Rencontre avec Nurith Aviv - Vidéo Dailymotion

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Première femme reconnue comme cheffe-opératrice par le CNC en France, Nurith Aviv est aussi la réalisatrice de films essentiels, où les langues, les pays, les récits intimes et mythiques se croisent et se répondent.

Nurith Aviv revient sur son travail et ses thèmes de prédilection. Rencontre animée par Catherine Coquio, enseignante-chercheuse et autrice.

Enregistré le 26 janvier 2025 au Forum des images dans le cadre du festival Un état du monde et de la carte blanche « Filmer la parole avec Nurith Aviv ».

Un état du monde 2025
Infos : https://www.forumdesimages.fr/un-etat-du-monde-edition2025

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00:00:00Merci, Zainep, beaucoup. Merci de ta patience. Zainep est tellement précieuse qu'on ne peut

00:00:15pas en parler. Et merci au Forum des images. Je voudrais d'abord dire que moi, je n'ai

00:00:20pas rencontré Nourrit par le cinéma. Je l'ai rencontré par les livres et par l'amitié

00:00:26puisqu'on avait un ami commun. Elle m'a été présentée par un ami qui est là ce

00:00:31soir, alors que je croyais qu'il était en Allemagne. C'est Irving Wolfhardt, qui

00:00:35est un des grands connaisseurs de la pensée de Walter Benjamin. Et c'est ça qui nous

00:00:39liait. C'est ça aussi qui nous a liés à Troyes en grande partie au début. Et avec

00:00:43Irving, on avait créé un séminaire et animé un séminaire dans le milieu des années

00:00:4790 sur ce qu'on appelait à ce moment-là les littératures des camps, la littérature

00:00:52de la Shoah. Puis ça s'est élargi à l'écriture des catastrophes historiques. Et en 97, on

00:00:57avait organisé un colloque qui s'appelait l'Homme, la langue, les camps. Et il y a

00:01:01eu un moment fort. On avait placé ce colloque sous le signe de la figure de l'ange de l'histoire

00:01:06de Benjamin d'ailleurs. Il y a eu un moment fort dans ce colloque qui était une rencontre

00:01:10entre Imre Kertes et Aaron Appelfeld, qui était alors très peu connu en France. C'était

00:01:16au CNL. Malheureusement, ça n'a pas été filmé puisqu'on ne se rendait pas compte

00:01:20du coup de génie qu'avait été cette rencontre à ce moment-là. Et en fait, c'était Nourit

00:01:26qui nous avait mis sur la voie, en particulier de Kertes, qui vraiment était très très

00:01:32peu, qui commençait d'être bien connu en Allemagne à ce moment-là, mais pas en France.

00:01:36Et cette rencontre évidemment, je ne l'oublierai jamais, c'est elle. Et je n'oublierai jamais

00:01:41sa présence non plus au séminaire, cette petite bonne femme israélienne qui avait

00:01:45l'air tellement européenne dans ses références, dans sa bibliothèque. Il y a tellement à

00:01:52la fois françaises, israéliennes, allemandes, juives. Et donc elle connaissait un maximum

00:01:58de trucs. Et voilà. Et donc moi, je voulais rappeler ça parce qu'elle m'a dit, on en

00:02:04a parlé un peu l'autre jour, pour moi, c'est une immense lectrice. Mais elle m'a dit mais

00:02:07non, je ne lis pas. De même qu'elle est analphabète en quatre langues. Vous avez déjà peut-être

00:02:12entendu cette formule. Et moi, je pense que si elle ne lit pas, ça veut dire qu'elle

00:02:16a déjà tout lu dans une autre vie antérieure ou qu'elle lit dans ses rêves. D'ailleurs,

00:02:20tu pourrais faire un film, je trouve, sur les livres qu'on lit en rêve. C'est une très

00:02:23bonne idée. Ce serait bien ton style. En tout cas, voilà. Par exemple, je trouve qu'elle

00:02:28parle très bien le Walter Benjamin. En tout cas, c'est aussi une des choses qui nous lit,

00:02:36qui irrigue son cinéma et qui, pour moi, compte beaucoup toujours maintenant. Mais

00:02:39ce n'est pas ça qui nous lit le plus profondément. Ce qui nous lit, ce n'est pas ça qui explique

00:02:45non plus que je suis une nourritavive addict, qui la suis depuis 20 ans. En fait, c'est

00:02:51quelque chose qui s'est passé justement il y a 20 ans, en 2004, lorsque j'ai vu pour

00:02:55la première fois, d'une langue à l'autre, Mizafal et sa femme. Alors, j'avais vu Makom

00:03:00Avoda en 1997. Je verrai plus tard Kafr Kara, Israël, qu'elle avait tourné en 1989, qui

00:03:07était son premier documentaire. Et donc, les deux portaient sur Israël, Palestine.

00:03:13Et sur cette question, je lui faisais confiance, en fait, une confiance politique qui s'est

00:03:19maintenue. C'est toujours très important pour moi de savoir ce qu'elle pense de tout

00:03:22ça, y compris en ce moment, bien sûr. Elle avait d'ailleurs fait débuter ce Kafr Kara

00:03:28par un chant arabe, ce qui m'avait été très sensible et ce qui conduit, en fait,

00:03:35à ce qui s'est passé plus tard dans son cinéma. Mais donc, c'est tout à fait autre

00:03:38chose qui s'est passé pour moi en 2004, quand j'ai vu ce film. C'est-à-dire, j'ai vraiment

00:03:43éprouvé une émotion très intense, presque à trembler ou presque à pleurer, parfois,

00:03:49mais aussi un éblouissement lié à un événement qui est bien particulier. Au fond, c'est-à-dire

00:03:53que dans un petit documentaire d'une heure, quelque chose se passe qui est que se déploie

00:03:58une pensée poétique, vraiment une pensée poétique au sens fort, où l'image pense

00:04:04en accompagnant, en rythmant une parole, des paroles, qui travaillent chacune à comprendre

00:04:11ce qui se passe dans les langues, dans le langage, pour chacun des locuteurs. Elle filme

00:04:17la parole, donc, comme le dit le titre du livre du collectif qui va apparaître prochainement,

00:04:23qu'a édité Marianne Dautrey et Nathalie-Georges Lambrix. Et ce film et la parole, ça suppose

00:04:29évidemment une mise en forme. C'est sans doute aussi à ça, c'est-à-dire l'intensité

00:04:33de cette forme, très maîtrisée, millimétrée presque, qui relève un peu de l'orchestration,

00:04:39qui relève, pour moi, de la partition, vraiment. Je pense que c'est vraiment de l'ordre de

00:04:43la performance presque musicale, chacun de ses films. Et à chaque fois, il y a une règle

00:04:48du jeu avec des variations, des codes, des rites. Elle aime beaucoup les rituels et ces

00:04:53rites, ils sont parfois secrets, parfois enfouis dans ses films et on les découvre un peu

00:04:58en farfouillant d'un film à l'autre et puis en discutant avec elle. Donc un dispositif

00:05:04très fort, très codifié et très maîtrisé, par lequel elle place sous la lumière, je

00:05:11dirais presque en gloire, un endroit qui est très obscur en chacun de nous, c'est-à-dire

00:05:15notre expérience du langage, comment on apprend ça, comment on le réapprend lorsqu'on apprend

00:05:20une autre langue, comment on passe d'une langue à l'autre, etc. Ce surgissement du langage

00:05:24est tellement incompréhensible, c'est un point obscur de nos existences, le point peut-être

00:05:29le plus intime, le plus périlleux, le plus vital à la fois. Et pour moi qui ai eu du

00:05:34mal enfant à passer au langage parlant, il y a quelque chose qui se réveille, qui est

00:05:40extrêmement intense. A chaque fois, je revois tous ces films, parce que tous ces films

00:05:43qui ne parlent pas forcément de ça renvoient néanmoins, pour moi, à cet espèce de point

00:05:48originaire. Donc c'est la vie du langage qui s'agit et à travers, à chaque fois, des

00:05:54humains parlants, des humains écrivants, traduisants, qui racontent leur vie, racontent

00:05:59leurs découvertes, d'abord leurs déchirures, souvent, leurs pertes, et puis leurs découvertes,

00:06:06leurs hurricans. Et à chaque fois, c'est ça qui est extraordinaire et c'est ça qui

00:06:12à mon avis me met, il y a une espèce de charme qui s'effectue, mais qui est très presque

00:06:18violent je dirais même, qui nous capte, il y a un phénomène d'emprise, à chaque fois

00:06:21un monde s'ouvre, à chaque locuteur, un monde s'ouvre, il parle d'une manière extrêmement

00:06:28dense, puisque cette parole qui n'est pas montée ensuite, mais qui est tournée, ne

00:06:37prend que quelques minutes, donc le monde se referme et hop, un autre monde se réouvre,

00:06:42on a à peine le temps d'assimiler le précédent que s'en est un autre, et pourtant ce n'est

00:06:49pas grave, parce que chaque fois, on se rend compte que ce qui se réouvre, c'est notre

00:06:54monde, c'est notre monde commun pour chaque locuteur, et cette réouverture, elle se traduit

00:07:00aussi par toutes ces portes, ces fenêtres, qui sont absolument partout dans ces films,

00:07:04ces seuils, d'une manière ou d'une autre. Donc ça crée une palpitation, une espèce

00:07:08de cœur battant, il y a un des personnages d'une langue à l'autre qui utilise cette

00:07:13formule, Daniel Epstein, et en effet il y a quelque chose qui bat, pour moi le cœur

