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Beaucoup le prenaient pour un bouffon. Il a pourtant fait gagner le Brexit en 2016 puis a triomphé aux législatives de décembre 2019. Boris Johnson est en train de changer en profondeur le Royaume-Uni, d'y laisser une trace indélébile, pour le meilleur ou pour le pire...
Pris dans la tourmente du "scandale des fêtes" données en violation des restrictions sanitaires, au sein de son gouvernement et jusqu'à Downing Street, mis en cause par son propre camp conservateur, Boris Johnson parviendra-t-il à surmonter la crise qu'il affronte aujourd'hui, la plus grave depuis qu'il a pris, en juillet 2019, les rênes du pouvoir ? Comparé alors à Donald Trump pour ses pitreries et ses prises de position violemment anti-UE, "BoJo" s'est-il démarqué de son homologue américain, une fois devenu Premier ministre, puis avoir gagné quelques mois plus tard, sur un brillant coup de poker, une majorité à sa main ? De sa promesse, tenue, de mettre rapidement le Brexit en oeuvre, qui lui a permis de triompher lors de ces élections anticipées de décembre 2019, aux succès et aux impasses de sa gestion parfois chaotique de la pandémie, ce documentaire révèle, derrière le bouffon, un stratège et sa vision, et en pointe les défaillances. Qu'il ait ou non déjà perdu la partie, ce joueur à l'instinct redoutable, qui use de la provocation comme d'une arme, a engagé son pays dans un chemin difficilement réversible. Dans un royaume désuni par le Brexit qu'il a si ardemment promu, et alors que le nombre des décès du Covid-19 y apparaît parmi les plus élevés au monde, malgré une campagne vaccinale éclair, celui qui rêvait de donner à son pays une cohésion nouvelle se voit désormais rattrapé par ses outrances.
De son éducation dans les meilleures écoles de l'establishment britannique à son ascension au sein du parti tory, de ses premières diatribes anti-UE dans la presse de droite à son élection à la mairie de Londres, Alice Cohen retrace le parcours personnel de Boris Johnson pour décrypter les choix et les zones d'ombre de ses deux mandats consécutifs à Downing Street. Avec les témoignages de certains de ses proches (dont sa soeur Rachel), de collaborateurs ou d'adversaires (Tim Montgomerie, son ancien conseiller à la Justice sociale, Michel Barnier, qui a durement négocié avec lui pour l'UE un accord commercial préalable au Brexit...), mais aussi d'observateurs plus distanciés, elle signe le portrait en forme de bilan d'un animal politique bien de son temps.

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00:50Il est complètement différent de tous les premiers ministres de notre époque.
00:54
01:00Il s'est toujours distingué de l'establishment anglais
01:02plutôt guindé, ennuyeux et traditionnel.
01:07Il s'intéresse au pouvoir, pas à la politique.
01:09Ce n'est pas un homme de grandes convictions.
01:16Boris Johnson, un politicien au style singulier,
01:20un des seuls hommes politiques que les Britanniques reconnaissent même de dos.
01:24Et surtout depuis 2019, le premier ministre du Royaume-Uni,
01:28unique pays à être sorti de l'Union Européenne.
01:42Il est aussi celui, contre toute attente,
01:44qui a porté et mené le Brexit à son terme.
01:51Je peux expliquer son triomphe en trois mots.
01:53« Get Brexit done ».
01:55Il a promis de mener à bien le Brexit.
01:57C'est tout ce que le pays voulait entendre.
02:00Aujourd'hui, il doit dessiner le futur de cette nation.
02:03Après la sortie de l'Union Européenne,
02:05il vend des rêves de grandeur britannique,
02:08d'un réveil d'un Royaume-Uni tourné vers le reste du monde.
02:12Rédempteur pour certains,
02:14fausse soyeur pour d'autres,
02:16il est le premier ministre d'un pays fracturé,
02:19où le Brexit a réveillé les velléités indépendantistes.
02:26Depuis sa sortie de l'Union Européenne,
02:28dans quelle direction Boris Johnson emmène-t-il vraiment cette nation ?
02:35Comprendre l'homme et ses choix politiques,
02:37présent et passé,
02:39pour mieux saisir l'avenir du Royaume-Uni.
02:50Pour savoir où Boris Johnson conduit le Royaume-Uni,
02:53il faut débuter l'histoire en décembre 2019,
02:56le jour des résultats des élections législatives.
03:19Je pense que Boris Johnson a été assez surpris d'une certaine manière.
03:23Je crois que peu de gens avaient imaginé,
03:25lorsqu'il a pris ses fonctions de Premier ministre cet été-là,
03:28qu'il obtiendrait une si large majorité.
03:34Une victoire comme l'aboutissement de quatre années de Brexit,
03:37et l'un de ses plus beaux coups de poker.
03:41Boris Johnson est celui qui a porté et fait gagner le référendum
03:45sur la sortie de l'Union Européenne en 2016,
03:48qui a été nommé Premier ministre en juillet 2019,
03:51et qui, trois mois plus tard, remet son titre en jeu
03:54en provoquant des élections législatives.
04:00Un pari stratégique et risqué pour échapper au blocage parlementaire.
04:09Un coup gagné, mais dans un pays fracturé.
04:19Depuis 2016, le pays est divisé par le Brexit
04:22et les négociations européennes qui n'en finissent pas.
04:25La prédécesseur de Boris Johnson, Theresa May, y a même perdu son poste.
04:30Theresa May était dans un gouvernement minoritaire,
04:33et Boris Johnson a forcé le Parlement à organiser des élections générales.
04:37Il est passé d'un gouvernement minoritaire,
04:39et donc d'une position de faiblesse à la table des négociations,
04:42à une position de force, en obtenant la majorité au Parlement
04:45et l'adhésion du pays.
04:47Il a ainsi pu mettre en œuvre son Brexit et sa vision de l'avenir.
04:51Le 13 décembre, Boris Johnson est donc devenu Boris Tout-Puissant.
04:57Vous avez changé notre parti pour un meilleur.
05:06Ce que nous allons faire, c'est travailler avec vous pour changer notre pays pour un meilleur.
05:11On peut se lever.
05:13Est-ce qu'il y a quelqu'un qui entend ce que vous dites ?
05:26Pour parvenir à cette victoire, Boris Johnson a imposé sa méthode.
