Un père de famille condamné en novembre à 20 ans de réclusion criminelle pour avoir violé et livré sa fille à des inconnus. Quelques jours plus tard, dans le Maine-et-Loire, un père est mis en examen, soupçonné d’avoir violé et fait violer sa fille de quatre ans. Selon un sondage Ipsos réalisé en novembre 2020, 1 Français sur 10 confie avoir été victime d’inceste. Un chiffre glaçant. Elisa Trannin et Florine Silvant, journaliste à BFM Radio, reçoivent dans Affaire Suivante, Aude Doumenge, chargée de plaidoyer et de communication pour l’association Face à l’inceste.
Production et rédaction: Charlotte Lesage, journaliste police-justice de BFMTV.com.
Production et rédaction: Charlotte Lesage, journaliste police-justice de BFMTV.com.
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00:00Un père de famille condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour avoir violé et livré sa fille à des inconnus.
00:05Cette affaire sordide a été jugée en novembre dernier devant la cour d'assises de Draguignan.
00:10La victime, une adolescente, a d'abord été violée à plusieurs reprises par son père adoptif et ce dès l'âge de 13 ans.
00:17Puis elle a été contrainte par ce même homme à avoir des relations sexuelles avec des inconnus recrutés sur un site de libertinage.
00:24Autre affaire, cette semaine dans le Maine-et-Loire, un père a été mis en examen, soupçonné d'avoir violé et fait violer sa fille de 4 ans.
00:32Selon un sondage Ipsos réalisé en novembre 2020, un Français sur 10 confie avoir été victime d'inceste.
00:39Ce chiffre est glaçant.
00:41Je suis Elisa Tranin et vous écoutez un nouvel épisode d'Affaires suivantes, le podcast inédit.
00:47Florine Sylvan, bonjour. Vous êtes journaliste chez BFM Radio. Bonjour, Haute Doumanche, soyez la bienvenue.
00:57Vous êtes chargée de plaidoyer et de communication pour l'association Face à l'inceste.
01:02Nous reviendrons dans un instant avec vous sur le combat de l'association contre l'inceste et puis ses conséquences sur les victimes.
01:09D'abord Florine Sylvan, parlez-nous de ce père de famille condamné le 22 novembre dernier pour avoir violé et livré sa fille adoptive à des inconnus.
01:18En novembre, la cour d'assises de Draguignan a condamné un père de famille à 20 ans de réocclusion criminelle,
01:24avec une période de sûreté de 2 tiers pour avoir violé et livré sa fille adoptive à des inconnus.
01:30L'affaire commence en août 2021. C'est un passant qui donne l'alerte aux forces de l'ordre.
01:35Car un peu plus tôt, il a croisé une jeune fille de 15 ans en pleurs dans la rue d'une commune du Var.
01:40Cette adolescente est paniquée, elle lui dit que son père adoptif l'a violé plusieurs fois,
01:45donc elle est tout de suite auditionnée par les gendarmes et son père aussi.
01:48Et là, elle va expliquer aux enquêteurs avoir avorté de son père dont elle était amoureuse.
01:53Oui, elle se confie et c'est de plus en plus insoutenable. Elle parle de rapports sexuels réguliers avec son père adoptif.
01:59Elle a du mal à dire depuis quand ça a commencé, peut-être 2 ou 3 ans avant, donc à ses 13 ans.
02:04Elle explique avoir avorté de son père adoptif en décembre 2020.
02:08Et ce qu'elle va aussi dire aux enquêteurs, c'est qu'elle était totalement sous son emprise, qu'elle était amoureuse de lui.
02:13Alors enfin, sa parole va se libérer, elle va se sentir en confiance et confier qu'elle a été livrée à des inconnus par son père.
02:21Et là encore, il est question d'emprise. En fait, elle est contrainte par son père à avoir des relations sexuelles avec des inconnus.
02:28Le père trouve ses hommes sur un site de libertinage.
02:31Et pour les appâter, il les présente comme un jeune couple à la recherche d'aventure.
02:35En vérité, il livre sa fille à ses hommes.
02:37Et quand ils arrivent au point de rendez-vous, les hommes découvrent l'adolescente les yeux bandés.