00:07:17bat plus vite au moment où je regarde les films de Nourrit. Elle m'a dit une phrase

00:07:24qui m'a frappé, faire l'image pour une chef opératrice, puisqu'on va passer à

00:07:27cette question de son travail de chef opératrice, c'est en fait faire la lumière, c'est

00:07:31la même chose, faire l'image et faire la lumière, et je pense qu'elle fait vraiment

00:07:36la lumière dans plusieurs sens différents, il y a la lumière qui se fabrique en captant,

00:07:41en filmant, en cadrant, et puis en faisant tomber donc une lumière sur les acteurs,

00:07:46sur les personnages, sur les objets, et puis il y a la lumière qui vient des personnages,

00:07:51parce qu'en fait ces personnages sont tous des illuminés, ils sont illuminés par leur

00:07:55passion, par leur quête, et c'est ça qu'on partage, et c'est absolument extraordinaire

00:08:00d'arriver à faire partager ça, ça suppose vraiment un grand art, et ça donne du plaisir,

00:08:05c'est-à-dire qu'on a du plaisir à voir, à entendre, mais aussi à penser, un plaisir

00:08:10je trouve très intense, alors pourtant qu'on nous parle de choses graves, parfois tragiques,

00:08:16puisque ça renvoie à l'histoire, et c'est une histoire grave, celle du XXe siècle,

00:08:20c'est la Shoah, c'est Israël-Palestine, mais c'est aussi les migrations judéo-arabes,

00:08:24ça peut être aussi parfois la traite, la colonisation, c'est-à-dire qu'à chaque

00:08:29fois c'est un cinéma qui nous montre la blessure, mais qui la soigne immédiatement

00:08:33au moment même où il la montre, on comprend une perte, on comprend une faille, mais on

00:08:41est aussi saisi par une puissance de recommencer, dans chacun de ces films semble-t-il, et qui

00:08:48renvoie un pouvoir aussi de revenir en arrière, pour aller plus loin, et de manière créative

00:08:56en fait, c'est-à-dire qu'en fait c'est à travers le surgissement de la création

00:08:59qui survient justement, surtout, souvent, entre des langues, c'est pas à travers la

00:09:06création qu'on comprend le langage, ça c'est exceptionnel en fait, comme travail,

00:09:11comme cuisine, moi je la traite souvent, c'est ça en fait, c'est un sortilège pour

00:09:14moi chaque film, je la traite de sorcière, mais aussi de rabbine, bien sûr c'est une

00:09:19rabbine d'aujourd'hui, on en reparlera peut-être, et sûrement même, et puis maintenant je

00:09:24voudrais qu'on regarde ce qu'il y a dans le chaudron de la sorcière, un petit peu

00:09:28du côté de l'image d'abord, alors on va regarder, il y a quatre montages de films

00:09:34qui sont pas seulement des extraits d'ailleurs pour le premier, et ça va rythmer la séance,

00:09:39c'est moi qui vais en parler un peu plus pour la première et puis Norit pour la seconde,

00:09:42ensuite on discutera, ces extraits on les a choisis ensemble, ça a été comme quelque

00:09:48chose, mais on y a réussi, c'est vrai, mais voilà, donc qu'est-ce que je voulais dire

00:09:55d'autre pour annoncer, je pense rien, voilà, on vous laisse regarder la première séquence.

00:10:39Pierre Rivière, âgé de 20 ans, cultivateur, né en la commune de Courvaudon et domicilier

00:11:08en Seine-le-Dôné, pour quel motif avez-vous assassiné votre mère, votre sœur Victoire

00:11:19et votre frère Jules, parce que Dieu me l'a commandé pour justifier sa providence,

00:11:25ils étaient unis, qu'entendez-vous quand vous dites ils étaient unis, c'était d'accord

00:11:31tous trois pour persécuter mon père, vous venez de dire que Dieu vous avait commandé

00:11:37les trois assassinats qui vous sont reprochés, vous saviez bien pourtant que Dieu ne commande

00:11:42jamais le crime, Dieu a commandé à Moïse d'égorger les adorateurs du pot d'or sans

00:11:48épargner ni ami, ni père, ni fils, qui vous a appris ces choses-là, je les ai lues dans

00:11:55le Deutéronome, dans les derniers jours on résolut malgré tout d'avertir sa mère et

00:12:15elle vint le voir, cet enfant avait déjà montré plus de société parmi le monde que

00:12:39moi et mon frère Prospère, aussi mon père l'aimait-il, cependant ma mère lui apporta

00:12:47deux lettres, l'une de madame Aude et l'autre du percepteur pour payer ses dettes,

00:12:53Seigneur, en fait vous voulez encore de plus dur, mon pauvre petit tu vas bientôt être

00:12:58débarrassé de ce monde, tu vas là au ciel, pas du terre,

00:13:09Je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux

00:13:16pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je

00:13:23ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas,

00:13:28je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux

00:13:33pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je

00:13:37ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:13:42peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:13:46peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:13:50peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:13:54peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

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00:21:19peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

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00:21:21peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:22peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:23peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:24peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:25peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:26peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:27peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:28peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:29peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:30peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:31peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:32peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:33peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:34peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:35peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:36peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:37peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:38peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:39peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:40peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:41peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:42peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:43peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:44peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:45peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:46peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:47peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:48peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:49peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:50peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:51peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:52peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:53peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:54peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:55peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:56peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:57peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:58peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:21:59peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:00peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:01peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:02peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:03peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:04peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:05peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:06peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:07peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:08peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:09peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:10peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:11peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:12peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:13peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:14peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:15peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:16peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:17peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:18peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:19peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:20peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:21peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:22peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:23peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:24peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:25peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:26peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:27peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:28peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:29peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:30peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:31peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:32peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:33peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:34peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:35peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:36peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:37peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:38peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:39peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:40peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:41peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:42peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:43peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:44peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:45peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:46peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:47peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:48peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:49peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:50peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:51peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:52peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:53peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:54peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:55peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:56peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:57peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:58peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:22:59peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:00peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:01peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:02peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:03peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:04peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:05peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:06peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:07peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:08peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:09peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:10peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:11peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:12peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:13peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:14peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:15peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:16peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne

00:23:17peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas, je ne peux pas.

00:23:47Quand on me demande ce que c'est que ma langue, j'ai du mal à répondre.

00:23:51Est-ce que c'est la langue que nous avons parlé à la maison?

00:23:54La langue où j'ai appris les premières mots?

00:23:57Ou peut-être c'est une autre langue?

00:24:00La langue qu'on a parlé à la rue?

00:24:02A l'école?

00:24:04La langue où j'ai appris les premiers mots?

00:24:07Ou peut-être c'est une autre langue?

00:24:10La langue qu'on a parlé à la rue?

00:24:12A l'école?

00:24:14A l'école?

00:24:16La langue où j'ai appris à lire et à écrire?

00:24:33Je suis née à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à Tel Aviv,

00:24:37la première ville hébreue.

00:24:41C'est ce que mes parents m'ont dit.

00:24:43Il va naître un nouveau homme

00:24:45qui parle, pense et rêve

00:24:48seulement en hébreu.

00:24:53Mes parents m'ont appelée de nouveau

00:24:55le nom d'un fleuron rouge

00:24:57qui a sauvé ma vie à la naissance,

00:25:00Nourit.

00:25:02Ils ne savaient pas que Nour et Nouri

00:25:05étaient des noms arabes,

00:25:07qui ont diffusé le fleuron et mon fleuron.

00:25:12La plupart de mes amis m'ont appelée de nouveaux noms hébreux,

00:25:15des noms d'ici,

00:25:17pas des noms jéudaïques d'ici,

00:25:19de la Galette.

00:25:22Mes parents ont essayé de parler en hébreu à la maison,

00:25:26mais c'était en hébreu dans un autre pays,

00:25:29dont la plupart étaient aussi d'origine d'Israël.

00:25:33Les autres parents parlaient en polonais, en russe,

00:25:36en arabe, en espagnol, en jéudaïque.

00:25:40S'ils parlaient en hébreu,

00:25:42ils étaient des parents,

00:25:44ou c'est ce que je pensais au moins.

00:25:50Chez nous, ils parlaient en allemand.

00:25:53En allemand, mon père m'a apporté

00:25:55des histoires d'enfants horribles.

00:25:57En allemand, il m'a raconté

00:25:59qu'ils ont tué sa mère.

00:26:05Avec les médecins, les amis,

00:26:07et les vendeurs dans la rue Ben Yehuda,

00:26:09ma mère parlait en allemand.

00:26:14Dans la rue Ben Yehuda,

00:26:16il y avait aussi mon jardin.

00:26:18Mais à peu près,

00:26:20ma mère ne savait pas qui était Eliezer Ben Yehuda,

00:26:23qui est considéré comme le réinventeur de la langue hébreue.

00:26:29Avant que j'apprenne à lire et à écrire,

00:26:32les mots, les noms, les prénoms

00:26:35évoquaient pour moi des couleurs.

00:26:41Ces couleurs étaient liées aux sons

00:26:43par lesquels les mots commençaient.

00:26:48Ainsi, par exemple,

00:26:50les prénoms Gabi et Gabi

00:26:52évoquaient les couleurs de Gabi.

00:26:55Ainsi, par exemple,

00:26:57les prénoms Gabi et Gabi

00:26:59évoquaient le vert.

