• la semaine dernière
Journée mondiale du handicap : absence de solution, insuffisance des moyens mis en œuvre, retard colossal en matière d'accessibilité... Regardez le grand ras-le-bol de Dominique Farrugia, réalisateur, acteur, scénariste, producteur de cinéma.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 03 décembre 2024.

Category

🗞
News
Transcription
00:00RTL Matin
00:03Avec Amandine Bégaud et Thomas Soto
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud a envolé les belles intentions des Jeux Paralympiques en ce 3 décembre,
00:10journée internationale des personnes en situation de handicap.
00:13Vous avez choisi, Amandine, de recevoir un homme en colère.
00:15Il nous a beaucoup fait rire, mais aujourd'hui il change de ton.
00:18C'est le comédien, producteur, réalisateur et ancien visage des nuls Dominic Farruggia.
00:23Bonjour Dominic Farruggia.
00:24Bonjour Amandine Bégaud.
00:25Et merci beaucoup d'être là avec nous en studio ici à RTL.
00:29Emmanuel Macron a fait, on s'en souvient, du handicap l'une des priorités de son quinquennat.
00:33En avril 2023, il avait même dit ceci.
00:36Les fauteuils roulants, dont les délais d'obtention sont souvent si longs et le prix si exorbitant pour certaines bourses,
00:42verront là aussi leur régime de prise en charge changer.
00:44Dès 2024, ils seront intégralement remboursés.
00:47Dès 2024, ils seront intégralement remboursés.
00:50On arrive fin 2024, 18 mois après ses propos.
00:53Toujours rien, toujours aucune loi, aucun décret.
00:56Qu'avez-vous envie de dire ce matin au président Dominic Farruggia ?
01:00Qu'un fauteuil roulant, ce sont nos jambes à nous, handicapés, qui ne pouvons plus marcher sur nos vraies jambes.
01:07Et que c'était irréalisable dès le début.
01:12Cette annonce a été faite sans vraiment parler avec les gens qui souffrent d'un handicap,
01:20qui sont des personnes à mobilité réduite et qui, une fois de plus, vont payer le prix de « on annonce et on ne fait pas ».
01:28« On annonce et on ne fait pas », vous avez l'impression que c'est ça tout le temps ?
01:32Je pense que le handicap national a dû être au moins trois ou quatre fois grande cause nationale.
01:37Rien ne s'est fait.
01:38La loi de 2005, elle commence à avancer et à porter ses fruits, 20 ans plus tard.
01:44Mais j'étais au congrès des maires de France, à l'invitation de David Gisnard,
01:49et j'ai parlé avec des maires qui nous disaient « on va redonner de l'argent à l'État, donc ça va nous empêcher de faire des choses ».
01:57Et sensiblement, ça touchait partout, la mobilité, l'inclusion,
02:03surtout refaire des parcours de vie dans lesquels on peut s'installer et vivre.
02:08Mais ça veut dire que les personnes en situation de handicap vont être les premières victimes des coupes budgétaires ?
02:14C'est votre inquiétude en tout cas ?
02:15De toute façon, on ne peut pas manifester, on ne va pas bloquer quoi que ce soit.
02:18Donc, on n'est ni les cheminots qui ont des vraies revendications,
02:23ni du personnel de grandes entreprises qui peuvent bloquer la France.
02:27On va faire quoi ? Bloquer ? Je l'ai déjà dit, on ne peut pas bloquer Paris avec des fauteuils roulants.
02:32La maire de Paris l'a déjà fait.
02:34Vous le prenez avec humour malgré tout ?
02:36Non, mais je ne représente personne à part moi-même, d'accord ?
02:39Je ne suis pas porte-parole, j'ai la voix qui porte, mais je ne suis pas porte-parole.
02:43Je dis qu'aujourd'hui, c'est difficile de se mouvoir dans Paris,
02:50c'est difficile de se mouvoir dans les grandes villes, c'est difficile de voyager seul.
02:54Il faut avoir un accompagnant, c'est très compliqué.
02:56Et comme je le disais précédemment, le fauteuil est le prolongement de nous-mêmes,
03:00puisque sans ça, on ne peut pas le faire.
03:02Il faut savoir aussi qu'il y a souvent un fauteuil pour une pathologie,
03:06donc c'est difficile de tout regrouper en un seul fauteuil,
03:10et qu'il faut aller vers le fauteuil électrique,
03:12car beaucoup de gens ont du mal aussi à pousser, à avancer avec ses roues,
03:16et ça rend beaucoup d'autonomie l'électricité.
03:20Un fauteuil électrique, ça peut aller jusqu'à 50 000 euros.
03:23Aujourd'hui, à peu près 5 000 euros est remboursé par l'assurance maladie.
03:28Ce n'est pas anecdotique, au-delà du fait que ce soit vos jambes ?
03:31Ce n'est pas anecdotique du tout.
03:33Parfois, on a la chance d'avoir un conjoint qui travaille,
03:37où nous-mêmes on travaille et on a une bonne mutuelle.
03:40Grâce à cette mutuelle, on arrive, mais pas à 50 000 euros.
03:42C'est impossible.
03:43On peut aller jusqu'à 5 000, on peut aller jusqu'à 6 000.
03:45Et encore, c'est très très très très cher.
03:48Vous disiez tout à l'heure, on ne peut pas manifester, on ne peut pas se faire entendre.
03:52Malgré tout, c'est quoi le sentiment ?
03:54Vous prenez ça encore une fois ?
