56– Une des choses que les gens te disent quand ils te croisent dans la rue aussi,
00:04:58c'est le fameux gimmick, ta fameuse
00:05:00phrase, la sentence est irrévocable.
00:05:02– La fameuse sentence est irrévocable.
00:05:04– J'ai tapé ça dans Google, et ce que j'ai cru comprendre,
00:05:06c'est qu'en fait, ça venait de la saison 5
00:05:08de Koh-Lanta, qui a quand même eu 4 saisons sans cette phrase,
00:05:10que tout d'un coup elle est apparue.
00:05:12Comment elle est née cette sentence ?
00:05:14– J'en parle avec d'autant plus de distance
00:05:16et de discernement, c'est que moi au départ,
00:05:18je n'étais pas favorable à ça.
00:05:20Le responsable de Koh-Lanta à TF1
00:05:22m'avait dit, tu sais, il faut qu'on charte le truc,
00:05:24et comme aux États-Unis,
00:05:26Jeff Probst, l'américain, lui, il avait des phrases
00:05:28très chartées,
00:05:30très organisées, et qui revenaient.
00:05:32– Survivor, effectivement,
00:05:34Koh-Lanta est un show international
00:05:36créé par Charlie Parson
00:05:38en Angleterre, et pour te dire que
00:05:40les Anglais et les Français sont très différents,
00:05:42c'est que c'est un four en Angleterre, ils ne vont même pas au bout
00:05:44de la première saison, et là, lui,
00:05:46il se dit, finalement, je n'ai pas créé
00:05:48quelque chose de formidable, sauf qu'il y a
00:05:50un producteur américain qui s'appelle Mark Burnett,
00:05:52qui lui, à le pif,
00:05:54il dit, ça ne marche pas en Angleterre, ça va marcher
00:05:56chez nous, et donc il achète le concept.
00:05:58Il ne le loue pas, c'est normalement un concept,
00:06:00tu le loues à celui qui l'a créé, et puis tu renégocies
00:06:02tous les 3, 4, 5 ans.
00:06:04Mark Burnett, il l'achète.
00:06:06Aux États-Unis, ça fait, je ne sais plus à combien de saison
00:06:08ils en sont, mais plus de 30 ans,
00:06:10avec le même animateur, Jeff Probst.
00:06:12– Donc tu es le Jeff Probst…
00:06:14– The French Jeff Probst.
00:06:16Tu sais que ça m'a sauvé la vie un jour,
00:06:18à Phoenix, dans le désert,
00:06:20en Arizona. – J'ai vu ça, avec deux flics
00:06:22qui t'arrêtent. – Non mais un flic.
00:06:24– Ah oui ? – Un flic.
00:06:26Je suis passé pour une nouvelle Mercedes,
00:06:28pour automoto, et je suis à la bourre.
00:06:30On est parti, Phoenix, il fait beau
00:06:32300 jours par an, ce jour-là, il pleut
00:06:34à Phoenix, donc on est
00:06:36retardé, etc., mais on doit être
00:06:38à 200 km de l'autre côté
00:06:40du désert, assez rapidement.
00:06:42Et je suis à la bourre.
00:06:44Donc je dis, j'ai une belle voiture,
00:06:46c'est tout droit, évidemment
00:06:48je peux rouler, et je roule. – À combien ?
00:06:50– Et là, je devais être à 180,
00:06:52tu vois, un truc comme ça, et d'un seul coup
00:06:54je me fais arrêter, par un flic.
00:06:56– C'est pas bien. – Ah non mais c'est pas bien du tout.
00:06:58C'est pas bien du tout.
00:07:00Mais j'avais pas une âme qui vide dans cet endroit-là,
00:07:02et donc
00:07:04très rude au départ,
00:07:06le type, tout seul dans sa bagnole,
00:07:08mettez-vous là, je suis
00:07:10pas collé à sa voiture, mais en tout cas de dos,
00:07:12il me tient à distance, j'ai un caméraman
00:07:14qui commence à dire, non mais je vous ai expliqué.
00:07:16Non, tu as rien nous expliqué, toi tu restes dans ta voiture derrière,
00:07:18parce qu'ils étaient derrière moi, avec un peu de retard.
00:07:20– Comme dans les films en fait, comme dans les films américains.
00:07:22– Et puis on discute,
00:07:24et il me dit, il se marre parce qu'il me dit,
00:07:26ça fait deux jours que vous faites les essais là,
00:07:28il me dit, j'ai chopé ton collègue allemand hier.
00:07:30Donc,
00:07:32entre guillemets, je suis fait comme un rat.
00:07:34Et on discute,
00:07:36et je peux pas me retourner, je suis pas face à lui quand même,
00:07:38il accepte pas, mais
00:07:40je me tourne un tout petit peu,
00:07:42et d'un seul coup je me dis,
00:07:44mais qu'est-ce que je peux faire ?
00:07:46Et je repense à quelque chose qui m'était arrivé à Cuba,
00:07:48dans les années 90.
00:07:50Je commentais l'athlétisme sur Eurosport,
00:07:52et je vais en vacances à Cuba,
00:07:54et je me souviens que Javier Sotomayor,
00:07:56le rockerman du monde du saut en hauteur,
00:07:58m'a dit, faisons une photo tous les deux,
00:08:00tu la mets dans ton portefeuille,
00:08:02si tu te fais arrêter par les flics,
00:08:04à Cuba, quelle que soit la raison,
00:08:06puisqu'ils vont vouloir bacsicher,
00:08:08tu montes cette photo,
00:08:10je peux te dire que c'est mieux que ton passeport.
00:08:12Et c'est ce qui s'est passé à Cuba,
00:08:14parce que j'ai traversé Cuba de part en part,
00:08:16et j'étais avec un petit 4x4,
00:08:18et donc je réfléchis en même temps,
00:08:20parce que je me dis, non seulement il va me garder la voiture,
00:08:22et moi j'en ai besoin pour mon tournage,
00:08:24ça va me coûter cher,
00:08:26et d'autant qu'il avait déjà commencé à remplir son papier,
00:08:28je ne sais pas ce qu'il mettait, mais il remplissait.
00:08:30Et puis d'un seul coup,
00:08:32j'ai l'idée de lui dire,
00:08:34tu connais Survivor ?
00:08:36Oh mon Dieu, j'adore Survivor.
00:08:38Tu aimes Survivor ? Moi aussi.
00:08:40Pourquoi tu parles de Survivor ?
00:08:42Et là c'est là que je lui dis,
00:08:44tu connais Jeff Probst ?
00:08:46J'adore Survivor depuis de nombreuses années.
00:08:48Et à ce moment-là, je lui dis,
00:08:50je suis le français Jeff Probst.
00:08:52Non, oui, non, oui.
00:08:54Et donc là il fait ce que je fais,
00:08:56je lui montre une photo de Jeff Probst,
00:08:58et moi qu'on avait prise au Fidji,
00:09:00et puis je lui montre sur Internet
00:09:02un extrait du Survivor français avec moi.
00:09:04Ça a été terminé.
00:09:06Ça m'a coûté 100 dollars,
00:09:08parce que comme il avait commencé son bordereau,
00:09:10il ne pouvait pas l'annuler.
00:09:12On est reparti, on s'est fait un chèque,
00:09:14c'est...
00:09:16Je ne te cache pas que ça ne m'est jamais arrivé en France,
00:09:18ce genre de situation.
00:09:20Mais là, je trouvais que le truc
00:09:22était assez incroyable.
00:09:24Et franchement,
00:09:26on a discuté, il m'a posé 10 000 questions.
00:09:28Ok, c'est marrant ça.
00:09:30C'est drôle. Tu sais, j'ai commencé dans les clubs de vacances.
00:09:32Au Club Med ? Comme Vincent Lagaffe ?
00:09:34Exactement, et comme d'autres.
00:09:36Il y a Bruel aussi qui a commencé au Club Med.
00:09:38Ah bon ?
00:09:40Patrick Bruel ?
00:09:42Moi, j'ai adoré.
00:09:44J'étais maître-nageur, éducateur de tennis.
00:09:46Je me souviens que, notamment à Marbella,
00:09:48quand je travaillais là-bas,
00:09:50je n'ai jamais été le plus grand danseur
00:09:52et surtout le plus grand
00:09:54assis dû la nuit pour répéter
00:09:56les chorégraphies avec un chapeau et machin.
00:09:58En revanche, j'avais déjà un peu la tchatche.
00:10:00Et comme je faisais les jeux apéro
00:10:02au bord de la piscine avec un micro,
00:10:04le chef du village m'avait repéré.
00:10:06J'étais le remplaçant du chef du village
00:10:08pour présenter les soirées,
00:10:10mais il n'était pas là.
00:10:12Et comme il n'avait pas un très bon accent anglais
00:10:14et que je parlais mieux anglais que lui,
00:10:16c'est moi qui le faisais souvent
00:10:18quand on avait des groupes importants d'anglais
00:10:20ou de gens qui ne parlaient pas notre langue
00:10:22qui faisaient la traduction,
00:10:24un peu le Nelson Monfort
00:10:26du chef du village pour traduire.
00:10:28Donc voilà.
00:10:30J'ai un anglais, comme je le dis toujours,
00:10:32j'ai un anglais parlé.
00:10:34C'est-à-dire que n'importe où dans le monde
00:10:36je me démerde.
00:10:38Si je me démerde, si je me fais chialer,
00:10:40ce sera un peu différent.
00:10:42– La sentence est irrévocable.
00:10:44Ça vient d'où cette histoire ?
00:10:46– Ça vient…
00:10:48C'est pas moi qui l'ai trouvée.
00:10:50Je voulais à un moment…
00:10:52Tu sais, très journaliste,
00:10:54on ne me dit pas ce que je dois dire.
00:10:56Je dirais ce qui me passe par la tête
00:10:58à l'instant T, en fonction du candidat.
00:11:00Et là, je me souviens,
00:11:02Christian Lebozek, responsable de Koh-Lanta pour TF1,
00:11:04m'a dit…
00:11:06Mais avec fermeté aussi, il dit…
00:11:08Franchement, non.
00:11:10Tu sais, c'est comme le nom, au départ.
00:11:12Au départ, on voulait appeler ça
00:11:14les aventuriers de Koh-Lanta la première année,
00:11:16parce que c'était sur l'île de Koh-Lanta,
00:11:18puis l'année d'après.
00:11:20Et je me souviens très bien qu'à la pub,
00:11:22ils nous ont dit, mais attendez,
00:11:24comment voulez-vous qu'on marquette le truc
00:11:26si tous les ans, le programme change de nom ?
00:11:28Donc c'est pour ça que maintenant,
00:11:30on peut appeler ça Koh-Lanta Philippines
00:11:32ou Koh-Lanta Polynésie
00:11:34Le nom, c'est pareil pour
00:11:36La sentence est irrévocable.
00:11:38Et puis, à la fin, il en reste Rakin aussi.
00:11:40Des moments qui sont devenus…
00:11:42C'est vrai, culte.
00:11:44Et le nombre de gens qui me disent
00:11:46« Alors, votre sentence est irrévocable ? »
00:11:48Ce matin, je suis arrivé avec mes béquilles
00:11:50parce que j'ai mal aux genoux et que je viens de me faire opérer.
00:11:52Et il y a quelqu'un qui m'a dit dans l'ascenseur
00:11:54« Denis, La sentence est irrévocable. »
00:11:56Voilà. Mais ça m'amuse.
00:11:58Et encore une fois, je pourrais être agacé
00:12:00en disant « Oh, elle tout le temps me dit ça. »
00:12:02Non, mais c'est formidable.
00:12:04Combien il y a de gens qui peuvent se targuer
00:12:06d'être à la tête d'un programme télé
00:12:08qui a laissé autant de repères aux gens,
00:12:10quel que soit leur âge ?
00:12:12Je ne sais pas. Et franchement,
00:12:14j'ai dit avec plein de potes à moi,
00:12:16j'ai interviewé Denis Brouillard.