00:27:02Dina et David, les bleus.

00:27:05Et Nourit, le rouge.

00:27:12Alors tu as dit que ces trois plans

00:27:14contenaient tout ton cinéma.

00:27:16Je ne sais pas si tu te souviens qu'on te dit ça

00:27:18à un moment d'égarement.

00:27:20Peut-être que tu peux déjà parler de ça.

00:27:22Je vais essayer de voir si je n'ai pas exagéré.

00:27:24Je crois que j'ai exagéré un tout petit peu.

00:27:27Déjà, je vois trois plans-séquences.

00:27:33Les moyens de les faire.

00:27:35Un, c'est dans un train.

00:27:37C'est-à-dire, c'est un travelling dans un train.

00:27:40J'ai raconté tout à l'heure,

00:27:42mais je m'excuse pour ceux qui étaient avant,

00:27:44que j'ai beaucoup, beaucoup, beaucoup

00:27:46cherché les lieux dans les trains

00:27:48dans lesquels je vais les filmer.

00:27:52Et l'autre, c'est un panoramique

00:27:54de, je crois,

00:27:56plus que 180 degrés.

00:27:59Et le troisième, c'est...

00:28:02Le troisième, c'est un plan tourné par moi

00:28:05avec le téléphone.

00:28:08Pour mon dernier film.

00:28:12Ce que je trouvais ici,

00:28:14moi, je n'ai pas écrit comme toi,

00:28:16donc je vais essayer.

00:28:19Ce que je vois, oui,

00:28:22que ça parle

00:28:24ça parle allemand,

00:28:26ça parle hébreu et ça parle français.

00:28:28C'est-à-dire que...

00:28:30Et c'est le début de trois films différents

00:28:32dans lesquels je prends la parole

00:28:34très peu dans mes films.

00:28:36Je prends la parole assez peu dans mes films.

00:28:39Et en fait,

00:28:41j'utilise ma biographie pour...

00:28:44En fait, pour la grammaire du film.

00:28:46Je ne veux pas raconter ma vie.

00:28:48Elle est là pour pouvoir construire

00:28:52la grammaire que je vais suivre.

00:28:56Mais quand même, je prends juste

00:28:58d'une langue à l'autre.

00:29:03Il y a mon nom.

00:29:05Et j'ai dit

00:29:07l'homme nouveau,

00:29:09phioniste, évidemment.

00:29:17Il est sorti...

00:29:19Il est sorti d'un livre.

00:29:21Il est sorti de la mer.

00:29:23Il est sorti de nulle part.

00:29:25Il est né du sable qui est là.

00:29:27Et ce qui est intéressant,

00:29:29c'est que le mot sable, ça veut dire aussi profane.

00:29:31Et dans mon film qui va venir après,

00:29:33Langue sacrée, langue parlée,

00:29:35ça s'appelle

00:29:37Les chancots de Svartkhol.

00:29:39Khol, c'est le sable.

00:29:41Le sable, elle est profane.

00:29:43Tel Aviv voulait être celle

00:29:45qui naît de nulle part.

00:29:48Et qu'on est un homme nouveau.

00:29:50Et mes parents

00:29:52ont choisi un nom nouveau.

00:29:54Un nom qui n'a rien à voir

00:29:56avec rien, qui est quelconque.

00:29:58C'est le nom d'une fleur

00:30:00qui fleurit

00:30:02à mon anniversaire.

00:30:06Mais dans le nom nourrit,

00:30:08il y a déjà que c'est pas

00:30:10un nom diasporique.

00:30:12C'est pas un nom exilique.

00:30:14C'est pas Foyguelet, par exemple.

00:30:16Surtout pas.

00:30:18Un nom yiddish comme ça, Foyguelet.

00:30:20Non, par exemple.

00:30:22Et c'est pas non plus

00:30:24Rachel

00:30:26ou Sarah.

00:30:28C'est pas un nom biblique.

00:30:30C'est un nom nouveau

00:30:32qui était créé.

00:30:34J'ai essayé de chercher, mais finalement,

00:30:36qui a inventé les noms.

00:30:38Les noms de la fleur, mais certainement

00:30:40pas longtemps avant.

00:30:42C'est une fleur rouge.

00:30:44Donc on va l'appeler

00:30:46Nour, qui veut dire

00:30:48en araméen et en ancien hébreu

00:30:50le feu, et en arabe

00:30:52la lumière.

00:30:54Sauf que

00:30:58mes parents ne le savaient pas

00:31:00et je crois que pas beaucoup de gens

00:31:02font attention, que c'est des noms

00:31:04qui existent déjà en arabe.

00:31:06C'est des noms courants en arabe.

00:31:08Nour et nourrit, c'est des noms courants en arabe.

00:31:10C'est

00:31:12refoulé.

00:31:16Et en même temps, le hasard fait,

00:31:18mes parents ne le savent pas,

00:31:20c'est la lumière.

00:31:22Est-ce que je ne suis pas

00:31:24devenu ce qu'on dit directeur de la lumière,

00:31:26chef opérateur,

00:31:28parce que j'avais la lumière dans mon nom, etc.

00:31:30Mais il se trouve

00:31:32qu'il y est.

00:31:36Donc il y a en fait pour moi

00:31:38tout, juste dans le nom,

00:31:40tout le sionisme est déjà là.

00:31:42L'attention

00:31:44avec

00:31:46on n'est pas les juifs exiliques,

00:31:48on n'est pas les juifs

00:31:50de la diaspora,

00:31:52on ne veut pas des saints.

00:31:54Déjà il y a une tension

00:31:56avec les autres noms, les autres langues.

00:31:58C'est-à-dire qu'on ne veut pas...

00:32:00Galoutine, comme tu m'expliquais l'autre jour.

00:32:02Galoutine, oui, on disait galoutine, ça c'était...

00:32:04Galouts, c'est l'exil.

00:32:06Mais on était, nous,

00:32:08les nouveaux, l'homme nouveau

00:32:10à Tel Aviv, des années où j'étais

00:32:12à l'école, très méprisants

00:32:14par rapport aux juifs qui venaient

00:32:16d'ailleurs. Nous, on était les vrais.

00:32:18Nous, on était là, nés là.

00:32:20Et on avait des noms nouveaux.

00:32:22Et on n'était pas...

00:32:24C'est-à-dire

00:32:26là, il se trouve que ce n'est pas un nom biblique,

00:32:28mais

00:32:30il y a quand même

00:32:32le truc, c'est un peu ancien,

00:32:34on va donner ce nom à la fleur.

00:32:36Rouge.

00:32:38Et c'est drôle, parce que je me rappelle maintenant

00:32:40que Nour était aussi une

00:32:42boîte d'allumettes

00:32:44qui était un peu rouge.

00:32:46Et la compagnie s'appelait Nour.

00:32:50Donc on était,

00:32:52il y a les rapports bibliques,

00:32:54et puis l'arabe,

00:32:56l'arabe,

00:32:58on ne voulait pas trop en savoir.

00:33:00Ni l'arabe,

00:33:02ni l'arabe de lieu,

00:33:04ni l'arabe de gens qui venaient des pays

00:33:06où on parlait l'arabe.

00:33:08C'est pour ça que

00:33:10il y a un film qui va venir plus tard,

00:33:12Des mots qui restent,

00:33:14où on découvre qu'il y a des judeux

00:33:16arabes, de toutes sortes,

00:33:18judeaux

00:33:20marocains, judeaux

00:33:22libyens, etc.

00:33:24C'est-à-dire que l'arabe était là,

00:33:26mais

00:33:28on ne voulait pas trop savoir.

00:33:30Je regrette toujours, je me dis que

00:33:32si on avait l'arabe depuis le début

00:33:34avec nous, une langue qui était

00:33:36sur place, je crois

00:33:38que ça aurait beaucoup enrichi l'hébreu

00:33:40parce que vraiment, vraiment,

00:33:42je ne sais pas qui vient de me dire là

00:33:44en sortant, quelqu'un qui parle l'arabe

00:33:46qui a dit, il y a plein de mots,

00:33:48il y a plein de mots que j'ai compris

00:33:50dans le film d'une langue à l'autre

00:33:52parce que c'est pareil comme l'arabe.

00:33:54Mais ça surtout, on ne voulait pas savoir.

00:33:57Je voudrais ajouter quelque chose

00:33:59parce que tu es passé vite sur Fathersland,

00:34:01sûrement parce que tu avais peur de répéter

00:34:03pour ceux qui viennent de voir le film.

00:34:05Mais d'abord, rappeler à quel point

00:34:07tu joues ton jeu sur les mots

00:34:09et sur les noms à la fois.

00:34:11Là, on le voit pour Fathersland,

00:34:13ton passage de Fathersland à Fathersland.

00:34:15Tu l'as sans doute expliqué tout à l'heure.

00:34:17Je vais faire l'effort.

00:34:19Reviens sur le chiffre 30 quand même.

00:34:21Oui, je vais m'excuser.

00:34:23Bon, le chiffre en général,

00:34:26il se trouve que quand on fait comme ça,

00:34:28de livres et de rétrospectives à la fois,

00:34:32ceux qui ont écouté Talmudic

00:34:34vont m'excuser,

00:34:36ceux qui ont vu le film-là vont m'excuser.

00:34:38D'ailleurs, Talmudic,

00:34:40j'ai beaucoup aimé échanger avec...

00:34:42Oui, c'était magnifique cet entretien.

00:34:44Donc, j'invite les gens quand même

00:34:46de l'écouter parce que je ne vais pas...