03:56Je ne sais pas si c'est avec philosophie ou parce qu'il y en a marre.
04:01Oui, j'en ai marre. Je suis exaspéré.
04:04Et je pense que les 12 millions de Français touchés par le handicap sont exaspérés comme moi.
04:09Maintenant, on se mobilise comment ?
04:11C'est ça qui m'ennuie.
04:12C'est comment faire pour se faire entendre dans un pays qui va mal,
04:17qui va mal financièrement, qui va couper des postes en veux-tu en voilà.
04:22Je ne sais pas comment on se fera entendre.
04:25Et une fois de plus, je ne représente personne, je ne représente que moi-même.
04:28Vous avez l'impression qu'on se moque de vous ?
04:30Oui, on s'est moqués de nous.
04:31Vous lui en voulez au président pour ça ?
04:33Non, mais pas que pour ça.
04:36J'en veux à la classe politique dans son ensemble
04:39qui ne voit pas comment on peut peut-être arriver à une accessibilité partout dans la France.
04:47C'est pour ça que je suis allé voir les maires de France.
04:50Pour faire passer un message qui est que l'accessibilité, ça touche tout le monde.
04:54Bien sûr, ça touche le handicap, mais ça touche les parents avec poussettes,
04:58le grand âge et les accidents de la vie.
05:00Vous cassez une jambe de main, comment vous allez le faire pour vous balader ?
05:03Comment aller au travail ?
05:05Tout ça, ça fait partie de quelque chose qui devrait être un tronc commun.
05:10Et ça ne l'est pas.
05:11Ça ne l'est toujours pas et on n'arrive pas à se projeter.
05:14La France a pourtant été régulièrement rappelée à l'ordre au mois d'avril 2023.
05:18Le Conseil de l'Europe avait demandé des mesures immédiates
05:20accusant carrément la France de violer les droits des personnes en situation de handicap.
05:23Alors, ça concernait le transport, l'accompagnement, le suivi et la scolarisation des élèves.
05:28C'est un manque de volonté politique, pas un problème d'argent, d'après vous ?
05:31Oui, c'est un problème d'argent sûr et certain.
05:33Mais c'est un manque de volonté politique.
05:35C'est un manque de volonté politique que de dire
05:37il y a des classes qui sont inaccessibles à des enfants handicapés.
05:41C'est un manque de volonté politique que de dire
05:44oui, on ne peut pas prendre des transports en commun dans cette ville.
05:50C'est la ville qui s'en occupe, ce n'est pas moi.
05:53En Angleterre, en Allemagne, en Espagne, dans tous ces pays-là,
05:59le handicap est pris sérieusement.
06:01Et en tout cas, l'accessibilité est prise sérieusement.
06:03C'est vraiment important.
06:05Plus vous allez au nord, Norvège, etc.,
06:08tous ces pays-là sont normés.
06:11Nous, chez nous, je crois que c'est le défendeur des droits
06:14qui a dit l'année dernière que c'était le premier cas de discrimination, le handicap.
06:19Mais parce qu'on s'en fiche, pourtant ça devrait tous nous révolter,
06:22tous, chaque individu, chacun de ceux qui nous écoutent ce matin.
06:25Alors ça va vous révolter un moment,
06:29mais on va vous couper ailleurs de l'argent
06:32et vous allez dire non, ne me coupez pas l'argent.
06:34Donc on sera toujours la cinquième roue du carrosse.
06:38Citoyens de seconde zone ?
06:39C'est ce que j'ai toujours dit.
06:40Moi, je ne veux pas l'égalité, je veux l'équité.
06:43C'est-à-dire qu'en tant que Français payant mes impôts,
06:45je veux autant que vous.
06:46Pas plus, pas moins.
06:48C'est ce qu'on ne me donne pas aujourd'hui.
06:49Les Jeux paralympiques ont malgré tout été un succès.
06:52C'est la preuve que quand on veut, on peut.
06:54Oui, je crois que c'était un joli moment d'espoir
06:57qui s'est éteint dès le 30 septembre.
07:00Et pourtant, Emmanuel Macron a dit qu'il y aura un avant et un après.
07:02Oui, le voilà l'après.
07:04En préparant cette interview, Dominique Ferruggia,
07:06j'ai remonté votre fil Twitter.
07:07Le 3 mai 2017, vous écriviez
07:10« Merci Emmanuel Macron de traiter le handicap de manière constructive et avec une vision ».
07:15J'imagine que vous ne réécririez pas ces mots aujourd'hui ?
07:18Non, mais je pense que 2017, c'était vraiment un espoir.
07:21Et c'était quelqu'un porteur d'espoir, avec enfin une vision.
07:23Et on n'allait pas voter contre, on allait voter pour.
07:26Aujourd'hui, on va re-voter contre.
07:28Vous écririez quoi aujourd'hui sur votre fil Twitter ?
07:31Je ne sais pas.
07:32Très honnêtement, je ne sais pas.
07:33Et pourquoi je ne sais pas ?
07:34Parce que les bras m'en tombent.
07:37C'est prendre vraiment les gens pour des cons.
07:40Pardonnez-moi, ce n'est pas très beau ce que je dis, mais c'est la vérité.
07:42Aujourd'hui, on va se retrouver à attendre un fauteuil roulant qui ne viendra, qui ne viendra pas, qui ne sera pas remboursé.
07:48Voilà, comment faire ? Comment faire ? Comment faire ?
07:51Il avait une vision.
07:52Merci beaucoup Dominique Paruzia.
07:54Je vous en prie. Merci de m'avoir vu.

Recommandations