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Le tour des managers français continue sur Cyclism'Actu ! Après Dominique Serieys (Decathlon AG2R La Mondiale), Stéphane Heulot (Lotto), Marc Madiot (Groupama-FDJ) et Cédric Vasseur (Cofidis), c'est au tour d'Emmanuel Hubert de se livrer au micro de Cyclism'Actu. Le patron de la formation Arkéa-B&B Hotels a fait parler durant cette inter-saison, en tirant la sonnette d'alarme quant à la situation du cyclisme dans l'hexagone, mais aussi en expliquant les difficultés auxquelles il faisait face pour trouver des sponsors pour son équipe. Bref, 30 minutes d'entretien passionnant avec Emmanuel Hubert, à regarder et/ou à lire ci-dessous.

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Transcription
00:00Bonjour Emmanuel Hubert. Bonjour, bonjour Titouan, bonjour cycliste Mathieu, tous mes bons voeux.
00:08Merci à vous aussi. Est-ce que vous pouvez nous un peu nous donner des nouvelles,
00:14comment ça se passe pour vous en tant que manager général d'Aircap, d'Envy Hotel et
00:19aussi pour l'équipe en ce début de mois de janvier ? Écoutez, ça part pas trop mal puisque
00:26un double titre championne de France avec Amandine et championne de France avec Clément,
00:32donc un cyclocross à Pontchâteau, presque sur des terres bretonnes, donc d'avoir deux
00:39maillots tricolores dès le début de l'année, c'est de bons présages, c'est de bon augure en tous les
00:45cas et puis ça me conforte moi, ça nous conforte sur l'existentiel du cyclocross et je pense que
00:54c'est quand même à bon escient de mettre en tant qu'équipe, cycliste professionnel,
01:01de mettre une pièce sur le cyclocross parce que c'est un beau sport et quand on voit la ferveur
01:06du public qu'il y avait à Pontchâteau, j'estime que c'est loin d'être peine perdue en tous les cas.
01:12C'est vraiment une volonté d'accès justement sur le cyclocross cette année,
01:18même peut-être plus que les années précédentes ? Alors moi j'ai toujours eu pour définition,
01:22c'est-à-dire que tout le monde a besoin de vivre, chaque discipline a besoin de vivre. Alors certes,
01:27je ne peux pas être partout, je ne peux pas être sur la piste, sur le BMX, enfin tout ça. Maintenant
01:32après les disciplines autour de la route, c'est un peu comme quand j'ai créé l'équipe féminine,
01:36quand j'ai créé l'équipe développement, quand je crée aussi cette équipe de cross,
01:40eh bien voilà, il y a besoin d'exister et puis surtout ce qui peut apporter aussi à l'équipe
01:45titre, je veux dire des professionnels masculins et de l'équipe titre aussi du cyclisme féminin,
01:52et je pense que du développement, de faire du sourcing et puis du scouting en bas,
02:01eh bien moi je pense que c'est tout bénéfique et le cyclocross est une discipline avec beaucoup
02:07de ferveur. Moi je prends mon pied tous les ans entre Noël et Nouvel An quand je vois la Belgique
02:14avec toute la ferveur du public qui est vraiment très impressionnante.