00:12:18Je leur ai dit « Qu'est-ce que tu demanderais à Denis Brouillard ? »
00:12:20Je me fais la voix de mes amis.
00:12:22C'est les gens qui regardent.
00:12:24Exactement.
00:12:26Évidemment, tout le monde me parle de Koh-Lanta.
00:12:28Parmi les questions que mes amis m'ont demandé de te poser,
00:12:30il y a cette fameuse question
00:12:32« C'est quoi le quotidien de Denis Brouillard ? »
00:12:34Ça dure 40 jours.
00:12:36Je fais un tournage d'une saison.
00:12:38Concrètement, c'est quoi ta journée type ?
00:12:40Je n'ai pas de journée type.
00:12:42Le jour du Conseil, je travaille la présentation le soir.
00:12:44Parfois, les Jeux, c'est le matin.
00:12:46Parfois, c'est l'après-midi.
00:12:48Des répètes avant, pendant, après.
00:12:50Et puis encore une fois,
00:12:52la présentation, c'est un peu la partie émergée de l'iceberg.
00:12:54Mais il y a
00:12:56tout ce qui peut se faire
00:12:58et qui ne se voit pas.
00:13:00D'ailleurs, ça désarçonne souvent les candidats.
00:13:02Je ne suis pas avec eux sur le camp,
00:13:04mais je sais tout ce qui s'est passé.
00:13:06Je suis en collaboration et en connexion
00:13:08permanente avec les journalistes,
00:13:10avec les rédacteurs en chef de l'émission,
00:13:12avec le producteur.
00:13:14Finalement, Koh-Lanta, c'est un parachute.
00:13:16Tu as des suspentes.
00:13:18Il faut que tu puisses,
00:13:20de manière très fine,
00:13:22gérer quelque chose qui n'est que de l'humain.
00:13:24Pendant 40 jours,
00:13:26une vingtaine de personnes dans deux équipes
00:13:28avec la parité respectée.
00:13:30Premier jour, sur trois jours,
00:13:32à chaque fois, ça se répète.
00:13:34Premier jour, tu as un jeu de confort
00:13:36avec une récompense à gagner si tu l'emportes.
00:13:38Deuxième jour, tu as une épreuve d'immunité.
00:13:40Si tu perds, tu vas au conseil et tu risques d'être éliminé.
00:13:42– Comment ça se prépare concrètement un conseil ?
00:13:44– Un conseil ?
00:13:46Ça se prépare jour par jour,
00:13:48avec des informations qui sont données.
00:13:50Parce qu'il faut bien comprendre qu'il y a des informations
00:13:52que je garde pour moi pour mieux comprendre le contexte
00:13:54mais que je ne peux pas divulguer.
00:13:56C'est-à-dire que si toi, t'es candidat à Koh-Lanta
00:13:58et que t'es face à un journaliste en one-to-one
00:14:00et que tu dis « Brenier, je l'aime pas »,
00:14:02ça, moi, je ne peux pas l'utiliser.
00:14:04Parce que tu l'as dit à la caméra.
00:14:06Si en revanche, t'es avec toute ton équipe
00:14:08et tu dis « Putain, Brenier, tu me casses les couilles »,
00:14:10etc.
00:14:12« Brenier, tu m'emmerdes ».
00:14:14Là, moi, je peux en parler
00:14:16puisque ça a été dit et exprimé
00:14:18au vu et au su de tout le monde.
00:14:20Il y a ce que je peux dire et ce que je ne peux pas dire.
00:14:22Ce qui me donne des billes
00:14:24pour mieux comprendre le contexte global
00:14:26mais que je garde pour moi.
00:14:28Et puis, ce qui me permet ensuite d'échanger.
00:14:30Et le Conseil, c'est en fait
00:14:32l'endroit où on peut
00:14:34finalement mettre à place ce qui se passe
00:14:36et ça se prépare.
00:14:38On fait une réunion.
00:14:40Si le Conseil, on le débute à 19h dès que la nuit est tombée,
00:14:42moi, j'ai une réunion à 16h.
00:14:4416h, 17h,
00:14:4617h15.
00:14:48Et ensuite, j'ai une heure d'écriture.
00:14:50Sachant que je n'ai ni prompteur
00:14:52et je me démerde
00:14:54avec ça.
00:14:56Écrire ce que je vais dire,
00:14:58ça me donne déjà
00:15:00un canevas très précis
00:15:02de ce que sera le Conseil.
00:15:04Et puis ensuite, on a 4-5 thématiques
00:15:06par Conseil.
00:15:08Il y en a qui marchent, il y en a qui ne marchent pas.
00:15:10Il y en a qui sont intéressantes, d'autres qui le sont moins.
00:15:12– Ça veut dire que c'est scénarisé ?
00:15:14– Ce n'est pas du tout scénarisé, absolument pas.
00:15:16– Il y a sûr ce soupçon, j'en parlais.
00:15:18– Oui mais non,
00:15:20c'est scénarisé, ils font gagner un tel, machin.
00:15:22– Pas du tout.
00:15:24Mais tu sais, moi je dis toujours,
00:15:26et je leur dis aux candidats quand ils arrivent,
00:15:28je fais le premier plateau parce que je ne les ai jamais vus avant.
00:15:30C'est enregistré et une fois que le premier plateau est fait,
00:15:32je leur serre la main à chacun
00:15:34et je les appelle par leur prénom.
00:15:36Donc ils sont déjà surpris que je connaisse leur prénom dès le départ.
00:15:38Et puis ensuite, je leur dis,
00:15:40vous savez, vous êtes 20 dans moi.
00:15:42Que ce soit un homme, une femme, un parisien,
00:15:44un provincial,
00:15:46je m'en fous comme de l'an 40.
00:15:48Ce que je veux, c'est que vous puissiez vous éclater.
00:15:50Parce que si vous vous éclatez, l'émission sera belle.
00:15:52Ce que je veux, c'est que vous puissiez aller au bout des choses pour vous.
00:15:56Et donc, c'est tellement fort ce…
00:15:58Merci Charlie Parsonne de l'avoir inventé.
00:16:00– Quand ça se passe le casting ? Parce que c'est ça qui est important.
00:16:02– Moi je ne suis pas dans le casting.
00:16:04– Tu sais bien un peu comment…
00:16:06Il y a le méchant, il y a le gentil.
00:16:08– Mais pas du tout.
00:16:10Le but du jeu, on essaye d'avoir une espèce de photographie
00:16:12de la population française.
00:16:14Si tu fais une photographie de la population française,
00:16:16tu n'es pas loin de la photographie des téléspectateurs de TF1.
00:16:18Donc il te faut effectivement…
00:16:20Il faut que toutes les couches socio-professionnelles, socio-culturelles
00:16:26soient représentées.
00:16:28Des jeunes, des moins jeunes, des CSP+, des étudiants, des ouvriers,
00:16:32des parents, des célibataires.
00:16:34– Pas un truc genre, ah ces deux-là, ils vont un peu s'engueuler.
00:16:38– Non, mais non, parce que…
00:16:40On serait devins, mais on se trompe.
00:16:42Mais le nombre de fois où on s'est dit, tiens lui va être comme ça,
00:16:44et en fait il est beaucoup moins.
00:16:46Et lui, tu vas voir, bon il est super sportif,
00:16:48mais je pense que sur le camp…
00:16:50Et tu te rends compte que sur le camp, le mec c'est MacGyver.
00:16:52Donc on se trompe.
00:16:54Et on se trompe par exemple quand des gens abandonnent,
00:16:56parce que si on avait pu soupçonner que cette personne-là,
00:16:58homme ou femme, n'ait pas la résistance pour aller au bout des choses,
00:17:04on ne l'aurait pas prise cette personne-là.
00:17:06Tu vois, c'est ça qui est génial avec Koh-Lanta.
00:17:08On a un tel berceau de population,
00:17:1025 000 à chaque casting,
00:17:12qu'on prend des gens.
00:17:14Alors c'est sûr qu'au moment où on a déterminé
00:17:16que ce type-là de 25 ans, coach sportif,
00:17:18était dans le casting
00:17:20et qu'on voulait absolument que cette personne soit là,
00:17:22on ne va pas prendre d'autres coaches sportifs de 25 ans.
00:17:26Ça ne veut pas dire que les autres ne sont pas bons.
00:17:28Et c'est pour ça d'ailleurs que certains ne sont pris
00:17:30qu'à leur 7e, 8e, 9e, parfois 10e candidature.
00:17:34Donc encore une fois,
00:17:36le principe du jeu est tellement dingue.
00:17:38C'est-à-dire que tu mets les caméras,
00:17:40tu leur dis, attention, tous les 3 jours, vous risquez d'être éliminés.
00:17:42Attention, tous les 3 jours, vous pouvez gagner
00:17:44une belle récompense.
00:17:46Attention, si vous allez au bout des 40 jours,
00:17:48vous pouvez prendre 100 000 euros.
00:17:50Il va falloir vous entendre avec les gens.
00:17:52Il va falloir vivre comme Robinson Crusoe.
00:17:54C'est ça, la force de Koh-Lanta.
00:17:56Que fais-tu pendant que les candidats sont sur leur poteau ?
00:17:58Être 4 heures sur un poteau, c'est dur.
00:18:02Mais regarder quelqu'un...
00:18:04Je ne la regarde pas pendant 4 heures.
00:18:06Je ne reste face à eux en continu
00:18:08que quand ça devient très précaire
00:18:10et qu'on est à l'avant-dernière clavette,
00:18:12c'est-à-dire sur le poteau qui devient très étroit
00:18:14et où les mouvements
00:18:16peuvent entraîner une chute assez rapidement.
00:18:18Tu fais quoi alors pendant ce temps-là ?
00:18:20Quand on parle de loge,
00:18:22c'est une tente avec un siège,
00:18:24une table, un ordinateur
00:18:26et on prépare le conseil du soir
00:18:28parce que qui dit poteau, dit dernier conseil
00:18:30avec tous ceux qui vont arriver du jury final.
00:18:32À ce moment-là, comme on n'a plus que les 3 derniers candidats,
00:18:34on a déjà demandé
00:18:36si c'est machin et machin
00:18:38qui sont sur les poteaux,
00:18:40qui est-ce que vous voyez, etc.
00:18:42On prépare le conseil final.
00:18:44J'écris les 2 teasers
00:18:46que je vais faire sur le conseil final
00:18:48puisque je fais le teaser
00:18:50de l'avant-dernier conseil et du dernier.
00:18:52En gros, c'est une demi-heure de poteau pour toi ?
00:18:56Non, c'est un peu plus que ça
00:18:58parce que je suis au moins
00:19:00les dernières 40 minutes sur
00:19:02et ensuite, le début,
00:19:04je reste au moins 20-25 minutes.
00:19:06Je dirais que je suis la moitié du temps avec eux.
00:19:08J'ai vu que les techniciens,
00:19:10depuis je ne sais pas quelle saison,
00:19:12ils devaient avoir des chaussures fermées.
00:19:14Oui, c'est vrai.
00:19:16Qu'est-ce qui s'est passé ?
00:19:18Je vais rendre à Franck Firmin-Guillon
00:19:20ce qui lui appartient.
00:19:22Franck Firmin-Guillon, c'était le président
00:19:24d'ALP, il en avait ras-le-bol.
00:19:26La boîte de prod'Aventure Line Production.
00:19:28Et Franck Firmin-Guillon,
00:19:30il en avait ras-le-bol de voir que des mecs
00:19:32se cassaient un doigt de pied
00:19:34ou étaient obligés de rentrer à Paris
00:19:36parce qu'ils s'étaient ouverts le pied,
00:19:38parce qu'ils étaient en tongs
00:19:40ou avec des chaussures ouvertes.
00:19:42Donc un jour,
00:19:44il a pris une super décision,
00:19:46même si c'est parfois contraignant,
00:19:48il a dit maintenant, vous débrouillez comme vous voulez,
00:19:50tout le monde avec des chaussures fermées.