00:34:48Ce n'est pas une raison pour ne pas parler aujourd'hui.

00:34:50C'est ça.

00:34:52Le chiffre 30.

00:34:54Bon, la...

00:34:58la directrice du programme

00:35:00qui m'a proposé Arte Allemagne,

00:35:02j'étais en train de préparer

00:35:04d'une langue à l'autre quand elle m'a proposé

00:35:06des...

00:35:08Il y avait 30 minutes qui ont resté

00:35:10dans une émission sur le deuil.

00:35:12Alors elle dit, tu veux bien faire

00:35:1430 minutes sur le deuil ?

00:35:16Déjà, 30,

00:35:18c'est vraiment le chiffre

00:35:20dans la tradition juive

00:35:22donc ça s'appelle

00:35:24shloshim, ça veut dire 30

00:35:26et on dit le shloshim, c'est-à-dire

00:35:28les 30, c'est les 30 jours du deuil.

00:35:30C'est marqué.

00:35:32Donc elle me demande juste 30.

00:35:34Je regarde d'où

00:35:36à où je veux aller.

00:35:38Je décide Westkreuz et Ostkreuz,

00:35:40deux stations

00:35:42à cause de leur nom à Berlin.

00:35:44Dans la ROR,

00:35:46la S-Bahn.

00:35:48Je fais le voyage une fois,

00:35:5030 minutes. Je me dis, parfait.

00:35:52Il y a 30, 30.

00:35:56Ce n'est pas que les chiffres 30

00:35:58parce qu'il y a l'autre chiffre.

00:36:00Il y a beaucoup d'autres chiffres.

00:36:02Mais là même, je me dis,

00:36:04on va les tourner le 12 novembre

00:36:06qui est l'anniversaire

00:36:08de mon père.

00:36:10Parce que Vaterland, c'est le pays du père.

00:36:12Donc je vais les tourner

00:36:14à l'anniversaire de mon père.

00:36:16La réponse de Arte

00:36:18vient le 9 novembre

00:36:20qui est un vendredi.

00:36:22Le 9 novembre,

00:36:24vous savez ce que c'est.

00:36:26C'est la nuit du cristal

00:36:28sur laquelle

00:36:30s'égriffe

00:36:32des années plus tard

00:36:34la réunion de l'Allemagne

00:36:36si je ne me trompe pas.

00:36:38Je ne crois pas que cela tombe de mur

00:36:40la réunion d'Allemagne.

00:36:42Je crois que c'est fêté.

00:36:44Je reçois la réponse le 9.

00:36:46Je ne peux pas tourner

00:36:48trop tôt le 12.

00:36:50Trois jours plus tard, je tourne le 21.

00:36:52Je décide

00:36:54que je vais tourner le 21.

00:36:56C'est juste dire que je joue comme ça

00:36:58avec les chiffres.

00:37:00Je joue tout au long

00:37:02avec les mots

00:37:04qui me font

00:37:06décider des images.

00:37:10C'est-à-dire que ces chiffres-là

00:37:12m'ont permis de faire

00:37:14des choses.

00:37:18J'aurais voulu

00:37:20lire en allemand

00:37:24la phrase de Freud

00:37:26mais on peut aussi la lire.

00:37:28Je crois que je la connais par coeur.

00:37:30Les deuils

00:37:32et la réaction

00:37:34de la perte d'une personne aimée

00:37:36ou une abstraction

00:37:38qui vient à sa place

00:37:40comme

00:37:42la patrie,

00:37:44la liberté, l'idéal, etc.

00:37:48J'aimais

00:37:50énormément l'etc.

00:37:52Mais j'étais très...

00:37:54C'est très freudien.

00:37:56Mais Vaterlande,

00:37:58il commence par Vaterlande.

00:38:00J'étais presque choquée

00:38:02que Freud commence avec la patrie.

00:38:04J'ai dit

00:38:06deux patries

00:38:08on va l'appeler

00:38:10le pays du père.

00:38:12J'ai mis un S

00:38:14et je parle avec

00:38:16les amis allemands.

00:38:18Vraiment les amis allemands.

00:38:20C'est ceux qui m'ont

00:38:22fait découvrir

00:38:24qu'est-ce que c'est un juif allemand.

00:38:26Avant en Israël

00:38:28on se moquait de juifs allemands

00:38:30parce qu'ils n'ont jamais appris à bien parler l'hébreu.

00:38:32Et s'ils l'ont parlé bien

00:38:34ils avaient un accent

00:38:36vraiment très très fort.

00:38:38On se moquait toujours d'eux.

00:38:40On les appelait yèques.

00:38:44Mais ces amis allemands

00:38:46m'ont vraiment appris.

00:38:48C'était mon premier rapport.

00:38:50Qu'est-ce que c'est les juifs allemands.

00:38:52Et j'avais vraiment...

00:38:54J'ai compris que je fais partie.

00:38:56J'ai commencé à comprendre

00:38:58que peut-être je fais partie

00:39:00de ceux-là et pas forcément

00:39:02des hommes nouveaux.

00:39:04Tu dis quand même que Berlin

00:39:06est étranger au début du film.

00:39:08Berlin est étranger, oui.

00:39:10Mais quand même je parle en allemand.

00:39:12Et je revendique

00:39:14contrairement à ce qui s'est passé en Israël

00:39:16où on était interdit de parler

00:39:18toutes les langues, il ne fallait parler

00:39:20que l'hébreu.

00:39:22Il y avait même un moment où on tapait les gens

00:39:24quand ils parlaient autre chose.

00:39:26Surtout les idiches.

00:39:28Je me suis dit

00:39:30je m'approprie

00:39:32je réapproprie la langue

00:39:34et c'est la mienne.

00:39:36C'est-à-dire que c'est la mienne

00:39:38c'est surtout celle de mes parents.

00:39:40C'est pas seulement qu'on a

00:39:42saché les juifs, on attend maintenant

00:39:44que leur langue

00:39:46ne doit pas être la leur.

00:39:48C'est ce qu'on nous a appris.

00:39:50Beaucoup de gens ont fait l'effort

00:39:52de parler l'hébreu

00:39:54mais très très mal

00:39:56pas seulement avec un accent

00:39:58mais une langue qui était beaucoup plus pauvre.

00:40:00C'est-à-dire qu'autour de moi, les gens

00:40:02parlaient avec

00:40:04une langue pauvre

00:40:06tandis qu'ils avaient leur langue.

00:40:08C'est normal qu'on apprend

00:40:10les pays mais c'était quand même

00:40:12effarant. Je ne sais pas pourquoi

00:40:14les procès à Eichmann mais revient là

00:40:16qu'en 61, je me rappelle

00:40:18ce qui m'a choqué

00:40:20c'est-à-dire il y avait, je ne sais pas

00:40:22le procureur général, comment il s'appelait ?

00:40:24Oui, le procureur général.

00:40:26Hausner, Hausner.

00:40:28Oui, c'est ça Hausner.

00:40:30Qu'il criait sur

00:40:32celui qui s'est appelé Katsetnik

00:40:34c'est-à-dire 4-7.

00:40:364-7 c'est le compte de concentration.

00:40:38Il s'appelait Katsetnik et il lui a dit

00:40:40qu'il voulait témoigner en Yiddish.

00:40:42C'était salant comment on demande à des gens de témoigner

00:40:44on ne s'était pas tellement loin.

00:40:46Il a dit en hébreu,

00:40:48en hébreu, il ne faut pas

00:40:50c'est-à-dire que c'est un procès

00:40:52c'était du théâtre

00:40:54c'était un procès théâtral

00:40:56tu parles hébreu. Mais ce qui est intéressant

00:40:58que je trouve le mieux

00:41:00c'était qu'Eichmann

00:41:02il parlait en allemand

00:41:04il traînait, il traînait

00:41:06après il y avait les traducteurs

00:41:08après il y avait d'autres traducteurs

00:41:10et les juges qui avaient à un moment donné

00:41:12et ces juges qui étaient tous

00:41:14de juif allemand

00:41:16ils commençaient à lui parler directement

00:41:18et tout d'un coup

00:41:20ce procès qui était prévu

00:41:22de passer en hébreu

00:41:24c'était vraiment

00:41:26on va montrer au monde entier

00:41:28c'était très bien

00:41:30mais on va penser que tout d'un coup

00:41:32ça se passait entre Eichmann

00:41:34et les juges en allemand

00:41:36tout, tout, tout

00:41:38ils ont cassé

00:41:40tout, tout, tout cassé

00:41:42et je pense par rapport à ça

00:41:44je reviens aussi à cette histoire de l'hébreu

00:41:46que Ben Gurion, juste après la guerre

00:41:48quand il était dans un camp

00:41:50de

00:41:52displaced people, ça s'appelle

00:41:54tout le monde

00:41:56personne ne parlait hébreu là-dedans

00:41:58il parlait la plupart yiddish

00:42:00qui était la langue maternelle de Ben Gurion

00:42:02non, il a parlé l'hébreu

00:42:04il savait qu'ils ne vont pas

00:42:06comprendre, mais pour lui c'était

00:42:08important les signifiants hébraïques

00:42:10d'ailleurs ça me fait penser

00:42:12que moi je viens de signer

00:42:14tous les livres en hébreu

00:42:16et que je ferais le même acte

00:42:18de Ben Gurion

00:42:20comme ça au moins

00:42:22une madame qui est là, elle m'a dit

00:42:24je ne vais pas comprendre

00:42:26ça ne fait rien, tu vas avoir les lettres hébraïques

00:42:28donc en fait, je ne suis pas mieux

00:42:30que ce que je suis en train de...

