Amandine Virassamy Sacri, danseuse professionnelle, nous livre son parcours et parle de son expérience dans le célèbre cabaret "Crazy Horse".
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00:00Tu es danseuse ? Oui c'est ça. En métropole ? Oui en métropole. Tu vis à Nice ? Oui. Mais tu as
00:10travaillé pour un cabaret très très très connu, très célèbre. C'est ça. Dis nous tout. Donc oui j'ai
00:17travaillé pour le Crazy Horse. Je ne suis pas restée longtemps parce que c'est pas un monde qui
00:24ne me correspond. J'ai besoin de contact avec les gens et le Crazy Horse ne me permettait pas
00:33d'avoir ce contact avec mon public. Donc du coup et moi qui suis très sociable et qui a besoin
00:42vraiment de... Tu es venue dans mon bureau, on a discuté dix minutes avant, c'est incroyable.
00:50C'est ça. Donc en fait j'ai vraiment besoin de ce contact avec le public, discuter avec eux tout
00:56ça. Mais ça fait une série de cartes de visite quand même. Oui c'est vrai. Je n'en parle pas
01:04souvent. Alors tu as donc commencé tes études à Nice. Tu m'as dit tout à l'heure que tu dansais
01:11depuis l'âge de ? Deux ans. C'est incroyable. Et tes parents t'ont toujours encouragé ? Toujours.
01:16Toujours toujours toujours et m'ont toujours poussé dans ce que je voulais faire. Donc j'ai
01:23toujours eu le soutien nécessaire pour pouvoir continuer dans ce domaine là. Donc tu as fait
01:29une école à Nice ? Exactement je suis allée dans une école privée qui s'appelle Off Jazz.
01:33De danse ? De danse. Et après ? Alors j'ai quand même commencé avant, c'est à dire que j'ai fait
01:40dix ans de conservatoire en classique. Donc le conservatoire régional de Nice. Ensuite j'ai fait
01:47mon bac à l'OREA mais avec la danse. C'est à dire que j'avais une option danse qui était très
01:53importante comme n'importe quelle option en SES ou S. Donc j'ai obtenu mon bac et à partir de mon
02:02bac j'ai voulu d'abord aller à la fac de lettres avec la danse. Donc je crois que c'était art et
02:12je sais plus trop. Mais en tout cas c'était avec la danse. Mais en fait moi je suis quelqu'un qui
02:19a besoin de danser tous les jours. Et en fait ça ne me correspondait pas parce que la première année
02:24à la fac on ne dansait pas, on faisait que de la théorie. La deuxième année on commençait un peu
02:29à danser et la troisième année c'était théorie et danse. Donc ça ne me correspondait pas. Donc j'ai démissionné
02:35de la fac et je suis allée dans cette école de danse qui s'appelle OFJazz pour faire des études
02:41professionnelles. Et là-bas j'ai obtenu mon EAT en classique et mon EAT en jazz. Donc c'est un
02:50examen d'aptitude technique. Pour faire court c'est dire que dans cette discipline on a un niveau.
03:00J'ai passé mes unités de valeurs c'est à dire anatomie, musique et histoire de la danse pour
03:12ensuite pouvoir obtenir le diplôme d'état de danse. Mais je ne l'ai pas fait parce que ça ne
03:20m'intéressait pas. Et pour l'instant je ne veux pas être prof, je veux danser. Je veux danser jusqu'à
03:27ce que mon corps m'empêche de danser. Juste une question, j'ai oublié de te la poser. Tu as quel âge ?
03:31J'ai 24 ans. D'accord. Donc est-ce qu'aujourd'hui tu danses et est-ce qu'aujourd'hui tu es heureuse dans ce que tu fais ?
03:38Oui. Je suis très épanouie, je suis une femme très épanouie. Quand je me lève le matin j'ai envie
03:43d'aller travailler. Je me couche, je me couche et je souris jusque là parce que j'ai fait une prestation
03:47incroyable. Le monde de la danse est parfois difficile mais quand on est entouré de bonnes
03:53personnes ça devient encore plus incroyable. D'un côté on fait la fête et en même temps on travaille.
04:03Et d'un côté on ne dirait pas du tout qu'on travaille parce que c'est notre
04:07passion. On fait ça avec le cœur. Le matin je ne me dis pas que je n'ai pas envie d'aller bosser.
04:13Il faut aller travailler. Oui il faut aller travailler parce que je sais que j'ai des gens autour de moi
04:17le matin ils se lèvent, ils n'ont pas envie d'aller travailler. Alors que moi c'est le contraire. Je suis là, je suis
04:23toute excitée parce que je dois me maquiller. Je me dis quel maquillage je peux faire, quelle
04:27coiffure, quel ci, quel ça. Vraiment c'est tout ce que j'aime, tout ce que j'ai voulu.