00:19:52Donc on a tous des chaussures fermées,
00:19:54ce qui réduit considérablement le risque.
00:19:56Ce ne sont pas des grosses blessures,
00:19:58mais quand tu te casses un doigt de pied
00:20:00ou tu as 4 points de suture sous le pied,
00:20:02tu ne peux plus travailler sur Koh-Lanta.
00:20:04Donc tu es obligé de rentrer,
00:20:06donc tu es obligé d'être remplacé
00:20:08parce qu'on ne travaille plus tendu.
00:20:10Quand quelqu'un rentre, c'est un coup.
00:20:12Et je crois que les gens sont contents
00:20:14parce qu'encore une fois,
00:20:16je repense toujours à ce photographe
00:20:18qui est monté avec des chaussures non fermées
00:20:20glissantes dans un bateau
00:20:22qui s'est pété deux doigts de pied instantanément.
00:20:24Il n'avait pas forcément complètement le pied marin
00:20:26et ça n'aurait pas eu lieu.
00:20:28Alors, il y a tes chemises.
00:20:30Tu en as plusieurs de chemises
00:20:32et tu as des patches pour ne pas se tuer.
00:20:34Je crois qu'au début, c'était des serviettes hygiéniques
00:20:36qui se sont transformées.
00:20:38Ça existe maintenant, il y a des patches.
00:20:40Je ne sais pas s'il existait à l'époque,
00:20:42mais c'est vrai qu'il fait très chaud
00:20:44et j'essaye, un peu comme un comédien
00:20:46de ce côté-là,
00:20:48d'être toujours nickel
00:20:50et d'avoir les chemises
00:20:52les moins mouillées possible.
00:20:54J'ai des chemises très foncées.
00:20:56Sur chaque jeu, j'ai quatre chemises
00:20:58qui peuvent tourner.
00:21:00La première, une fois qu'elle est trempée
00:21:02et que je me suis changé,
00:21:04elle sèche au soleil.
00:21:06Avant de penser à la quatrième,
00:21:08je remets la première qui a séché.
00:21:10Je mets un t-shirt en dessous.
00:21:12Quand il fait 40 degrés, je te laisse imaginer
00:21:14t-shirt, jeans, chaussettes, chaussures,
00:21:16chemises et patches.
00:21:18Effectivement, patches sous les bras
00:21:20qui permettent d'éviter les auréoles.
00:21:22Je mets des chemises en jeans,
00:21:24ou des chemises épaisses et foncées,
00:21:26ce qui atténue tout ça.
00:21:28On a travaillé au fil des années
00:21:30et on est devenu
00:21:32de plus en plus compétents
00:21:34pour éviter tout ça,
00:21:36sachant qu'ensuite, au montage,
00:21:38si tu es obligé d'effacer les traces de transpiration,
00:21:40c'est un peu emmerdant.
00:21:42Est-ce que tu as la solution pour lutter contre les moustiques ?
00:21:44J'ai la solution personnelle.
00:21:46J'ai beaucoup de chance.
00:21:48C'est le sang ?
00:21:50Moi, je ne me fais pas piquer.
00:21:52Ou très peu.
00:21:54Je suis déçu par la réponse.
00:21:56Souvent, mon assistante me dit
00:21:58que j'ai plein de boutons.
00:22:00C'est assez injuste.
00:22:02Ce qui est très gênant,
00:22:04plus que les moustiques,
00:22:06c'est ce qu'on appelle les chitras,
00:22:08ces espèces de bestioles microscopiques
00:22:10qui vivent dans le sable
00:22:12et qui peuvent te piquer.
00:22:14Parfois, tu peux avoir des milliers de boutons
00:22:16au niveau des chevilles.
00:22:18Quand tu arrives dans ta chambre
00:22:20sur Koh Lanta,
00:22:22tu as un kit avec de la crème solaire
00:22:24et un kit pour tes vêtements
00:22:26et pour ta peau contre les moustiques.
00:22:28Même chose pour les candidats.
00:22:30Tu goûtes tout ce que les candidats
00:22:32sont susceptibles de goûter.
00:22:34Tu as déjà goûté un œil de barracuda.
00:22:36Quelle goût ça ?
00:22:38L'œil de poisson,
00:22:40globalement, n'a pas beaucoup de goût.
00:22:42Ce qui est embêtant, c'est la texture.
00:22:44Ça croque sous la dent.
00:22:46C'est pas très agréable.
00:22:48Ça ressemble à du cartilage de poulet.
00:22:50C'est pas bon.
00:22:52Autrement, c'est plus le goût d'eau salée.
00:22:54C'est pas ce qu'il y a de pire.
00:22:56Je pense que ce qu'on a fait de pire,
00:22:58c'était du poisson fermenté
00:23:00très prisé en Polynésie.
00:23:02Rien que l'odeur,
00:23:04ça me fait tourner de l'œil.
00:23:06J'y avais goûté pour voir.
00:23:08C'est beaucoup plus difficile à sentir qu'à manger.
00:23:10Mais je te jure, c'est horrible.
00:23:12J'ai appris que l'épreuve des poteaux,
00:23:14c'est une spécificité française
00:23:16qui n'existe pas forcément dans les adaptations étrangères,
00:23:18qui a été conçue par Yann Le Gac,
00:23:20qui est donc le père Fouras
00:23:22de Fort Boyard.
00:23:24Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
00:23:26Yann Le Gac, c'est la star de notre programme.
00:23:28C'est un type incroyable.
00:23:30J'ai toujours dit que je rêverais
00:23:32d'écrire un roman sur cet homme-là.
00:23:34Son histoire est fabuleuse.
00:23:36Il a commencé comme danseur étoile.
00:23:38Danseur étoile chez Béjar.
00:23:40D'abord acrobate dans un cirque.
00:23:42Moi j'en ai ras-le-bol
00:23:44de la voie royale uniquement par les petits rats de l'opéra.
00:23:46Moi je veux aussi des athlètes,
00:23:48des acrobates.
00:23:50Donc il est allé dans un cirque.
00:23:52Et il a dit, toi, je veux que tu bosses avec moi.
00:23:54Et je vais te faire de toi un danseur étoile.
00:23:56Il a dansé dans les plus grands théâtres
00:23:58de la Scala de Milan au théâtre Colon de Buenos Aires.
00:24:00Et puis ensuite,
00:24:02il est devenu le père Fouras
00:24:04et il est devenu le producteur des jeux de Koh-Lanta.
00:24:06Il a une imagination débordante.
00:24:08C'est un type étonnant.
00:24:10Les profs des poteaux, c'est parce qu'il a vu des pélicans
00:24:12qui se posaient.
00:24:14Tu sais ça, pourquoi ?
00:24:16Là, tu me l'apprends, mais à chaque fois,
00:24:18où est-ce que tu as trouvé ces jeux ?
00:24:20Il fourmille d'idées.
00:24:22C'est quelqu'un qui a dépassé les 70 ans
00:24:24mais qui est encore dans une forme
00:24:26et qui a un petit truc en plus.
00:24:28Personne dans notre équipe
00:24:30ne peut prendre la place de Yann Le Gac.
00:24:32Parce qu'il est unique.
00:24:34Il est unique.
00:24:36Et puis,
00:24:38pendant très longtemps,
00:24:40il était encore capable,
00:24:42c'était notre grand défi,
00:24:44de me faire le grand écart facial devant moi
00:24:46juste pour blaguer un soir.
00:24:48Et notamment,
00:24:50il pouvait faire ça sur un bar.
00:24:52À quel âge ?
00:24:5460 ans passés.
00:24:56Je te propose qu'on parle un peu de toi.
00:24:58Parce que j'ai le sentiment que tu es très populaire,
00:25:00ça c'est sûr,
00:25:02mais que les gens te connaissent assez peu finalement.
00:25:04J'ai regardé un peu, je me suis intéressé.
00:25:06Je me suis dit Dany Brognard,
00:25:08j'ai regardé plein de trucs, plein d'interviews.
00:25:10Ce que je te propose, c'est que je te dise un petit peu ce que j'ai vu,
00:25:12que tu me dises si c'est vrai, si c'est faux,
00:25:14à l'abri que j'ai fait des erreurs,
00:25:16je ne pense pas, mais on va voir.
00:25:18On commence par le début.
00:25:20Le début, je crois que ton truc à toi,
00:25:22c'est le journalisme et le sport,
00:25:24pour résumer grossièrement.
00:25:26C'est une vocation.
00:25:28Exactement. Ton ambition, c'est commenter le foot à la télé.
00:25:30À l'époque, mon idole, c'est Thierry.
00:25:32Tu commences ta carrière à la radio.
00:25:34Radio France, Normandie, Caen.
00:25:36Comment ça se passe ?
00:25:38Écoute, j'en parle souvent avec mes enfants.
00:25:40Il faut avoir du culot,
00:25:42de temps en temps dans la vie.
00:25:44J'ai poussé deux portes.
00:25:46J'étais étudiant en première année d'école de journalisme
00:25:48et je rêvais de travailler.
00:25:50J'avais fait mes études universitaires
00:25:52avant l'école de journalisme à Paris-Lypégie.
00:25:54Je les avais faites à Caen, ces études-là.
00:25:56Je pousse la porte de Ouest-France.
00:25:58Michel Le Néel, qui était le patron des sports,
00:26:00m'a demandé s'il n'y avait pas une petite place
00:26:02d'observation pour moi.
00:26:04S'il faut graffouiller trois trucs,
00:26:06des résultats le dimanche, etc.,
00:26:08je peux être là tous les week-ends.
00:26:10C'est sympa, mais non.
00:26:12En gros, mais le type, sympa.
00:26:14Et puis, derrière, je fais la même chose
00:26:16à Radio France.
00:26:18Et là, je tombe sur mon premier Pygmalion, Francis Gauguin,
00:26:20qui est un type extraordinaire,
00:26:22qui a pris sa retraite il y a longtemps,
00:26:24que je revois encore très souvent,
00:26:26qui m'a envoyé encore ses voeux il y a deux jours.
00:26:28Il m'a aidé profondément.
00:26:30Sans lui, je ne serais pas là aujourd'hui.
00:26:32Il m'a fait confiance.
00:26:34Je suis arrivé, je ne savais rien faire,
00:26:36comme n'importe quel étudiant en école de journalisme.
00:26:38J'ai quelques connaissances, quelques envies,
00:26:40mais il m'a permis de mettre un pied
00:26:42dans cette maison,
00:26:44de commencer par faire quelques petites interviews.
00:26:46Et puis, finalement, j'ai été la cheville ouvrière
00:26:48de l'émission des sports du dimanche soir,
00:26:50où j'allais le samedi après-midi
00:26:52voir une compétition de hockey,
00:26:54le samedi soir, une réunion de boxe,
00:26:56le dimanche matin, un cross-country, etc.
00:26:58Et je bossais nuit et jour,
00:27:00le samedi et le dimanche.
00:27:02J'aime bien rappeler ça.
00:27:04Ce que me rapportaient ces deux jours-là
00:27:06était inférieur à ce que me coûtait
00:27:08mon billet de train à l'air-tour
00:27:10pour venir de Paris.
00:27:12C'est-à-dire que je payais pour travailler.
00:27:14Mais ce qui est extraordinaire,
00:27:16c'est que j'ai appris mon métier.
00:27:18– Tu parlais de Francis Gauguin,
00:27:20rédacteur en chef à Caen.
00:27:22C'est la notion de Pygmalion,
00:27:24donc tu en mis le pied à l'étrier.
00:27:26Et je crois que ton site, de manière générale,
00:27:28il y en a peut-être plus, mais ton site 3,
00:27:30donc Francis Gauguin, Jeanne Saccomano,
00:27:32et puis Isabelle Couture.
00:27:34– Isabelle Couture, TF1.
00:27:36Est-ce que ça, ça existe encore ?
00:27:38Est-ce que finalement, avec le marché du travail…
00:27:40– J'espère, j'espère que ça existe.