00:42:32on parlera des lettres hébraïques tout à l'heure

00:42:34parce que c'est une grosse chose

00:42:36je voudrais juste te dire un petit mot

00:42:38sur ta manière de coder

00:42:40de chiffrer, de coder, de t'amuser

00:42:42avec les dates

00:42:44les chiffres, les noms, les mots

00:42:46justement tu t'amuses

00:42:48avec une matière qui est presque inquiétante

00:42:50on le voit bien dans Fathersland

00:42:52c'est-à-dire que ce jeu

00:42:54sur les chiffres qui est presque

00:42:56secret en fait

00:42:58c'est un peu une manière d'exorciser

00:43:00qu'est-ce qu'il y a d'angoissant quand même

00:43:02dans ce Berlin là

00:43:04où ton père

00:43:06évidemment n'est plus

00:43:08c'est quelque chose comme un deuil

00:43:10mais en jouant en fait avec tout ça

00:43:12tu crois et tu ne crois pas à la fois

00:43:14de même que tu fais de Nourrit un signe du destin

00:43:16et moi je crois vraiment que tu crois au signe du destin

00:43:18comme si tu croyais au signe du destin

00:43:20elle le fait même dans la vie courante

00:43:22quand je lui ai dit que j'étais née un 12 novembre moi aussi

00:43:24comme son père, en général les gens disent

00:43:26ah oui marrant, elle dit quoi ?

