Après deux comédies romantiques - "Tout le monde debout" (2018) et "Rumba la vie" (2022) - à contre-courant de Patrick Chirac, son personnage de séducteur impénitent de la saga "Camping", Franck Dubosc signe avec "Un Ours dans le Jura", une comédie macabre oscillant du rire à l'effroi.
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00:00Notre invité ce matin est un acteur et réalisateur, bonjour Franck Dubosc, c'est l'un des événements
00:06de ce tout début d'année au cinéma, Un ours dans le Jura, votre troisième film
00:11vient de sortir en salle avec un super casting, Laure Calamy et vous-même, les cultivateurs
00:16de sapins, Benoît Poulvord, le major de gendarmerie, Kim Igelin, sa fille, Joséphine Demaux, gendarme,
00:23Emmanuelle Devos, la patronne du club échangiste, Un ours dans le Jura, Franck Dubosc, pourtant
00:29il n'y a pas d'ours dans le Jura ? Ben si, il y en avait un, il y en avait un qu'on a
00:33trouvé, non il n'y a pas d'ours dans le Jura, c'est ce que répètent tous les personnages
00:37au début du film. C'est ce qui surprend, effectivement. Et c'est l'arrivée de cet
00:40ours qui va déclencher des événements en cascade et des morts en pagaille. 8, je crois
00:47qu'il y a 8 morts, j'ai compté, comme dit Benoît Poulvord dans le film, plus de morts
00:50que d'habitants. Dès le début on sait que c'est votre personnage qui a tué, je n'en
00:54dis pas plus, mais l'important ce n'est pas tellement l'enquête en fait, même si elle
00:57est loufoque et drôle, c'est de voir comment ces meurtres et la découverte d'une très
01:02grosse somme d'argent vont bouleverser en fait la vie de vos héros. Pas forcément
01:07en mal d'ailleurs, je n'en dis pas plus. Oui, c'est ce que je voulais d'ailleurs, ça avait
01:12failli être le titre, l'argent ne fait pas le bonheur, mon cul. Et comme je le dis, l'argent
01:17c'est vulgaire dans le titre, et puis ce n'était pas le thème du film non plus. Mais en l'occurrence
01:22les gens, c'est-à-dire que le fait que cette somme d'argent, ces événements arrivent
01:27dans leur vie, fait que les gens se couplent d'ailleurs, que je forme avec l'or qu'elle
01:31a mis, se reparlent. Ce gendarme parle aussi à sa fille, c'est-à-dire que tout à coup,
01:38même si c'est par petite somme, l'extraordinaire fait que ça améliore leur ordinaire dans
01:44le sens de pouvoir se reparler et se revoir, re-regarder on va dire.
01:49C'est assez amoral quand même, non ? Complètement. Alors je ne sais plus si on dit amoral ou
01:53immoral. Ou les deux. Mais je pense que c'est les deux. Tout ce qui est I, A, O, moral,
01:59tout ce que vous voulez, mais effectivement oui. Et c'était votre parti pris des défunts ?
02:02Oui, oui, oui. Heureusement il y a des gens honnêtes. Il y a un curé même qui se sert
02:07dans la caisse. Oui, mais là ça paraît moins... Oui, mais c'est pour le bien des
02:13autres, c'est pour le bien de ses oies, il y a un toit qui fuit, comme il le dit, une
02:16bête malade. Il aide un peu tout le monde. Oui, c'est une belle petite voiture décapotable
02:21en plus, ça lui fait du bien. Non, non, oui, tout le monde. Alors il y a des gens honnêtes
02:26sur cette planète, je l'espère, mais dans mon film ils n'y sont pas passés.
02:28Mais c'était votre parti pris, vous teniez... Pour l'humour, oui, pour le rire, oui. Oui,
02:34c'était pour aucune démonstration et ne donner aucune leçon, mais c'était pour le
02:37rire, oui. C'est un thriller, on est loin de l'atmosphère
02:40beaucoup plus solaire des comédies qui ont fait votre succès et qui vous ont fait aimer
02:45et qui vous font aimer de millions de français, évidemment, on pense à la série des campings.
02:49Là c'est plus habillé, il y a plus de doudounes. Oui, il y a plus de doudounes, il fait froid,
02:52il y a de la neige. Pourquoi vous aviez envie de faire une comédie noire ?
02:56Je ne me suis pas fixé comédie noire ou genre, un genre spécial. Je me suis dit juste que
03:03j'avais envie de renouer avec ce que j'aimais aussi quand j'étais gamin, c'est les méchants,
03:08les gentils, un côté western comme ça. Au début de l'écriture, quand j'ai rencontré
03:13Sarah Kaminsky qui a écrit le film avec moi, j'ai dit je voudrais un western rural.
