La danse, c'est grâce aux grands du quartier qu'il y a goûté. Il a été maçon, a dormi à la rue et aujourd'hui, il collabore avec des grands noms comme Shakira. Sadeck Berrabah est danseur et chorégraphe. Sa spécialité : les tableaux vivants, des "mumurations" géométriques avec des corps humains. On est allé le rencontrer chez lui à Forbach dans l'est de la France.
Category
🦄
Art et designTranscription
00:00Je me vois aller les rues où j'ai galéré, où j'ai dormi.
00:11J'étais au téléphone avec Kanye West il n'y a pas longtemps.
00:16C'est ma femme, un jour elle m'appelle, elle me dit « Mais tu sais qui te suis ? Rihanna
00:21? » Je vais sur son profil, je vois sa bonne en retour.
00:23Je voulais utiliser ce que j'avais, le vocabulaire que j'ai développé, pour développer des
00:32tableaux vivants, des murmurations avec des coriolas.
00:35Ici on est à Fort-Bac et c'est chez moi, c'est là où j'ai grandi.
00:40Quand on allait se promener ici dans des trucs comme ça, j'aimais bien ce côté nature,
00:45ce côté tranquille, ce côté hors de la ville, j'aimais beaucoup ça et après quand
00:50j'étais dans le quartier c'était bien évidemment la danse et même à la maison,
00:54quand j'étais à la maison c'était la danse, la danse, la danse, la danse.
00:57Il n'y avait pas du tout de cours à cette époque-là, il n'y avait pas d'école de
01:00danse, surtout pas ici.
01:01Il y avait juste des grands du quartier qui dansaient, qui m'ont donné envie de danser
01:04et même quand je bougeais, quand je faisais des trucs, ils me disaient « Hey, t'es un
01:07truc toi ». J'ai grandi avec les clips, avec MCM, avec M6 Musique, les clips, même
01:12le matin quand on allait à l'école, on voyait des trucs à la télé.
01:15On a essayé de refaire pareil et ça a donné des idées.
01:19Je revois les rues où j'ai marché, je revois les rues où j'ai galéré, où j'ai dormi.
01:24Il y a une période à mes 18 ans où j'ai vécu 6 mois, on ne dirait pas que c'est énorme,
01:30mais 6 mois à la rue c'est beaucoup.
01:32En août 2010, je suis descendu à Montpellier et j'ai très vite trouvé du travail dans
01:37la maçonnerie.
01:38L'année 2011, j'ai eu mon CDI, mon permis, ma fille, changement de vie mais total.
01:45Et me dire j'arrête cette situation stable pour retourner dans un truc où c'est un peu
01:49bancal, à savoir la danse à l'époque, ça a été une décision difficile à prendre
01:53mais je l'ai prise.
01:54Et heureusement, parce que je ne voulais pas arriver à un certain âge et me dire « Ah,
01:58j'avais du talent, j'aurais dû essayer ». Ce n'était pas possible pour moi.
02:01Je voulais développer un style qui mélange le dessin et la danse.
02:04Depuis 2017, c'est la folie.
02:06Parce que justement, il y avait les premières vidéos sur les réseaux sociaux, en l'occurrence
02:10Facebook à l'époque.
02:11La première vidéo que tu postes, elle fait un million ?
02:13Ouais, en 24 heures, même pas.
02:15Maintenant, on poursuit la visite et on va chez mon frère, Adel, vraiment producteur
02:19de musique.
02:20C'est vraiment ici que toute la musique a été faite.
02:24Le fait d'avoir dansé avec lui quand on était plus jeunes, je connais un petit peu
02:27l'univers de la danse et son univers à lui.
02:29Et je sais exactement quand il me dit, parce que des fois, il n'a pas forcément les bons
02:33termes en termes de musique.
02:34Quand il me dit un truc, je sais ce qu'il a besoin, je sais ce qu'il veut dire et je
02:38sais où je dois aller en fait dans la composition.
02:40Ah, il y a un sacré cadeau, en vrai.
02:43C'est notre quartier d'enfance qui a été détruit.
02:46Un quartier de Marino.
