"Il faut en parler, montrer aux autorités que la population meurt de soif."
Coupures d'eau quotidiennes, prix du pack d'eau pouvant aller jusqu'à 7 euros... Voici ce que vivent les habitants de Mayotte, 101e département français, depuis les premières restrictions en eau fin mai. Et la situation ne devrait pas s'améliorer avant des mois.
Coupures d'eau quotidiennes, prix du pack d'eau pouvant aller jusqu'à 7 euros... Voici ce que vivent les habitants de Mayotte, 101e département français, depuis les premières restrictions en eau fin mai. Et la situation ne devrait pas s'améliorer avant des mois.
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00:00Maillot à soif, oui, c'est maintenant le slogan partout, partout où on passe.
00:04Maillot à soif, même écrit sur les murs, maillot à soif, maillot à soif.
00:09Les coutures, donc, qui commencent dès midi.
00:12Il est 14h et je n'ai plus d'eau.
00:17Pour se laver, on est obligé de récupérer de l'eau, un stock d'eau.
00:21Cette crise de l'eau, c'est vraiment quelque chose qui touche tout le monde.
00:27Pour ne pas faire semblant, à un moment donné, il faut parler et montrer aux autorités
00:30justement que, en fait, la population meurt de soif.
00:33Là, tu vois en direct que c'est une fontaine qui est censée alimenter toute une famille.
00:40Et donc, il n'y a rien qui coule dans cette fontaine-là.
00:45Des coupures d'eau quotidiennes, certaines pendant 48 heures de suite,
00:49alors que le prix d'un pack d'eau peut atteindre 7 euros.
00:51Voilà ce que vivent, depuis les premières restrictions en eau, fin mai, les habitants de Maillot.
00:56Cette eau, c'est devenu l'alpha et l'oméga de toute la vie à Maillot.
01:00Et en fait, c'est ce qui fait qu'on n'est plus en train de vivre normalement, on survit.
01:03Sortir du travail, ne pas avoir de l'eau pour se laver, ni pour faire à manger, c'est très difficile.
01:09Toutes les bouteilles sont vides, donc je ne sais pas comment je vais faire pour faire à manger aujourd'hui.
01:16La chasse d'eau, je suis obligée de venir soulever et vider l'eau que j'ai pour pouvoir aller aux toilettes.
01:26Ce problème, surtout ici, dans un quartier qui est habité par une population considérable,
01:33il n'y a qu'un seul robinet, il n'y a qu'une seule fontaine qui est dedans.
01:36Et cette fontaine, actuellement, elle est fermée.
01:38Et donc, il y a tout le monde qui est assis autour pour attendre à ce que l'eau coule, mais ce n'est pas possible.
01:43On est dans une crise de la ressource où on a eu une année 2022-2023 exceptionnellement sèche.
01:52Et donc, on se retrouve avec notamment des retenues collinaires
01:55qui ne répondent pas aux besoins qu'on a pour la saison, la saison sèche.
01:59Le département français connaît sa seconde plus importante sécheresse depuis 60 ans,
02:04alors que 80% de l'eau provient des cours d'eau et de ces retenues collinaires.
02:08Il y a quelques supermarchés où on peut trouver des bouteilles d'eau, des packs d'eau,
02:11mais c'est très, très, très cher encore une fois.
02:14Donc, ce n'est pas tout le monde, vous imaginez,
02:16ce n'est pas tout le monde qui arrivera à se procurer d'une bouteille d'eau.
02:20Moi, je travaille en tant qu'infirmier pluriculteur en pédiatrie au centre hospitalier de Melmontzou.
02:24En fait, là, ça fait 2-3 semaines que c'est une hécatombe.
02:28On voit venir, c'est un défilé de bébés tous les jours aux urgences
02:30et qui, après, montent dans le service, ils sont tous déshydratés.
02:32Alors, soit ils sont déshydratés parce qu'ils ont attrapé une bactérie qu'ils ont bue dans l'eau
02:36qui n'est pas forcément potable et qui, du coup, entraîne une gastro.
02:39Et là, ils se déshydratent complètement.
02:41Ou alors, c'est tout simplement qu'ils ne boivent pas assez.
02:43Franchement, aujourd'hui, à l'hôpital, on se pose vraiment beaucoup de questions
02:45parce qu'avec 7 euros le pack d'eau,
02:48je ne vois pas comment certaines familles vont pouvoir
02:51mettre rien que faire le biberon du bébé, c'est impossible.
02:53Et ça me fait vraiment très peur sur la situation de l'hôpital.
02:55Certaines vidéos postées par des habitants sur les réseaux sociaux
02:58montrent une eau boueuse sortant du robinet.
03:01C'est ce qu'il peut arriver à un court instant après une longue coupure d'eau.
03:04À date, et au regard des recommandations de l'ARS que je vais vous préciser,
03:09l'eau est potable.
03:12Et la recommandation de l'Agence régionale de santé
03:17est de faire bouillir l'eau dans les premières heures suite à une coupure d'eau.
03:21En complément, nous, ARS, on réalise des contrôles de la qualité de l'eau.
03:27Et à date, il n'est pas identifié non seulement de non-conformité,
03:33mais pas de dégradation de l'eau par rapport aux années antérieures.
03:36Nous, Mahorais et Mahorais, on n'arrive plus à admettre
03:41que l'État et services de la préfecture soient aussi passifs
03:48et aussi sourds et aveugles aux besoins de la population.
03:54Parce qu'il faut comprendre que le système de production d'eau potable
03:57aujourd'hui à Mayotte est systémiquement, structurellement déficitaire.
04:02À Mayotte, on a des coupures d'eau tous les jours depuis des années.
04:05Et là, cette crise, elle est aiguë parce qu'il n'y a pas de pluie.
04:08Mais fondamentalement, il n'est pas acceptable
04:11qu'un département français ait des coupures d'eau quotidiennes.
04:14Interpellé fin juin, Gérald Darmanin a assuré un retour à la normale début septembre.
04:18Je pense qu'on peut garantir que chaque Mahorais aura accès à l'eau potable,
04:22chaque enfant à l'entrée septembre aura accès à l'eau potable.
04:25Fin août, le préfet a annoncé que la situation devrait durer encore plusieurs mois
04:29alors que la saison des pluies n'est pas attendue avant la fin de l'année.
04:32En dépit des efforts qui ont été réalisés par les Mahorais
04:35sur la consommation d'eau et des économies importantes qui sont réalisées,
04:40on s'aperçoit aujourd'hui que les prélèvements qui sont faits dans les retenues collineures,
04:45c'est trop important.
04:46Nous sommes obligés de prendre de nouvelles mesures.
04:49On va donc passer à des tours d'eau plus restrictifs,
04:5248 heures sur l'ensemble du département.