00:27:42Parce qu'il y a les études,
00:27:44il y a ce que t'es, il y a la rencontre,
00:27:46il y a l'échange.
00:27:48Je ne répondrais pas de la même façon
00:27:50si ce n'était pas toi en face.
00:27:52Si c'était quelqu'un d'autre, ce serait différent.
00:27:54– Il y a une humanité quoi.
00:27:56– Il y a de l'humanité.
00:27:58Quand Jeanne Saccomano me fait confiance…
00:28:00– Ah oui, alors ça c'est marrant.
00:28:02– Mais c'est fou. – Comment ça se passe ?
00:28:04– Conférence sur l'histoire d'Europe 1.
00:28:06J'arrive, je suis étudiant en journalisme,
00:28:08je travaille déjà à Radio France à Caen,
00:28:10et je dis, ah Caen, ah d'accord,
00:28:12ça m'intéresse pour le multiplex,
00:28:14vous connaissez le foot ?
00:28:16Je dis, j'adore le foot, etc.
00:28:18Mais c'est tellement brutal
00:28:20comme réaction,
00:28:22je ne m'y attends tellement pas
00:28:24que je ne fais pas ce qu'il me demande.
00:28:26Il me dit, amenez-moi une cassette.
00:28:28À l'époque, on parlait des cassettes.
00:28:30Et puis c'était pas par mail, ça existait pas,
00:28:32il n'y avait pas de mail et tout ça,
00:28:34on est dans les années 90.
00:28:36– Parce qu'il te propose un boulot quoi,
00:28:38il ne te connaît pas.
00:28:40– Et moi, je n'ai pas de portable,
00:28:42il n'y a pas de portable encore à l'époque.
00:28:44Mon père m'avait ramené un téléphone
00:28:46avec un répandeur.
00:28:48Et là, bonjour, c'est Eugène Saccomano,
00:28:50j'attends toujours,
00:28:52je vais garder votre numéro de téléphone,
00:28:54j'attends toujours votre CV,
00:28:56la cassette, parce que ça m'intéresse encore.
00:28:58Mais là, j'ai fait mon CV
00:29:00en une demi-heure,
00:29:02j'ai pris la cassette,
00:29:04à l'époque je roulais en vélo dans Paris,
00:29:06j'ai traversé Paris, rue François 1er,
00:29:08je lui ai donné ça. – Europe 1.
00:29:10– Europe 1, dix jours après,
00:29:12je commentais Cannes Saint-Étienne
00:29:14au stade de Venois,
00:29:16et sans Eugène, je n'ai pas ça,
00:29:18parce que je fais le tour de France,
00:29:20je suis repéré par les gens de la rédaction d'Europe 1,
00:29:22parce que je deviens salarié de cette maison,
00:29:24parce que je passe des années extraordinaires,
00:29:26parce que je suis sur la pelouse
00:29:28pour la finale de la Coupe du Monde de 1998,
00:29:30sans Saccomano,
00:29:32je ne fais pas tout ça.
00:29:34Et tu vois, quand je te disais
00:29:36qu'il a fait confiance à un jeune,
00:29:38il ne savait pas,
00:29:40je pense qu'il n'était pas très au fait
00:29:42des écoles de journalisme à l'époque,
00:29:44je suis à l'IPJ,
00:29:46ok, je ne pense pas qu'il…
00:29:48Lui, il ne sortait pas d'une école de journalisme, Sacco,
00:29:50et pour la petite histoire,
00:29:52le mec que je remplace à Europe 1
00:29:54sur le multiplex à Cannes,
00:29:56c'est le type de Ouest-France
00:29:58qui ne m'a pas pris en stage.
00:30:00– Ah, c'est marrant.
00:30:02– Mais avec qui j'ai eu des excellents relations,
00:30:04il est malheureusement parti aujourd'hui,
00:30:06Michel Le Neel,
00:30:08mais voilà, c'est des moments comme ça,
00:30:10et Eugène,
00:30:12et je le disais
00:30:14après son décès à son épouse,
00:30:16mais j'en ai des frissons
00:30:18quand je te le dis,
00:30:20c'est un type qui a bouleversé ma vie
00:30:22comme Francis Gauguin.
00:30:24C'est plus important que les études,
00:30:26c'est plus important que les diplômes,
00:30:28c'est rencontre avec des gens,
00:30:30et des gens qui te font confiance,
00:30:32mais des gens qui sont exigeants.
00:30:34– Est-ce que c'est de la chance ?
00:30:36– Je déteste ce mot.
00:30:38Finalement, parce que les gens vont écouter ça,
00:30:40vont se dire, ah bah oui, alors en fait,
00:30:42il y a un mec, au début, à quand il l'a fait bosser,
00:30:44après 5 mois de l'appel, il laisse un message sur…
00:30:46Dans quelle mesure ?
00:30:48En fait, c'est juste de la chance, un moment,
00:30:50ou c'est toi, parce que…
00:30:52– C'est une opportunité, mais que j'ai saisie.
00:30:54Moi je dis toujours, et je passe mon temps
00:30:56à le dire à mes enfants,
00:30:58et quand je donne des conférences de motivation
00:31:00dans les entreprises, je dis toujours,
00:31:02arrêtez de parler de la chance sur Koh-Lanta
00:31:04quand on me dit, j'ai perdu parce que j'ai pas de chance
00:31:06t'as perdu parce que t'avais pas forcément
00:31:08les compétences, le niveau à l'instant T
00:31:10ou il y a un petit facteur chance,
00:31:12mais t'as gagné aussi parce que
00:31:14t'avais plus de potentiel que les autres.
00:31:16Je dis toujours que le travail c'est 60%,
00:31:18le talent c'est 20%,
00:31:20et la chance c'est 20%,
00:31:22et tu peux bouger le curseur de 5%
00:31:24dans tout ça,
00:31:26mais ça n'existe pas, tu ne réussis pas
00:31:28qu'avec de la chance, et bien sûr,
00:31:30mais j'ai eu l'envie
00:31:32d'aller rencontrer Sakomano,
00:31:34de discuter avec lui,
00:31:36je me suis senti bien parce que le mec m'a fait confiance
00:31:38tout de suite, parce qu'il m'a écouté,
00:31:40parce qu'il m'a parlé,
00:31:42mais t'as vu,
00:31:44entre guillemets, l'opportunisme
00:31:46c'est que
00:31:48je m'en suis voulu après
00:31:50de ne pas lui avoir envoyé tout de suite ma cassette,
00:31:52c'est nul, c'est ça qui est fou.
00:31:54La chance t'arrive, tu ne la saisis pas, elle revient
00:31:56et là tu la prends. Tu sais pourquoi ? Parce qu'à ce moment-là
00:31:58je me dis, mais il doit dire ça à tout le monde.
00:32:00En gros, je rentre chez moi,
00:32:02je suis content, j'ai rencontré Eugène Sakomano,
00:32:04je te parlais de Thierry Hollande,
00:32:06mais Eugène, c'est un mythe pour moi,
00:32:08ce monsieur,
00:32:10il est aussi un tout petit bonhomme
00:32:12avec une voix,
00:32:14j'adore, voilà,
00:32:16Eugène, c'est un type qui m'a transcendé,
00:32:18et je me dis,
00:32:20mais bon sang,
00:32:22comment je n'ai pas pu, dans l'instant,
00:32:24lui envoyer tout ça ?
00:32:26La chance, c'est pas de l'avoir rencontré,
00:32:28la chance, là,
00:32:30c'est qu'il me rappelle.
00:32:32– Alors, t'as eu beaucoup de chance avec le téléphone quand même,
00:32:34parce qu'il y a aussi Xavier Couture,
00:32:36qui un jour t'appelle alors que tu bosses pour Europe 1,
00:32:38ça, tu l'as raconté dans plein d'interviews,
00:32:40je veux bien qu'on en reparle parce que c'est assez marrant,
00:32:42phrase obscure,
00:32:44histoire de fakir, raconte-moi un peu.
00:32:46– Moi, je ne connais pas du tout les arcanes
00:32:48de TF1 à l'époque, Xavier Couture,
00:32:50je connais ce nom, mais je ne sais même pas
00:32:52quelles sont ses fonctions à TF1.
00:32:54– T'as quel âge à l'époque ?
00:32:56– À l'époque, j'arrive à TF1 en 99,
00:32:58donc j'ai 32 ans,
00:33:00et je suis à Europe 1,
00:33:02je suis bien à Europe 1,
00:33:04mais comme je te l'ai dit,
00:33:06moi, je rêve de faire du sport,
00:33:08et à la télévision, et TF1,
00:33:10c'est une grande maison,
00:33:12et là, effectivement, je reçois un coup de téléphone
00:33:14de Xavier Couture,
00:33:16qui ne me laisse quasiment pas parler,
00:33:18mais qui me dit, Denis Bourgnard,
00:33:20c'est Xavier Couture à TF1, vous avez une voix de fakir.
00:33:22– Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
00:33:24– Il me dit, t'as une voix de fakir.
00:33:26– Une voix de fakir.
00:33:28– Il me dit, t'inquiète, c'est positif,
00:33:30on peut se voir demain à 15h ? J'aimerais bien qu'on bosse ensemble.
00:33:32Putain, t'as le mec de TF1,
00:33:34donc ensuite, tu vois, je suis allé discrètement,
00:33:36qu'est-ce qu'il fait exactement, Xavier Couture ?
00:33:38Je savais qu'il était patron des sports,
00:33:40mais je ne savais pas qu'il était patron de l'antenne à l'époque,
00:33:42et là, je ne regarde même pas mon agenda,
00:33:44je me dis, 15h demain, je serai là,
00:33:46quoi qu'il arrive, j'enlèverai tous les autres rendez-vous,
00:33:48et me voilà dans la tour de TF1, au 13ème étage,
00:33:50juste sur la tour Eiffel,
00:33:52bureau carré en marquetterie,
00:33:54le type costard italien,
00:33:56beau gosse,
00:33:58la tchatche,
00:34:00et là, on discute.
00:34:02– Qu'est-ce qu'il te dit ?
00:34:04– Il me dit, j'ai envie que tu viennes bosser avec nous,
00:34:06je ne peux pas t'embaucher pour l'instant,
00:34:08alors que moi, je suis en CDI à Europe 1,
00:34:10tu vois, c'est pour ça que je dis que ce n'est pas de la chance,
00:34:12je pense qu'il y a plein de gens qui auraient dit à ce moment-là,
00:34:14oh là là, tu me proposes d'être pigiste ?
00:34:16Moi, j'ai la sécurité à Europe 1,
00:34:18il m'assure un certain nombre de piges par an,
00:34:20par mois donc par an,
00:34:22et il me dit, dès que je peux, je t'embauche.
00:34:24Mais c'est toujours risqué,
00:34:26parce que tu ne sais pas comment ça va se passer.
00:34:28Mais je rentre,
00:34:30et puis tu vois, ça se bouscule dans ma tête.
00:34:32Et puis, il se trouve qu'encore une fois,
00:34:34Xavier Couture, c'est le patron de l'antenne,
00:34:36et c'est aussi le patron des sports,
00:34:38donc c'est là qu'il me parle de Koh-Lanta,
00:34:40c'est là qu'il me parle de Domino Day…
00:34:42– Il dit quoi d'ailleurs, la première fois qu'il parle de Koh-Lanta,
00:34:44qu'est-ce qu'il te dit ?
00:34:46– Il ne me parle pas de la présentation,
00:34:48puisque c'est Hubert Auriol qui présente.
00:34:50– Oui, la première année, on l'oublie, c'est Hubert Auriol qui présente,
00:34:52toi tu es la voix off.
00:34:54– Exactement, mais Hubert, un, ce n'était pas son métier,
00:34:56deux, il était patron du Paris-Dakar,
00:34:58donc il n'avait pas forcément le temps,
00:35:00et puis je ne sais même pas,
00:35:02je n'ai jamais vraiment discuté
00:35:04s'il avait l'envie de le faire.