00:43:28il se passe vraiment

00:43:30quelque chose d'important

00:43:32elle est dans un truc avec la croyance

00:43:34et le rite

00:43:36l'hasard, l'hasard

00:43:38non mais c'est au fait

00:43:40c'est ça qu'il y a

00:43:42on met la lumière

00:43:44sur le hasard

00:43:46il n'y a pas de signification

00:43:48tu en fais quand même quelque chose

00:43:50dans ta rythmique, ton code

00:43:52tu chiffres quand même des films

00:43:54tu le fais avec les lettres aussi

00:43:56je voudrais juste dire une

00:43:58parce que j'allais dire

00:44:00c'est que Hans Tischler

00:44:02dans le film il dit

00:44:04il s'appelle Hans comme mon père

00:44:06je m'excuse

00:44:08incroyable n'est-ce pas

00:44:10le nom le plus courant

00:44:12les petits Hans

00:44:14on connait

00:44:16il dit et ça je trouvais

00:44:18vraiment fort qu'à Berlin

00:44:20les fantômes sont plus forts qu'ailleurs

00:44:22c'est à dire les fantômes on les voit

00:44:24ils sont là plus qu'ailleurs

00:44:26et je crois que

00:44:28je crois que c'est vraiment ça

00:44:30à Berlin, moi maintenant

00:44:32ils sont en train de tout

00:44:34mettre la

00:44:36la couleur dessus

00:44:38effacer, effacer

00:44:40on dit qu'on fait du neuf et on efface

00:44:42j'aurais voulu te faire parler du bord

00:44:44de la mer aussi, du bord

00:44:46et puis de la mer aussi

00:44:48mais on n'aura peut-être pas le temps de tout faire

00:44:50le bord, peut-être tu peux revenir sur cette question

00:44:52du bord, du seuil

00:44:54oui le bord

00:44:56la frontière

00:44:58tout ça, oui

00:45:00le mot hébreu safa

00:45:02le mot hébreu safa

00:45:04que je t'avais montré

00:45:06qu'il contient les mots

00:45:08P dedans qui veut dire la bouche

00:45:10si on l'écrit on le voit

00:45:14les lèvres

00:45:16je suis en train de

00:45:18tu vois

00:45:20si on fait ça

00:45:22si j'arrivais à faire

00:45:24en carré ça ferait une fenêtre

00:45:28je sais

00:45:30comme ça

00:45:32mais bon à faire

00:45:34les lettres hébraïques en carré

00:45:36mais aussi c'est vraiment l'extérieur intérieur

00:45:38et je pense

00:45:40qu'il y a souvent souvent les fenêtres

00:45:42dans mes films

00:45:44mais c'est très différent

00:45:46parfois je mets le point

00:45:48dehors, le point

00:45:50vraiment physiquement, le point

00:45:52où c'est net, dehors

00:45:54parfois dedans et parfois sur la frontière

00:45:56qui est le bord de la fenêtre

00:45:58les bords qui se disent safa

00:46:00et on dit safatiam

00:46:02c'est le bord de la mer, je commence

00:46:04d'une langue à l'autre le bord de la mer

00:46:06et après il y a quelqu'un

00:46:08qui est sur le seuil

00:46:10qui s'est dit saf

00:46:12vous attendez

00:46:14c'est le même

00:46:16et on va retrouver la mer dans

00:46:18le film Yiddish

00:46:20il y a un autre film

00:46:22tout à l'heure quelqu'un m'a dit

00:46:24qu'il y a deux films qui finissent

00:46:26avec la mort de ma mère

00:46:28il y a deux films qui commencent

00:46:30avec la mer

00:46:32de Tel Aviv

00:46:34et il y a un rêve que je raconte

00:46:36dans Poétique des cerveaux

00:46:38il faut passer par le français

00:46:40pour comprendre les rêves

00:46:42parce que c'est mère, mère, etc

00:46:44les mots mère est là

00:46:46Yim, Emma

00:46:48qui passent par le mot français

00:46:50c'est toutes ces combinaisons

00:46:52elle fait des combinaisons

00:46:54où elle se sert

00:46:56de plusieurs langues à la fois

00:46:58de même que tu racontes dans un de tes entretiens

00:47:00que tu rêves en plusieurs langues

00:47:02qui ne sont pas linguistiques

00:47:04qui se révèlent dans le rêve

00:47:06tu t'es réveillée en riant

00:47:08de tes propres jeux de mots

00:47:10parce que c'est marrant

00:47:12que dans le rêve tu te dis

00:47:14j'ai jamais pensé à ça

00:47:16et le rêve te révèle la chose

00:47:18c'est un signe du destin

00:47:20ce que je veux dire

00:47:22quand je dis qu'il y a le point

00:47:24sur la fenêtre pas toujours au même endroit

00:47:26quand je pense à la mer

00:47:28il y a deux films qui commencent

00:47:30c'est très évident

00:47:32que ça commence

00:47:34j'ai beaucoup cherché les deux palmiers

00:47:36un comme ça

00:47:38et l'autre comme ça

00:47:40et entre les deux

00:47:42c'est ce qui était vraiment important

00:47:44la barre culturelle

00:47:46mais

00:47:48dans l'autre film, Yiddish

00:47:50que je commence, la mer

00:47:52c'est par rapport à un poème

00:47:54qui va

00:47:56plus tard

00:47:58mais qu'on lira tout à l'heure

00:48:00les poèmes

00:48:02on comprend pourquoi je commence à la mer

00:48:04et que ça n'a rien à voir

00:48:06avec la mer de Tel Aviv

00:48:08c'est juste que la mer de Tel Aviv

00:48:10était sous la main

00:48:12alors tu dis que tu penses par mots

00:48:14que tu remontes des phrases

00:48:16aux mots et puis des mots

00:48:18aux lettres, tu aimes les lettres

00:48:20tu aimes les alphabets

00:48:22les lettres

00:48:24et voilà

00:48:26je voulais dire un mot

00:48:28mais on n'aura pas beaucoup le temps je crois

00:48:30du film que tu as fait au même moment

00:48:32que Misafal et Safar

00:48:34un petit film que j'aime beaucoup

00:48:36qui est l'alphabet brûlé-brouhabré

00:48:38on a oublié la lettre R

00:48:40de Troisième Traveling

00:48:42non tu en as parlé tout à l'heure

00:48:44tu veux parler de la lettre R

00:48:46non non

00:48:48c'est à dire que je voulais dire que mon nom

00:48:50nourrit il est là

00:48:52il est très dans la politique

00:48:54et dans l'autre il est complètement

00:48:56dans les rapports

00:48:58couleur-son

00:49:00dans le jeu d'enfance

00:49:02dans les rapports couleur-son

00:49:04et qui est le cinéma

00:49:06par excellence

00:49:08je veux dire couleur-son

00:49:10pardon

00:49:12ce que je voulais juste dire

00:49:14pour ceux qui n'ont pas vu l'alphabet brûlé-brouhabré

00:49:16j'ai pas fait exprès

00:49:18alors

00:49:20c'est vrai j'ai pas fait exprès

00:49:22comment j'aurais pu

00:49:24l'alphabet brûlé-brouhabré

00:49:26j'adore ce film

00:49:28ça montre

00:49:30brûlé-brouhabré qui est un ivoirien

00:49:32de la culture

00:49:34qui invente une écriture pictogrammatique

00:49:36sous le coup d'une illumination

00:49:38qui a eu lieu le 11 mars

00:49:4048

00:49:42elle est née le 11 mars 45

00:49:44vous y voyez un peu le truc

00:49:46elle le dit pas dans le film

00:49:48c'est la raison profonde

00:49:50pour laquelle elle a voulu faire ce film

00:49:52sur brûlé-brouhabré

00:49:54et le brûlé-brouhabré il a inventé

00:49:56une véritable cosmogonie absolument géniale

00:49:58en peignant des petits cartons

00:50:00des signes dont il a dit que certains

00:50:02lui étaient venus en rêve

00:50:04il l'a fait en secret

00:50:06il y a beaucoup de choses qui font écho

00:50:08avec ce que tu fais

00:50:10tu as un rapport fort non seulement

00:50:12à l'Afrique mais aux alphabets

00:50:14de manière générale

00:50:16à leur force visuelle bien sûr

00:50:18et puis tu mets en scène dans tes films

00:50:20la beauté des lettres hébraïques

00:50:22où les lettres sont un peu

00:50:24comme des fenêtres d'où regarder

00:50:26ce sont des fenêtres sur un passé lointain

00:50:28sur une interprétation

00:50:30à l'infini

00:50:32et on va passer de là

00:50:34au troisième montage

00:50:36d'extrait

00:50:48Le Rabbi Bizna Barzavda a dit

00:50:50Le Rabbi Akiva a dit

00:50:52Le Rabbi Panda a dit

00:50:54Le Rabbi Nachoum a dit

00:50:56Le Rabbi Biraym a dit

00:50:58de n'importe qui

00:51:00et nous avons dit

00:51:02Le Rabbi Bena'a

00:51:0424 portes de rêve

00:51:06étaient à Jérusalem

00:51:08une fois j'ai rêvé

00:51:10et j'y suis allé

00:51:12et ce qui m'a sauvé

00:51:14n'a pas sauvé

00:51:16Je pense que

00:51:18les différentes personnes

00:51:20que nous avons vues

00:51:22et entendues

00:51:24nous ont raconté

00:51:26des histoires

00:51:28complètement différentes

00:51:30venues

00:51:32d'endroits

00:51:34complètement différents

00:51:36et il me semble

00:51:38qu'ils nous racontaient

00:51:40tous la même histoire

00:51:42Il faut traduire

00:51:44ce que dit

00:51:46cette vraie thèse

00:51:48absolument géniale

00:51:50qui dit quelque chose

00:51:52d'infiniment

00:51:54incroyable

00:51:56qu'il y a un point

00:51:58de non présence

00:52:00de non

00:52:02il y a un point

00:52:04d'absence

00:52:06de nullité

00:52:08dans le rapport des langues

00:52:10et que c'est ce point là

00:52:12qui l'intéresse

00:52:14et je trouve que ça

00:52:16c'est quelque chose

00:52:18qui est

00:52:20beaucoup plus fondamental

00:52:22pour notre réflexion

00:52:24dans le rapport des langues

00:52:26et que

00:52:28c'est ce qui fait

00:52:30la grandeur du film

00:52:36Je suis heureuse

00:52:38d'avoir pu

00:52:40connaître mon hébreu

00:52:42grâce à mon grand-père

00:52:44J'ai appris le hébreu

00:52:46qui transmet

00:52:48l'univers du zohar

00:52:50de la mystique juive

00:52:52sans les significations

00:52:54du zionisme

00:52:56Mes parents

00:52:58n'ont parlé que l'arabe

00:53:00c'est-à-dire que c'était

00:53:02la langue des grands

00:53:04la langue qu'ils gardent pour eux-mêmes

00:53:06la langue qui n'est pas

00:53:08opposée à nous

00:53:10Pour moi, l'arabe

00:53:12est une langue

00:53:14que j'utilise

00:53:16car c'est une langue

00:53:18que j'entends

00:53:20ce n'est pas vraiment

00:53:22la langue que je parle

00:53:24C'est deux langues

00:53:26l'arabe et l'hébreu

00:53:28que j'ai créé

00:53:30Je parle aussi de mon hébreu

00:53:32et de mon arabe

00:53:34qui sont les liens

00:53:36entre l'Aivarone

00:53:38l'area de la sécheresse

00:53:40l'area de la détente

00:54:04C'est comme ça que j'ai découvert

00:54:06que je parlais

00:54:08le hébreu, le romand,

00:54:10le hongrois

00:54:12et le allemand

00:54:14J'ai parlé toutes les langues

00:54:16Mais pour moi, en tant qu'enfant

00:54:18le plus important était

00:54:20d'être comme tout le monde

00:54:22J'ai voulu parler l'hébreu

00:54:24comme tous les enfants

00:54:26Je me souviens

00:54:28comment j'étais

00:54:30face à l'arabe

00:54:32J'ai été face à l'arabe

00:54:34pendant des heures

00:54:36et j'étais habituée

00:54:38à transformer mon accent

00:54:40en arabe

00:54:42car c'était très important pour moi

00:54:44d'être comme tout le monde

00:54:48En général, je pense que

00:54:50le fait que je sois une chanteuse

00:54:52a beaucoup d'importance

00:54:54à cette époque

00:54:56car je n'ai pas parlé l'hébreu

00:54:58de manière mécanique

00:55:00Je me suis retrouvée

00:55:02toute la journée

00:55:04dans cet espace

00:55:06entre les langues

00:55:08dans l'espace

00:55:10de la recherche

00:55:12de la façon

00:55:14de m'adapter

00:55:16à l'épreuve de l'hébreu

00:55:30J'avais une langue

00:55:32qui s'appelait M

00:55:34et une autre qui s'appelait A

00:55:36l'amour grand, l'amour saint

00:55:38que nous avons appris dans le ciel

00:55:40La langue M, c'était ma langue naturelle

00:55:42une langue émue

00:55:44que j'ai sauvée

00:55:46sans aucun effort

00:55:48et qui a toujours été

00:55:50dans mon service d'amour

00:55:52et de mon service d'indépendance

00:55:54en tant qu'expression

00:55:56la langue de l'amour

00:55:58C'était comme un enfant qui s'étouffe

00:56:00et toute l'expérience

00:56:02orale de cette langue

00:56:04l'expérience liée à l'oreille

00:56:06était complètement différente

00:56:08car les écrivains de la théorie

00:56:10apprennent à s'étouffer

00:56:12comme ils apprennent à prendre

00:56:14ces verbes saints

00:56:16à l'oreille et à les sortir de l'oreille

00:56:18ces verbes qui ont un goût

00:56:20qui ressemblent à des citations

00:56:22qui doivent être répétées

00:56:24sans changement

00:56:26et qui doivent être clarifiées

00:56:28la grande haine qu'il y a dans l'écrivain

00:56:30mais aussi le danger qu'il y a

00:56:32c'est exactement ce moment

00:56:34où les doigts de l'oreille

00:56:36s'étouffent

00:56:38et ce qu'il fallait faire

00:56:40c'est juste entrer dans l'oreille

00:56:42et sortir après

00:56:44la langue des paroles devient une politique

00:56:46le Tanakh devient une politique

00:56:48et la politique devient un Tanakh

00:56:50c'est la grande peur et la grande beauté

00:56:56petit à petit, nous avons appris l'hébreu

00:56:58c'était un grand effort

00:57:00d'entrer dans la langue

00:57:02qui est tranchée

00:57:04d'une manière différente

00:57:06des langues que je connaissais

00:57:08elle ressemble plus

00:57:10à des commandements

00:57:12aller, dormir, s'organiser

00:57:14elle ressemble

00:57:16comme si elle s'éloignait

00:57:18de l'océan et de la mer

00:57:20qui nous ont accompagnés

00:57:22dans l'atelier

00:57:24ce n'est pas une langue

00:57:26qui s'éloigne de toi

00:57:28mais comme si

00:57:30elle s'éloignait de toi

00:57:34c'est-à-dire que l'hébreu

00:57:36c'est la langue de ma mère

00:57:38je n'ai aucune autre langue

00:57:40je rêve d'elle, je l'écris

00:57:42et ainsi de suite

00:57:44jusqu'à ce jour, j'ai peur

00:57:46que cette langue m'éloigne

00:57:48chaque fois que je me réveille

00:57:50c'est comme si

00:57:52j'avais perdu

00:57:54cette langue

00:57:56je veux l'avoir

00:57:58mais je n'y peux plus

00:58:22J'ai vu de l'avantage dans la compréhension de la langue hebréenne,

00:58:25beaucoup plus qu'un partenaire jéhoudien qui ne me connaît presque rien

00:58:28à cause de la faillite de sa compréhension de la langue.

00:58:31Et c'est quelque chose que je suis fière de.

00:58:34Je suis fière d'un homme qui vit ici depuis de nombreuses années,

00:58:37dans le Méditerranéen, et qui n'a pas d'espoir,

00:58:40qui n'a pas d'espoir de connaître la culture de l'autre,

00:58:43sauf peut-être par rapport à l'alimentation.

00:58:46Il écoute un peu de musique, et c'est aussi un stéréotype,

00:58:49ce n'est pas la musique que j'écoute.

00:59:19Alors, on va essayer d'aller à l'essentiel.

00:59:22Je voudrais, d'abord, il y a beaucoup de choses à dire.

00:59:25Il y a un lien, d'abord, entre chacun de ces films,

00:59:28ils se font signe les uns les autres,

00:59:31la totalité se modifie à chaque fois,

00:59:34de manière presque organique, à chaque nouveau film.

00:59:37Et ça correspond à une vision aussi que tu as de l'œuvre

00:59:40comme entretien infini,

00:59:43de l'œuvre qui doit elle-même se renouveler,

00:59:46sur un mode midrashique, dans un commentaire infini.

00:59:49Mais je voudrais surtout pouvoir revenir

00:59:52sur cette histoire d'entre-langues,

00:59:55le point d'oubli qui est si fondamental.

00:59:58C'est vraiment ça l'essentiel.

01:00:01Et tu rapproches ça...

01:00:04Elle parle de point aveugle.

01:00:07Elle dit point d'amnésie.

01:00:10Mais aveugle, parce que j'ai dit juste en hébreu,

01:00:13et arviouti et ivriouti,

01:00:16l'hébreu et l'arabe,

01:00:19ne koudat ivaron, vous attendez?

01:00:22Ne koudat ivaron, c'est point aveugle.