02:42Le père, lui, il filme et prend des photos pendant les viols de sa fille.
02:46Sur ces clichés, la victime est, je cite, en détresse extrême.
02:50Donc c'est selon les mots des enquêteurs. Elle apparaît parfois en pleurs, tremblante, complètement sous l'emprise.
02:55Donc ces viols ont eu lieu dans les communes de Salernes, Cavalère-sur-Mer, Cogolin ou encore Grimaud entre 2019 et 2021.
03:03Il y aurait eu au moins 5 ou 6 agresseurs potentiels.
03:06Et au fil de l'enquête, un seul homme est identifié. C'est un septuagénaire.
03:10Cela rappelle en partie les viols de Mazan.
03:13Et comme lors du procès Pellicot, les vidéos ont été retranscrites au procès.
03:18Des vidéos où on voit les deux accusés, donc le père de la victime et l'homme de 70 ans.
03:23On les voit insulter l'adolescente, la forcer à changer de position ou encore à ouvrir la bouche.
03:28Est-ce que le père reconnaît les faits ?
03:31Il avoue aux enquêteurs avoir eu des rapports sexuels avec sa fille.
03:34Il prétend l'avoir donné à violer à des inconnus pour assouvir le fantasme de cette dernière.
03:39Donc il a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté de 2 tiers.
03:44Le second accusé, lui, il a écopé d'une peine de 16 ans de prison avec mandat de dépôt.
03:49Alors Florine, la semaine dernière dans le Maine-et-Loire, cette fois,
03:52un père de famille a été placé en détention provisoire pour des faits assez similaires.
03:57Pour avoir violé et fait violer sa fille de 4 ans.
04:00Le procureur de la République d'Angers a expliqué à Ouest-France
04:03que le père commettait des actes sur sa fille et se mettait en scène en étant vu à distance par un internaute.
04:09Il aurait alors invité cet homme à venir à son domicile
04:12où il l'aurait laissé passer à l'acte sur sa fille.
04:14Cet homme, âgé de 60 ans, a lui aussi été mis en examen.
04:18Haute Doumanche, vous êtes chargée de plaidoyer et de communication pour l'association face à l'inceste.
04:23On va essayer d'aller plus loin avec vous et de comprendre tout ce qui entoure l'inceste et cette notion.
04:29D'abord, dans l'affaire que vient d'évoquer Florine,
04:32l'adolescente explique être sous l'emprise de son père adoptif.
04:37Cette notion d'emprise, est-ce qu'elle est courante dans l'inceste ?
04:41Est-ce que l'enfant a une injonction à garder le silence ?
04:44Est-ce qu'il a peur ? Il a honte ?
04:46Oui, pour la thématique de l'inceste, on considère par exemple que l'inceste est double.
04:54C'est un crime double dans le sens où, évidemment, c'est le crime sexuel qu'on évoque,
04:58mais c'est aussi le crime du lien familial.
05:01C'est-à-dire que l'enfant est violé par la personne qui est censée l'humaniser,
05:07et finalement il se trouve déshumanisé par la personne qui a autorité sur lui.
05:12L'enfant est évidemment incité à garder le silence,
05:16déjà pour maintenir la bonne vie de la famille,
05:22mais aussi parce qu'en fait on ne laisse pas à cet enfant la place ni le pouvoir d'énonciation.
05:28Il est lié par un conflit de loyauté extrême,
05:31puisqu'il est lié à la personne qui le socialise en socialisation primaire.
05:37On pourra aussi parler des troubles de l'attachement
05:40et des conséquences sur son rapport affectif aux autres.
05:46Mais ce conflit de loyauté, c'est le juge Édouard Durand qui en parlait,
05:52pousse aussi à un paroxysme de domination.
05:55C'est-à-dire que c'est un adulte sur un enfant,
05:59et dans 95% des cas, un homme sur une petite fille.
06:03Et dans ce paroxysme, qui est une nouvelle fois double,
06:07l'inceste prend toute sa mesure dans le sens où l'enfant n'a pas d'échappatoire.
06:12L'enfant ne peut pas parler.