00:35:06Mais tu vois, quand tu arrives,
00:35:08et que tu n'es pas journaliste au départ,
00:35:10c'est un peu compliqué.
00:35:12Le montage balbutie, compliqué,
00:35:14et c'est là qu'on me dit,
00:35:16Pierre Denis, ce serait bien,
00:35:18on va narrer le truc, et on a besoin d'une voix off,
00:35:20et ma fameuse voix de Fakir arrive,
00:35:22et c'est là que je fais la voix.
00:35:24Et les audiences sont bonnes,
00:35:26et on sait que Hubert ne fera pas la deuxième saison,
00:35:28à ce moment-là,
00:35:30alors que c'était en access primetime le week-end,
00:35:32on envisage, compte tenu des scores,
00:35:34de mettre ça en primetime.
00:35:36Et là, naturellement, on me propose
00:35:38d'abord de présenter la dernière émission
00:35:40de cette première saison,
00:35:42c'est une émission hyper importante,
00:35:44en direct, où la révélation du gagnant se fait là.
00:35:46Alors qu'à l'époque, ça se faisait sur place,
00:35:48en Thaïlande,
00:35:50puis cette dernière émission, qui est en troisième partie de soirée,
00:35:52à minuit passé, c'était l'occasion de faire
00:35:54une espèce de feu de camp fictif,
00:35:56dans un studio à Paris, pour retrouver tout le monde.
00:35:58Mais il n'y avait aucun objectif.
00:36:00Et Hubert ne pouvait pas la présenter,
00:36:02je me souviens, parce qu'il était sur un truc,
00:36:04enfin, il ne pouvait pas la préparer,
00:36:06donc il était là, avec les candidats,
00:36:08et puis moi, je la présente.
00:36:10Et là, on me dit, tiens, ça ne brancherait pas,
00:36:12ben si, j'aime l'aventure, le voyage, le dépassement de soi,
00:36:14le sport, ça correspond à ce que j'aime.
00:36:16C'est marrant, je te coupe,
00:36:18parce que moi, je n'ai pas connu cette époque-là,
00:36:20mais j'ai l'impression qu'il y a un côté hyper artisanal.
00:36:22Mais oui !
00:36:24Il y a un mec qui t'appelle au téléphone,
00:36:26après, on te dit, ben t'es là, vas-y, présente Koh-Lanta.
00:36:28C'est vrai, ça ?
00:36:30Non, mais c'est un peu ça,
00:36:32mais je dis toujours à TF1,
00:36:34mais vous avez eu vachement de culot.
00:36:36À l'époque, t'es pas connu.
00:36:38Je suis connu des gens qui regardent le JT,
00:36:40qui voient de temps en temps montrer ma bobine,
00:36:42après un match de foot, un match de rugby,
00:36:44ou sur un rassemblement de l'équipe de France,
00:36:46mais que ça !
00:36:48Et les gens du milieu me connaissent,
00:36:50parce que j'ai été journaliste à Eurosport, à Europe 1,
00:36:52et donc là.
00:36:54Mais ils prennent un risque, quand même.
00:36:56Comment ça se passe, quand on devient connu ?
00:36:58Ma première saison d'animateur, au Costa Rica, en 2002,
00:37:00je suis dans un camion bâché,
00:37:02avec tous les candidats.
00:37:04Mais comme ils ne me connaissent pas,
00:37:06ils ne comprennent pas ce que je veux.
00:37:08Et ils ne comprennent que je suis animateur,
00:37:10qu'au moment où je descends du camion.
00:37:12Et je leur dis, les aventuriers, venez vers moi,
00:37:14prenez votre sac, regardez de quelle couleur vous êtes.
00:37:16Ok, les rouges, vous êtes les machins,
00:37:18vous allez partir par là.
00:37:20Les jaunes, vous êtes les machins,
00:37:22et vous allez partir par là.
00:37:24Et là, je me souviens,
00:37:26t'en prends un coup sur ton égo,
00:37:28même si l'égo, il est quand même assez mince,
00:37:30à ce moment-là, de te dire,
00:37:32il y a un mec qui dit,
00:37:34c'est des choses qui sont assez rigolotes,
00:37:36mais petit à petit,
00:37:38tu rentres dans les foyers des gens.
00:37:40Je ne veux pas être vexant, mais ça m'aurait fait marrer
00:37:42de voir Koh-Lanta par Vincent Lagaffe.
00:37:44Je me demande à quoi ça ressemblait.
00:37:46Tu sais quoi ?
00:37:48C'est un des animateurs qui m'a, en premier,
00:37:50envoyé un message de félicitation.
00:37:52Il était vraiment dans la boucle ?
00:37:54Pas du tout, il n'était pas du tout dans la boucle.
00:37:56Mais il y a des gens qui,
00:37:58tu sais, les mêmes indiscrétions,
00:38:00et encore, à l'époque où j'ai commencé Koh-Lanta,
00:38:02je n'étais pas dans les médias sociaux et tout ça,
00:38:04mais Vincent, c'est un type
00:38:06qui m'a toujours encouragé,
00:38:08qui m'a toujours donné des conseils,
00:38:10qui a toujours été d'une bienveillance
00:38:12et d'une prévenance avec moi.
00:38:14Donc voilà, ça m'amuse toujours.
00:38:16Et il le dit encore aujourd'hui.
00:38:18Il dit, s'il y a bien une émission que j'adore,
00:38:20c'est Koh-Lanta.
00:38:22Koh-Lanta, c'est 100, 200 personnes
00:38:24qui bossent ensemble.
00:38:26C'est un peu plus de 100 Français
00:38:28et on multiplie par deux avec les locaux,
00:38:30à la régie, enfin voilà.
00:38:32Et parfois aussi dans des domaines techniques,
00:38:34puisque les Philippines sont extrêmement bons,
00:38:36que ce soit au niveau du son ou de la caméra.
00:38:38En quoi tu es devenu meilleur ?
00:38:40Là, ça fait bientôt 23 ans que tu fais Koh-Lanta.
00:38:42En quoi aujourd'hui tu es meilleur qu'il y a 23 ans ?
00:38:44L'aisance.
00:38:46La responsabilité très importante
00:38:48que je peux avoir sur ce que je dis,
00:38:50ce que je fais, la collaboration
00:38:52très étroite que j'ai avec le producteur
00:38:54de Koh-Lanta.
00:38:56Enfin voilà, je suis plus ancien
00:38:58que cette émission aujourd'hui,
00:39:00je n'aime pas dire que je suis la mémoire,
00:39:02mais en tout cas, je l'aime viscéralement,
00:39:04cette émission.
00:39:06Elle me passionne encore aujourd'hui,
00:39:08je n'éprouve aucune lassitude
00:39:10et j'ai envie de te dire que l'animation,
00:39:12c'est la partie émergée de l'iceberg.
00:39:14Ensuite, il y a une collaboration
00:39:16de tous les instants sur quoi faire,
00:39:18comment faire, et c'est ça qui est magique.
00:39:20J'ai aucun titre par rapport à ça,
00:39:22je suis producteur de rien,
00:39:24mais j'appartiens à cette équipe
00:39:26et je suis très content d'avoir,
00:39:28justement, par l'expérience
00:39:30et par l'aisance acquise au fil des années,
00:39:32ce temps,
00:39:34cette ouverture d'esprit
00:39:36pour faire de ce métier
00:39:38un métier extrêmement complet qui dépasse grandement
00:39:40l'animation pure et dure.
00:39:42Je n'étais pas le meilleur la première année,
00:39:44je manquais d'aisance, je me souviens très bien
00:39:46de Franck Firmin-Guillon qui était
00:39:48à la direction artistique de TF1
00:39:50et qui était venu avec moi sur le tournage
00:39:52au Costa Rica, qui faisait le sourire Roger Zabel,
00:39:54et on répétait dans l'eau,
00:39:56dans les vagues du Pacifique,
00:39:58on répétait les plateaux.
00:40:00Parce qu'il faut sourire à la télé ?
00:40:02Il faut sourire, bien sûr,
00:40:04et on est là pour transmettre quelque chose.
00:40:06Si tu transmets un visage qui fait la gueule,
00:40:08les gens n'ont pas envie de venir te voir.
00:40:10On est dans un métier d'image,
00:40:12donc on fait attention à son image, c'est normal.
00:40:14L'animateur de télévision ou le journaliste
00:40:16qui passe à l'entraîne et qui dit
00:40:18« je m'habille n'importe comment, je m'en fous »,
00:40:20il te ment, c'est pas possible.
00:40:22Je pourrais être épicier, chirurgien,
00:40:24gendarme, non, on fait ce métier
00:40:26parce qu'on a eu envie.
00:40:28Tu es obligé, tu ne peux pas.
00:40:30Je prends l'exemple de Jean-Luc Reichman,
00:40:32il était derrière, il faisait la voix off,
00:40:34il est passé devant parce qu'il kiffe de faire ça
00:40:36et ça se voit, ça se sent.
00:40:38Mais heureusement, parce que si tu ne kiffes pas de le faire,
00:40:40à coup sûr tu le fais mal.
00:40:42Quand tu kiffes de le faire, tu n'es pas toujours
00:40:44forcément dans le bon ton, mais au moins
00:40:46tu as l'énergie, la motivation
00:40:48pour transmettre et pour partager
00:40:50avec les gens.
00:40:52C'est marrant ce que tu dis, parce que j'en parlais
00:40:54avec les personnes qui s'occupent de la communication de TF1,
00:40:56qui m'ont servi un excellent café,
00:40:58et on parlait de ça,
00:41:00et une des personnes de la com de TF1
00:41:02me disait « tu vas voir, Denis Bourniard
00:41:04est très sympa, il n'a pas changé »,
00:41:06et du coup je disais « mais il y en a qui ont changé ».
00:41:08J'ai l'impression que c'est le cas quand même,
00:41:10les gens changent une fois qu'ils deviennent connus.
00:41:12Tu sais, je pense que quand tu fais de l'antenne
00:41:14et que tu partages des moments avec des gens
00:41:16qui font de l'antenne, tu n'as pas la version
00:41:18naturelle forcément des gens.
00:41:20Moi je me souviens toujours,
00:41:22et je tairai son nom,
00:41:24mais un chanteur m'a dit un jour « tu sais, c'est beaucoup plus difficile
00:41:26de jouer un rôle
00:41:28que d'être soi-même ».
00:41:30Donc comme moi je suis feignant, je ne joue jamais de rôle.
00:41:32Et c'est vrai que j'essaye
00:41:34de m'appliquer ça à moi-même,
00:41:36c'est-à-dire que quand je sors de chez moi,
00:41:38je ne mets pas mon masque d'animateur,
00:41:40j'essaye d'être toujours le même avec les gens,
00:41:42et je crois que c'est ce qui m'a permis de créer cette proximité
00:41:44avec les gens,
00:41:46c'est pas compliqué,
00:41:48j'aime aussi ce métier parce que j'aime les gens,
00:41:50parce que j'adore partager avec eux,
00:41:52parce que j'aime les rencontrer,
00:41:54parce que j'aime sortir de ce petit écran
00:41:56pour partager,
00:41:58et pour aussi peut-être délivrer
00:42:00un peu un autre message,
00:42:02et montrer, parce que c'est important pour nous aussi,
00:42:04montrer que finalement,
00:42:06tu sais, on me dit toujours
00:42:08« quand on bosse à la télé on est con »
00:42:10ou « on a la grosse tête »,
00:42:12mais il y a autant de gens dans n'importe quel métier,
00:42:14je pense qu'il y a le même pourcentage
00:42:16de gens qui ont la grosse tête,
00:42:18qui sont désagréables,
00:42:20et puis c'est pas parce qu'un jour t'es mal luné,
00:42:22je te prends un exemple,
00:42:24un jour je suis sur une station d'autoroute,
00:42:26je porte une de mes filles
00:42:28qui est toute petite,
00:42:30la plus jeune de mes filles à 18 ans aujourd'hui,
00:42:32elle me vomit dessus,
00:42:34et là t'as quelqu'un qui me court en baguette
00:42:36« vas-y on va faire une photo »
00:42:38non on va pas faire une photo,
00:42:40j'ai sans doute été très désagréable,
00:42:42parce qu'aujourd'hui elle te dirait
00:42:44« oh Bregard quel con »
00:42:46– Est-ce que ça a changé avec les réseaux sociaux ?