05:30Une prise de risque d'abord, et un sens de la mise en scène ensuite.
05:57Il utilise des slogans courts, comme « get Brexit done »,
06:02qu'il répète, répète, répète,
06:06et ainsi touche les électeurs qui ne suivent pas la politique de très près.
06:11Il utilisait son slogan « get Brexit done » comme si c'était simple,
06:15comme s'il suffisait d'actionner un interrompu.
06:18Il a donc mis en œuvre sa méthode.
06:21Il utilisait son slogan « get Brexit done » comme si c'était simple,
06:25comme s'il suffisait d'actionner un interrompu.
06:28Quitter une organisation, une alliance internationale telle que l'Union Européenne,
06:32est une affaire incroyablement compliquée.
06:35Nous en étions membres depuis les années 1970.
06:39Mais son génie politique a été de mettre tout cela de côté,
06:42et de dire « vous êtes pour ou contre ».
06:46Ses propos ont fait écho au sentiment de lassitude et de désespoir de beaucoup de Britanniques
06:51qui voyaient la question du Brexit dominer tout le reste.
06:55Et ce n'est qu'après avoir quitté l'Union Européenne qu'il est devenu clair
06:58qu'on n'avait pas assez réfléchi à la façon dont on en sortirait.
07:03Boris Johnson gagne donc d'abord, et réfléchit après.
07:07Aussi bien sur les moyens pour sortir de l'Union,
07:10que sur l'autre slogan répété sans cesse pendant la campagne,
07:13le « levelling up » ou le rééquilibrage du pays.
07:32L'idée principale de Boris Johnson, en dehors du Brexit,
07:35c'était de rééquilibrer le pays.
07:38Pour que certaines régions comme le Nord, qui recevaient moins d'argent que d'autres,
07:41obtiennent un traitement plus équitable.
07:46Il en a discuté avec le ministre des Finances de l'époque, Sajid Javid,
07:50mais en face de lui, Boris Johnson n'avait qu'une feuille blanche.
07:55Il n'avait aucune idée de comment réaliser son projet, ou de comment le financer.
07:59C'est un des problèmes de Boris Johnson.
08:06Un manque de vision qui interroge à l'aune des enjeux
08:09qui attendent le Premier ministre en ce début d'année 2020.
08:12Et le premier d'entre eux, la gestion d'une crise sanitaire sans précédent.
08:16Une crise comme un premier exercice du pouvoir.
08:19Seul, sans l'Union européenne.
08:32Les premiers mois de la pandémie au Royaume-Uni
08:35ont été une période très sombre.
08:38Et pour le gouvernement, c'était une improvisation perpétuelle.
08:45Des improvisations qui vont coûter cher au pays.
08:48La première commence par la conférence de presse du 3 mars consacrée au coronavirus.
09:09Il a dit, ou plutôt on lui a demandé,
09:12les gens devraient-ils continuer à serrer la main ?
09:15Et il a répondu...
09:25Nous avons découvert plus tard qu'avant cette conférence de presse,
09:29ses conseillers lui avaient dit
09:31si on vous demande si les gens peuvent se serrer la main,
09:34vous devez dire non.
09:36Au lieu de ça, non seulement il a ignoré leurs conseils,
09:40mais en plus il a dit tout le contraire.
09:43Il n'a pas voulu saisir la gravité de ce qui se passait dans le monde.
09:57Dans sa tête, il était en quelque sorte aux prises avec deux forces concurrentes.
10:03L'économie et la santé, le social.
10:07Boris Johnson est fondamentalement libertaire.
10:10Et donc lorsque cette pandémie sans précédent est arrivée,
10:14c'était en contradiction avec tout ce qu'il était.
10:17Il ne voulait pas restreindre les libertés des gens.
10:20Il ne voulait pas tout confiner.
10:22Il a été très lent à s'adapter aux conséquences.
10:25Je pense que c'est dû à sa position philosophique et à son tempérament.
10:30Deux semaines seulement après ses premières déclarations,
10:33le gouvernement Johnson change alors de ton.
10:591 789 personnes ont mort au Royaume-Uni à cause du coronavirus.
11:03Bonjour, je voudrais vous rappeler quelque chose qui se passe aujourd'hui,
11:07c'est que j'ai développé des symptômes moindres du coronavirus.
11:17Le Royaume-Uni est le premier pays européen à enregistrer plus de 100 000 morts liées à la pandémie.
11:22Et selon l'Université d'Oxford,
11:24le Royaume-Uni a l'une des plus hautes taux de mort de Covid dans le monde.
11:29Une prise de conscience plus tardive et un prix à payer plus cher.
11:37Mais comme souvent avec Boris Johnson,
11:40même dans la tempête, il trouve une manière de rebondir.
11:43Il tente une stratégie plus risquée que d'autres pays européens.
11:47Tout miser sur le développement des vaccins.
11:51Je pense que Boris Johnson avait compris qu'une pandémie n'est pas un problème que l'on gère,
11:56mais une campagne que l'on doit gagner.
11:58Et il a appliqué les techniques de campagne à la question des vaccins,
12:01sans trop perdre de temps à suivre les processus officiels,
12:04mais en se concentrant sur les résultats.
12:09Le gouvernement a pris des risques avec son programme de vaccination.
12:13Ils ont fait appel à des personnes du secteur privé,
12:16et le Trésor public leur a donné un chèque en blanc,
12:19ce qui est très inhabituel dans la politique britannique.
12:22Dépensez, dépensez tout ce dont vous avez besoin.
12:25Investissez dans autant de vaccins que possible.
12:28Assurez-vous que le Royaume-Uni soit en première ligne.
12:32Le gouvernement passe des précommandes de centaines de millions de doses avant tout le monde,
12:36auprès des laboratoires du monde entier.
12:47En pleine pandémie, le Royaume-Uni devient le premier pays au monde
12:50à pouvoir autoriser le vaccin et à l'injecter dès septembre 2020.
12:55Bienvenue au Royaume-Uni !
13:20Derrière la course aux vaccins se joue aussi une compétition sourde
13:23entre l'Union européenne et le Royaume-Uni.
13:26Face aux Européens qui font bloc et décident de passer leurs commandes de façon groupée,
13:30le gouvernement Johnson, lui, adopte la stratégie du cavalier seul.