02:21On va faire un petit retour en arrière pour revenir sur cette saison 2024 qui a été marquée
02:30évidemment par la victoire d'étape de Kevin Vauquelin sur le Tour. En dehors de ça,
02:35des résultats peut-être un peu plus compliqués, notamment avec Arnaud Desmarques qui est un des
02:39leaders de l'équipe. Comment vous jugez cette saison maintenant, ça fait trois mois qu'elle
02:44est terminée, avec du recul ? Moi je la juge assez satisfaisante, bien sûr. Il est évident
02:52qu'on peut toujours faire mieux, on peut toujours faire plus. Maintenant quand on regarde l'équation
02:57financière, l'équation de la qualité de nos sportifs, de la qualité de notre équipe en
03:05général, moi j'estime que c'est une bonne saison. Des victoires, des secondes places qui sont loin
03:15d'être neutrales, quand on regarde une deuxième place à la Flèche Wallonne, une deuxième place
03:20autour des Flandres. Je pense que ça se saurait si on était la plus grande équipe du monde,
03:30donc ça se verrait beaucoup plus. La seule chose par rapport à notre statut et ce qu'on sait faire,
03:36et l'équation qu'on veut bien en déduire, moi j'estime que c'est une bonne saison. Après pour
03:44la deuxième question par rapport à Arnaud, je crois qu'il a déclaré quelques déboires,
03:51quelques soucis personnels et moi je serais tenté de dire que c'est tout à son honneur et à son
03:57épouse d'avoir pu dévoiler tout cela. Je pense que de parler, de libérer la parole, parfois permet
04:05de se soulager, permet aussi une certaine compréhension parce qu'on est quand même dans
04:08un milieu où on est public, donc parfois on se doit d'avoir des choses à dire, parfois c'est
04:17pas forcément très évident quand ça touche le perso et je crois qu'on peut tirer un grand coup
04:21de chapeau à Arnaud et sa famille d'avoir pu dire tout ce qu'il en était sur ses raisons
04:27personnelles. Moi je reste persuadé qu'Arnaud reste un champion, reste un grand sprinter et
04:33cette année avec une tête bien libérée, je pense qu'il fera une très belle saison 2025. En tous
04:41les cas, il est motivé, en tous les cas il a envie. Les voyants sont au vert maintenant,
04:47l'avenir nous le dira et je lui souhaite de tout mon cœur de réussir une belle saison 2025.
04:54Après cette saison 2024, on a eu le Mercato. Un Mercato jugé assez difficile pour votre équipe,
05:04avec notamment les départs anticipés, si je ne me trompe pas, parce qu'ils étaient encore sous
05:09contrat d'Albanese et Clément Champoussin. Au niveau des recrutements, on a eu quasiment
05:15exclusivement des coureurs de votre équipe développement, donc U23. Expliquez-nous un peu
05:22ce qui s'est passé pendant ce Mercato, puisque c'est vrai qu'on n'a pas eu énormément d'informations.
05:26Est-ce que vous pouvez un peu nous décrire tout ça ? Ce qui s'est passé, c'est que d'une part,
05:31dans certains contrats et sur un plan contractuel, il y a des clauses libératoires. À partir du
05:38moment où j'ai des athlètes qui sont possiblement libres, à partir du moment où ils font valoir
06:00leurs clauses, on se doit d'une part de les écouter. Parfois, c'est un grand dommage par
06:07rapport aux sportifs, parce qu'après, je rappelle à dire qu'on est dans un milieu où il y a des
06:15points, il y a des points à aller chercher, il y a une équation aussi à faire valoir par rapport
06:20au classement UCI. Maintenant, ils ont choisi, on a discuté. Je crois qu'à partir du moment où
06:32quelqu'un a envie et pense à autre chose, je serais tenté de dire que c'est un peu comme dans un couple
06:39ou dans une association ou dans un pacte d'associés. À partir du moment où on ne sait pas qu'on s'entend
06:46plus, mais à partir du moment où on pense ailleurs, je pense qu'il faut être des grands garçons et se
06:53dire les choses et voguer par ses propres moyens et aller là où on a envie d'être. Après, pour les
07:04recrues, je suis resté sur une certaine philosophie par rapport au fait qu'aujourd'hui, on a une équipe
07:12développement. Maintenant, si on prend des garçons dans une équipe de développement et qu'on ne leur
07:17donne pas le lead et la chance d'aller plus haut, je pense que ce n'est pas opportun d'avoir une
07:26équipe développement. On a choisi cela comme cela. Maintenant, c'est vrai qu'on n'est pas forcément
07:31dans une situation aujourd'hui où les points sont quand même très prégnants. Il faut en avoir.
07:41Après, les jeunes qui vont passer professionnels ne seront pas forcément ceux-là pour rapporter un
07:48bon nombre de points. Maintenant, je garde cette philosophie, comme quand j'ai créé l'équipe
07:54féminine il y a 4-5 ans. Cette équipe développement existe, elle a le mérite d'exister et donc il faut
08:01faire valoir les choses. J'ai une croyance, les jeunes aujourd'hui, ça pousse vers le haut,
08:09ça pousse aussi les plus anciens à encore plus faire le métier et puis ça leur permet de s'aguerrir.