00:42:48– Non pas tant que ça,
00:42:50parce que je m'interdis aussi,
00:42:52je mets des garde-fous très forts,
00:42:54très puissants et très solides,
00:42:56c'est-à-dire que je ne parle jamais de politique,
00:42:58je ne parle que de ce qui fait mon quotidien d'homme public.
00:43:02– Pourquoi ?
00:43:04– Parce que j'estime que c'est pas mon rôle de faire ça,
00:43:06je suis un citoyen comme toi,
00:43:08comme ceux qui nous entourent ici,
00:43:10je n'ai ni plus de droits,
00:43:12ni plus de prérogatives de dire
00:43:14« je pense ça, je dois faire ça »
00:43:16donc c'est très important.
00:43:18Maintenant, partager un voyage,
00:43:20partager une expérience sportive, culinaire,
00:43:22mais tu me verras jamais,
00:43:24je me suis toujours refusé,
00:43:26jusqu'à ce qu'il soit majeur,
00:43:28à mettre mes enfants en image.
00:43:30– T'as 4 enfants ?
00:43:32– 4 enfants, 24,
00:43:342 de 20 parce que j'ai des jumelles
00:43:36et une petite dernière entre guillemets de 18 ans.
00:43:38Et tu vois, j'ai aucun de mes enfants qui est influenceur,
00:43:40j'ai aucun de mes enfants qui se revendique être entre guillemets
00:43:44mon fils ou ma fille
00:43:46et c'est ma plus grande fierté aujourd'hui
00:43:48parce que, je leur dis toujours,
00:43:50ma vie n'est pas la vôtre.
00:43:52– Aucun veut faire de la télé ?
00:43:54– Aucun, j'ai une de mes filles
00:43:56qui aimerait devenir journaliste,
00:43:58c'est pas encore totalement précis dans sa tête,
00:44:00voilà.
00:44:02– Quel conseil tu lui donnes du coup,
00:44:04quand elle te dit qu'elle veut être journaliste ?
00:44:06– Je lui dis, c'est plus qu'un métier,
00:44:08c'est une vocation.
00:44:10Donc si t'as cette vocation, si t'as envie de faire ça,
00:44:12si t'as envie de kiffer ça,
00:44:14mais n'oublie jamais, tu bosseras sans doute le week-end,
00:44:16tu bosseras pendant les fêtes,
00:44:18tu bosseras peut-être pendant les vacances,
00:44:20là où tes potes, eux, ne bosseront pas.
00:44:22Mais c'est aussi un métier de passion.
00:44:24Si ma fille peut être aussi passionnée,
00:44:26aussi heureuse que moi dans ce métier,
00:44:28mais je lui dis, fonce à en perdre à l'aine,
00:44:30tellement c'est un métier,
00:44:32quelque chose d'extraordinaire.
00:44:34Mais en tout cas, je ne les ai jamais incités
00:44:36à faire ce que je fais,
00:44:38et aucun, par exemple, n'a cette envie,
00:44:40et pourtant Dieu sait s'il y a beaucoup de jeunes
00:44:42qui rêvent de ça,
00:44:44aucun n'a envie d'être connu,
00:44:46aucun n'a envie d'être un influenceur,
00:44:48de multiplier les followers sur les réseaux sociaux,
00:44:50voilà, ils sont dans l'air du temps parfaitement,
00:44:52ils se servent des réseaux sociaux,
00:44:54mais voilà, leur grand plaisir,
00:44:56leur grande fierté,
00:44:58c'est de faire quelque chose,
00:45:00et qu'à la fin, il y ait plein de gens
00:45:02qui ne savent même pas que ce sont mes enfants.
00:45:04Une chose qui est peu connue sur toi,
00:45:06je l'ai entendue dans le podcast
00:45:08In Power de Louise Aubury,
00:45:10ta courte, très courte même,
00:45:12expérience chez Nike,
00:45:14c'est qu'à un moment donné, tu es sur Europe 1,
00:45:16et puis on te propose un boulot apparemment
00:45:18aux Pays-Bas, chez Nike, Nike Europe,
00:45:20tu dis oui, tu y bosses une semaine,
00:45:22et puis tu te rends compte que ce n'est pas ton truc,
00:45:24et tu reviens chez Europe 1.
00:45:26Qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi ?
00:45:28Je trouve ça intéressant.
00:45:30J'avais un collègue qui bossait chez Nike,
00:45:32qui me dit, tiens, je vais partir,
00:45:34et il cherche quelqu'un, et j'aurais parlé de toi,
00:45:36et ton profil les intéresse beaucoup.
00:45:38À l'époque, j'étais assez proche
00:45:40des deux grands athlètes,
00:45:42puisque je commentais l'athlétisme, sur Eurosport notamment,
00:45:44et sur Europe 1,
00:45:46de Sergueï Boubka, le perchiste,
00:45:48et puis d'Hicham El Guerrouj, le spécialiste du demi-fond.
00:45:50Marocain.
00:45:52Et donc, tu sais,
00:45:54on te fait miroiter des choses.
00:45:56Vivre à Amsterdam,
00:45:58avec un bel appartement,
00:46:00avec un salaire quasiment doublé par rapport à ce que tu gagnes à la radio.
00:46:02À l'époque, je suis à Europe 1, en 87.
00:46:04Je viens de revenir comme salarié,
00:46:06et là, je perds les pédales.
00:46:08Mais vraiment, je perds les pédales.
00:46:10Et je dis, je vais voir Eugène Saccomano,
00:46:12encore une fois Eugène,
00:46:14et je dis, je vais partir.
00:46:16Perdre des pédales, ça veut dire quoi ?
00:46:18Je ne sais plus où donner de la tête.
00:46:20Je ne sais pas.
00:46:22Parce qu'on propose Nike,
00:46:24mais au marketing sportif,
00:46:26je suis responsable pour l'Europe de l'athlétisme.
00:46:28C'est un super poste.
00:46:30On me laisse miroiter.
00:46:32Une voiture de fonction magnifique.
00:46:34Le déménagement.
00:46:36Une espèce de confort.
00:46:38Puis Nike.
00:46:40Nike.
00:46:42Donc, j'y vais une première fois.
00:46:44Et là, en gros,
00:46:46c'est le Père Noël.
00:46:48J'arrive là-bas, je discute avec des gens.
00:46:50Je me rends compte qu'ils n'ont même pas de cantine.
00:46:52Ils ont juste un truc pour acheter des salades le midi.
00:46:54C'est ce qu'on leur a proposé chez Nike.
00:46:56Dans une entreprise française,
00:46:58quand tu reviens avec les cheveux mouillés à 14h,
00:47:00on te dit, mais qu'est-ce que t'as fait à midi ?
00:47:02Tu dis, j'ai fait du sport.
00:47:04Là-bas, si tu reviens avec les cheveux secs,
00:47:06on te dit, dis donc, t'es blessé ?
00:47:08Je repars avec deux sacs pleins de fringues,
00:47:10et je rentre.
00:47:12Je dis, j'y vais.
00:47:14Je n'ai pas d'enfant.
00:47:16J'y vais.
00:47:18On me dit, très bien.
00:47:20Tu vas commencer, finalement,
00:47:22au milieu d'Oslo.
00:47:24Et là, j'arrive.
00:47:26Et là, déjà, tu partages ta chambre.
00:47:28Nous, on avait un métier où tu partages les chaises.
00:47:30Je me retrouve avec un Suisse allemand sympathique,
00:47:32mais qui avait l'âge de mon père.
00:47:34Et je me retrouve
00:47:36dans des salles de séminaire
00:47:38avec des paperboards et des trucs.
00:47:40Et je me rends compte, si tu veux,
00:47:42que ce business-là,
00:47:44la vente,
00:47:46ce n'est pas fait pour moi.
00:47:48Et donc, au bout de quatre jours, je m'en vais.
00:47:50Ah oui, quatre jours, mais c'est l'horreur.
00:47:52C'est l'horreur.
00:47:54Ils ne m'ont pas menti du tout
00:47:56sur ce que j'avais à faire.
00:47:58Mais moi, je m'étais menti à moi-même.
00:48:00Et c'est là que je me suis rendu compte
00:48:02que ma vocation, c'était celle d'être journaliste,
00:48:04de transmettre des choses,
00:48:06d'être un vecteur
00:48:08entre des gens qui regardent la télé,
00:48:10qui écoutent la radio,
00:48:12et d'autres qui agissent.
00:48:14Et voilà, un journaliste,
00:48:16il est là pour répercuter ce qu'il voit
00:48:18et le donner aux autres.
00:48:20Et donc, je rentre,
00:48:22et j'avais dit à Eugène Saint-Denis que je m'en vais.
00:48:24Et il avait essayé de me retenir
00:48:26en me proposant plus d'argent, etc.
00:48:28Et je suis revenu,
00:48:30mais de l'aéroport.
00:48:32C'est-à-dire que j'ai fait un au-slo Paris,
00:48:34et je suis allé direct à l'Europe 1.
00:48:36Quatre jours après.
00:48:38Et je suis allé voir Eugène,
00:48:40je lui ai dit, écoute Eugène,
00:48:42je vais te dire la vérité,
00:48:44je me suis trompé.
00:48:46Tu vois, quand je te parle d'un Pygmalion,
00:48:48c'est remarquable, exactement.
00:48:50Et il n'y a pas eu d'histoire d'argent, etc.
00:48:52C'est-à-dire que, tu vois,
00:48:54je suis revenu exactement comme j'étais,
00:48:56mais ça reste.
00:48:58Et tu te rends compte, si j'étais parti,
00:49:00j'aurais pas notamment,
00:49:02tout le reste après,
00:49:04mais moi je pense, tu sais,
00:49:06ce qui était juste derrière,
00:49:08j'aurais pas couvert la coupe du monde de foot de 98.
00:49:10Qui restera ? On peut m'enlever tout.
00:49:12Ce moment-là, les matchs équipe de France,
00:49:14la finale,
00:49:16ça restera le point d'orgue
00:49:18de ma carrière de journaliste de sport.
00:49:20J'ai fait 2018 la deuxième victoire française.
00:49:22J'ai fait le titre de champion du monde
00:49:24de Stéphane Diagana à un moment
00:49:26où ça a été prodigieux à Athènes,
00:49:28etc. en 97.
00:49:30Néanmoins, voilà,
00:49:32si j'avais accepté cette proposition,
00:49:34je sais pas ce que je ferais aujourd'hui.
00:49:36Je serais peut-être revenu un peu plus tard
00:49:38ou je serais peut-être encore chez Nike.
00:49:40Parce qu'on me laissait entendre que je pourrais partir
00:49:42en France aux Etats-Unis.
00:49:44T'avais le rêve américain.
00:49:46Enfin, il y avait des tas de choses.
00:49:48Mais si je peux donner un conseil
00:49:50fort de cette expérience-là,
00:49:52c'est qu'il faut pas se laisser griser
00:49:54par les à-côtés.
00:49:56Il faut savoir exactement
00:49:58de quel bois on chauffe
00:50:00et qu'est-ce qui nous anime.
00:50:02Et moi, je me suis rendu compte que
00:50:04Taébo me proposait un enrobage fabuleux,
00:50:06financier, de confort,
00:50:08d'organisation.
00:50:10Si le noyau à l'intérieur,
00:50:12c'est pas ce qui te fait kiffer,
00:50:14il vaut mieux rester avec un enrobage,
00:50:16certes, peut-être un peu moins reluisant,
00:50:18un peu moins brillant,
00:50:20mais avec un noyau fort et un noyau que tu maîtrises.