13:36À l'époque, le fait que le Premier ministre refuse de participer
13:40au programme européen de vaccination était très controversé,
13:44notamment au sein de l'opposition.
13:46Le raisonnement était « L'Union fait la force, nous aurons un plus grand pouvoir de négociation ».
13:52Mais au sein du gouvernement, il n'y avait aucun débat.
13:55Personne ne voulait participer à ce programme.
13:58Mais c'était un pari risqué.
14:00Imaginez que le programme britannique de vaccination n'ait pas marché
14:03et que le programme européen ait fonctionné.
14:05La situation politique serait alors complètement différente.
14:11Certains journaux conservateurs en font même une victoire des Brexiteurs sur l'Union européenne.
14:22Même en tant que membre de l'Union,
14:24la Grande-Bretagne aurait pu financer la recherche scientifique et le développement des vaccins.
14:28L'Union européenne ne l'en aurait pas empêché.
14:33Mais le fait qu'il ait pu le faire en dehors de l'Union
14:36était un atout supplémentaire pour justifier la sortie de l'Union européenne.
14:41Boris Johnson a donc réussi à transformer la gestion chaotique de la crise
14:46en une victoire politique.
14:48Une capacité à rebondir comme une des nombreuses facettes de sa personnalité.
14:55Ceux qui connaissent Boris Johnson se demandent souvent
14:58si le personnage public n'est vraiment qu'un personnage.
15:05Je pense qu'on pourrait le comparer à un ensemble de poupées russes
15:09et qu'au centre de ces poupées russes, il y a une facette de sa personnalité
15:13que nous ne verrons probablement jamais, à laquelle seuls ses proches ont accès.
15:29La plus petite de ces poupées est peut-être allée chercher dans l'enfance.
15:33Dans une famille atypique et bohème de quatre frères et soeurs,
15:37incarnation d'une certaine bourgeoisie internationale
15:40et éduquée dans un esprit de compétition.
15:47Vous savez, mon père est très... J'aime son ambition.
15:51Il refuse d'être contraint.
15:53Je pense qu'il n'est même pas satisfait qu'un seul de ses fils soit premier ministre.
15:57Je pense qu'il voudrait au moins que deux de ses fils soient premiers ministres.
16:06Je vais vous raconter une anecdote bien connue.
16:09Quand nous étions petits, un ami de la famille lui a demandé...
16:12Alexander, son nom est Alexander Boris.
16:16Que veux-tu faire quand tu seras grand ?
16:18Boris lui a répondu, je veux être roi du monde.
16:21Je me suis dit, quoi ?
16:23C'est un métier ?
16:25J'ai su qu'il avait une grande ambition dès son plus jeune âge.
16:40Une ambition, la sienne et celle de sa famille,
16:43qui va le mener sur les bandes d'Eton et d'Oxford,
16:46deux des écoles et universités les plus élitistes du pays.
16:53Boris Johnson n'est pas un produit de l'élite au sens où il serait aristocrate.
16:58Il est un élite.
17:00Il est un élite.
17:02Il est un élite.
17:04Il est un élite.
17:06Il n'est pas un élite au sens où il serait aristocrate.
17:10Il vient d'un milieu familial qui est en fait assez international.
17:13Il a du sang turc.
17:15Son père Stanley a été membre du parlement européen.
17:18Mais quand il va à Eton,
17:20il voit qu'il a l'opportunité de faire partie de la future élite dirigeante.
17:25Et il la saisit.
17:27Puis rapidement, il part pour l'université d'Oxford,
17:30où il fait exactement la même chose.
17:32Il est membre de tous les clubs importants.
17:34Il est président de l'Oxford Union,
17:36une association de débats fréquentée par beaucoup de politiciens de haut niveau.
17:42J'étais rédacteur en chef du Daily Telegraph
17:45et j'avais été invité à prendre la parole lors d'un débat à l'Oxford Union.
17:49Boris Johnson, dont je n'avais jamais entendu parler, en était président.
17:54Boris, même à cette époque, avait des manières d'empereur.
17:57Mais je voyais déjà que c'était un amuseur brillant et extrêmement populaire.
18:02Savoir à la fois amuser et porter un récit.
18:05Des qualités que Max Astinks va exploiter quelques années plus tard.
18:09Il engage Boris Johnson comme correspondant à Bruxelles
18:12au sein de la rédaction du Daily Telegraph.
18:15C'est le premier débat à l'Oxford Union.
18:18Il engage Boris Johnson comme correspondant à Bruxelles
18:21au sein de la rédaction du Daily Telegraph,
18:24un des plus importants quotidiens conservateurs britanniques.
18:31Les lecteurs du Daily Telegraph adoraient ces histoires venant de Bruxelles.
18:34Sur l'Union européenne qui envisageait de rendre illégales les bananes courbées britanniques
18:39ou sur la menace qui planait sur la saucisse britannique.
18:42Elles étaient très drôles.
18:49Le style Johnson.
18:51Un style enlevé aux dépens de l'exactitude et des faits
18:54dont Sonia Purnell a été le témoin privilégié.
18:57Au début des années 90,
18:59elle partageait le même bureau que Boris Johnson au Daily Telegraph.
19:02Spectatrice de ses semi-vérités,
19:04comme c'est le cas aujourd'hui.
19:06Sonia Purnell,
19:08elle a été le témoin privilégié.
19:10Au début des années 90,
19:12elle partageait le même bureau que Boris Johnson au Daily Telegraph.
19:15Spectatrice de ses semi-vérités,
19:17comme celle concernant l'immeuble de la Commission européenne,
19:20le Berlaymont.
19:24Un jour où nous étions à la Commission,
19:26une blague circulait sur un architecte
19:28qui, pour faire un coup de pub,
19:30avait envoyé des plans pour remplacer le Berlaymont
19:32par une tour de 2 km de haut.
19:35En première page du Daily Telegraph le lendemain,
19:38il y avait un article qui annonçait que la Commission
19:40avait l'intention de construire une immense tour,
19:43une nouvelle tour de Babel,
19:45que ça allait coûter très cher
19:47et que c'est nous qui allions la payer.
19:49Mais ce n'était pas vrai.
