La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, était l'invitée du 8h30 franceinfo le 24 janvier 2025
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00:00Bonjour Amélie de Montchalin, hier le Sénat a approuvé le projet de loi de finances pour 2025.
00:05L'objectif c'est un déficit à 5,4% du PIB, 50 milliards d'efforts budgétaires dont 30 milliards d'économies.
00:12C'est moins ambitieux que le budget Barnier. Est-ce que ça l'est assez ?
00:15Alors c'est un budget qui nous permet de reprendre notre destin budgétaire en main d'une certaine manière.
00:21C'est un budget qui est absolument nécessaire. Il est nécessaire à deux titres.
00:26D'abord parce que, je pourrais y revenir, la censure a un coût pour les Français, elle a un coût pour les finances publiques.
00:31Vous l'avez mesurée ?
00:32C'est un coût de 12 milliards. Le 1er janvier, ceux qui ont voté la censure,
00:37ils ont fait que, au fond, notre réveillon à tous nous a coûté 6 milliards.
00:42Parce que le 1er janvier, plein de mesures qui devaient s'appliquer ne s'appliquent pas.
00:45Et depuis, c'est 100 millions par jour. Au total, là, sur deux mois, c'est 12 milliards d'euros de gâchis d'une certaine manière.
00:52C'est plein de politiques publiques qui ne s'appliquent pas.
00:55C'est la prime rénov' qui n'est pas versée, c'est des places en EHPAD qui ne sont pas créées,
00:59c'est des mesures pour les Outre-mer qui ne sont pas prises.
01:01Donc on est dans une situation très difficile.
01:04Et donc on a besoin d'un budget, et on a besoin d'un budget, au fond,
01:07moi je suis rentrée avec le Premier ministre et Éric Lombard dans cette discussion vis-à-vis des Français et des sénateurs,
01:12avec trois convictions.
01:14Un, il nous faut réduire le déficit. Pas parce que c'est un totem, mais parce que...
01:17Moins que ce que souhaitait M. Barnier.
01:20Le déficit, il est autour de 6% en 2024.
01:22Il faut qu'on vise d'être à 3% de déficit en 2029.
01:27Et la marche, vous voyez, l'effort pour 2025, c'est d'arriver à ce 5,4% déficit.
01:33Pourquoi ? Parce que si nous ne réduisons pas ce déficit,
01:36si nous avons une nouvelle crise,
01:38nous serons en très grande difficulté pour soutenir de nouveau les emplois et l'économie.
01:43Et par ailleurs, un pays qui n'a pas de budget bien financé,
01:48c'est un pays qui, à terme, ne sait plus financer les politiques sociales.
01:51La deuxième conviction, après réduire le déficit,
01:55c'est de ne pas augmenter les impôts des classes moyennes.
01:57Et donc, il faut faire des économies.
01:59Et la troisième conviction, c'est que vu le moment politique dans lequel on est,
02:02il faut que la méthode qu'on suive permette de trouver un accord.
02:05Alors entrons dans le vif, Amélie de Montchalin.
02:07Dans ce budget, il y a aussi des coupes budgétaires.
02:10Vous dites qu'il faut faire des économies.
02:11Il y en a dans le domaine de la culture, la recherche,
02:14il y en a dans l'enseignement supérieur, dans la transition écologique.
02:18Est-ce que c'est ça, votre méthode ?
02:20C'est-à-dire faire un grand rabot général
02:23plutôt que des économies durables, des réformes structurantes ?
02:27Alors, la première chose, c'est que je le redis ici,
02:30le plus grand rabot dans le dos des Français qui a eu lieu, c'est la censure.
02:34C'est la mise à l'arrêt du pays, la mise à l'arrêt des politiques publiques.
02:37Et ça, ça coûte 12 milliards.
02:38Ce que vous appelez rabot, moi, j'appelle ça d'abord des efforts courageux,
02:43que chaque ministre a proposé.
02:45Et ces efforts portent, et je tiens vraiment à le dire ici, ce matin,
02:49non pas sur les politiques publiques.
02:51On n'est pas en train de dire, vous savez,
02:52on arrête la politique familiale ou on arrête la politique de la recherche.
02:56Les efforts qu'on porte sont les efforts sur les dépenses de fonctionnement de l'État.
03:00Ça veut dire qu'on va faire des efforts sur les achats.
03:03On va faire des efforts sur les recrutements.
03:05On va faire des efforts, vous voyez, dans les opérateurs,
03:08on a mis tout le monde avec un objectif de moins 5 %,
03:10mais on ne détruit pas les politiques publiques.
03:12Et puis surtout, ce n'est pas l'austérité générale.
03:15On n'est pas en train de faire du rabot aveugle.