01:00:25Donc c'est les points aveugles, d'amnésie, etc.

01:00:28Et Agui Michon aussi parle entre les deux langues.

01:00:31Elle parle de lieu du malaise,

01:00:34c'est un lieu ambigu.

01:00:37Oui, mais c'est entre les langues quand même.

01:00:40Je ne peux pas ne pas penser à Benyamin.

01:00:43Je voulais vous en lire un petit bout,

01:00:46mais on n'a pas trop le temps.

01:00:49Benyamin, dans ce texte extraordinaire de 1923

01:00:52qui s'appelle La tâche du traducteur,

01:00:55parle d'un langage pur qui est...

01:00:58En faisant passer d'une langue à une autre,

01:01:01une traduction ne fait pas seulement passer

01:01:04d'une langue à une autre,

01:01:07c'est un autre stade, un autre niveau plus élevé,

01:01:10qui est d'ordre métaphysique, dit-il,

01:01:13et qui désigne ce qu'il appelle le lieu promis et interdit

01:01:16où les langues se réuniront et s'accompliront.

01:01:19Il y a cette vision messianique,

01:01:22il parle même des langues comme de Tesson d'un vase brisé,

01:01:25mais qui évidemment est une vision religieuse,

01:01:28d'inspiration religieuse du moins,

01:01:31mais c'est ça qui est très frappant,

01:01:34c'est ce que j'appelais les illuminés,

01:01:37ceux qui ont cette foi, qui croient à ce lieu promis et interdit,

01:01:40à la fois parce qu'ils y vouent leur vie littéralement.

01:01:43C'est ce point aveugle, pour moi c'est la même chose.

01:01:46C'est un point qui est plein,

01:01:49qui n'est pas seulement le vide.

01:01:52Et toutes les langues qui n'y sont pas une et l'autre.

01:01:55C'est ça, c'est la complémentarité des langues,

01:01:58comme il dit, le grand désir, une grande traduction

01:02:01le grand désir d'une complémentarité des langues.

01:02:04Il s'agit d'atteindre un désir.

01:02:07Tu relis ça, tu dis que tu préfères

01:02:10le langage pur, c'est un langage très métaphysique,

01:02:13tu préfères le tout monde de Glissant,

01:02:16qui lui aussi est toute proposition poétique.

01:02:19J'ai l'impression qu'il y a quelque chose qui est très proche,

01:02:22si on veut, entre pour moi et Pédaillat,

01:02:25comme cet endroit.

01:02:28Il est tombé raide amoureux d'Aviva Pédaillat,

01:02:31qui est absolument génial dans l'ensemble,

01:02:34parce qu'elle apparaît plusieurs fois dans tes films.

01:02:37La seule qui apparaît dans trois.

01:02:40Elle est d'ailleurs assez messianique aussi explicitement.

01:02:43Elle dit que le Messie se trouve dans la petite lettre M,

01:02:46que c'est une lettre carrée.

01:02:49Et en fait le Messie est là, il attend la fin,

01:02:52et évidemment il ne va jamais sortir.

01:02:55Je voulais revenir sur l'hébreu quand même.

01:02:58Ce cas particulier de l'hébreu, même si toutes les langues

01:03:01font signe vers un entre-langues.

01:03:04Il y a une histoire particulière avec l'hébreu qui est ressuscité

01:03:07et d'une langue sacrée est devenue langue parlée,

01:03:10d'une langue sacrée est devenue langue politique.

01:03:13Roy Greenwald résume un petit peu les choses en disant

01:03:16que c'est la beauté et le danger.

01:03:19Il y a tout le danger du sionisme qui est compris dans ce danger-là.

01:03:23Et on sait à quel point le messianisme fait des dégâts en ce moment-même.

01:03:27Confusion de langues.

01:03:30Il parle de bruit.

01:03:33Je trouve ça extraordinaire d'ailleurs cette formule dans la bouche.

01:03:36Confusion de niveau de langue.

01:03:39Je voudrais quand même dire un mot là-dessus.

01:03:42Quand on discute de ça, à chaque fois qu'on a préparé cette séance,

01:03:45on était accablés de désespoir en pensant à Gaza.

01:03:48On ne peut pas ne pas penser à ça.

01:03:51Je voudrais rappeler cette discussion de la conversation

01:03:54qui m'a beaucoup frappée où tu étais très abattu

01:03:57et tu t'inquiétais de la transmission du judaïsme

01:04:00dans ce temps de catastrophe du judaïsme

01:04:03et tu disais que tu voyais un avenir sombre

01:04:06où il resterait d'un côté un État,

01:04:09de l'autre une religion et c'est tout.

01:04:12Et qu'au fond la transmission n'existerait plus

01:04:15de ce qui toi t'est cher.

01:04:18Tu faisais tout au contraire.

01:04:21C'est quand même la dimension historique, culturelle, artistique, poétique

01:04:24qui existe. Par quoi la judaïté est si forte

01:04:27et si riche.

01:04:30Et à ce moment-là de désespoir, tu semblais ne même plus croire

01:04:33à la force de tes propres films.

01:04:36Alors qu'à chaque fois qu'on regarde tes films,

01:04:39on est arraché salutairement à cette sphère

01:04:42de la politique qui a un usage meurtrier du langage

01:04:47ou purement conflictuel du langage.

01:04:50Même quand on te fait parler en chantant une palestinienne d'Israël,

01:04:53tu ramènes dans cette sphère poétique

01:04:56où tout est plus humain.

01:04:59Elle est en colère, il y a bien quelque chose de politique

01:05:02que tu dis dans ce film.

01:05:05Mais quand tu la fais chanter, il y a quelque chose d'émotionnel

01:05:08qui fait qu'une communication se fait dans une sphère plus humaine.

01:05:11Et ça, ça marche par l'art.

01:05:14Je vais vite te dire, continue à faire tes films.

01:05:17Et puis c'est tout, je crois qu'il n'y a rien d'autre.

01:05:20Et puis tes films, et puis la poésie, et puis lire la poésie.

01:05:23Et puis maintenant, on va parler de la poésie yiddish.

01:05:26C'est ça.

01:05:29Parce que ça, c'est justement l'autre possibilité.

01:05:32Elle m'a dit, comme réponse politique, il y a la poésie yiddish.

01:05:35J'ai trouvé ça génial.

01:05:38Entre les deux guerres dans lesquelles les gens ont écrit...

01:05:42C'est-à-dire que c'est des gens,

01:05:45des jeunes gens aujourd'hui,

01:05:48qui sont tombés amoureux de cette poésie yiddish

01:05:51entre les deux guerres.

01:05:54Une poésie complètement avant-gardiste, qu'on ne connaît pas du tout.

01:05:57Et dans laquelle le mot juif n'apparaît jamais.

01:06:00De toute façon, dans ce que je choisis de dire,

01:06:04mais c'est des gens qui savent

01:06:07et qui revendiquent d'être juifs

01:06:10sans revendiquer ni une religion ni un état.

01:06:13Et ils revendiquent cette poésie extraordinaire.

01:06:16Et c'est des jeunes gens.

01:06:19Et chacun choisit un poète

01:06:22de qui il parle.

01:06:25Moi, je dis toujours que la poésie, c'est une forme de résistance.

01:06:28Et je pensais pouvoir faire un film entier

01:06:31sur la poésie déjà.

01:06:34Et la poésie yiddish,

01:06:37pour moi, c'est ça faire la résistance.

01:06:40Et Chahar, qui doit être dans les parages,

01:06:43aurait pu être un des personnages du film.

01:06:46Comme tu n'étais pas dans le film,

01:06:49il va nous lire justement le poème de Halperin

01:06:52à cause duquel il y a la mer

01:06:55dans le début du film yiddish.

01:06:58Et on a proposé que toi, tu lis d'abord le français.

01:07:01Je lis d'abord le français.

01:07:04Et après, on va faire comme ça.

01:07:07Et après, Chahar va lire les deux.

01:07:10Et après, tu vas traduire l'un de l'autre.

01:07:13Donc, un poème de Moshe Leib Halperin,

01:07:16qui était écrivain et peintre à la fois,

01:07:19qui était né en Galicie dans les années 1880,

01:07:22qui est passé par Vienne, qui a fait ses débuts poétiques en allemand.

01:07:25Et puis, il est allé aux Etats-Unis en 1908 à l'âge de 22 ans.

01:07:28Et il a rencontré le groupe des Junge en Amérique

01:07:32qui voulait écrire sur le monde, la rue, la vie d'aujourd'hui,

01:07:35mais dans une poésie en vers, en se réclamant de l'art pour l'art.

01:07:38C'était un poète qui s'est un petit peu isolé de ce groupe-là,

01:07:41qui était assez solitaire,

01:07:44qui a vécu dans une grande précarité.

01:07:47Mais voilà, je vais vous lire le poème.

01:07:50Chahar, il faut que tu dises toi-même un mot pour te présenter.

01:07:53Je m'appelle Chahar Feinberg.

01:07:56Je vis ici depuis un moment.

01:07:59Je travaille avec Nourit depuis 2015.

01:08:02J'ai commencé à travailler et puis à devenir ami,

01:08:05parce que c'est plus simple que travailler avec Nourit.

01:08:08Tu es né à Jérusalem et tu es à Paris depuis une dizaine d'années, c'est ça?

01:08:11Merci beaucoup d'être là.

01:08:14Donc, je lis en français ce poème qui s'appelle Memento Mori.