19:51Mais l'article renforçait l'idée
19:53que l'Union européenne
19:55et la Commission en particulier
19:57étaient dingues,
19:59qu'elle ne pensait qu'à elle
20:01et à interférer dans la vie publique.
20:03On pourrait tracer une ligne droite
20:05entre ce qu'il écrivait à l'époque
20:07et ce que les gens pensent maintenant.
20:09À l'époque, j'étais très ami
20:11de Lassard et il m'a souvent dit
20:13que la plupart des points qu'il soulevait
20:15sur les erreurs de l'Union européenne étaient justifiés.
20:29Il a un problème avec la vérité,
20:31même maintenant en tant que Premier ministre,
20:33parce que son instinct avec n'importe quel public
20:35est de lui dire ce qu'il veut entendre.
20:37Et c'est parce que nous semblons vivre
20:39dans cette période extraordinairement frivole
20:41de l'histoire,
20:43dans laquelle les gens semblent très réticents
20:45à considérer les sujets historiques
20:47de manière profonde,
20:49que Johnson n'a pu exploiter
20:51ses brillants talents d'amuseur.
20:53À travers les mensonges,
20:55l'humour et le récepticisme,
20:57Boris Johnson, journaliste,
20:59construit sa marque et bâtit pas à pas
21:01son pouvoir médiatique
21:03aux dépens de l'Union européenne.
21:09C'était cet étrange vaisseau de l'espace
21:11qui flottait au-dessus de la réalité,
21:13rempli de gens
21:15qui boivent du Crémant d'Alsace,
21:17ce magnifique vin brillant,
21:19et une étrange collection
21:21de formidables SS-stormtroopers
21:23allemands et grecs
21:25qui marchaient dans les Lederhosen
21:27et des stars de porno italiens
21:29et Dieu sait quoi.
21:31C'était une galerie d'excentriques
21:33et, dans de nombreuses manières,
21:35un endroit merveilleux
21:37pour observer la vie humaine,
21:39mais pas exactement une législature convaincante.
21:41Johnson a su exploiter à son avantage
21:43la tension et la confrontation
21:45avec l'Union européenne.
21:47Il se moquait de la Commission européenne.
21:49Il attaquait constamment
21:51le centralisme.
21:53Malgré les vérités approximatives,
21:55à la fin des années 90,
21:57Boris Johnson prend la tête
21:59du célèbre magazine conservateur
22:01Le Spectator.
22:03En 2001, il entre en politique,
22:05en fonction de rédacteur en chef
22:07et de député.
22:17Un mélange des genres surprenant
22:19qui se poursuivra
22:21durant près de sept années
22:23avant de devenir maire de Londres en 2008.
22:27La touche Johnson,
22:29homme orchestre,
22:31journaliste, politique
22:33et réalisateur.
23:03Il fait sa publicité
23:05dans les émissions de divertissement
23:07de la BBC,
23:09comme Top Gear
23:11ou dans le très populaire
23:13soap opéra EastEnders.
23:15C'était une star
23:17avant d'être un leader politique.
23:19Et c'est une partie
23:21très importante de l'histoire
23:23parce que beaucoup de politiciens,
23:25sans doute la majorité,
23:27pensaient que c'était une terrible erreur,
23:29que ça ne renvoyait pas
23:31une image de lui-même.
23:33C'est ce qui s'est passé
23:35avec Boris Johnson.
23:37C'est ce qui s'est passé
23:39avec Boris Johnson.
23:41C'est ce qui s'est passé
23:43que ça ne renvoyait pas
23:45une image de lui très sérieuse.
23:47Boris Johnson a compris
23:49bien avant que ce ne soit le cas
23:51que l'avenir de la politique
23:53réside dans la représentation
23:55et la célébrité.
23:57En 2012, pendant les Jeux Olympiques,
23:59alors qu'il est maire de Londres
24:01depuis quatre ans,
24:03une image va même faire le tour du monde.
24:09Boris Johnson a connu
24:11un moment où il avait l'air
24:13tellement amusant.
24:17Et quand il a été filmé
24:19sur la tyrolienne,
24:21il était là, l'air un peu ridicule
24:23avec ses deux drapeaux.
24:25Beaucoup de politiciens ont dit
24:27que si ça m'était arrivé,
24:29ça aurait complètement ruiné ma carrière.
24:31Mais il était le maire amusant.
24:33On comprend pourquoi il a fait ça.
24:35Il est devenu une marque mondiale.
24:37Il savait que cette photo
24:39ferait le tour du monde
24:41et ça a été le cas.
24:43Ce jour-là, il a pris
24:45une envergure internationale.
24:47Il savait ce qu'il faisait.
24:49Quelqu'un d'autre aurait dit
24:51c'est un désastre,
24:53mais lui, il s'est dit
24:55c'est un triomphe.
24:57Boris Johnson aime brouiller les pistes
24:59et fait du ridicule ou de la provocation
25:01voire une philosophie.
25:27Je pense que la personnalité
25:29et le caractère de Boris Johnson
25:31font que la plupart des gens comprennent
25:33qu'il est prêt à faire et à dire n'importe quoi
25:35pour obtenir ce qu'il veut.
25:37Et d'une certaine manière,
25:39cela lui confère une position de négociation
25:41assez puissante.
25:43Une position qu'il va mettre
25:45à profit sur un autre enjeu clé,
25:47la négociation du Brexit saison 2.
25:49Si le 31 janvier 2020,
25:51le Royaume-Uni est officiellement sorti
25:53de l'Union Européenne,
25:55que le divorce a été signé,
25:57il reste à en négocier les conditions,
25:59c'est-à-dire décider
26:01des futures relations commerciales
26:03entre les 27 membres
26:05et le Royaume-Uni.
26:07La négociation
26:09entre la Grande-Bretagne
26:11et l'Union Européenne
26:13n'a pas été facile.
26:15C'est-à-dire
26:17que la négociation
26:19entre la Grande-Bretagne
26:21et l'Union Européenne
26:23a sans aucun doute été la plus importante
26:25que nous ayons connue
26:27dans la période d'après-guerre
26:29en termes de ramifications économiques,
26:31diplomatiques et politiques.
26:33L'enjeu était énorme
26:35car il s'agit de négociations
26:37entre le Royaume-Uni
26:39et notre principal partenaire commercial.
26:41Il y avait donc beaucoup à faire.