03:17Il y a des politiques publiques, je pense par exemple à l'hôpital,
03:20à la justice, à la sécurité, aux Outre-mer.
03:23Le sport, on en est où ? Il y a une coupe ou il n'y a pas de coupe ?
03:25Sur le sport.
03:26Les 425 sportifs qui ont dénoncé cette coupe budgétaire dans l'équipe,
03:31eh bien, ils ont quand même trouvé un allié de choix, Emmanuel Macron.
03:34Donc, ça sera Ardoise Magique où vous allez conserver la coupe budgétaire de 100 millions.
03:39Alors, là aussi, un élément de fond, un élément de méthode.
03:43Sur le fond, quand vous avez tous les parlementaires de tous les bords,
03:45toute la société civile qui vous dit que ce n'est pas le bon équilibre,
03:48il faut l'entendre.
03:49Élément de méthode.
03:51Nous entrons dans une phase où, dans une semaine, jeudi prochain,
03:567 députés et 7 sénateurs se réunissent pour trouver le compromis.
04:00Le compromis, ce n'est pas l'unanimité.
04:02Le compromis, ce n'est pas un truc naïf où on se dit
04:04tiens, les gens vont miraculeusement tomber d'accord.
04:07Le compromis, c'est de dire nous avons besoin d'un budget.
04:10Chacun a des priorités.
04:12Certains vont dire voilà. Et d'ailleurs, on l'a entendu.
04:14Le gouvernement, d'ailleurs, a soutenu le fait que pour les enseignants,
04:18il y ait 4000 postes sur lesquels on imaginait revenir,
04:20sur lesquels on ne revient pas.
04:21Mais ce compromis, il va se faire dans une pièce où le gouvernement n'est pas.
04:25Je ne suis pas dans une pièce...
04:26Donc, ça veut dire quoi concrètement pour le sport ?
04:27Parce que je n'ai pas compris.
04:28Sur le sport, les parlementaires trancheront.
04:31Et je pense qu'ils ont entendu tout le pays
04:34et probablement que la coupe de 100 millions
04:36n'est pas le point d'arriver du compromis.
04:37Vous remettez ça entre les mains des parlementaires,
04:39mais sur d'autres sujets, on sait qu'il y a aussi
04:40des négociations en cours avec les socialistes.
04:42Elles continuent ces négociations.
04:43Ils vous demandent de revenir sur une certaine partie de ces coupes.
04:47C'est important que les Français comprennent.
04:48Jeudi prochain, dans la pièce, il n'y a pas le gouvernement.
04:50On a bien compris, mais on sait que les choses se passent aussi
04:53avant cette réunion, forcément.
04:54Exactement. Ce qui se passe à partir d'aujourd'hui avec Éric Lombard,
04:56c'est que nous rencontrons les parlementaires.
04:58Nous nous mettons à leur entière disposition.
05:00Nous leur donnons tous les éléments.
05:02Nous éclairons leurs réflexions, leurs points de convergence.
05:07Nous donnons toutes nos chances et toute sa chance au compromis.
05:11Parce que dans mon pays, je pense que si nous n'arrivons pas
05:13à donner toute la chance à la démocratie représentative,
05:17à la démocratie sociale, de trouver des compromis
05:19dans un moment politique où nous sommes fragmentés,
05:21alors il n'y a plus que les extrêmes à la fin.
05:23Vous donnez aussi vos lignes rouges,
05:24et j'imagine qu'ils vous donnent les leurs pour éviter une censure,
05:26parce qu'on sait que c'est ça aussi l'objectif.
05:27On a changé, depuis qu'on a commencé avec Éric Lombard,
05:30à la demande du Premier ministre,
05:32de rencontrer les 17 groupes politiques et parlementaires
05:34qui existent dans notre pays.
05:36On est d'accord et tous d'accord.
05:38Et ça, c'est déjà en soi une victoire
05:40que nous sortions de la logique de lignes rouges.
05:42Les gens ne rentrent plus dans la pièce en disant
05:43c'est ça où je pars.
05:45Ils rentrent dans la pièce en disant
05:46j'ai des priorités, pas pour moi.
05:47Mais ils m'ont chalin.
05:48Ils veulent des concessions, les socialistes.
05:50Ils en veulent encore plus.
05:51Est-ce que vous avez encore des choses à leur donner ?
05:54Et d'ailleurs, combien ont coûté les concessions
05:57que vous leur avez déjà faites ?
05:59Le coût du compromis qui rentre dans le cadre,
06:02au fond, c'est le contrat qu'on a posé,
06:04des 5,4% de déficit,
06:06il est infiniment inférieur, ce coût du compromis,
06:10au coût de la censure.
06:11Donc 12 milliards, c'est la censure.
06:13Donc combien le coût du compromis ?