03:18Je voudrais qu'on se retrouve à la campagne, je voudrais des gentils, des méchants, de
03:22l'humour parce que j'aime ça. Et puis voilà, j'avais ces idées de mec qui trafique de
03:27la drogue, d'accident de voiture, de millions d'euros dans un coffre. Tout ça, c'était
03:32l'envie de faire du cinéma, une histoire de cinéma.
03:34Mais vous dites, je disais c'est votre troisième film comme réalisateur, après Tout le monde
03:39debout et Roomba la vie, vous dites maintenant j'ai envie de faire des films que j'aurais
03:42envie de voir comme spectateur ?
03:43Oui, bah attention, j'aimais aussi voir Tout le monde debout et Roomba la vie, mais…
03:47Et justement depuis que je suis réalisateur, oui, en tant que réalisateur…
03:52Ils vous correspondent plus que ceux que vous avez faits comme acteur avant ?
03:55Oui, j'aime beaucoup les films que j'ai faits comme acteur, je renie absolument pas
03:58mes personnages ou les films de comédie au contraire et je remercie tous les réalisateurs
04:02qui m'ont confié ça et qui me confieront je l'espère encore. Mais c'est surtout…
04:06Bah en tant que réalisateur oui, puisque j'ai le choix on va dire d'écrire mes
04:11films, tant que le public vient, après j'aurai plus le choix, mais c'est… Bah je fais
04:18des histoires que j'ai envie de voir, oui, après je fais pas forcément les rôles que
04:23j'ai envie de jouer, je fais les histoires que j'ai envie de voir, en revanche maintenant
04:26au cinéma j'ai envie de jouer des rôles que j'ai envie de jouer.
04:28Et qu'on vous les propose ?
04:30Qu'on me les propose, oui.
04:31Donc vous restez acteur et réalisateur ?
04:32Ah oui, je reste acteur, oui j'aime ça, j'aime laisser les autres faire la part difficile.
04:36Sur le côté comédie noire, vous dites aussi, j'aime bien le côté « et en plus on rit ».
04:41Oui, oui, c'est comme en séduction, je me suis toujours rendu compte que dans la séduction
04:46c'est un mec qui est… Un beau mec ou une belle femme qui est en plus intelligente ou
04:55poète, on va dire « et en plus il est intelligent ». Vous voyez, ou un mec qui a l'air austère
05:00et qui est un peu drôle, « et en plus il est drôle ». On va toujours noter le « et
05:04en plus ». Et ce que j'aime c'est que c'est un thriller « et en plus c'est drôle ».
05:07Vous parliez du fait que vous vouliez faire un Polar Rural, on vous parle beaucoup des
05:13frères Cohen, de Fargo, moi j'ai beaucoup pensé à Polar Park qui était une formidable
05:17série d'arté avec Jean-Paul Rouve, ça se passait dans le Doubs.
05:21C'est dans le Doubs, oui, on ne s'était pas loin non plus.
05:23Je l'ai regardé quelques épisodes, d'abord parce que j'aime beaucoup Jean-Paul Rouve,
05:27et après, mais j'ai pas voulu trop m'influencer, mais c'est vrai que c'est la neige, c'est
05:32le côté un peu décalé comme ça, oui, sans être influencé, il y a un cousinage.
05:37Une atmosphère qu'on retrouve et qui est vraiment formidable dans les deux films.
05:41On vous ramène sans cesse, et je l'ai moi-même fait, et c'est normal, vu la popularité
05:47de ce personnage à Patrick Chirac, votre héros de camping, là on l'a dit, on est
05:51loin de l'ambiance des Flos Bleus, mais je vois un fil rouge entre tous ces films dans
05:56votre carrière, c'est le souci de ne jamais mépriser vos personnages.
06:01Même de leur redonner une dignité, de redonner une dignité à ce qu'on appelle les petites gens,
06:05c'est ça que vous essayez de faire ?
06:07Oui, oui, j'aime ça, j'en fais presque pas exprès, ça me paraît normal, c'est-à-dire
06:12que j'ai plus de facilité à écrire des gens simples, des gens ordinaires, pas dans
06:18le sens péjoratif, parce qu'ordinaire ça peut être parfois un peu péjoratif, des
06:22gens simples.
06:23J'aime ça, avec la vie, avec le cinéma, avec tout ça, je suis devenu un peu moins
06:31simple.
06:32Oui, c'est sûr.
06:33Forcément.
06:34Forcément.