26:43Ce qui se joue pour le Royaume-Uni
26:45c'est un recul brutal des échanges
26:47avec son premier partenaire commercial
26:49et un enjeu plus politique aussi,
26:51celui de l'étendue de sa souveraineté.
26:55Des enjeux qui doivent être tranchés
26:57en seulement dix mois.
26:59Pour y parvenir,
27:01Boris Johnson adopte alors
27:03une technique radicale.
27:05Boris Johnson a mené
27:07ces négociations en partant du principe
27:09que jouer les durs avec l'Union Européenne
27:11finirait par payer.
27:13Il s'agit presque
27:15de la théorie du fou
27:17dans les négociations internationales.
27:19Vous faites croire à votre adversaire
27:21ou à votre interlocuteur
27:23que vous êtes prêt à faire n'importe quoi,
27:25à enfreindre les normes et les règles,
27:27à claquer la porte,
27:29même si pour cela
27:31vous sacrifiez les intérêts de votre pays.
27:35Michel Barnier,
27:37négociateur en chef du Brexit
27:39pendant plus de quatre ans,
27:41est un des plus privilégiés du gouvernement Johnson.
27:45Il s'est confronté aux méthodes de négociation
27:47du premier ministre britannique.
27:49J'ai étudié très soigneusement
27:51toutes les techniques de négociation
27:53dans le monde.
27:55J'ai du mal à comprendre les tactiques britanniques
27:57mais j'ai toujours pensé qu'il fallait garder ses nerfs.
28:01J'ai compris que les Britanniques
28:03jouaient la pression du temps.
28:07Durant cette année 2020,
28:09à trois ou quatre reprises,
28:11ils ont eux-mêmes, unilatéralement,
28:13imposé des délais.
28:15En janvier, en nous disant
28:17si on n'a pas d'accord en juin,
28:19le premier disait
28:21on quittera la négociation.
28:25Alors que le gouvernement britannique
28:27fait toujours craindre la possibilité
28:29de quitter la table des discussions,
28:31en septembre, la tension monte d'un cran.
28:35Boris Johnson menace en pleine négociation
28:37de violer le premier traité du Brexit
28:39qu'il a lui-même signé neuf mois plus tôt.
28:43Une provocation que le gouvernement assume
28:45jusque sur les bancs du Parlement.
28:55J'ai été horrifié d'entendre un ministre
28:57se lever au Parlement et menacer
28:59de violer le droit international.
29:01Qu'un ministre britannique tienne de tels propos
29:03était vraiment choquant.
29:05Je pense que la technique de Boris Johnson
29:07était de choquer l'Union européenne
29:09pour attirer l'attention.
29:11Mais il n'a pas compris que ça renvoyait
29:13une mauvaise image au reste du monde.
29:15Je pense qu'il a endommagé
29:17le soft power britannique.
29:35Boris Johnson a toujours été un perturbateur.
29:37Mais il savait calculer en coulisses
29:39jusqu'où il pouvait aller.
29:41Je pense que cela faisait partie
29:43de sa technique de campagne
29:45de donner l'impression
29:47qu'il pouvait faire quelque chose
29:49de contraire.
29:51Nous n'avions pas prévu
29:53que le Royaume-Uni afficherait
29:55une volonté de rompre
29:57un accord international,
29:59ni mettrait lieu
30:01un manque d'intérêts
30:03de l'Union européenne.
30:05C'est ce qu'il a fait.
30:07C'est ce qu'il a fait.
30:09C'est ce qu'il a fait.
30:11C'est ce qu'il a fait.
30:13C'est ce qu'il a fait.
30:15C'est ce qu'il a fait.
30:17C'est ce qu'il a fait.
30:19C'est ce qu'il a fait.
30:21C'est ce qu'il a fait.
30:23C'est ce qu'il a fait.
30:25C'est ce qu'il a fait.
30:27C'est ce qu'il a fait.
30:29C'est ce qu'il a fait.
30:31C'est ce qu'il a fait.
30:33C'est ce qu'il a fait.
30:35C'est ce qu'il a fait.
30:37C'est ce qu'il a fait.
30:39C'est ce qu'il a fait.
30:41C'est ce qu'il a fait.
30:43C'est ce qu'il a fait.
30:45C'est ce qu'il a fait.
30:47C'est ce qu'il a fait.
30:49C'est ce qu'il a fait.
30:51C'est ce qu'il a fait.
30:53C'est ce qu'il a fait.
30:55C'est ce qu'il a fait.
30:57C'est ce qu'il a fait.
30:59C'est ce qu'il a fait.
31:01C'est ce qu'il a fait.
31:03C'est ce qu'il a fait.
31:05C'est ce qu'il a fait.
31:07C'est ce qu'il a fait.
31:09C'est ce qu'il a fait.
31:11C'est ce qu'il a fait.
31:13C'est ce qu'il a fait.
31:15C'est ce qu'il a fait.
31:17C'est ce qu'il a fait.
31:19C'est ce qu'il a fait.
31:21C'est ce qu'il a fait.
31:23C'est ce qu'il a fait.
31:25C'est ce qu'il a fait.
31:27C'est ce qu'il a fait.
31:29C'est ce qu'il a fait.
31:31C'est ce qu'il a fait.
31:33C'est ce qu'il a fait.
31:35C'est ce qu'il a fait.
31:37C'est ce qu'il a fait.
31:39C'est ce qu'il a fait.
31:41C'est ce qu'il a fait.
31:43C'est ce qu'il a fait.
31:45C'est ce qu'il a fait.
31:47C'est ce qu'il a fait.
31:49C'est ce qu'il a fait.
31:51C'est ce qu'il a fait.
31:53C'est ce qu'il a fait.
31:55C'est ce qu'il a fait.
31:57C'est ce qu'il a fait.
31:59C'est ce qu'il a fait.
32:01C'est ce qu'il a fait.
32:03C'est ce qu'il a fait.
32:05C'est ce qu'il a fait.
32:07C'est ce qu'il a fait.
32:09C'est ce qu'il a fait.
32:11C'est ce qu'il a fait.
32:13C'est ce qu'il a fait.
32:15C'est ce qu'il a fait.
32:17C'est ce qu'il a fait.
32:19C'est ce qu'il a fait.
32:21C'est ce qu'il a fait.