06:14On prend souvent cet exemple sans vouloir faire d'échelle de hiérarchisation des horreurs,
06:21mais un enfant qui est par exemple violé par son prof de sport,
06:25il peut en parler à ses parents.
06:27Dans le cas de l'inceste, il ne peut en parler à personne autour de lui,
06:31puisque ce sont ses parents qui ont cette autorité parentale sur lui,
06:35qui commettent l'acte.
06:37Et justement dans le cas de cette jeune fille, Florine l'a dit,
06:41le père agissait à l'insu de la mère.
06:43Est-ce que c'est souvent le cas ?
06:45Est-ce que le deuxième parent ignore vraiment tout des faits commis ?
06:49Est-ce que c'est possible finalement que de tels crimes se déroulent dans un foyer
06:53et que tout le monde ignore ce qui se passe ?
06:55Alors la particularité de l'inceste, vu qu'elle est presque systémique,
07:00puisqu'elle touche un français sur dix,
07:02on ne peut pas faire de généralité aussi poussée.
07:04Par contre on a des chiffres,
07:06on sait par exemple qu'il n'y a que 6% des mères qui protègent l'enfant
07:11une fois qu'elles prennent conscience de la réalité,
07:13et 5% des pères.
07:15Vous voulez dire que quand la famille est avertie,
07:18elle prend le parti de l'agresseur ?
07:20Dans la grande majorité des cas, puisque nous n'avons que 6% des mères
07:23qui protègent l'enfant une fois la parole révélée,
07:25et 5% des pères qui protègent l'enfant une fois la parole révélée.
07:29Pourquoi alors ? Pour maintenir, comme vous le disiez, cette cohésion familiale ?
07:33Oui, pour tout ce que j'évoquais, pour maintenir cette cohésion familiale,
07:36parce que souvent le père ou la mère ne peut imaginer
07:42que son conjoint puisse se faire subir de telles choses à l'enfant.
07:46Comment est-ce que l'enfant est pris dans les rouages du parent ?
07:49Est-ce que tout simplement il ne peut pas réaliser que c'est grave
07:53parce qu'il fait naturellement confiance à ses parents ?
07:56Oui, il y a aussi cette thématique-là qui est brillamment abordée
08:00dans le livre de Nech Sono, Triste Tigre,
08:03où en fait ce mélange un peu comme un enfant qui est victime
08:08de violences physiques ou de violences morales,
08:12il est lié par ce conflit de loyauté où en fait il a toute confiance
08:16en la personne qui est censée l'humaniser,
08:19qui est censée lui apporter les prémices de sa vie adulte.
08:23Et il est extrêmement compliqué pour un enfant d'avoir cette intelligence
08:29et cette maturité de déceler son amour pour son père,
08:33s'il est sain ou malsain, puisque normalement cet amour
08:37et cette dissociation, c'est le père et la mère
08:41qui l'enseignent à l'enfant en lui disant
08:43non, de tels gestes on ne peut pas les poser ensemble,
08:46non, de tels propos tu ne peux pas me les tenir
08:48parce que je suis ton père et ta mère
08:50on ne va pas avoir de lien sexuel entre nous.
08:53Et si l'enfant doit l'apprendre par lui-même,
08:56il est évident qu'il va mettre beaucoup plus de temps à les comprendre
08:59et qu'il peut être complètement sous l'emprise
09:01et lié à un rapport qu'il va considérer amoureux
09:05mais qui est complètement biaisé par la situation qu'il vit.
09:09Et qu'est-ce qui pousse déjà un enfant à en parler ?
09:12Et une fois qu'il en a parlé, il a osé le faire,
09:15comment est-ce qu'il est pris en charge ?
09:17Alors un enfant qui parle,
09:21il peut parler pour différentes raisons,
09:25parce que soit il en a parlé à un adulte
09:28qui lui a fait comprendre que ce n'était pas normal ce qu'il vivait,
09:31soit de lui-même, soit parce qu'il a eu la chance
09:34d'être éduqué à la notion de consentement
09:36ou à la notion de son corps,
09:38que tels gestes sur telle partie de son corps
09:40ne sont pas autorisés.