06:35Vous venez d'un milieu populaire, à côté de Rouen.
06:39Oui, j'ai un milieu populaire, et j'aime m'y retrouver dans les personnages que j'écris.
06:42Là, ces personnages, c'est leur calamit, et vous, ce couple, vous l'avez dit, qui
06:47ne se parle plus, qui galère avec son entreprise de sapins, alors ils en vendent à Noël,
06:52puis le reste du temps ils font des cagettes.
06:53Comme on le dit, on fait un boulot de merde, on est un couple de merde, on fait un boulot
06:58de merde, on vend des cagettes.
06:59Il y a le fils qui ne va pas bien, enfin, en tout cas, ils se demandent s'il ne serait
07:03pas différent.
07:04Oui, il y en a un qui le trouve normal, l'autre qui le trouve pas normal, ils ne sont pas
07:07d'accord là-dessus.
07:08Et puis, encore une fois, même si ce qu'ils font ne s'avère pas très moral, ça va leur
07:13permettre de se relever.
07:14Mais oui, c'est justement ce moment où elle lui dit, on est un couple de merde, on fait
07:20de la merde, on est de la merde, on est des parasites, et elle lui sort toute une diatribe
07:24comme ça, et au bout du compte, mon personnage lui dit, ça fait longtemps qu'on ne s'était
07:28pas parlé.
07:29Et c'est vrai que moi, j'aimais ce moment-là, j'aimais voir l'or partir en vrille comme
07:34ça et pouvoir, derrière, clore la conversation comme ça.
07:37Justement, c'est comment de diriger, puisque vous jouez et vous dirigez des Rolls Royce
07:43comme Lord Calamy ou Benoît Poulvard, et puis Emmanuel Deveau, Joséphine Demau, Kimi
07:47Hichlin, que j'ai citées.
07:48Justement, vous voyez, la métaphore avec une voiture, moi, je prends toujours un instrument
07:53et je ferais mieux de prendre avec une voiture, c'est que plus la voiture est sophistiquée
07:59et racée, on va dire, plus c'est difficile de la conduire, plus il faut faire attention,
08:05plus ça va vite.
08:06Donc il faut être à l'écoute, il faut être pédagogue, il faut être plein de choses
08:11parce que ce sont des acteurs qui ont un passé ou qui savent faire les choses, donc il faut
08:16les amener vers soi, c'est plus compliqué.
08:19Le résultat est mieux, mais pour y arriver, il faut y mettre du leurre.
08:25C'est à vous d'y mettre du leurre ! J'aime bien l'image !
08:30Vous aviez cette envie de réalisation depuis longtemps, c'est votre troisième film donc,
08:33mais vous expliquez que vous aviez tellement envie d'être aimé que vous aviez peur d'endosser
08:38les habits de chef.
08:39Vous avez réglé ce problème ?
08:41Oui, oui, j'ai réglé ce problème.
08:43Oui, c'est jeune, je me disais, réaliser, c'est moi j'allais chercher mes copains,
08:46mes voisins, après l'heure du bain, donc ils étaient souvent en pyjama, on avait 12-13
08:50ans, j'avais ma petite caméra, je disais, venez on va faire un film, je les amenais
08:54dans ma chambre et puis on faisait des bagarres, des trucs, on se filmait et eux ça les faisait
08:58chier.
08:59Et c'était Frank Tocque à notre porte encore pour faire un de ses films et tout.
09:03Bon, et je me suis dit, c'est pas le poste que je veux, le chef, et puis je me suis rendu
09:08compte avec le temps qu'un réalisateur c'est pas forcément un chef, c'est quelqu'un qui
09:11a une idée, qui a une envie, qui doit mener tout le monde, mais sans se faire détester
09:15pour le coup, donc ça passe maintenant, j'espère ne pas me faire détester quand je dirige
09:19une équipe.
09:20Quand on lit les interviews de Benoît Poulevard, par exemple, j'ai pas l'impression que ce
09:25soit le cas.
09:26Non, non, non, il a apprécié.
09:27Mais au début, le premier jour, il s'est dit, va me faire chier, je le sais parce qu'il
09:31est venu me voir quand il a vu le film, il a adoré le film, j'en étais très fier,
09:34et il m'a dit, oh mon Francky, je comprends et je te remercie de m'avoir fait chier.
09:37On peut voir le résultat justement, dans un ours dans le Jura, en salle, et on vous souhaite
09:44pour bien commencer 2025 beaucoup d'entrées.
09:46Merci beaucoup.
09:47Bonne année Franck Dubosc.
09:48Bonne année à vous tous.
09:49Et toutes.