08:16Et quoi qu'il se passe, ces jeunes se souviendront d'avoir eu cette chance. J'ai toujours pour mémoire
08:25qu'il y a toujours une reconnaissance du ventre. Et à partir du moment où on donne la capacité à un
08:29jeune de passer professionnel, il a cette reconnaissance peut-être pas toute sa vie,
08:36mais au moins toute sa carrière. En tant que manager personnellement,
08:41comment on se sent quand il y a des coureurs qui souhaitent partir ? Ce que vous m'expliquez,
08:48c'est un peu ça. Prématurément, c'est une déception ? C'est de l'énervement ? On se dit
08:57c'est comme ça ? Non, je le prends sur un point de vue philosophique assez facilement. Aujourd'hui,
09:09j'ai 54 ans, j'ai aussi grandi dans ma tête. On ne pense pas forcément les mêmes choses quand on
09:14a 25 ou 30 ans si nous ne sommes dirigeants qu'à 55 ans. Je le prends toujours du bon côté. Le tout,
09:24c'est de dire les choses et d'être des grands garçons. Et puis, on se bagarre aussi dans un
09:30milieu où il y a une forte présence financière. Et donc, quand on me donne 5 et qu'on me propose 7,
09:42je comprends tout à fait qu'à un moment donné, il y ait une discussion. Maintenant, après,
09:46comme je dis toujours, sur un plan paternaliste en général avec les coureurs avec lesquels
09:55je suis et je signe, je leur dis toujours « attention, ce n'est pas certain que l'herbe soit
10:01plus verte ailleurs ». Et d'autre part, il ne faut pas faire n'importe quoi par rapport au fait de se
10:07dire « je vais gagner plus », parce que ce n'est pas forcément ça qui donne une pérennité dans
10:14la carrière. Il ne faut surtout pas faire du one-shot et penser à très court terme. Et parfois,
10:21c'est ce qui manque, peut-être d'avoir un vrai plan de carrière.
10:23Pour revenir un peu sur ce qui a fait l'actualité de cette intersaison normalement en France,
10:30on vous a vu assez alarmiste dans différentes interviews quant à l'avenir de votre équipe.
10:37Est-ce que vous pouvez un peu nous dire ce qu'il en est ou est-ce que ça en est au niveau des
10:43sponsors, au niveau des contrats ? Est-ce que vous pouvez un peu nous informer là-dessus ?
10:48Moi, je suis totalement livre ouvert par rapport à tout cela. D'une part,
10:52nos contrats de partenariat arrivent à échéance fin 25, mais ça, je dirais que c'est la vie
11:03normale de tous les jours. À un moment donné, ça commence, à un moment donné, ça peut s'arrêter,
11:09ça s'arrête. Donc, il faut soit renégocier, soit retrouver de nouveaux partenaires,
11:16soit réactiver les partenaires actuels. Maintenant, je dirais que c'est la vie de tous
11:22les jours. Et c'est pour ça que moi, j'ai surtout été alarmiste, non pas par rapport à cela,
11:27parce que ça fait partie de notre quotidien. On sait aujourd'hui qu'une équipe cycliste,
11:32les contrats sont assez court-termistes, entre un, deux, trois années parfois. Il y a d'autres
11:39équipes où c'est beaucoup plus pérenne, mais c'est comme ça. Je veux dire, après,
11:45on n'a que ce que l'on a et ce que les partenaires veulent bien faire. Et moi,
11:51je respecte tout à fait cela. Par contre, je pense que sur le côté alarmiste, j'ai été plus
12:00alarmiste sur le fait qu'il n'y ait pas un intérêt particulier post-JO par rapport au fait que nos
12:13partenaires aujourd'hui, c'est beaucoup, beaucoup d'argent aujourd'hui, une équipe cycliste. Et
