• il y a 4 jours
Elle ne le dira pas elle-même, mais nous, on peut : Maya Kamaty est une femme puissante. “Sovaz” et fière de l’être, elle est une artiste engagée qui valorise la langue créole tout en incarnant la force des femmes réunionnaises à travers son parcours et sa musique.
Transcription
00:00En étant une femme, vous devez faire encore plus, 20.000 fois plus, 20.000 fois mieux.
00:06Et quoi que vous faites, ce ne sera quand même pas bon.
00:09Je commence à être en paix avec ça et à être capable d'assumer cette midi, cette midi pas.
00:31Là, tout le temps, dis à moi que moi, c'est la relève.
00:34En étant la fille de Gilbert Pugna et de Annie Gondin.
00:37C'est vraiment des histoires double tranchantes, on m'y dirait.
00:45C'est à la fois l'espèce de fardeau, l'espèce de poids sur les épaules.
00:50De porter cette mission-là parce qu'il faut que je m'y écrive de telle façon.
00:55Il faut que je m'utilise ces mots-là.
00:58Moi, les militantes, de cette façon-là, ils font autre chemin pour.
01:01On doit faire comme ça et on n'a point trop voix au chapitre.
01:05Et en même temps, une fois que je m'en ai démaillé de tout ça-là, c'était pour moi un véritable trésor.
01:14Aujourd'hui, je suis capable de dire qu'au-delà du militantisme, c'est des valeurs.
01:20C'est un savoir-vivre créole, une façon banale d'éduquer avec mon petit frère.
01:29Il faut montrer, prouver.
01:32Et moi, j'ai vraiment appris à détacher-moi de ça.
01:35Et donc, quand je me réveille le matin, je crée ce cocon-là avec ma famille, avec mes amis,
01:45avec des gens qui aiment partager un bon manger, un bon gazon-manger et un bon manger pour le cœur aussi.
01:54Il y a un paquet d'injustices que les bandes artistes réunionnais, pas que femmes, rencontrent.
02:00Déjà, quand on chante en créole, quand on arrive en France, souvent, il y a parfois une espèce de condescendance.
02:10Par rapport au groupe dehors, le groupe de la Réunion, il sera moins payé, il est moins considéré, il est moins bien accueilli.
02:18Et après, quand il grogne un peu, il dit pour qui ça vous prend ?
02:24Tu t'es pris pour une diva.
02:26C'est pour ça que moi, j'ai écrit le morceau « Sauvage ».
02:28Je dis, vous pouvez appeler moi « Queen » ou bien « Diva » comme vous voulez.
02:31Moi, j'ai parlé avec ça, maintenant, il fait ce que j'ai envie de faire.
02:34Et vous pouvez dire ce que vous avez envie de dire.
02:36Le silence n'est pas le silence n'est pas le silence.
02:46Il y a ce mansplaining, il y a le paternalisme, il y a le sexisme, il y a du harcèlement.
02:52Combien de fois, la fin arrivée, qu'un programmateur ou même un musicien, il dit à vous,
02:57vous ne voulez pas venir avec moi dans ma chambre d'hôtel en fin de soirée ?
03:00Ça, la fin arrivée, un tas de fois.
03:03Ou bien sinon ça, il raconte des affaires sur vous.
03:06Moi, je veux dire, j'ai une réputation, une réputation qui précède à moi.
03:11Et comme je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est comme si j'étais redevable.
03:14Si j'arrive là où je suis, forcément, je vais coucher avec quelqu'un.
03:19Donc, il fait mal.
03:22Mais moi, je sais que je l'ai fait, je sais que je ne l'ai pas fait.
03:26Aujourd'hui, c'est une source intarissable d'inspiration et je m'y écris à fond la caisse dessus.
03:31Parce que c'est des années après que je me rends compte qu'au tout début, je suis un peu une glousseuse.
03:37Je rigole un petit peu.
03:39Quand je fais des invitations comme ça, je rigole un petit peu.
03:45Et aujourd'hui, non, je ne rigole plus et je me dénonce.
03:51L'album Sauvage, c'était vraiment un marmai comme Skyron,
03:56qui redonne à moi cette confiance-là.
03:59Parce qu'il y a des gens, parfois des hommes, très souvent des hommes,
04:07qui m'ont fait croire que je n'étais pas capable de faire,
04:10qui m'ont fait croire que sans Banna, je n'aurais pas pu faire rien.
04:13Et pour une fois, je suis tombée sur ce bonhomme-là, justement, Skyron.
04:17Pour une fois, je suis tombée sur ce bonhomme-là, justement, Skyron,
04:20qui donne à moi cette confiance-là de reprendre les rênes
04:24et que je lui comprends cette envie de faire passer comme message,
04:28mais pour moi-même.
04:29C'est une reprise de confiance, une reprise de conscience aussi.
04:33Et je me dirais que c'est fantastique ce sentiment de réappartenir à vous-même.
04:40C'est vrai que quand des gens critiquent à toi en permanence,
04:45des fois, tu as envie de baisser les bras.
04:47Et oui, des fois, je pleure, je me casse.
04:51Et je passe de très mauvaises journées parce que des gens me blessent.
04:55Et souvent, c'est des gens que je ne connais même pas
04:58et qui ne connaissent pas moi non plus.
05:00Du coup, je ne peux pas dire que je balaie tout ça.
05:04Ce n'est pas vrai, ce ne serait pas vrai.
05:07Mais en tout cas, comme je dis, c'est une source d'inspiration.
05:10Donc moi, je trouve ce métier-là passionnant.
05:12Je suis toujours en recherche d'apprentissage et d'apprendre de nouvelles choses.
05:16Je rencontre des gens, je parle avec des gens,
05:19échanger, avoir des avis différents.
05:22C'est absolument extraordinaire.
05:24Tant qu'ils ne bataillent pas les gaillards
05:26et tant que ce n'est pas une méchanceté gratuite,
05:28moi, il va à moi.
05:29Donc, voilà, forcément, c'est une source d'inspiration.
05:35Voilà, forcément, moi, je suis par contre un petit peu pessimiste
05:41sur la marche de ce monde-là qui va complètement à l'envers.
05:46Mais peut-être que c'est ça qui fait l'œuvre à moi tous les matins aussi,
05:48de dire que peut-être qu'il est possible de garder à nous d'un miroir
05:51et de changer un coup sur ces affaires-là,
05:53parce que là, nous, on est en train de faire n'importe quoi.

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