06:15Le coût du compromis, c'est de se dire...
06:16Le chiffre est à combien ?
06:18Puisque vous êtes précis sur la censure,
06:19soyons précis sur le coût du compromis.
06:21Je ne vais pas vous faire ici l'arithmétique.
06:22Derrière les 4 000 postes d'enseignants,
06:24c'est un élément important, il est dans le budget.
06:26Mais il est dans un budget dont on ne dégrade pas
06:28l'objectif.
06:29Ça veut dire qu'on fait des équilibres.
06:31Ça veut dire que si on fait plus quelque part,
06:33il faut faire moins ailleurs.
06:34Et c'est ça qu'on construit.
06:36Mais à nouveau, nous, le gouvernement aujourd'hui,
06:38nous sommes dans un moment où nous devons accompagner,
06:43favoriser, donner ces chances à un compromis
06:45qui se tiendra lors de la commission mixte paritaire
06:48où les 7 députés et les 7 sénateurs jeudi prochain
06:50vont travailler pour le pays.
06:52Michel Barnier était quand même sous la coupe
06:53du Rassemblement national.
06:54Est-ce que vous, vous n'êtes pas sous celle,
06:56on peut le dire aussi clairement que ça,
06:58des socialistes ?
06:59On est sortis de cette logique de ligne rouge.
07:01Et surtout, moi, je crois à une chose,
07:02c'est qu'on peut, dans notre pays,
07:04s'opposer sans censurer.
07:06On peut, dans notre pays, s'opposer sans tout bloquer.
07:09Et les socialistes resteront dans l'opposition.
07:12Simplement qu'aujourd'hui, ils ont,
07:14et de manière tout à fait sincère,
07:16comme beaucoup d'autres forces politiques,
07:18compris et surtout, ils se sont engagés
07:21pour que nous ayons un budget,
07:23parce que ce qui coûte le plus cher,
07:25c'est que nous soyons dans cette instabilité.
07:27Ce qui coûte le plus cher,
07:28c'est que le pays est à l'arrêt.
07:29Ce qui coûte le plus cher,
07:30c'est que sur des grandes politiques publiques,
07:32qui sont leurs priorités et qui sont les miennes aussi.
07:34À la fin, les Français, aujourd'hui,
07:35ils payent la facture de cette censure.
07:37Et je tiens à dire autre chose.
07:39Si jamais il y avait une nouvelle censure...
07:41Moi, je veux, ce matin, vous dire,
07:43il y a une immense hypocrisie
07:45d'une partie de l'extrême-gauche
07:46sur le fameux pouvoir d'achat.
07:48Je suis, nous sommes tous, avec le gouvernement,
07:50très engagés, évidemment,
07:52pour protéger le pouvoir d'achat des Français.
07:54Si jamais il y avait une nouvelle censure
07:55la semaine prochaine, qu'est-ce que ça veut dire ?
07:58Ça veut dire qu'il y a 600 000 Français
08:00qui vont, le 15 mars ou le 15 mai,
08:03devoir payer un impôt sur le revenu
08:05que le gouvernement et personne, je crois,
08:07dans le pays ne veut leur imposer.
08:09Ça veut dire qu'il y aurait 18 millions de Français
08:11qui vont voir leur impôt augmenter.
08:12Ça, c'était déjà la petite musique du temps de Michel Bessé.
08:15Ce n'est pas une musique.
08:15Vous savez que ce n'est pas un hauchet.
08:17Ce n'est pas pour faire peur aux Français.
08:19S'il n'y a pas de budget,
08:20je peux vous dire qu'en tant que ministre des Comptes publics,
08:22je ne sais pas, sans budget,
08:24protéger les 600 000 Français en question de la hausse des impôts.
08:27Je ne sais pas protéger les 18 millions
08:29alors que notre objectif avec François Bayrou,
08:31c'était, un, on réduit le déficit,
08:34deux, on n'augmente pas les impôts pour les Français.
08:36Donc vous dites que les opposants seront responsables de cela ?
08:39Chacun est responsable aujourd'hui.
08:40Chacun est responsable.
08:41La censure a eu un coût énorme.
08:43La recensure aurait un coût massif.
08:45Et le point de compromis, à nouveau,
08:48ce n'est pas l'unanimité.
08:49On ne force personne à rejoindre le gouvernement
08:51ou à rejoindre la majorité.
08:53Ce n'est pas pour eux,
08:54ce n'est pas pour les sénateurs ou les députés qu'on travaille,
08:56c'est pour les Français.
08:57Et ce moment,
08:58on veut vraiment lui donner sa chance
09:00parce que c'est comme ça,
09:01dans ce moment politique,
09:02qu'on peut essayer de trouver le point d'équilibre
09:04pour remettre le pays en route.