12:18donc, je pense qu'il faut raisonner sur un plan plus factuel, plus économique en disant, voilà,
12:26on veut que ça marche encore, le sport, qu'il y ait des nouveaux partenaires, que les partenaires
12:33continuent, et peut-être de les aider sur un plan fiscal, sur un plan… Voilà. Alors, après,
12:40je sais que ce n'est pas facile, parce qu'aujourd'hui, pourquoi une équipe cycliste ou une
12:44équipe de foot ou une équipe de basket ne serait favorisée par rapport aux boulangers du coin,
12:48ou aux restaurants du coin, ou à l'ETI, pardon, ou la PME du coin. J'entends. Maintenant,
12:55après, je pense que le sport est un très bon vecteur. On l'a vu pendant les JO. Et moi,
13:00je pense personnellement qu'il faudrait réfléchir à vraiment être plus en faveur des partenaires
13:12qui voudraient mettre de la finance dans le sport. Pourquoi ? Parce que le sport est une très,
13:18très belle et grande école de la vie. Et donc, il faut encourager à faire du sport, à faire du
13:23foot, à faire du basket, et tout ça. Maintenant, après, sur un plan fiscal, on a quand même une
13:29belle différence et grande différence par rapport à nos concurrents étrangers. C'est tout simplement
13:35ça que j'ai voulu signaler, tout simplement dire. Maintenant, après, on a la chance aussi,
13:41il faut reconnaître, d'être en France et d'avoir toutes les protections, que ce soit sociales,
13:45que ce soit sur le plan médical. Je pense que beaucoup, beaucoup de sportifs aujourd'hui sont
13:52entre guillemets sur un plan retraite, sur un plan médical, sur un plan social, sont peut-être
13:57beaucoup plus sereins, couverts que bien d'autres sportifs étrangers. Et comment vous jugez
14:05cette arrivée de sponsors d'État ? Notamment, on a vu Bahreïn, UAE qui sont arrivés ces dernières
14:13années. On a aussi maintenant des grands multinationales comme Red Bull qui arrivent
14:18dans le vélo. Est-ce que c'est la disparition petit à petit des sponsors classiques, on va dire,
14:26comme chez vous avec Arkea et BNB ou chez Groupama, FDJ ? Est-ce qu'on se dirige petit à petit vers
14:32de plus gros budgets, donc de plus gros sponsors ? Est-ce que c'est un peu ce cercle-là vers lequel
14:40on se dirige ? Ce qui est sûr et certain, c'est que c'est de plus en plus de plus en plus gros
14:47budgets qui arrivent. Donc ça, c'est indéniable et le constat, il est là. Aujourd'hui, si on lise
14:57tout, aujourd'hui, le budget moyen doit arriver aux alentours des 30 et quelques millions,
15:04entre 30 et 35 millions d'euros pour une équipe cycliste avec 150 personnes, avec une cinquantaine
15:13d'athlètes en tout et pour tout. Donc là-dessus, on y va. Maintenant, aujourd'hui, sur le plan,
15:22là je parle de mon pays et quand je dis mon pays parce qu'on a certainement l'un des plus beaux
15:28pays au monde, la seule chose, c'est qu'aujourd'hui, on se bagarre par rapport à des salariés qui sont
15:35en France et aussi également par rapport à nos concurrents étrangers, des travailleurs
15:41indépendants. Donc déjà, on a tout compris, chaque employeur va comprendre que sans les charges,
15:48c'est quand même un peu plus facile. Donc une fois qu'on a dit cela, on n'a pas résolu le truc.
15:54Maintenant, après, on est quand même dans un état aussi conjoncturel qui est très anxiogène.
15:59Aujourd'hui, il y a beaucoup de choses qui n'avancent pas, il y a juste à suivre l'actualité.
