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00:00Huit en moins le quart avec notre invitée, Yann, nous allons évoquer un pan de l'histoire
00:03sartoise assez méconnue.
00:05Oui, car peu glorieux pendant la Seconde Guerre Mondiale, le camp d'internement des gens du
00:09voyage au château de Coudrecieux, entre Bouloir et Saint-Calais, une professeure d'Histoire,
00:15on a fait un roman, bonjour Sandrine Fayel.
00:18Bonjour.
00:19Alors votre roman s'appelle, je vais le montrer à la caméra, les Barbelés de la Vairie,
00:23camp d'internement oublié de la Sarthe, c'est important, il dépeint la vie et des conditions
00:29horribles de détention des nomades dans ce camp d'internement sartois du château de
00:34la Vairie.
00:35On va y revenir, mais d'abord, comment avez-vous découvert l'existence de ce camp ?
00:39Écoutez, totalement par hasard, je travaillais avec mes élèves sur la préparation du concours
00:45national de la résistance et de la déportation, donc c'était en l'année scolaire 2018-2019.
00:50Au Mans, des élèves ?
00:52Oui, bien sûr, au lycée Yursena, et le thème de l'année c'était la répression.
00:59Donc on avait choisi comme angle d'approche de partir du local pour aller au Reich, et
01:08on avait découpé en fonction des catégories de personnes qui étaient recherchées.
01:15Parmi ces personnes, il y avait les nomades, et donc nomades, juste pour la petite précision,
01:23c'est le nom qu'on donne aux gens du voyage aujourd'hui, mais depuis 1912, on les appelle
01:27les nomades.
01:28Jusqu'à les années 70.
01:29C'est pour ça que vous employez ce terme.
01:31Voilà, donc pendant cette période, on ne parle que de nomades.
01:34Et c'est à cette occasion que vous découvrez l'existence de ce camp, jusque-là, inconnu ?
01:38Alors on découvre au hasard des dossiers qu'on compulse, on découvre un camp, Coudre-Cieux,
01:45qu'on ne connaissait pas du tout, et le document qui nous a le plus marqué au début, c'est
01:51qu'on a vu la police d'assurance.
01:54Figurez-vous qu'on assure le camp, on l'assure pour je ne sais plus combien de millions, là
01:59je n'ai pas les chiffres en tête.
02:00Contre quoi on l'assure ?
02:02On l'assure contre le feu, contre tout ce qui peut arriver en fait, dans une prison,
02:08c'est la remarque que je me suis faite après, mais au début, wow, on assure.
02:13On assure le camp, mais évidemment pas ceux qui y sont enfermés.
02:18Non, c'est les biens matériels.
02:20Est-ce qu'on sait combien de nomades ont été internés entre 1940 et 1942, puisque c'est
02:26la durée de l'existence de ce camp ?
02:28Oui, c'est la durée de l'existence de ce camp.
02:29On sait qu'il s'est allé jusqu'à 370 au mois de mars 1942, où là, le directeur
02:36appelle au secours, parce que ce n'est plus tenable.
02:38Dans des conditions déplorables, d'hygiène, très peu d'eau, pas de...
02:44Un puits, comme vous verrez dans le roman, des conditions d'hygiène déplorables, inhumaines
02:52même.
02:53Vous avez choisi d'en faire un roman, expliquez-nous pourquoi.
02:57Alors, en fait, je me suis dit, il y a deux choses à faire, le faire connaître au grand
03:02public et le roman, c'est la façon la plus simple.
03:04Honnêtement, j'en ai rencontré dans des petits salons que j'ai faits, et ils sont plus portés
03:10à lire un roman qu'à un ouvrage historique.
03:13Et il y a les deux à faire.
03:14Il y a vraiment les deux, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de travail à faire encore
03:18dessus.
03:19Et malheureusement, moi, je ne peux pas le faire pour des raisons de santé, je ne peux
03:22pas rester des heures...
03:23Donc, j'appelle des étudiants, s'il y a des gens qui veulent, il y a vraiment beaucoup
03:27de travail à faire.
03:28La privation de nourriture, l'insalubrité, les conditions indignes, vous les dépeignez
03:33bien.
03:34On suit Irène et sa famille, puis d'autres nomades qui sont dans ce camp et qui tentent
03:40de survivre.
03:42On a du mal, des fois, à faire la part entre le roman et l'histoire.
03:46Par exemple, vous parlez d'un typhus qui ravage une partie des internés.
03:50Est-ce que ça, c'est un fait historique ou pas ?
03:52Alors, c'est un fait historique.
03:53Je n'ai pas trouvé, honnêtement, dans le camp de Coudrecieux, de documents d'archives
03:57qui disaient qu'il y avait eu une épidémie.
03:59Mais dans les autres camps, il y en a eu.
04:01Donc, en fait, je me suis dit, là, c'était pour la dramaturgie, je vais, j'utilise cette
04:07maladie.
04:09Il y a des gens qui sont morts dans le camp, pas mal.
04:12Et figurez-vous que quand on est mort, on a une fiche de libération.
04:15Donc, on trouve des fiches de libération.
04:18Ils sont libérés du camp et ils sont morts.
04:20Et c'est ce que vous dites dans le roman, c'est la seule façon d'être libéré.
04:23Quand Irène se pose la question, qu'est-ce que ça veut dire, je sortirai les pieds devant,
04:27en fait, je serai mort.
04:30Vous dépeignez aussi les tentatives d'évasion de certains nomades, effectivement, qui parfois
04:37se réfugient chez des paysans, chez qui ils ont travaillé avant d'être internés.
04:41Des paysans qui les dénoncent après, est-ce que ça, c'est vrai ?
04:44Oui, oui, c'est vrai.
04:46Donc, j'ai revérifié.
04:47Donc, parce qu'il y a des archives et puis il y a aussi quand même quelques ouvrages
04:51qui ont été écrits et on les ramène à coup de fourche ou on les dénonce.
04:56Enfin, voilà, ils ne sont pas du tout, ce n'est pas des populations qui sont appréciées
05:01malheureusement.
05:03Est-ce qu'on sait ce que sont devenus ces nomades à la fermeture du camp en 1942 ?
05:09Alors, ils sont transférés au camp de Mulsanne et le camp de Mulsanne, il est surpeuplé
05:14aussi et donc ils sont à nouveau transférés au camp de Montreuil-Belay.
05:18Certains sont libérés bien après la guerre ?
05:21Alors, les camps ferment en 1946 seulement.
05:23C'est dingue.
05:24Est-ce que vous avez pu rencontrer des descendantes ces derniers ?
05:28En fait, c'est un peu mon regret de ne pas avoir effectivement pu le faire.
05:34Peut-être que ça se fera après.
05:37Peut-être que cet après-midi, là je vais au lycée Touchard, il y a une table ronde
05:43là-dessus et il y a des gens qui ont travaillé avec une famille de nomades.
05:47Peut-être que j'aurai l'occasion d'en parler.
05:50Vous participez au festival « Histoire d'ici » organisé aujourd'hui par le lycée
05:54Touchard au Washington, important j'imagine pour vous d'en parler aux élèves et d'échanger
06:01avec les futures générations.
06:02Et vous serez ce soir, je remontre votre roman « Les barbelés de la verrie », vous serez
06:07ce soir en dédicace à 18h à la librairie Doucet.
06:12Oui c'est ça.
06:13Merci beaucoup Sandrine Faillel d'avoir accepté notre invitation, bonne journée.