09:42C'est d'ailleurs quelque chose au sein de notre association
09:45pour lequel on milite, puisqu'on a sorti il y a maintenant quelques années
09:49un cahier de prévention que vous pouvez faire
09:51avec des 6-12 ans accompagnés d'un adulte
09:54pour lui apprendre par exemple
09:57tel mot ou tel geste sur ton corps
09:59ou qu'on te dit ça c'est un mot gentil ou un mot vilain,
10:03telle action, ça tu as le droit de dire non,
10:05tel jeu, ce n'est pas,
10:07faire la différence entre ce qui est bon pour l'enfant
10:09et ce qui est mauvais pour l'enfant.
10:11On accompagne aussi les parents protecteurs
10:13quand l'enfant arrive à parler
10:16par le cahier des parents protecteurs
10:18qui est aussi sur notre site internet
10:21de Face à l'inceste.
10:23Et sur la prise en charge,
10:25elle est variée
10:27parce qu'on peut commencer
10:29par l'aspect juridique.
10:31L'enfant va être accompagné souvent
10:33par un administrateur ad hoc,
10:35puisqu'il est évident que le parent ne représente plus
10:37l'intérêt de l'enfant.
10:39La civisme, mais aussi l'association Face à l'inceste
10:41demande à ce que l'enfant
10:43soit accompagné par un avocat
10:45qui lui soit propre.
10:47Puisqu'on sait que la procédure
10:49est longue, que l'enquête est
10:51douloureuse et que le procès
10:53encore plus.
10:55Il est protégé justement
10:57pendant toute la procédure, l'enfant,
10:59est-ce qu'il peut encore vivre avec ses parents ?
11:01Alors, c'est un de nos
11:03plais de voyer prioritaire, la protection immédiate
11:05de l'enfant. Non, aujourd'hui en France
11:07un enfant qui part n'est pas immédiatement protégé.
11:09Malgré les récentes
11:11avancées législatives,
11:13comme la loi de Madame Santiago,
11:15le 24 mars 2024,
11:17l'enfant est aujourd'hui
11:19protégé qu'à la fin de l'enquête pénale.
11:21Et l'enquête pénale, on le sait,
11:23elle peut durer à peu près 3 ans, moyenne.
11:25Elle est beaucoup trop longue pour un enfant.
11:27Et donc on considère évidemment
11:29que l'enfant ne doit pas revoir
11:31ce parent, pour plusieurs raisons.
11:331. Parce que maintenir un lien familial qui a été brisé
11:35par le crime d'inceste, c'est insoutenable.
11:37Et 2.
11:39Parce qu'on considère que
11:41éloigner l'enfant,
11:43plutôt que de l'isoler,
11:45et le protéger,
11:47protège aussi l'enquête.
11:49Puisque dans plein d'autres procédures
11:51pénales et judiciaires,
11:53la victime n'est plus
11:55mise en lien avec le présumé agresseur.
11:57Et il n'y a que dans ce rapport
11:59de lien familial et donc de l'inceste
12:01où on oblige l'enfant
12:03à revoir et être parfois
12:05seul avec son parent présumé agresseur.
12:07Évidemment, l'emprise ou la pression
12:09peut perdurer.
12:11Comment est-ce que ces victimes, ensuite, peuvent se
12:13reconstruire ? Parce qu'on imagine que les conséquences,
12:15ne serait-ce que sur leur vie affective
12:17ou leur santé, doivent être lourdes.
12:19Oui, les conséquences sur l'inceste, on s'en doute,
12:21sont vraiment
12:23nombreuses, sont vraiment
12:25compliquées et accompagnent la victime
12:27tout au long de sa vie.
12:29Par exemple, pour vous citer un chiffre,
12:31plus de la moitié des
12:33victimes d'inceste
12:35vont ou ont fait une tentative
12:37de suicide, c'est 52%.
12:39Il y a un rapport aussi
12:41à l'alcoolisme, aux
12:43drogues, aux pratiques dangereuses
12:45qui est accru
12:47avec des pourcentages
12:49affolants.