32:23C'est ce qu'il a fait.
32:25C'est ce qu'il a fait.
32:27C'est ce qu'il a fait.
32:29C'est ce qu'il a fait.
32:31C'est ce qu'il a fait.
32:33C'est ce qu'il a fait.
32:35C'est ce qu'il a fait.
32:37C'est ce qu'il a fait.
32:39C'est ce qu'il a fait.
33:01Quitter l'union européenne
33:03est de toute évidence
33:05dommageable pour l'économie.
33:07Les économistes prédisent un déclin du PIB de 4%
33:12sur les 10-15 prochaines années.
33:17Aucun économiste digne de ce nom
33:21ne pense que cela va être bénéfique pour le Royaume-Uni,
33:25ou que les accords commerciaux,
33:28même avec les États-Unis, l'Inde ou la Chine,
33:31vont compenser le fait que nous allons perdre des échanges
33:34avec nos grands partenaires commerciaux.
33:41Ce n'est pas exactement la manière de penser de Boris Johnson
33:44et d'une grande partie de ceux qui ont soutenu et bâti le Brexit.
33:47Boris et les siens, eux,
33:49vendent les rêves d'un retour à la grandeur britannique.
34:04La principale matrice politique de mon frère est
34:27« La Grande-Bretagne est le meilleur pays du monde ».
34:30Il ressemble à mon plus jeune fils.
34:33Il répond « La Grande-Bretagne ».
34:35Nous avons inventé les meilleurs jeux de société,
34:37nous avons Shakespeare, la famille royale,
34:39nous organisons les plus beaux mariages royaux,
34:41nous avons le plus beau littoral.
34:47Il faut se rappeler qu'il a grandi dans les années 80,
34:50à l'époque de Margaret Thatcher, du renouveau britannique.
34:54La Grande-Bretagne n'avait pas besoin de décliner,
34:57elle n'était pas une nation de troisième ordre.
35:00Et une partie de cela est bien sûr vraie.
35:03La Grande-Bretagne n'a pas à être une nation de troisième ordre.
35:06Mais vous ne pouvez pas en conclure qu'elle peut prospérer seule,
35:09en dehors du plus grand marché unique du monde.
35:12Pour Boris Johnson,
35:14restaurer la grandeur de la nation passe par un nouveau slogan,
35:17« Global Britain »,
35:19la Grande-Bretagne mondialisée comme renouveau face à l'Union européenne.
35:25Boris Johnson avait besoin d'une alternative à l'Europe
35:28comme base de sa politique étrangère.
35:30Et le slogan « Global Britain »,
35:32qui n'a pas de signification spécifique,
35:34ravive le passé glorieux de la Grande-Bretagne
35:37en tant que grande puissance,
35:39avec une Royal Navy dominant les mers.
35:52Des voix d'un autre temps,
35:54comme les fantômes d'un récit construit et porté
35:56encore aujourd'hui par les conservateurs britanniques.
35:59Celui d'un pays qui n'a jamais courbé les Chines,
36:02a gagné la Seconde Guerre mondiale.
36:15Un récit politique comme un roman familial.
36:18Celui d'un empire qui fut un des plus puissants au monde
36:21jusqu'au milieu du XXe siècle,
36:23composé de plus de 50 nations
36:25qui, chacune à leur manière, rendaient hommage à la reine.
36:37Je pense qu'il y a toujours eu cette idée
36:39selon laquelle la scène européenne
36:41était trop petite pour la Grande-Bretagne.
36:44Et que du fait de notre passé impérial,
36:46nous avions des liens avec d'autres pays dans le monde
36:49qui pourraient être utilisés à notre avantage
36:51diplomatique et économique.
36:54Le commerce est bien sûr un élément clé de Global Britain.
36:57C'est l'idée qu'après le Brexit,
36:59le Royaume-Uni signera des accords commerciaux
37:01dans le monde entier, avec les Chinois,
37:03les Indiens, les Américains, les Australiens,
37:05les Néo-Zélandais.
37:06Il est très important politiquement
37:08pour le gouvernement britannique de pouvoir dire
37:10« Regardez, nous avons signé des accords avec tous ces pays. »
37:13Car cela montre que nous sommes à nouveau pris au sérieux.
37:18Quitter l'Union européenne pour se tourner
37:20vers le monde anglo-saxon,
37:22particulièrement vers l'ami américain.
37:25Et mettre sur le devant de la scène
37:27l'éternelle relation dite « spéciale ».
37:31Une relation qui s'est d'abord écrite pour Boris Johnson,
37:34avec la présidence de Donald Trump.
37:47Une complicité affichée et souvent surjouée.
37:50Une mise en scène au service d'intérêts économiques
37:53mais aussi politiques bien compris.
37:59En voyant Boris Johnson,
38:01Donald Trump a vu un clone de lui-même.
38:03Il a même utilisé l'expression « Britain Trump »
38:06que Boris Johnson a détesté.
38:08Je pense que Donald Trump a perçu le Brexit
38:10comme quelque chose qu'il aurait pu lui-même faire.
38:15Je pense que Trump et Johnson se voyaient tous les deux
38:17comme des figures politiques contestataires et perturbatrices
38:20qui s'adressaient au même type d'électeurs
38:22dans leurs différents pays
38:24et adoptaient des techniques similaires.
38:30En 2019, au G7 de Biarritz,
38:32les deux hommes vont se retrouver pour la première fois
38:34comme leaders respectifs de leur pays.
38:40Au-delà de leur connivence,
38:42va se jouer lors de ce sommet
38:44une partie de la diplomatie internationale britannique
38:47post-Brexit.
38:51John Bolton, puissant ex-conseiller
38:53à la Sécurité nationale de Donald Trump,
38:55faisait partie de sa délégation.
38:57Il a été l'acteur et témoin direct
38:59de leurs relations privilégiées
39:01si diplomatiquement utiles.
39:07Le G7 a été conçu pour coordonner l'Occident,
39:10d'abord sur des questions économiques
39:12puis sur des questions politiques plus larges.
39:16Lorsque la Russie y est entrée,
39:18c'était parce qu'on espérait
39:20qu'elle deviendrait plus proche de l'Occident.
39:22Mais ça n'a pas été le cas.
39:24Elle a donc été expulsée.