04:32Est-ce que ça paye bien ? Oui et non. C'est à dire oui si vous ne voulez pas de vie de famille et non
04:43si vous voulez avoir une vie de famille, avoir un copain. Clairement créer une famille parce que
04:49c'est très compliqué. On va dire tous les jours de rebours, par exemple Noël, le Nouvel An, c'est là
04:55où nous on travaille le plus en fait. Parce que les gens ont des demandes, on est partout. Moi je
05:01voyage partout dans le monde donc en fait c'est compliqué d'être là. Par exemple là je suis à
05:07La Réunion pendant deux mois mais c'est parce qu'en vacances et ce qui me permet, mon travail me
05:13permet aussi de choisir mes vacances. Donc j'ai pu prendre deux mois mais c'est exceptionnel.
05:19Sinon je travaille tous les mois de l'année et je dors presque entre deux et quatre heures par
05:24nuit. Ça veut dire pas d'enfants ? Pas d'enfants. C'est un métier donc de ce point de vue là qui
05:29quand même a des contraintes importantes. Oui il y en a plusieurs. Et s'il y a un enfant, ça veut dire quoi ?
05:36C'est la fin de la carrière ? Pas forcément mais ça veut dire enlever des chauds. C'est à dire dire
05:48ce jour là je peux pas parce que je dois emmener mon enfant à tel ou tel endroit, parce qu'il est
05:52malade. Et c'est très compliqué parce que si notre enfant par exemple est malade, c'est très
05:58compliqué pour nous en tant que danseuse de dire à notre patronne qu'il faut trouver notre
06:03danseuse. Et c'est le risque de qu'on ne te rappelle pas demain. Et c'est ça en fait. Parce que c'est un monde
06:10de requins. C'est le premier arrivé, premier servi. Et que le meilleur gagne. Tu n'as donc fait que
06:17passer au Crazy Horse. Quel genre de spectacle est-ce que tu fais aujourd'hui ? C'est un peu les
06:22mêmes. Du talon, je fais du burlesque, les plumes, on va dire tout ce qu'on voit, les nipises, les marquises.
06:29C'est très nu, je fais beaucoup du nu. Après j'aime ça, je suis à l'aise avec mon corps. C'est ce qui
06:38rapporte le plus aussi. Après je fais toutes les sortes de toutes sortes de danses. Je fais
06:43du hip hop, je fais de l'afro. On me prend pour tout mais moi ce que j'aime, ce qui me fait vibrer,
06:49c'est vraiment les plumes, les paillettes. J'aime beaucoup les shows burlesques avec les plumes.
06:57C'est à dire quand j'ai des éventails et que j'ai des nipises et une marquise et que je suis en
07:01contact avec le public. Parce que tout simplement on voit dans le regard des gens qui sont un peu
07:07choqués mais en même temps ils voient un peu la beauté de l'art. Et moi c'est ce que j'aime le plus.
07:13C'est qui je crois que c'est ? Lady Gaga pour l'inauguration des Jeux Olympiques ?
07:18Justement, Lady Gaga a fait ce show là et il y avait une copine, une ancienne copine à moi
07:25du Crazy Horse qui dansait pour elle. Est-ce que c'est un plus dans ce milieu là d'être métissée ?
07:31Oui, carrément. On me demande beaucoup parce que je suis métisse et que j'ai les cheveux frisés.
07:39Après j'ai mon corps qui va avec aussi. Je suis très grande, je suis élancée.
07:45Donc du coup, surtout en métropole, on est en demande. On veut de l'exotisme.
07:55Alors ça c'est le bon côté. Mais est-ce que dans l'autre face de la médaille,
08:00est-ce que tu as eu à faire face à du racisme par exemple ?
08:04Oui, ça m'est déjà arrivé. Du genre, je ne veux pas celle-là, elle est trop foncée,
08:12trop les cheveux crépus. Moi je veux une blonde aux yeux bleus, toute blanche.
08:17Ah, d'accord.
08:19Cela étant, ce n'est peut-être pas du racisme non plus. Chacun a le droit d'avoir des goûts.
08:23Oui, mais en fonction de là où on est avec les gens.
08:27Le plan sur lequel elle s'est dit peut-être aussi.
08:31Je connaissais bien le personnage et je savais très bien ce qu'il pensait.