12:51La société accompagne
12:53ces victimes en proposant
12:55alors ça, par exemple, c'est quelque chose qui est
12:57très peu connu, mais les victimes
12:59peuvent être remboursées à 100% par la sécurité
13:01sociale des soins qu'elles
13:03reçoivent suite aux
13:05sévices subis,
13:07sans qu'il y ait besoin de plaintes
13:09déposées en amont.
13:11Un suivi psychologique, par exemple ?
13:13C'est un suivi psychologique, mais aussi physique, parce qu'il y a
13:15évidemment des conséquences physiques
13:17à l'inceste. C'est quelque chose
13:19que vous pouvez demander à votre médecin traitant, qui est
13:21très peu connu même dans le corps médical,
13:23mais qui existe,
13:25à la petite exception que dans le cadre
13:27de soins psychologiques, ce n'est que les
13:29psychologues en CMP, en centre
13:31médico-psychologique, qui peuvent être remboursés des soins
13:33par les psychologues libéraux.
13:37Parce que pour revenir
13:39aux conséquences de l'inceste
13:41sur les enfants, on sait
13:43aussi que l'inceste
13:45se cumule
13:47à peu près avec 3 à 4
13:49autres traumatismes
13:51dans l'enfance. L'inceste n'est pas
13:53seul. Il y a des
13:55violences autres qui sont
13:57présentes. Et on sait
13:59évidemment que plus les traumatismes sont
14:01nombreux dans l'enfance, plus ils sont
14:03dramatiques
14:05dans la vie adulte d'un enfant.
14:07Quand l'inceste touche
14:097,4 millions de Français,
14:11on considère que c'est un véritable fléau
14:13de santé publique.
14:15On a rebondi
14:17aussi, par exemple, sur ce sujet de
14:19santé publique, à l'annonce
14:21du Premier ministre
14:23Michel Barnier, quand il a annoncé que la santé
14:25mentale serait la cause
14:27de 2025, la grande cause de 2025.
14:29Numéro 1.
14:31L'inceste est totalement touchée
14:33par la notion de santé mentale.
14:35Elle a un lien direct.
14:37Et quand
14:39il touche 1 Français sur 10,
14:41on abrite que les pouvoirs publics prennent
14:43un peu plus la mesure de la réalité.
14:45Certaines victimes d'inceste sont
14:47touchées par l'amnésie traumatique.
14:49Est-ce que quand l'histoire
14:51refait surface, malheureusement il est
14:53trop tard, on sait que votre association
14:55se bat pour l'abolition de la prescription, justement ?
14:57Oui, totalement. Alors, on parle
14:59aussi d'amnésie dissociative.
15:01Alors, sur
15:03cette notion-là, en fait, le traumatisme
15:05est tellement violent,
15:07tellement fort,
15:09tellement aussi inscrit dans la petite
15:11enfance ou l'enfance de
15:13la personne que
15:15son cerveau, pour se protéger,
15:17va vouloir oublier.
15:19Ça peut réellement ressortir des années plus
15:21tard. C'est la
15:23psychologue Muriel Salmona qui
15:25a conclu
15:27que 50% des victimes d'inceste
15:29ont, au fond, de l'amnésie
15:31traumatique, qui peut aller jusqu'à plus
15:33de 20 ans d'amnésie, et évidemment
15:35encore plus. Dans
15:37le cadre de la CIVIS, c'est la mesure
15:39qui est le plus demandée, puisque
15:4175% des victimes ont vu leur
15:43affaire prescrite dans les témoignages de la CIVIS.
15:45C'est 6 victimes sur 10.
15:47C'est énorme.
15:49On a aussi des personnalités
15:51publiques comme Camille Kouchner qui appellent
15:53à ce que l'imprescriptibilité
15:55soit instaurée.
15:57En droits comparés,
15:59il y a des pays qui l'ont mis en place
16:01et qui
16:03s'en sortent très très bien.
16:05Et je
16:07voudrais aussi reprendre sur l'imprescriptibilité.
16:11En fait, l'enfant
16:13aussi, quand il est mineur,
16:15il n'a pas de personnalité juridique.
16:17Donc on ne lui laisse pas le temps
16:19de pouvoir parler.
16:21Ce n'est qu'une fois adulte qu'il a le temps de parler.