00:50:22Là, on est là, on est chez TF1 qui fête ses 50 ans.
00:50:24Toi, toute ta carrière à la télévision,
00:50:26tu as fait chez TF1.
00:50:28Ça fait 26 ans.
00:50:30Comment tu as vu l'évolution de TF1
00:50:32et comment tu juges TF1 aujourd'hui ?
00:50:34C'est un compagnon TF1 depuis 50 ans.
00:50:36C'est un membre de la famille.
00:50:38C'est vrai que c'est une famille
00:50:40qu'on consomme différemment aujourd'hui.
00:50:42Si je devais comparer,
00:50:44avant, les enfants sont toujours à la maison.
00:50:46La télé était toujours à la maison.
00:50:48Aujourd'hui, TF1, c'est un peu comme un adolescent.
00:50:50Il vient, il vient pas.
00:50:52Tu picores
00:50:54quand tu le veux.
00:50:56C'est un peu la télévision à la demande.
00:50:58C'est ça, l'énorme changement.
00:51:00Il y a TF1+, il y a TF1,
00:51:02il y a tout un tas de programmes.
00:51:04On ne le consomme pas pareil, TF1.
00:51:06Il y a quand même plus de la moitié,
00:51:08les trois quarts des gens
00:51:10qui consomment en linéaire.
00:51:12Ensuite, tu le consommes à la demande
00:51:14en replay.
00:51:16Tu peux revoir des programmes du passé.
00:51:18Tu as, en plus, via TF1+, des films.
00:51:20C'est une plateforme.
00:51:22La personne qui dirige TF1, c'est Rodolphe Belmer.
00:51:24Là, c'est tout le mois de janvier.
00:51:26TF1 fête ses 50 ans.
00:51:28Il a écrit un mot sur LinkedIn
00:51:30où il dit que
00:51:32le projet culturel de TF1,
00:51:34c'est justement de réunir les gens.
00:51:36Il a tellement raison.
00:51:38Sur les réseaux sociaux, il y a beaucoup de bulles.
00:51:40Les gens sont dans une sorte de bulle
00:51:42où ils regardent les mêmes contenus que leurs amis.
00:51:44Est-ce que, quelque part,
00:51:46l'avantage de TF1 par rapport aux réseaux sociaux,
00:51:48c'est que c'est grand public,
00:51:50ça réunit des gens différents,
00:51:52alors qu'on est dans une époque de réseaux sociaux
00:51:54qui fonctionne justement par sphère ?
00:51:56Est-ce que ça, c'est un truc important pour toi ?
00:51:58Je pense que la télévision, c'est ce qui rassemble
00:52:00le plus de gens,
00:52:02le plus grand nombre d'origines.
00:52:04Quand je parle des origines,
00:52:06c'est l'âge, c'est le milieu socio-culturel,
00:52:08socio-professionnel, les origines personnelles
00:52:10de chacun.
00:52:12C'est rare aujourd'hui maintenant.
00:52:14Il n'y a plus le service militaire.
00:52:16C'est pour ça que c'est important.
00:52:18C'est important de garder de grands rendez-vous.
00:52:20C'est important de garder les rendez-vous d'informations.
00:52:22Je trouve que c'est capital
00:52:24parce que ça réunit les gens à un instant T.
00:52:26C'est important d'avoir ces grands barnum de divertissement.
00:52:28C'est important d'avoir le sport.
00:52:30C'est important d'avoir des séries
00:52:32qui ensuite iront peut-être sur les plateformes
00:52:34mais qui sont regardées
00:52:36par 7, 8 millions de téléspectateurs.
00:52:38Je pense notamment à HPI.
00:52:40Et il n'y a que la télévision
00:52:42et la télévision populaire
00:52:44qui permet ça aujourd'hui.
00:52:46Et puis c'est aussi, n'oublions pas,
00:52:48moi j'y pense souvent, on était il n'y a pas si longtemps
00:52:50pendant les fêtes, c'est un compagnon,
00:52:52la télévision.
00:52:54Il y a énormément de gens qui sont seuls.
00:52:56Et on parle des plus anciens, des plus vieux.
00:52:58Il y a plein de jeunes qui sont seuls.
00:53:00Et qui ont besoin aussi de ça.
00:53:02Qui ont besoin de cette communauté
00:53:04créée par la télévision.
00:53:06C'est un truc que tu te dis, toi,
00:53:08quand tu fais Koh Lanta par exemple.
00:53:10Mais bien sûr, moi quand je présente une émission,
00:53:12je sais qui me regarde.
00:53:14Et je pense évidemment à ceux qui regardent,
00:53:16qui sont en pleine possession de leurs moyens
00:53:18psychologiques, physiques.
00:53:20Mais je pense, tu vois, je reçois régulièrement
00:53:22des lettres de prisonniers,
00:53:24je reçois régulièrement des lettres de gens qui sont malades,
00:53:26et qui se raccrochent à ça.
00:53:28Et je pense que la télé,
00:53:30et c'est pour ça que c'est génial
00:53:32de pouvoir fêter les 50 ans,
00:53:34c'est pour ça aussi que je crois
00:53:36que c'est important, et TF1 le fait si bien
00:53:38depuis des années, je prêche un peu forcément
00:53:40pour ma paroisse, mais c'est important
00:53:42qu'il y ait des repères.
00:53:44Les repères des incarnants.
00:53:46Arthur, plus de 20 ans.
00:53:48Nikos, plus de 20 ans.
00:53:50Reichman, plus de 20 ans.
00:53:52Ma Pomme, plus de 20 ans.
00:53:54Foucault, je t'en parle pas.
00:53:56Evelyne Delia, elle est là depuis toujours.
00:53:58Tu vois, des gens, et je trouve que
00:54:00c'est ça aussi, dans cette maison, on dit toujours
00:54:02Oh là là, TF1, ça doit être dur,
00:54:04à moins de conneries dehors. Mais non, parce que
00:54:06justement, il y a un côté, même si
00:54:08c'est une chaîne commerciale,
00:54:10une chaîne privée, il y a un côté très
00:54:12paternaliste, il y a un côté très famille,
00:54:14moi qui m'a toujours plu,
00:54:16et quand on me disait, je sais, j'ai jamais
00:54:18su si c'était positif ou négatif, mais que j'étais un TF1 boy,
00:54:20mais je l'assume, je le revendique,
00:54:22et j'en suis fier.
00:54:24Alors, je pourrais te servir la soupe et te dire, c'est super,
00:54:26mais est-ce que, malgré tout, il n'y a pas un côté, quand même,
00:54:28un peu du coup, de conservatisme, et que la télé, du coup,
00:54:30c'est aussi pour ça qu'il n'y a plus que des vieux qui la regardent,
00:54:32parce que ça ne se renouvelle pas assez,
00:54:34ça ne bouge pas, quoi. Alors, Koh-Lanta, ça se renouvelle
00:54:36un peu dans les règles, mais est-ce que tu penses
00:54:38que la télé se renouvelle assez ?
00:54:40Je pense que
00:54:42la télé, elle est tellement
00:54:44concurrencée, elle est tellement challengeée aujourd'hui
00:54:46qu'elle essaye de faire ce qu'elle peut
00:54:48avec ce qu'elle a, et avec
00:54:50ce qu'elle n'a pas. Regarde, la télé, c'est encore
00:54:52le carrefour du sport en direct,
00:54:54c'est le carrefour de
00:54:56grands événements
00:54:58de divertissement. Tu parlais de Koh-Lanta,
00:55:00Voice, la Starac, etc.
00:55:02C'est un peu les exceptions, t'as raison.
00:55:04Le sport, les pirouettes...
00:55:06Si tu mets bout à bout toutes les soirées
00:55:08que représente Koh-Lanta, une ou deux saisons par an,
00:55:10Voice, avec Voice Kids, Voice Classique,
00:55:12plus Star Academy, ça te fait
00:55:14quasiment, pratiquement,
00:55:16un, voire deux programmes par semaine.
00:55:18Et je t'ai pas cité Massinger, qui est plus jeune
00:55:20mais qui marche formidablement bien, Danse avec les stars.
00:55:22Donc c'est des grands barnum,
00:55:24tu vois, qui fonctionnent et qui sont
00:55:26aujourd'hui encore
00:55:28la chasse gardée de la télévision.
00:55:30Pareil pour certaines
00:55:32grandes séries, je pense à SPI.
00:55:34Maintenant, tu sais,
00:55:36plus que les incarnants ou plus que
00:55:38le vieillissement de la télévision, qui est
00:55:40réel, regarde sur ces émissions.
00:55:42Mais ça t'inquiète pas, le fait que l'âge moyen
00:55:44du téléspectateur soit 60 ans ?
00:55:46Je suis pas inquiet, parce que
00:55:48c'est la suite logique des choses.
00:55:50A l'époque, s'il y avait eu YouTube, tu penses que tu te serais lancé
00:55:52en créateur de contenu sur YouTube ?
00:55:54Ouais, je pense. Je pense.
00:55:56Je pense que je l'aurais fait.
00:55:58Tu vois, je l'ai fait un moment, j'envisage
00:56:00de le refaire. J'aurais envie
00:56:02de faire un peu plus de podcasts aussi, parce que
00:56:04l'échange m'intéresse beaucoup.
00:56:06Oui, bien sûr.
00:56:08Tu regardes YouTube, d'ailleurs ?
00:56:10Pas tant que ça.
00:56:12J'écoute beaucoup de podcasts.
00:56:14Et je suis assez friand de ça.
00:56:16J'échange de temps en temps
00:56:18dans le cadre de podcasts aussi.
00:56:20Et ce qui me fascine, c'est qu'il y a plein de gens
00:56:22dont c'est pas le métier, mais qui se lancent dans le podcast
00:56:24et qui sont finalement bons, parce que
00:56:26les questions de quelqu'un
00:56:28qui a envie de rentrer
00:56:30dans ce que tu es, ne sont pas forcément
00:56:32les mêmes que celles d'un journaliste
00:56:34qui aurait un côté un peu plus policier,
00:56:36un peu plus organisé, par rapport
00:56:38à une structure intellectuelle
00:56:40acquise au fil des années, au fil d'une expérience
00:56:42et au fil d'études.
00:56:44Mais encore une fois, je pense que la télé,
00:56:46tu vois, moi j'ai encore plein de gens qui me disent
00:56:48« Oh là là, ce soir on s'est fait un plateau de sushis
00:56:50et on a regardé tous ensemble Koh-Lanta ».
00:56:52Ça, c'est quelque chose qui m'interpelle.
00:56:54Et puis, je regarde, tu sais,
00:56:56quand on regarde des audiences, bien sûr qu'on regarde
00:56:58le nombre de téléspectateurs, mais je regarde qui
00:57:00est devant la télé. Et quand je vois que sur Koh-Lanta
00:57:02on est à plus de 55%
00:57:04des jeunes
00:57:06à un instant T qui regardent Koh-Lanta,
00:57:08quand je vois que les femmes responsables des achats
00:57:10de moins de 50 ans sont entre 30 et 40%
00:57:12devant Koh-Lanta,
00:57:14ça veut dire quelque chose.
00:57:16Mais il en faut pour tout le monde.
00:57:18Et évidemment, plus on vieillit,
00:57:20plus on a « de temps » aussi pour regarder la télévision.
00:57:22Et je pense qu'il ne faut surtout pas
00:57:24non plus faire du jeunisme.
00:57:26À l'époque
00:57:28où moi j'étais gamin, mes grands-parents
00:57:30regardaient beaucoup la télévision,
00:57:32parce qu'ils avaient plus de temps, parce qu'ils avaient moins d'énergie,
00:57:34parce que la télévision était un compagnon.
00:57:36– Parce qu'il n'y avait pas les téléphones portables.
00:57:38– Exactement. Mais je crois qu'aujourd'hui,
00:57:40la télévision, quel que soit le moyen de la consommer,
00:57:42c'est encore un compagnon
00:57:44important, quel que soit son âge.
