Dans son édito du 07/01/2025, Thomas Bonnet revient sur les positions de La France insoumise vis-à-vis de l'attentat commis contre Charlie Hebdo.
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00:00On commémore aujourd'hui les dix ans de l'attentat islamiste contre la rédaction de Charlie Hebdo,
00:06sans oublier la policière de Montrouge, policière municipale, Clarissa Jean-Philippe,
00:10et évidemment les clients et le personnel de l'Hyper Cacher.
00:15Thomas, que reste-t-il de l'esprit Charlie dix ans après ces attentats islamistes ?
00:22Alors Romain, l'année 2025 nous renvoie à ce que nous étions il y a dix ans,
00:26moi, jeune journaliste habitant le quartier de République,
00:29j'assisterai malgré moi cette année-là aux horreurs du terrorisme islamiste au coin de ma rue.
00:34Ces attentats ont laissé en moi, comme pour beaucoup d'autres j'imagine,
00:36une marque profonde et indélébile.
00:38Alors depuis, les bougies se sont éteintes, les pancartes ont jauni, les slogans s'effacent,
00:44l'effroi ressenti lors de ces froides soirées de 2015, lui, demeure.
00:48A l'époque, de gauche à droite, la classe politique a l'unisson contre la barbarie islamiste,
00:53une rare unanimité, salutaire et compréhensible,
00:56tant nous étions tous sous le choc.
00:58A l'époque, la réaction de Jean-Luc Mélenchon est impeccable,
01:01lui qui était proche de certains dessinateurs de Charlie Hebdo, dont Charb,
01:05poste ce message sur les réseaux sociaux.
01:13Et mettons maintenant en parallèle deux déclarations à dix ans d'écart.
01:16En novembre 2015, l'élu de ce qu'est alors le Front de Gauche
01:19dit qu'il conteste le terme d'islamophobie.
01:22On a le droit, dit Jean-Luc Mélenchon, de ne pas aimer l'islam
01:25comme on a le droit de ne pas aimer le catholicisme.
01:28Et voici ce que publiait le même Jean-Luc Mélenchon ce week-end,
01:31il y a quelques jours à peine.
01:32L'ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve reprend dans l'Obs
01:36la thèse raciste selon laquelle une partie de la gauche considère cyniquement
01:40les musulmans comme une clientèle électorale à conquérir.
01:42Pour lui, l'islamophobie n'est pas une forme contemporaine du racisme.
01:47Alors qu'est-il arrivé au Jean-Luc Mélenchon de 2015 ?
01:50Où est passé l'ardent défenseur de la laïcité et de la critique de la religion ?
01:55Je crains que la théorie de Bernard Cazeneuve sur la clientèle électorale
01:59ne soit la bonne.
02:00Jean-Luc Mélenchon a donc trahi ses anciens idéaux
02:03et par là même l'esprit Charlie, Thomas.
02:05Oui, et ce n'est pas moi qui le dis, mais il n'y a qu'à voir le récent malaise
02:08au sein de la rédaction du journal satirique pour s'en rendre compte.
02:12Le journal L'Express rapporte cette scène qui se déroule en juin
02:16entre les deux tours des législatives.
02:18Musclé se déroule en conférence de rédaction
02:20quant à l'attitude à adopter vis-à-vis du barrage républicain.
02:24Résolument opposé au RN, la rédaction de Charlie Hebdo se déchire néanmoins
02:28sur l'attitude vis-à-vis de la France insoumise.
02:31À la même période, RIS, le directeur de la rédaction,
02:34écrit un éditorial qui résume très bien la situation.
02:37S'adressant aux électeurs, il interroge.
02:39Ont-ils soutenu, après le 7 janvier 2015, Charlie Hebdo
02:42pour avoir publié les caricatures du prophète ?
02:44Ont-ils donné raison à Samuel Paty d'avoir voulu discuter
02:47avec ses élèves des caricatures du prophète ?
02:49Ont-ils participé aux manifestations contre l'antisémitisme
02:52après les pogroms du 7 octobre 2023 ?
02:55Les candidats qui se sont tenus à distance de ces combats
02:58ne sont pas fiables et ne méritent pas votre suffrage.
03:01Je crois que tout est dit dans ces quelques lignes.
03:04RIS rappelle à ceux qui l'avaient oublié
03:06qu'on ne transige pas avec ces valeurs essentielles.
03:09Depuis quelques années, les élus insoumis ont donc pris leur distance
03:14avec cet esprit Charlie, avec Charlie Hebdo.
03:16Comment l'expliquer ?
03:17Eh bien, à l'image de leur leader, les députés insoumis
03:20imaginent qu'une critique appuyée contre le journal satirique
03:23leur attire la sympathie des électeurs musulmans.
03:26Manuel Bompard expliquait ces dernières heures à l'agence France Presse.
03:30En parlant de Charlie Hebdo, je le cite,
03:32leur ligne politique se rapproche de plus en plus de l'extrême droite.
03:35Certaines de leurs publications s'inscrivent
03:38dans un contexte de libération de la parole et des actes islamophobes.
03:42On se pince, pour le croire, à des fins électorales.
03:45LFI est prête à tous les reniements.
03:47En 2015, Daniel Obono, qui n'était pas encore député,
03:50disait sur son blog qu'elle n'avait pas pleuré Charlie.
03:52Force est de constater que c'est sa ligne qui l'a emporté désormais
03:55sur ce sujet comme sur tant d'autres,
03:58comme par exemple le 7 octobre 2023.
04:00Les députés LFI oublient à dessein le véritable sens du slogan
04:04Je suis Charlie.
04:05Il ne s'agissait pas de dire que nous étions tous
04:07des lecteurs assidus du journal,
04:09ni de trouver les dessins toujours réussis.
04:11La cause était plus grande,
04:13dire que la France est Charlie et que Charlie, c'est la France.
04:16La liberté d'expression chevillée au corps,
04:17l'esprit français à la pointe du crayon.
04:20Dire qu'il n'est pas tolérable, jamais,
04:22d'être menacé pour un dessin ou pour des idées.
04:24Alors pour finir, je reprendrai un autre slogan
04:27utilisé lors de la vague d'attentats de 2015.
04:29La devise de Paris,
04:31fluctuate nec mergitur,
04:32que l'on peut traduire par
04:33battue par les flots mais ne sombre pas.
04:35La République tient bon contre vents et marées,
04:37encore aujourd'hui, mais visiblement,
04:39certains ont décidé de quitter le navire.