02:48Voilà, c'est juste incroyable.
02:52Et nous, on habitait ici exactement.
02:54Ça, c'est un truc, c'est trop nostalgique.
02:57Ma mère, elle était là, elle sortait juste et elle faisait.
02:59Et on l'entendait de là et on rentrait.
03:07C'était un quartier très pauvre.
03:10C'était vraiment un ghetto, ghetto.
03:12Mais c'était mon quartier, entre les Italiens, les Arabes, les Gitans, les Français.
03:18Tout le monde était une grande famille.
03:20C'était incroyable. J'allais chez ma grand-mère comme si c'était chez moi ou chez mes cousins.
03:25Je rentrais comme ça. C'était à la maison.
03:27Je rentrais, j'allais au frigo.
03:30Je ressors, c'était normal.
03:32C'était normal. Et là, il n'y a plus ça, c'est fini, ça.
03:35Il y a un truc qu'on n'a pas raconté, c'est qu'un jour, ton téléphone sonne et c'est Shakira.
03:40Non, mais ça, c'est incroyable.
03:42C'est elle en direct qui me contacte.
03:43Quand on arrive à Barcelone, on nous envoie une adresse pour faire un test Covid.
03:47On monte dans les hauteurs de Barcelone et là, c'est que des grosses villas, que des trucs de fous, fous malades.
03:53Il y avait deux sonnettes, je me rappelle.
03:54Il y avait studio et home.
03:56Boum, j'en ai sonné sur les deux.
03:58On rentre là-dedans et là, du coup, ça fait une villa immense, baie vitrée, ascenseur sur le côté,
04:05terrain de tennis, terrain de foot.
04:07OK, on nous descend en bas dans un studio et là, on voit des disques d'or partout, des Guinness Book et tout.
04:14Mais on se regarde avec mon pote, on se dit, mais lui, il ne dit pas qu'on est chez Shakira, on dit qu'on est chez Piqué.
04:20Parce que lui, il était gros fan de Barcelone.
04:22Et non, on est chez le manager, c'est impossible.
04:24La première adresse qu'on nous envoie, c'est chez elle.
04:27On est chez le manager ou chez l'agent ou je ne sais pas, même pas 30 minutes ou quoi.
04:31Elle débarque, on a Shakira devant nous.
04:35Et là, on se dit, oh la dingue, on se regarde avec mon pote, on dit, eh, hi, Shakira.
04:41Le contact s'est fait très, très simplement jusqu'à bon, bon, allez, montre-moi ce que tu as préparé.
04:46OK, on s'est posé devant le miroir et c'était d'une simplicité incroyable.
04:50Et ça, j'ai trop aimé.
04:51On reprend la route, on se dirige vers le Zénith de Strasbourg.
04:54Oui, c'est très particulier parce que du coup, c'est le départ de la tournée.
04:59Il y a tous mes potes, il y a toute ma famille, il y a tout le monde qui va être là présent ce soir.
05:03Et ça va être trop bien.
05:08On reste concentré, on n'a qu'une heure, même pas.
05:10Donc, s'il vous plaît, on y va.
05:123, 2, 1.
05:15Mon style de danse, c'est un style basé sur le hip hop.
05:18Il y a du mime, il y a plein de choses.
05:20Bon, l'ami, s'il vous plaît, il y a tout le monde là.
05:23Vous savez comment je suis très doué avec ce genre d'approche, de situation.
05:27On fait un battle, c'est un cercle.
05:28OK, c'est bon.
05:29Hop là, on est là, Strasbourg, ça va ou quoi ?
05:32On peut le faire comme ça ?
05:33Ça va être incroyable.
05:34Non, en vrai, il y a un an, l'aventure a commencé.
05:42Vraiment, même avec Olivier, on ne pensait pas que ça allait être aussi rapide.
05:45On parlait des Zéniths peut-être dans 2-3 ans.
05:48Vraiment, je vous jure que c'est la vérité.
05:50Et en vrai, un an après, on est aux Zéniths, c'est incroyable.
05:54Kiffez bien ce soir, amusez-vous.