16:07Et donc pour trouver des partenaires aujourd'hui, et je pense qu'il y a des vrais partenaires qui
16:12seraient capables de mettre beaucoup d'argent, la seule chose, c'est qu'aujourd'hui, c'est
16:16quand même relativement anxiogène et très perturbant. Donc en fait, quand on ne sait pas
16:22où on va, on freine les deux pieds et on n'avance pas forcément. Maintenant, voilà, c'est un constat
16:28que moi je donne. Maintenant, pour répondre à votre question, Titouan, sur les sponsors étatiques,
16:37ça fait partie de notre schéma. Ils sont là, donc on doit les respecter. Et si demain matin,
16:46un sponsoré étranger reprend une équipe à 50 millions d'euros de budget, alors que ça s'appelle
16:56X comme pays, eh bien, je veux dire, on ne va pas se priver. Ça serait quand même dommage. Et donc
17:02aujourd'hui, on peut tout dire et tout faire en disant, on n'est plus dans la concurrence,
17:09on n'est plus ci, on n'est plus ça. Maintenant, ça existe et je pense que ces équipes et les
17:15personnes qui ont pu trouver ses partenaires, bien tant mieux pour eux. Je veux dire, moi,
17:20là-dessus, je n'ai aucune jalousie à nous, à nous, à moi de faire pareil. Mais si je peux
17:26trouver un grand et beau sponsor breton, continuer avec mes partenaires d'aujourd'hui, eh bien,
17:32je ne serai que plus fier. Vraiment, vous aviez aussi été, dans cette interview dont on a parlé
17:39précédemment, assez alarmiste. Mais là, sur ce côté-là, sur le cyclisme français, vous disiez
17:4560% des équipes vont sûrement disparaître dans les prochaines années si ça continue comme ça.
17:53Est-ce que vous restez un peu sur le même point de vue ? Si on continue comme ça, je reste sur ce
18:01même point de vue. Maintenant, le tout, c'est qu'à partir du moment où on sait et on a quelques
18:07voyants qui s'allument, il faut essayer de changer. Je n'ai pas tous les arguments et toutes
18:14les solutions pour que ça change. Je pense que notre sport, il faut peut-être remodéliser. Il
18:19faut peut-être repenser aussi à certaines choses. Et ça, je pense qu'il faut se mettre autour d'une
18:24table. Parfois, on a un manque de communication entre les équipes. Et ça, c'est bien dommage.
18:32Chacun voit sa petite paroisse ou sa grande paroisse. Et puis, si l'autre est en difficulté,
18:38ce n'est pas forcément le souci du voisin. Et voilà, maintenant, à partir du moment où on a
18:46des voyants qui s'allument et on se dit qu'il peut y avoir problème dans 2, 3, 4 ans, il faut
18:52essayer de changer les choses. Il faut essayer de se mettre autour de la table et que toutes les
18:58parties prenantes se mettent autour d'une table, que ce soit les organisateurs, que ce soit les
19:04médias, que ce soit les équipes et puis les coureurs. Je pense que tous ces acteurs doivent
19:10se parler, communiquer. Justement, à partir du moment où on voit quelques dangers ou pas,
19:15peut-être que je me trompe totalement, mais à partir du moment où on voit quelque chose,
19:19je pense que ça mérite d'avoir une discussion et puis d'avoir des éclaircissements et peut-être
19:26de penser à, pas forcément à un autre modèle, mais peut-être à penser à améliorer le modèle
19:34qui existe. On peut clore un peu ce chapitre extrasportif et revenir au vélo. Vous êtes
19:4419e du classement UCI. On rappelle, c'est sur un classement sur trois années maintenant. 2025 sera
19:52la dernière année. Vous êtes la première place relégable avec environ 2000 points de retard sur
19:58Cofidis. C'est inquiétant. Vous voulez absolument vous battre pour rester en World Tour. Est-ce
20:07qu'une descente serait grave ? Quelle est votre réflexion ? Je resterais toujours sur mon point
20:16de vue. Comme je dis toujours, il ne faut pas jouer d'hypocrisie. Il ne faut pas dire que d'être
20:22en deuxième division, c'est bien. Non, c'est mieux d'être World Tour que de ne pas y être. Après,
20:28il faut relativiser. Ce n'est pas forcément une fin en soi non plus d'y être. Après, la seule
20:35chose, c'est qu'il y a quand même certaines conditions qu'il faut avoir, c'est-à-dire
20:42d'être dans les deux premières équipes, si on peut appeler ça pour le grand public,
20:49de deuxième division. Après, c'est vrai que d'être World Tour, ta fiche te donne une certaine
20:59sérénité dans la participation au programme des grandes courses. Et notamment, pour ne rien cacher,
21:08le point d'orgue, c'est quand même la participation autour de France. Pour un partenaire, d'y être ou