16:23Il y a
16:25un autre point que je voulais aborder
16:27avec vous. C'est le
16:29rapport flamand de 2017
16:31qui voit aussi l'imprescriptibilité
16:33comme
16:35quelque chose
16:37de dissuasif pour les agresseurs.
16:39Puisqu'en fait, en instaurant
16:41ce qu'on peut appeler une épée de Damoclès
16:43au-dessus des agresseurs,
16:45ça peut aussi agir
16:47sur la prévention et ça peut
16:49en réalité inverser ce rapport de force
16:51où le sentiment d'intranquillité,
16:53le sentiment de honte,
16:55le sentiment de peur de la victime ne quitterait plus
16:57non plus l'agresseur.
16:59Et c'est à ce titre qu'on demande
17:01l'imprescriptibilité
17:05des crimes sexuels et des crimes d'inceste.
17:07Et je voudrais finir
17:09en précisant que
17:11c'est une dynamique qui devient transpartisane
17:13puisque nous avons à ce jour
17:15et simplement pour cette année 2024
17:17et 2023,
17:19quatre propositions de loi de différents
17:21partis, de différents parlementaires
17:23qui ont appelé et qui
17:25ont déposé des propositions
17:27pour que l'imprescriptibilité rentre dans notre Code.
17:29Et peut-être concrètement
17:31pour terminer, comment
17:33signaler une victime,
17:35une situation qui nous semble
17:37dangereuse, à qui signaler
17:39un enfant en danger ?
17:41On peut le signaler
17:43par exemple quand c'est des professionnels
17:45de santé. Je pense à
17:47une professeure qui est d'ailleurs
17:49devenue députée
17:51et qui a été touchée
17:53par ce sujet. Elle a pu faire un signalement
17:55à son rectorat.
17:57Le souci ce n'est pas tant le signalement,
17:59c'est le suivi qu'ont ensuite ces professionnels
18:01sur l'affaire
18:03qu'elles ont signalé.
18:05Il y a un véritable problème
18:07sur ce sujet puisque par exemple
18:09une professeure remonte l'info
18:11à sa directrice d'école et la directrice
18:13d'école a eu
18:15cette intelligence de prévenir l'agresseur
18:17du signalement et de signaler
18:19quel professeur avait opéré
18:21ce signalement, ce qui est extrêmement dangereux
18:23pour cette
18:25professeure qui a eu la force de
18:27signaler. Il y a
18:29l'éducation nationale qui opère le signalement, mais
18:31on milite pour que
18:33cette obligation de signalement
18:35et surtout cette formation des professionnels
18:37touche tous les
18:39secteurs qui ont accès
18:41à la parole de l'enfant, que ça
18:43aille des médecins,
18:45et on sait que l'obligation
18:47de signalement chez les médecins pose encore soucis,
18:49que ça aille
18:51dans l'éducation et que
18:53aussi les gendarmes
18:55et tout le corps professionnel
18:57qui a accès à l'après,
18:59à l'après-parole,
19:01soit formé sur ces thématiques très
19:03spéciales et très spécifiques de l'inceste.
19:05Et c'est d'ailleurs quelque chose
19:07pour lequel l'association
19:09s'engage d'aller
19:11former les gendarmes, d'aller former
19:13ces professionnels. – Écouter les enfants, s'adresser à eux.
19:15– Écouter les enfants, parce que comme je viens de vous le développer,
19:17l'inceste a cette double casquette
19:19de lien familial et de crime sexuel
19:21et il est extrêmement difficile
19:23même pour nous adultes
19:25pourtant construits
19:27et instruits et formés comme des
19:29gendarmes de recevoir et de savoir
19:31au-delà de comprendre
19:33l'enfant, de savoir le protéger
19:35et de faire remonter comme il faut l'enfant.
19:37– Merci beaucoup Haute Doumanche
19:39pour votre éclairage passionnant.
19:41Merci à vous Florine Sylvans.
19:43Vous retrouverez un nouvel épisode la
19:45semaine prochaine en attendant affaire suivante.
19:47Le podcast inédit est à retrouver
19:49sur le site de BFMTV.com
19:51et sur toutes les plateformes de streaming.