39:26Au G7 de Biarritz en 2019,
39:28Trump a voulu réintégrer la Russie.
39:32Tout le monde pensait que c'était une mauvaise idée.
39:34Mais Boris, qui était peut-être un peu plus franc
39:36que certains autres dirigeants,
39:38a été celui qui a mis un terme à la discussion.
39:42Il a su être suffisamment amical avec Trump
39:44et ça lui a permis
39:46de faire accepter la position britannique
39:48avec plus de facilité.
39:52Il y a quelque chose de fascinant dans la relation
39:54entre Boris Johnson et Donald Trump
39:56qu'on peut résumer dans la distinction
39:58entre le fond et la forme.
40:00Sur la forme, tous les deux voulaient montrer
40:02à la vieille garde une nouvelle manière de gouverner,
40:04se débarrasser des anciennes règles
40:06et faire les choses différemment.
40:08En revanche, sur le fond,
40:10si vous vous penchez sur leurs objectifs
40:12de politique étrangère, qu'il s'agisse
40:14de la Russie, de la gestion de l'Iran,
40:16de la Chine, du multilatéralisme
40:18ou de l'avenir de l'OTAN,
40:20ils ne sont pas d'accord.
40:24À Biarritz, si Boris Johnson
40:26veut profiter de sa proximité avec Donald Trump,
40:28c'est surtout pour faire avancer
40:30un intérêt économique bien précis
40:32pour son pays.
40:34Là où il avait besoin du soutien de Trump,
40:36c'était bien sûr pour élaborer
40:38entre la Grande-Bretagne et les États-Unis
40:40un accord commercial substantiel
40:42pour éclipser ce que nous avions perdu
40:44dans ce domaine en quittant
40:46l'Union européenne.
41:00Il y a eu une rencontre autour d'un petit déjeuner
41:02entre Johnson, Trump et leurs conseillers respectifs.
41:04Il faut bien comprendre
41:06que Trump se rendait à ces réunions
41:08sans but précis ou sans préparation.
41:10Quelqu'un comme Boris Johnson
41:12arrive et va trouver le moyen
41:14de parvenir à ses fins.
41:16Je ne suis même pas sûr
41:18que Trump se rende compte
41:20de ce qu'il lui arrive.
41:34Ce que veut Boris Johnson,
41:36c'est un accord commercial avec les Américains,
41:38même si seulement 20%
41:40des exportations britanniques
41:42vont vers les États-Unis.
41:44Un accord comme un symbole politique
41:46autant qu'économique.
41:50Ce que vous avez vu au G7 de Biarritz,
41:52c'est la convergence
41:54de deux personnes
41:56et de leurs intérêts respectifs.
42:00L'intérêt de Donald Trump
42:02était bien sûr d'attaquer
42:04et d'affaiblir l'Union européenne.
42:06Boris Johnson, lui,
42:08voulait montrer que la Grande-Bretagne
42:10hors de l'Union européenne
42:12pouvait avoir une relation
42:14avec le pays le plus puissant du monde.
42:16Et nous voulions également
42:18un accord commercial avec les États-Unis
42:20pour montrer aux Européens
42:22que nous pouvions être aussi influents
42:24et puissants en dehors de leur club.
42:33Les Américains sont des négociateurs commerciaux
42:35extrêmement coriaces.
42:37Et la Grande-Bretagne, en dehors de l'Union,
42:39est une économie assez petite.
42:41Les Américains ont donc d'autres priorités,
42:43comme l'accord de libre-échange
42:45avec l'Union européenne.
42:47La Grande-Bretagne vient un peu plus bas
42:49dans la liste.
42:51Je pense que Boris Johnson espérait
42:53que ses relations étroites
42:55avec Donald Trump
42:57poursuivent.
42:59Cela ne s'est pas produit
43:01et je ne vois pas Joe Biden
43:03donner la priorité à la Grande-Bretagne
43:05pour un accord de libre-échange.
43:07Deux ans et demi après le G7,
43:09l'accord commercial avec les Américains
43:11est au point mort.
43:13Et Boris Johnson doit se confronter
43:15à d'autres conséquences du Brexit.
43:17Plus politiques, celles-là.
43:19Faire face aux risques
43:21de désunion de son pays.
43:23Il est crucial
43:25que les Américains
43:28comprennent une chose.
43:30Le Royaume-Uni n'est pas
43:32un État-nation européen
43:34comme les autres.
43:36C'est un État multinational
43:38composé de trois nations distinctes
43:40et d'une partie d'une autre.
43:42Cela signifie donc
43:44que son intégrité
43:46est toujours potentiellement en danger.
43:48Selon moi,
43:50le Brexit
43:52est un accord
43:55Selon moi,
43:57il est indéniable
43:59que le Brexit a soulevé des questions
44:01sur l'intégrité future du pays.
44:06De ma vie, je n'avais jamais vu
44:08l'unité du pays aussi menacée.
44:10Mais il ne fait aucun doute
44:12que les résultats du référendum
44:14sur l'Europe, le fait que l'Écosse
44:16et l'Irlande du Nord aient voté pour rester
44:18mais que l'Angleterre et le pays de Galles
44:20aient voté pour partir,
44:22le sujet allait être très sensible
44:24pour l'avenir du Royaume-Uni.
44:29En avril 2021, en Irlande du Nord,
44:31le Brexit fait ressurgir
44:33les démons et les images du passé.
44:35Ceux d'un conflit qui a bouleversé
44:37le Royaume-Uni pendant plus de 30 années.
44:41Avec la sortie de l'Union européenne,
44:43le pays retrouve ses frontières
44:45avec la République irlandaise.
44:47Mais personne ne veut rétablir les contrôles
44:49entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande
44:51à l'heure de réveiller la lutte armée.
44:54À la place, un compromis est trouvé.
44:56L'Irlande du Nord reste de facto
44:58dans le marché unique européen.
45:02Désormais, toutes les marchandises
45:04qui arrivent de Grande-Bretagne
45:06et vont vers l'Irlande du Nord seront contrôlées.
45:08Le Brexit a donc créé une frontière économique
45:10à l'intérieur même du Royaume-Uni
45:12dont la principale conséquence
45:14est celle d'un risque de rapprochement
45:16entre les deux Irlandes.