00:57:46– Il y a un truc qui est intéressant,
00:57:48c'est que toi tu fais des séminaires de motivation
00:57:50en entreprise. Donc j'imagine que le management,
00:57:52c'est quelque chose qui te parle, comment gérer les hommes,
00:57:54quelles convictions tu as sur ça ?
00:57:56– Je ne sais pas si j'ai des convictions,
00:57:58j'ai une expérience
00:58:00au travers de ce que j'ai pu vivre
00:58:02comme animateur, comme journaliste,
00:58:04au travers des échanges
00:58:06que je peux avoir avec des gens.
00:58:08J'ai beaucoup appris, par exemple, dans le monde de la Formule 1,
00:58:10quand j'ai présenté Fin à la Une pendant pratiquement 10 ans,
00:58:12où je me suis rendu compte que finalement
00:58:14800 personnes, 400 pour le moteur,
00:58:16400 pour le châssis,
00:58:18étaient là pour gérer le destin
00:58:20de deux pilotes et de deux voitures.
00:58:22Avec des choses positives et négatives
00:58:24que j'avais pu enregistrer
00:58:26dans l'organisation
00:58:28de ces écuries.
00:58:30Et puis sur Koh-Lanta,
00:58:32c'est une source inépuisable
00:58:34d'informations.
00:58:36Je dis toujours, j'essaye de mettre,
00:58:38c'est difficile, mais les gens dans des cases.
00:58:40Et je me suis rendu compte que finalement
00:58:42il y avait quatre grandes cases.
00:58:44Et c'est de là que moi je pars,
00:58:46c'est-à-dire la case idéale,
00:58:48c'est-à-dire avec des gens
00:58:50avec qui tu partirais en vacances les yeux fermés,
00:58:52donc avec qui tu t'entendrais bien
00:58:54pour les loisirs,
00:58:56avec qui tu partagerais peut-être
00:58:58les mêmes modes d'éducation de tes enfants,
00:59:00et des gens avec qui tu vas
00:59:02à la guerre dans le boulot.
00:59:04C'est l'idéal.
00:59:06Dans toutes les situations de la vie,
00:59:08ils peuvent être proches de toi.
00:59:10T'as l'opposé, c'est-à-dire des gens
00:59:12avec qui t'as aucune confiance professionnelle,
00:59:14avec qui t'as pas envie de travailler,
00:59:16et des gens avec qui t'as aucune appétence personnelle,
00:59:18donc avec qui t'as pas envie de passer
00:59:20ne serait-ce qu'une soirée.
00:59:22Donc ces gens-là, t'essayes au maximum
00:59:24de réduire leur action auprès de toi.
00:59:26Et puis t'as les deux autres catégories
00:59:28qui sont beaucoup plus difficiles à cerner.
00:59:30Dans la catégorie des gens humainement,
00:59:32c'est top.
00:59:34C'est-à-dire que tu vas vraiment en vacances,
00:59:36tu partages les mêmes violons d'ingres,
00:59:38etc.
00:59:40Mais dans le boulot,
00:59:42il y a un manque d'appétence.
00:59:44Et puis t'as l'inverse.
00:59:46C'est-à-dire des gens,
00:59:48dans le boulot, des warriors,
00:59:50des gens qui sont extraordinaires,
00:59:52mais avec qui tu n'as aucun atome crochu.
00:59:54Et comment tu fais
00:59:56avec ces quatre catégories ?
00:59:58Il y en a sans doute beaucoup plus.
01:00:00C'est schématique tout ça.
01:00:02Moi, quand j'ai ça en tête,
01:00:04j'essaye de m'imaginer,
01:00:06dans les gens qui sont en face de moi,
01:00:08qui irait dans quelle case.
01:00:10Pour moi, le pire, c'est vraiment
01:00:12des gens avec qui t'es pote,
01:00:14mais dont tu ne reconnais pas
01:00:16de compétences particulières professionnellement
01:00:18alors que tu es contraint
01:00:20de bosser ensemble.
01:00:22On va conclure par un sujet
01:00:24que tu ne parles jamais,
01:00:26et je pense que ça intéresse beaucoup de gens.
01:00:28Je crois que ta famille
01:00:30est assez catholique.
01:00:32Il y a une relation à la foi.
01:00:34Et je crois que ta femme, tu l'as dit,
01:00:36est athée.
01:00:38Est-ce que cette foi catholique
01:00:40t'a construit ?
01:00:42Et comment tu vis avec quelqu'un
01:00:44qui ne partage pas forcément cette foi ?
01:00:46Je dirais que plus qu'une foi catholique,
01:00:48j'ai la foi.
01:00:50Je crois en quelque chose après la mort.
01:00:52La question,
01:00:54que je me pose tous les jours,
01:00:56c'est pourquoi je crois.
01:00:58Est-ce que c'est parce que j'ai peur du néant ?
01:01:00Et on en parle souvent avec ma femme.
01:01:02Ou est-ce que c'est parce que
01:01:04je crois viscéralement
01:01:06à quelque chose dans l'au-delà ?
01:01:08Et encore une fois, c'est pour ça
01:01:10que j'ai le respect absolu de toutes les religions.
01:01:12Et dès l'instant
01:01:14où on a
01:01:16la capacité
01:01:18à être capable
01:01:20d'avoir une foi
01:01:22maîtrisée,
01:01:24moi, c'est quelque chose qui m'aide.
01:01:26C'est quelque chose qui m'aide.
01:01:28C'est le seul vrai point
01:01:30de désaccord que j'ai avec mon épouse.
01:01:32Un point de désaccord majeur.
01:01:34Oui, mais parce qu'elle, elle n'a pas peur d'après.
01:01:36Elle n'a pas peur du néant.
01:01:38Et j'aimerais être comme elle.
01:01:40Je pense que si je n'avais pas peur du néant, je serais peut-être comme elle.
01:01:42Mais tu sais, en plus,
01:01:44mes parents
01:01:46étaient très croyants.
01:01:48Je suis allé longtemps à la messe.
01:01:50Ma tante,
01:01:52la sœur de mon père, était carmélite.
01:01:54Le frère de ma grand-mère
01:01:56était prêtre.
01:01:58Je suis dans un univers, effectivement,
01:02:00où la religion avait une place importante,
01:02:02sachant quand même que j'avais des parents
01:02:04et un papa, et c'est pour ça que
01:02:06je pense souvent à lui,
01:02:08qui prônait, mais au quotidien,
01:02:10la laïcité.
01:02:12Et notamment
01:02:14à l'école.
01:02:16Moi, je ne suis jamais allé dans le privé.
01:02:18L'école laïque, c'était pour lui
01:02:20quelque chose de très important.
01:02:22Et il différenciait totalement sa foi
01:02:24de sa vie au quotidien.
01:02:26Et j'ai aussi
01:02:28ce souhait-là.
01:02:30On parlait de la mort, et c'est évidemment
01:02:32lié à ça, la foi.
01:02:34Moi, je suis hypochondriaque, j'ai peur de mourir.
01:02:36J'ai peur que mes proches meurent.
01:02:38Je n'ai rien résolu par rapport à ça.
01:02:40Et c'est vrai que
01:02:42c'est une vraie angoisse.
01:02:44C'est une vraie angoisse.
01:02:48Et j'admire,
01:02:50je ne sais même pas s'ils sont totalement
01:02:52honnêtes avec eux-mêmes, ceux qui disent
01:02:54« le jour où il faut mourir, il faut mourir,
01:02:56ce sera comme ça,
01:02:58je suis prêt, ou je serai prêt le jour où il faudra. »
01:03:00Moi, je ne suis pas prêt.
01:03:02Et plus tu vieillis, plus tu te dis
01:03:04finalement, le sablier...
01:03:08Mais c'est aussi, si tu veux,
01:03:10c'est aussi ce qui me
01:03:12entraîne,
01:03:14et je pense que
01:03:16c'est aussi une forme de foi.
01:03:18J'ai la foi
01:03:20dans l'autre, j'ai la foi dans l'au-delà,
01:03:22et j'ai la foi aussi
01:03:24dans ce qui peut
01:03:26augmenter la vie
01:03:28et réduire
01:03:30les écueils et la maladie.
01:03:32Tu vois, je suis
01:03:34parrain de la Fondation Art pour la Recherche contre le Cancer.
01:03:36Mon père est mort plus jeune
01:03:38que je ne suis aujourd'hui
01:03:40du cancer, brutalement.
01:03:42J'ai une
01:03:44peur viscérale de la maladie
01:03:46et tu vois, je me dis
01:03:48toujours que si je peux,
01:03:50jusqu'à mon dernier souffle, apporter mon énergie
01:03:52pour
01:03:54aider
01:03:56la science,
01:03:58aider à communiquer,
01:04:00pour récolter un maximum d'argent
01:04:02afin que les chercheurs trouvent,
01:04:04parce que j'en ai la conviction aujourd'hui.
01:04:06C'est-à-dire que si on a l'argent,
01:04:08on va trouver la solution.
01:04:10Dans ma dernière partie de vie,
01:04:12j'aurais laissé la télévision
01:04:14ou que la télévision m'aura laissé.
01:04:16Tu penses ?
01:04:18J'ai 57 ans, forcément j'y pense,
01:04:20parce que je n'ai pas envie.
01:04:22Je considère que la période 60-75 est une période
01:04:24bénite des dieux,
01:04:26quand tu es en bonne santé.
01:04:28Mais ça ne veut pas dire ne plus rien faire,
01:04:30mais justement rendre un peu de la chance,
01:04:32puisqu'on en parle un peu,
01:04:34mais de la chance que j'ai pu avoir.
01:04:36Je rêverais de pouvoir lancer ça.
01:04:38Si on pouvait faire deux fois par an,
01:04:40une espèce de collecte,
01:04:42où on dit qu'on est 70 millions de Français,
01:04:44on donne chacun 1 euro.
01:04:46Moi je suis père de 4 enfants,
01:04:48on est 6 à la maison,
01:04:50c'est moi en tant que père,
01:04:52je donne 6 euros.
01:04:54Et tout le monde donne ça.
01:04:56T'imagines 70 millions au premier semestre,
01:04:5870 millions au deuxième.
01:05:00Ce serait extraordinaire.
01:05:02C'est la maladie qui nous touche tous.
01:05:04Si je peux me battre pour ça,
01:05:06c'est en ça aussi que j'ai la foi.
01:05:08Merci beaucoup pour tout le temps que tu m'as accordé.
01:05:10Avec plaisir, c'était très intéressant.
01:05:12J'espère que les gens te connaîtront un peu mieux à la fin de cette vidéo.
01:05:14J'espère aussi qu'on continuera à se tutoyer.
01:05:16On a réussi finalement.
01:05:18Aurel San, tu le connais ?
01:05:20Un petit peu, oui.
01:05:22C'est drôle parce qu'il m'est arrivé
01:05:24un grand moment de solitude avec Aurel San.
01:05:26Je suis animé pour Adidas,
01:05:28une grosse convention en Alsace.
01:05:30Ils ont un espèce de cabaret
01:05:32dans le nord de l'Alsace, je ne sais plus où c'est.
01:05:34Tervilaire.
01:05:36J'animais le truc là-bas.
01:05:38Adidas l'avait réservé.
01:05:40Aurel San était l'artiste.
01:05:42Je présente.
01:05:44Aurel San commence à chanter.
01:05:46Je sors et je me prends les pieds dans une prise.
01:05:48Je débranche le truc, ça débranche tout.
01:05:50D'un seul coup, alors qu'il chantait,
01:05:52que le micro marchait, les lumières, tout,
01:05:54on se retrouve dans le noir complet.
01:05:56C'était vraiment l'alimentation générale.
01:05:58Donc là, il y a un mec
01:06:00qui s'est précipité, qui a rebranché le truc.
01:06:02Désolé.
01:06:04C'était drôle.