01:08:17Et lorsque Moïche et Leib, le poète,

01:08:20dira qu'il a sur les vagues,

01:08:23qu'il a sur les rues,

01:08:26et lorsque Moïche et Leib, le poète,

01:08:29dira qu'il a sur les vagues entreaperçu la mort,

01:08:32aussi simplement qu'on se voit dans un miroir,

01:08:35et le matin en plus, comme ça, vers 10 heures,

01:08:38est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:08:41Et lorsque Moïche et Leib a salué la mort de loin,

01:08:44avec la main, et demandé ça va?

01:08:47Justement au moment où des milliers de gens dans l'eau

01:08:50jouissaient follement de la vie,

01:08:53est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:08:56Comme l'amant languissant attiré au soir

01:08:59par la fenêtre d'une femme qui le vénère,

01:09:02est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:05Et lorsque Moïche et Leib leur dépeindra la mort,

01:09:08non pas sombre et grise, mais belle et colorée,

01:09:11comme elle s'est présentée au loin vers 10 heures,

01:09:14d'elle-même là-bas, entre vagues et ciel,

01:09:17est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:20Et lorsque Moïche et Leib leur dépeindra la mort,

01:09:23est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:26Et lorsque Moïche et Leib leur dépeindre la mort,

01:09:29est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:32Et lorsque Moïche et Leib leur dépeindre la mort,

01:09:35est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:38Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:09:41est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:44Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:09:47est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:50Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:09:53est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:09:56Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:09:59est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:02Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:10:05est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:08Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:10:11est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:14Est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:17Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:10:20est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:23Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:10:26est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:29Et lorsque Moïche et Leib leur dépendra la mort,

01:10:32est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:35Est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:38Est-ce qu'on ira le croire, Moïche et Leib?

01:10:45Merci beaucoup, Chahara.

01:10:48Un petit mot sur le dernier poème,

01:10:51le deuxième et dernier poème qui est beaucoup plus court,

01:10:54qui est d'Avram Zuzkever que vous connaissez sans doute plus.

01:10:57Il est élui de Vilnius, il était de Vilnius

01:11:00et il a justement son témoignage du ghetto de Vilnaux

01:11:03et c'est le texte par lequel on connaît le mieux en France.

01:11:06Ça a été traduit par Gilles Rosi en 2013,

01:11:09mais il y a eu aussi des traductions par Batia Baum, Aquarium Vert

01:11:12pour un choix de poème en vers et prose sous le titre Heure rapiessée.

01:11:17Ce qui est à noter ici d'important, je trouve que ce poème,

01:11:21c'est comme l'explique la jeune fille qui l'a choisi,

01:11:24parce que chacun choisit son poème préféré.

01:11:27C'est un poème qui n'est pas tardif,

01:11:30qui est un poème d'avant, de 1940,

01:11:33lorsque l'occupation allemande menace

01:11:36et que le groupe auquel il appartenait,

01:11:39des Jung-Vilnaux, dans les années 30, se réunit.

01:11:42Ils ne savent pas que c'est la dernière fois qu'ils se réunissent,

01:11:45mais ils choisissent de parler,

01:11:48d'écrire un poème qui parle de tout,

01:11:51de la vie, du monde.

01:11:54C'est un poème panthéiste, dit celle qui le présente.

01:11:57D'abord toi, Chara, et moi ensuite.

01:12:00C'est un petit mot sur celle qui la présente,

01:12:03c'est la brillante Migliano Chausse,

01:12:06qui est bien qu'elle, que je salue depuis ici.

01:12:09Avec qui, je dois ajouter...

01:12:12Oui, voilà, c'est ça.

01:12:15Et qui est ma fiancée aussi.

01:12:18La plus belle de toutes.

01:12:21Elle est venue pour la première du Yiddish.

01:12:24Quand elle est venue, je passe les détails,

01:12:27mais depuis ils sont ensemble.

01:12:30C'est comme ça le Yiddish, c'est vivant.

01:12:33D'ailleurs, elle a appris le Yiddish

01:12:36en faisant des études de sémiotiques au départ,

01:12:39chinois, hébreu, et c'est par sa prof d'hébreu

01:12:42qu'elle a été conduite vers le Yiddish.

01:12:45C'est une histoire assez incroyable.

01:12:48Elle est lituanienne elle-même.

01:12:51Oui, elle est lituanienne, c'est par sa prof d'hébreu

01:12:54qui était la directrice du Judaïca Research Center

01:12:57à la Bibliothèque Nationale.

01:13:00Pour pouvoir cataloguer,

01:13:03elle a commencé à travailler avec le Yiddish à la Bibliothèque Nationale.

01:13:06Et elle a passé aussi par le YIVO.

01:13:09Par le YIVO aussi, mais elle est,

01:13:12son métier, elle est artiste de bande dessinée.

01:13:15Qu'elle fait aussi en Yiddish.

01:13:18Bon voilà, cet homme heureux va prononcer un poème heureux pour finir.

01:13:21Je vous donnerai le français après.

01:13:30Je vous donnerai le français après.

01:13:56Donc en français c'est par Batia.

01:13:59La traduction.

01:14:08Tout est précieux pour mon œil en sa course,

01:14:11tout est cher, essentiel pour ma stance,

01:14:14les herbes, les arbres, la terre,

01:14:17une source, et du sommeil la lointaine nuance,

01:14:20et dans tout,

01:14:23je rencontre un éclat de l'infini.

01:14:30Juste un petit mot.

01:14:33Juste par, je trouve,

01:14:36splitter von eins auf,

01:14:39je ne le dis pas aussi bien,

01:14:42splitter vient de l'allemand,

01:14:45et qui veut dire de brise,

01:14:48d'éclat, et eins auf, ça vient de l'hébreu,

01:14:51qui veut dire l'infini, mais c'est vraiment un terme kabbalistique,

01:14:54très très important. Donc le Yiddish,

01:14:57c'est l'hébreu là-dedans.

01:15:00Et les derniers...

01:15:11De très très beaux passages de films,

01:15:14et on va terminer par ce montage-là,

01:15:17qui évoque la création

01:15:20de manière plus générale.

01:15:23On l'appelait création, pour nous,

01:15:26et après on ne va plus rien dire.

01:15:29Merci.

01:15:56...

01:15:59...

01:16:02...

01:16:05...

01:16:08...

01:16:11...

01:16:14...

01:16:17...

01:16:20...

01:16:23...

01:16:26...

01:16:29...

01:16:32...

01:16:35...

01:16:38...

01:16:41...

01:16:44...

01:16:47...

01:16:50...

01:16:53...

01:16:56...

01:16:59...

01:17:02...

01:17:05...

01:17:08...

01:17:11...

01:17:14...

01:17:17...

01:17:20...

01:17:23...

01:17:26...

01:17:29...

01:17:32...

01:17:35...

01:17:38...

01:17:41...

01:17:44...

01:17:47...

01:17:50...

01:18:14et j'entends son goût.

01:18:16Et ce goût, cette connexion de goût,

01:18:18c'est la connexion que je me souviens de la maison.

01:18:44C'est un arbre qui se veille.

01:19:14C'est un arbre qui se veille.

01:19:16C'est un arbre qui se veille.

01:19:18C'est un arbre qui se veille.

01:19:20C'est un arbre qui se veille.

01:19:22C'est un arbre qui se veille.

01:19:24C'est un arbre qui se veille.

01:19:26C'est un arbre qui se veille.

01:19:28C'est un arbre qui se veille.

01:19:30C'est un arbre qui se veille.

01:19:32C'est un arbre qui se veille.

01:19:34C'est un arbre qui se veille.

01:19:36C'est un arbre qui se veille.

01:19:38C'est un arbre qui se veille.

01:19:40C'est un arbre qui se veille.

01:19:42C'est un arbre qui se veille.

01:19:44C'est un arbre qui se veille.

01:19:46C'est un arbre qui se veille.

01:19:48C'est un arbre qui se veille.

01:19:50C'est un arbre qui se veille.

01:19:52C'est un arbre qui se veille.

01:19:54C'est un arbre qui se veille.

01:19:56C'est un arbre qui se veille.

01:19:58C'est un arbre qui se veille.

01:20:00C'est un arbre qui se veille.

01:20:02C'est un arbre qui se veille.

01:20:04C'est un arbre qui se veille.

01:20:06C'est un arbre qui se veille.

01:20:08C'est un arbre qui se veille.

01:20:10C'est un arbre qui se veille.

01:20:12C'est un arbre qui se veille.

01:20:14C'est un arbre qui se veille.

01:20:16C'est un arbre qui se veille.

01:20:18C'est un arbre qui se veille.

01:20:20C'est un arbre qui se veille.

01:20:22C'est un arbre qui se veille.

01:20:24C'est un arbre qui se veille.

01:20:26C'est un arbre qui se veille.

01:20:28C'est un arbre qui se veille.

01:20:30C'est un arbre qui se veille.

01:20:32C'est un arbre qui se veille.

01:20:34C'est un arbre qui se veille.

01:20:36C'est un arbre qui se veille.

01:20:38C'est son arbre.

01:20:40C'est sa route vers la

01:20:42route vers la sauveterre Gustavus Ullmann.

01:20:44La route vers sa sauveterre Gustavus Ullmann.

01:20:46Variation en heroes créateurs russes.

01:20:48Variation en héros créateurs russes.

01:20:50Variation en heroes créateurs russes.

01:20:52La troisième scène du MOOC,

01:20:54La 3ème scène du MOOC,

01:20:56et la retraite.

01:20:58est l'association known as deceased

01:21:00du M charismatic

01:21:02le M Charismatic

01:21:04Le M Charismatic

01:21:06Merci à vous, merci à vous.

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