08:37Si jamais demain, je suis sûr qu'en te regardant, il y a plein de jeunes réunionnaises qui vont rêver,
08:42qu'est-ce que tu leur conseillerais ?
08:45Keep going. Il faut continuer, il faut croire en soi, il faut s'aimer.
08:50Sauter la mer ?
08:51Ah oui, il faut aller. Parce que malheureusement, ce n'est pas à La Réunion qu'on va pouvoir s'épanouir en tant que danseuse.
09:01Même s'il y a nos danses locales.
09:06Tu danses à Malouia ?
09:07Oui, bien sûr. J'adore ça. Mais malheureusement, il faut y aller, même si on a peur, même si on est loin de sa famille.
09:15C'est super important de pouvoir se dire, au moins j'ai essayé.
09:19Et si ça ne fonctionne pas, ce n'est pas grave. L'échec, ça nous apprend à grandir.
09:25En vrai, il n'y a pas d'échec. C'est une expérience bénéfique pour la vie.
09:36On va dire ça comme ça.
09:37Et moi, je dirais qu'il faut aller, il faut vraiment...
09:42Au bout de ses envies.
09:44Au bout, parce qu'on n'a qu'une seule vie et que ce n'est pas demain, quand on aura 40 ans, qu'on se dira, j'aurais dû le faire.
09:52Parce que malheureusement, c'est là, quand on est jeune, quand on a le peps, on a l'énergie qu'il faut le faire.
09:57Tu m'as dit que ce n'est pas à La Réunion qu'on gagnerait sa vie.
10:00Mais justement, toi qui as connu les paillettes, Métropole, est-ce que tu n'as pas envie de revenir à La Réunion et de faire quelque chose d'ici pour ton île ?
10:08Si, j'ai très envie.
10:09J'ai très, très, très, très, très envie.
10:11En fait, ça me trotte dans la tête depuis un certain temps.
10:15J'ai très envie d'ouvrir un cabaret où je prendrai des danseuses sur audition et pouvoir faire découvrir ce monde-là aux Réunionnais, en fait.
10:27Parce que je vois qu'il n'y a pas...
10:30Il y a eu une troupe à un moment donné, je me souviens l'avoir vue dans un cocktail qui faisait un show.
10:35Une troupe brésilienne, oui.
10:36Non, une troupe french cancan.
10:38OK, waouh.
10:40C'est déjà bien.
10:42Je ne sais pas si ça existe toujours, mais je sais qu'à un moment donné, ça a existé.
10:46À ma connaissance, là, maintenant, je ne sais pas.
10:49Mais moi, de moi, c'est non.
10:51Parce que quand j'ai voulu chercher, je n'ai pas trouvé.
10:56Parce que je compte... Je suis née en Métropole, mais je compte finir ma vie ici.
11:00Donc en fait...
11:01Oui, parce que c'était avec ça que je voulais conclure.
11:04Quand je t'ai contactée, tu m'as dit que tu étais ici en vacances,
11:06mais parce que j'ai besoin de venir assez souvent.
11:08Oui, j'ai besoin de revenir sur mes terres, la terre de mes ancêtres.
11:13J'ai besoin de ressentir toute l'énergie volcanique que l'île peut me faire ressentir.
11:18Parce qu'en Métropole, c'est...
11:21C'est molle.
11:22C'est très compliqué.
11:26On va dire que l'énergie ne passe pas là-bas.
11:28Alors que là, quand je suis ici, je suis avec ma famille,
11:31je ressens vraiment tout et je suis heureuse.
11:35Pour vous dire à quel point, c'est que quand je suis dans l'avion,
11:38j'ai même pas eu le temps de poser...
11:41L'avion n'a même pas eu le temps de poser ses roues sur l'île
11:44que je suis déjà en train de pleurer parce que je suis déjà chez moi, en fait.
11:47Je me sens chez moi ici.
11:50Très bien.
11:50Écoute, Amandine, merci.
11:53Et puis j'espère sincèrement que ça donnera envie à des jeunes réunionnaises,
11:57et réunionnais d'ailleurs, parce que maintenant, il y a aussi des réunionnais.
11:59Ah oui, bien sûr.
12:01On a besoin de garçons, venez.
12:02Et s'ils veulent te contacter, ils font comment ? Instagram ?
12:06Instagram, oui, Instagram.
12:10Alors mon Instagram, c'est lavenusnoir974.
12:13D'accord.
12:14S'ils ont besoin de conseils, s'ils ont besoin de contacts,
12:17qu'ils n'hésitent pas à le faire.
12:19Ah oui, vraiment.
12:19Je serai ravie de répondre à leurs questions.
12:21Merci.
12:22Avec plaisir.