45:22L'Irlande du Nord, comme l'Écosse,
45:24a voté contre le Brexit.
45:26Et à cause de la mise en place
45:28du protocole nord-irlandais,
45:30les marchandises provenant du reste du Royaume-Uni
45:32ne sont plus livrées correctement.
45:36Des manifestations violentes
45:38ont éclaté dans les rues nord-irlandaises
45:40pour protester contre le Brexit.
45:46La possibilité d'une majorité nationaliste
45:48en Irlande du Nord
45:51n'est plus impossible à imaginer.
45:55Comme en Irlande du Nord depuis le Brexit,
45:57le désir indépendantiste
45:59s'est aussi largement renforcé en Écosse
46:01où les Écossais ont voté à 62%
46:03contre le Brexit.
46:09Boris Johnson, en pleine pandémie,
46:11conscient de ces élans indépendantistes
46:13et des élections législatives qui viennent,
46:15décide de venir promouvoir sa plus forte carte.
46:20L'action la plus populaire de son gouvernement
46:22a été le déploiement d'un vaccin
46:24qui a sauvé des dizaines de milliers de vies.
46:26Il s'est rendu auprès des Écossais
46:28pour leur dire
46:30voilà ce que le Royaume-Uni
46:32et la sortie de l'Union Européenne
46:34ont fait pour l'Écosse.
46:38Quand il y est allé en janvier,
46:40il n'a pas reçu un accueil très chaleureux.
46:42Il a déclaré que rien ne l'empêcherait
46:44de faire campagne en Écosse
46:46pour ces élections.
46:48Mais en réalité, il ne s'est pas présenté
46:50parce que les sondages ont montré
46:52très clairement qu'il était extrêmement
46:54impopulaire là-bas.
46:58Boris Johnson et son gouvernement
47:00conservateur ont très mauvaise réputation
47:02en Écosse.
47:04Un grand nombre d'Écossais ont le sentiment
47:06que le Brexit leur a été imposé par les nationalistes
47:08de Londres.
47:10Les Écossais sont très pro-européens.
47:12Donc le Brexit a été
47:14un véritable traumatisme pour eux.
47:16Il a ravivé l'idée
47:18que la Grande-Bretagne est dominée par l'Angleterre
47:20et que les politiciens
47:22anglais prennent des décisions
47:24sans tenir compte de la vie de l'Écosse.
47:26Ça a inévitablement
47:28relancé le débat sur l'indépendance.
47:32Un sentiment
47:34indépendantiste conforté depuis que
47:36le SNP, parti national
47:38indépendantiste écossais, a remporté
47:40les élections législatives haut la main
47:42en mai 2021.
47:44Une majorité qui a donné naissance
47:46à un nouveau gouvernement écossais
47:48dont Angus Robertson est aujourd'hui
47:50l'un des ministres.
48:10Je veux que l'Écosse soit un pays européen
48:12comme les autres.
48:14Nous sommes une nation du nord de l'Europe
48:16de 5 millions d'habitants, tout comme
48:18le Danemark ou l'Infinlande, qui sont d'ailleurs
48:20tous deux membres de l'Union Européenne,
48:22ou comme notre plus proche voisin, l'Irlande.
48:24Je veux que nous soyons comme eux.
48:26Je veux que l'Écosse soit un pays normal.
48:28Une victoire du SNP
48:30qui remet au goût du jour
48:32un référendum sur l'indépendance de l'Écosse
48:34qu'Angus Robertson et son parti
48:36ont fermement décidé d'organiser.
48:38Mais il faut, en principe,
48:40l'accord constitutionnel de Boris Johnson.
49:04Boris Johnson, dans un ultime paradoxe,
49:06vante l'union des nations
49:08comme une force,
49:10pourvu qu'elle soit britannique
49:12et surtout pas européenne.
49:14Boris Johnson a déclaré
49:16qu'il ne les autoriserait pas
49:18à organiser ce référendum.
49:20La question de savoir s'il peut légalement le faire
49:22est controversée.
49:24Et je ne doute pas que si un référendum
49:26est organisé en Écosse dans les prochaines années,
49:28il sera extrêmement serré.
49:30Et nous pourrions bien voir l'Écosse
49:32devenir un pays indépendant.
49:34Le gouvernement Johnson
49:36et le gouvernement écossais
49:38mènent un bras de fer
49:40sur l'organisation du référendum
49:42que seul le temps tranchera.
49:44Un affrontement qui éclaire
49:46et accentue le fossé
49:48entre toutes les nations du Royaume-Uni.
49:50Depuis le Brexit,
49:52la question de l'indépendance écossaise
49:54est revenue sur le devant de la scène.
49:56Et c'est très dangereux.
49:58Parce que même si Boris Johnson
50:00a fait de bonnes choses en tant que Premier ministre,
50:02s'il devait présider
50:04à l'éclatement du Royaume-Uni,
50:06c'est tout ce que l'histoire retiendrait de lui.
50:08C'est désormais une priorité absolue
50:10pour son gouvernement
50:12de maintenir la cohésion du pays.
50:14Beaucoup de gens
50:16qui croyaient au Royaume-Uni
50:18espéraient que la démocratie
50:20en sortirait renforcée.
50:22Mais vous avez aujourd'hui deux nations
50:24qui pourraient bien quitter le Royaume-Uni
50:26dans les années à venir.
50:29De ma vie,
50:31je n'avais jamais vu les questions d'identité
50:33être aussi centrales
50:35dans la politique britannique.
50:37Je pense qu'on peut dire
50:39que le Royaume-Uni traverse une crise identitaire.
50:41D'aussi loin que je me souvienne,
50:43c'est la première fois
50:45que les différentes parties du Royaume-Uni
50:47se considèrent plus divisées qu'unies.
50:51Alors que Boris Johnson
50:53a su réaliser son rêve d'enfant,
50:55conquérir le pouvoir,
50:57il reste toujours populaire
50:59auprès de ceux qui l'ont soutenu
51:01et détesté par ceux qui l'ont rejeté.
51:05Le Royaume-Uni, lui,
51:07cherche encore sa place sur la scène mondiale.
51:09Et les années à venir diront
51:11si les rêves d'une Grande-Bretagne mondialisée
51:13vont ou non
51:15se diluer dans la réalité d'un Royaume
51:17plus désuni que jamais.
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