21:15de ne pas y être, c'est aussi complètement différent. Sur un plan philosophique, je le dis
21:22toujours, c'est quand même mieux d'y être que de ne pas y être. Après, c'est peut-être pas
21:27forcément une fin en soi, mais il faut quand même se battre pour y être. C'est le leitmotiv que j'ai
21:34donné, et que les directeurs sportifs, les entraîneurs, et aussi avec la conscience des
21:39coureurs, de se battre jusqu'au bout, tant que la ligne n'est pas franchie. Je rappelle que 1 000
21:45points, 2 000 points, 3 000 points sur une saison, ce n'est pas forcément énorme. Et ça s'est vu
21:51encore cette année, en 2024, on s'est aperçu qu'il y a eu des équipes qui avaient bien fonctionné
21:57la première année, qui ont mal fonctionné la deuxième année, et qui vont peut-être très bien
22:01fonctionner la troisième année, et vice-versa. Juste pour refaire un petit crochet du côté
22:08sponsoring, est-ce que ça serait plus dur de trouver des sponsors qui veulent investir dans
22:13une équipe de deuxième division, même si, comme vous l'avez dit, les deux premiers sont
22:16automatiquement invités dans les cours sur le tour ? Quelle est la différence entre une
22:23première division et une deuxième division au niveau sponsor ? Oui, comme je veux dire,
22:30ça rejoint la question précédente. C'est mieux d'y être que de ne pas y être, donc c'est
22:34obligatoirement beaucoup plus bankable si tu es World Tour que si tu n'es pas World Tour. Mais bon,
22:41à côté de cela, on a peut-être la plus grande société française sur un plan mondial avec Total,
22:50qui est en deuxième division. Et donc, peut-être qu'eux, aujourd'hui, je ne sais pas s'il y a des
22:56assurances pour faire le Tour de France. Maintenant, il y a quand même des chances qu'ils y soient.
23:02Maintenant, je ne vais pas jouer d'hypocrisie parce que je suis dix-neuvième et en disant
23:09que si on est en deuxième division, on est obligé de faire le Tour de France et ce n'est pas très
23:15grave si on est en deuxième division. Non, il faut y être, il faut se battre pour y être. Et je
23:19pense qu'en plus de ça, que ce soit les organisateurs se souviennent que l'année
23:24d'avant, tu étais en première division et que l'équipe, statutairement, a juste baissé de
23:32catégorie. Mais sur un plan mental, sur un plan équité sportive et tout cela, on est encore dans
23:40le match. Donc, on ne va pas balayer quelqu'un d'un coup de balai, d'un coup de revers de main,
23:47d'une équipe qui pourrait descendre dès la première année. Après, la deuxième année,
23:51ça, c'est autre chose. Il y a justement pour cette année 2025 qui approche à grands pas,
23:57quelles sont vos attentes pour votre équipe Arcabien Biotel ? Moi, j'ai toujours des attentes.
24:03D'une part, c'est que les équipes soient, quand je dis les équipes, que ce soit la féminine,
24:10le développement, l'équipe pour le tour, le cross qui va se terminer. Mais je veux dire,
24:15c'est d'afficher du plaisir et d'afficher aussi beaucoup d'envie. Et à partir du moment où il y a
24:24l'envie, il y a de la création, il y a ce qui va avec, c'est-à-dire des victoires, des secondes
24:32places, des troisièmes places. Mais le tout, c'est d'avoir le sentiment d'avoir tout fait pour
24:38réussir. Et à partir du moment où on a tout fait, ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on n'a rien
24:44à se reprocher et on a tout mis dans les bonnes cases pour réussir le meilleur projet possible.
24:51Maintenant, après, le sport, comme j'appelle à le dire, et heureusement d'ailleurs,
24:56ce n'est pas tout le temps une science exacte. Ce n'est pas tout le temps le plus fort qui gagne,
25:02et tant mieux, parce que sinon, il y a déjà trois, quatre équipes à dominer notre sport. Alors,
25:09ça veut dire que nous, les 15, 20 autres équipes ramasseraient des miettes. Donc,
25:16comme ce n'est pas une science exacte, ça donne permission, ça donne liberté aussi de se dire
25:23« écoute, moi, cette course-là, certes, il y a lui et lui qui sont au départ ou elle et elle qui
25:28sont au départ, mais peut-être que j'ai permission de croire de gagner ». Et ça, ça reste quand même
25:35aussi la qualité première peut-être de notre sport, mais ça devient de plus en plus compliqué,
25:43parce qu'on s'aperçoit que les grandes équipes aussi ont besoin non seulement de victoire,
25:49non seulement de points, et donc, ça affiche de plus en plus dans des plus petites courses
25:54où auparavant, ils n'avaient pas forcément envie de venir.
