Le travail, la notion de travail semble définitivement prisonnière des injonctions idéologiques. Le travail serait de droite, le temps, le lien et le bonheur de gauche. La valorisation du travail a bien sûr muté selon les époques, au 18 ème siècle il était valorisé comme facteur de productions, au 19ème, comme l’essence de l’homme, au 20ème, comme la clef de voute de notre système de redistribution. [...]
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00:00Le travail, la notion de travail, semble définitivement prisonnière des injonctions idéologiques.
00:14Le travail serait de droite, le temps, le lien et le bonheur de gauche.
00:18La valorisation du travail a bien sûr muté selon les époques.
00:22Au XVIIIe siècle, il était valorisé comme facteur de production, au XIXe comme l'essence
00:28de l'homme.
00:29Au XXe comme la clé de voûte de notre système d'eurodistribution.
00:33Le travail est une valeur politique cardinale que la droite valorise souvent, il est vrai,
00:38et qui crée plus de clivages à gauche.
00:41Une gauche du travail, une gauche de la paresse façon Lafargue, une gauche de l'exploitation
00:45et de la domination.
00:46Mais il reste que c'est par des vraies batailles syndicales venues de la gauche au travail
00:52que des avancées notables ont vu le jour.
00:56En 1936, les accords de Matignon mettent en place les quarante heures de travail hebdomadaire.
01:01Le confort des travailleurs est important, mais il n'est pas question de décroissance
01:06ou de droit à la paresse pour autant.
01:08Toujours à gauche, et dans une optique de libérer les salariés du joug d'un travail
01:13trop prenant, la cinquième semaine de congé est accordée ainsi que les 39 heures par
01:17semaine au début des années 80, tout un héritage mitterrandien.
01:22A gauche encore, au tout début des années 2000, la semaine des 35 heures se met en place.
01:27Mais attention, cette réforme importante portée par Martine Aubry n'est pas construite
01:32autour du non-travail.
01:34Non, c'était plutôt une tentative de partage du travail et surtout, souvenons-nous,
01:39l'objectif est dès d'espérer réduire le chômage.
01:43Sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, dès 2007, l'esprit change.
01:47Il est dit que la crise morale des Français est la crise du travail.
01:51Rappelons-nous du slogan « Travailler plus pour gagner plus » et des fameuses « heures
01:56supplémentaires défiscalisées ».
01:57Sous Sarkozy, il était de « bon ton de travailler pour dynamiser son pouvoir d'achat »,
02:03dont acte.
02:04Dans la même optique, en 2017, le candidat Emmanuel Macron se définit lui-même comme
02:08le candidat du travail.
02:10Depuis quelques années, le débat entre marxisme et décroissance se fait plus fort
02:15et le travail se trouve malmené comme une valeur plutôt négative.
02:20Le débat est largement relancé en 2022 par Sandrine Rousseau qui estime que le travail
02:24est une valeur de droite et milite pour le droit à la paresse.
02:28La réduction du temps de travail serait aussi une urgence écologique.
02:33Elle prône donc la semaine de quatre jours au regard du fait que l'on a le droit de
02:37faire des pauses dans sa vie et qu'il nous faut retrouver du temps.
02:40Elle convoque aussi Marx pour justifier ses prises de position.
02:46Un marxisme écologique puisque selon elle, une société écologique est une société
02:51du ralentissement.
02:52Le mot décroissance n'est pas prononcé mais nous sommes bien au cœur de cela.
02:57Est-ce que l'oisiveté des grands aristocrates du XVIIIe siècle est un objectif ?
03:03Sait-on jamais.
03:04De même, quelques voix dénonçant le travail comme simple alienation ont désormais une
03:08place importante dans le débat mainstream.
03:12Ce qui n'est pas dit, c'est comment un système avec très peu de travail subsiste,
03:17comment l'état provident se rémunère, comment les avancées technologiques, par
03:22exemple liées à la santé, sont financées.
03:24Et si la réponse est la fiscalité, on peut supposer que si plus personne ne travaille
03:29vraiment, il n'y a logiquement plus de rentrée fiscale.
03:33De mon côté, je n'opposerai jamais ici l'assistanat façon Sarkozy au travail.
03:39Pas du tout.
03:41J'affirme en revanche que le travail, dans des conditions humaines, respectueuses et
03:45normalement rémunératrices, peut être le lieu de l'apprentissage, de la construction
03:50du lien social et j'ose aussi la notion de performance et de défi.
03:54Dans une société qui ne travaillerait plus, est-on vraiment sûr que l'on ferait autre
03:59chose que de regarder un écran une fois le repas terminé et quelques voyages prévus ?
04:04Sans contraintes liées à l'exigence du travail, que ferions-nous ?
04:09Le droit à la paresse, bien sûr, mais dans une société qui travaille.
04:13C'est là ma conclusion.