25:59Oui, justement, en parlant de ça, les dominations d'UAE, de Visma, de Red Bull,
26:09maintenant, qui arrivent en grande pompe, comment, en tant qu'équipe de bas de tableau sur ces
26:17dernières années, vous vivez ça ? Vous l'avez notamment évoqué, des équipes comme UAE qui
26:23s'alignent sur des courses de second rang, quelque chose qu'on voyait assez peu à l'époque.
26:29Comment ça se passe ? Personnellement, je le vis bien. À partir du moment où une équipe UAE
26:37participe à une course française, ou Visma qui va venir sur une épreuve française de plus petites
26:46catégories sur lesquelles auparavant ça ne les intéressait pas forcément, je pense qu'on a
26:51réussi un bon pari déjà. Ça veut dire que nos courses sont attrayantes, les organisations sont
26:56bien faites. Et puis surtout, je rappelle à le dire qu'en France, on a quand même une vraie
27:00bonne sécurité sur nos routes et sur les épreuves qui sont organisées. Personnellement, je le vis
27:10bien. Maintenant, après, la bataille n'est que plus dure. Les résultats ne sont qu'en plus durs
27:15à avoir, mais ça fait partie de notre sport. Heureusement pour mes coureurs, pour d'autres
27:26coureurs d'autres équipes, ils ne se bagarrent pas contre des cadets, mais de gagner contre UAE,
27:31de gagner contre Visma, on n'en sort que plus grand et ça fait partie de l'avancée d'un athlète de
27:39haut niveau. Je vois bien un garçon comme Kevin Auclin, il a envie de se confronter au haut niveau
27:47et pas forcément à un moment donné de tourner en rond et de se battre contre des gens de même
27:53valeur, mais il a envie d'aller progresser et de se battre contre des gens qui sont, sur le papier,
27:59plus forts que lui. Emmanuel, pour conclure cette interview, qu'est-ce qu'on peut vous
28:05vous souhaiter personnellement ou pour votre équipe pour cette saison 2025 ? Sur un plan
28:15personnel, moi, du moment que la santé aille et que ma famille aille, c'est ce qui me convient sur
28:21le plan personnel. Maintenant, après, ce qui me tient le plus à cœur, c'est que l'équipe
28:28puisse perdurer. Pourquoi ? Parce que j'ai une âme vraiment familiale dans cette équipe, ça
28:39représente 150 salariés, ça représente donc beaucoup de personnes, c'est une PME, et donc je
28:45me battrai jusqu'au bout justement pour soit convaincre encore les partenaires existants,
28:51ou en convaincre d'autres. La seule chose, c'est que le but de ma manœuvre, si tant bien est,
28:59on peut l'appeler comme cela, c'est vraiment de faire durer cette existence qui dure depuis 20
29:05ans presque sur cette équipe. Et le rayonnement que l'on a sur les routes françaises, sur les
29:12routes mondiales, je veux que ça continue justement par rapport à tout ce personnel
29:18qui est estampillé rouge et noir, tatoué rouge et noir, et avec le cœur qui brille toujours,
29:29les yeux qui brillent toujours justement par rapport à toute cette valeur d'équipe et ce
29:36qui s'est créé petit à petit. On n'a fait que progresser d'année en année, et aujourd'hui,
29:41c'est grâce à mes collaborateurs. Et donc, c'est pour ça que moi, sur un plan personnel,
29:44je me souhaite beaucoup de choses, mais c'est surtout, surtout, surtout pour l'équipe que je
29:51me battrai et pour l'âme qui règne tout au long de l'année et depuis de nombreuses années tous
29:58ensemble. Merci Emmanuel Hubert pour cette interview accordée à Cyclisme Actu. On vous
30:04souhaite une bonne saison 2025 avec votre équipe Arkea Bienvenue L'Hôtel. Merci Titouan,
30:09merci Cyclisme Actu et au plaisir de vous revoir.

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