Dans son édito du 22/11/2024, Paul Sugy revient sur la disparition de Boualem Sansal à Alger.
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00:00Oui, Romain, c'est grave. D'abord, parce que Boalem Sansal n'est pas seulement un ingénieur algérien épris de liberté qui compte avec ses mots d'écrivain,
00:07le rideau de ténèbre qui est descendu sur le pays qui l'a vu naître. C'est aussi l'un des nôtres, et cela a au moins deux titres.
00:14D'abord, c'est un écrivain de langue française qui a été auréolé de plusieurs prix littéraires, dont le grand prix du roman de l'Académie française pour son livre 2084, paru en 2015.
00:23Il est donc fils de France par le talent et la façon qu'il déploie à illustrer le pays par les arts et les lettres.
00:31Enfin, il est fils de France, comme vous l'avez dit, parce que depuis plusieurs mois maintenant, il est citoyen français.
00:36Il est devenu par l'encre versée, on dit qu'on est légionnaire par le sang versé. Lui, il est par l'encre versée, cette encre d'écrivain qu'il déploie pour combattre, pour la liberté.
00:46C'est l'un des nôtres, et l'arrestation de Boilem Sansal est un scandale pour la liberté, mais c'est aussi une insulte faite à la France.
00:53Peut-être en représailles pour la façon dont Emmanuel Macron a favorisé par exemple les intérêts marocains,
00:59pour la façon dont, par exemple, le prix Goncourt a été décerné à un autre écrivain d'origine algérienne qu'Amel Daoud.
01:05Peu importe, mais en tout cas, tout ceci, bien sûr, maintenant, se passe à un autre niveau que le nôtre.
01:09Sans doute faut-il espérer en premier lieu que nos services obtiennent, c'est bien le minimum, la libération de Boilem Sansal,
01:14l'assurance qui ne sera pas touchée à un seul cheveu de l'écrivain ni à ceux de ses proches.
01:19Mais pour tous ceux qui nous regardent, qui regardent la France comme le phare d'une liberté qui a été foulée aux pieds par le régime algérien,
01:26pour nous aussi, citoyens français, qui espérons que ces mots résonnent comme une promesse de liberté,
01:30je crois que la France doit signifier clairement au monde ce qu'il en coûte de vouloir faire taire un écrivain.
01:36C'est une humiliation que nous a été adressée par le régime algérien, une humiliation de trop.
01:41La France ne peut pas laisser passer ça.
01:43En France, une partie de la classe politique, et je dis bien une partie seulement, s'est empressée de soutenir Boilem Sansal.
01:50Oui, la classe politique est unanime, on va dire, de la gauche socialiste, tendance Jérôme Guedj et François Hollande,
01:56à Marine Le Pen et Éric Zemmour, en passant par François-Xavier Bellamy, Édouard Philippe.
02:00Bien sûr, le gouvernement et l'Élysée, pas une voix ne manque chez les partis politiques
02:04où la liberté signifie encore quelque chose, pour appeler à la libération immédiate de Boilem Sansal.
02:09On ne s'étonne presque pas du mutisme de l'extrême gauche qui, il est vrai, a été dénoncé parfois par Boilem Sansal
02:16comme la complice d'un islamisme dont l'écrivain s'alarme qu'il ait traversé la Méditerranée
02:21pour faire vivre en France la même menace que dans l'Algérie qu'il a vu s'estomper sous ses yeux.
02:26L'islamisme d'ailleurs, ou l'islam, ce que c'est vrai, Boilem Sansal, parfois rapproche les deux
02:31en disant qu'ils sont malheureusement de plus en plus synonymes.
02:34Lorsqu'il lutte contre l'oppression là-bas, c'est aussi notre liberté ici qu'il défend.
02:39Alors, Boilem Sansal est peu suspect, et moins qu'aucun autre, de toute forme d'islamophobie.
02:43Il est né dans l'islam et c'est pour l'avoir observé de près qu'il en est venu à dire cela ces dernières années.
02:49Donc que cette religion à bien des égards est encore trop politique,
02:52qu'elle n'a pas encore connu cette phase de transformation qui la rendrait soluble dans nos principes.
02:56C'est ce qu'il a affirmé encore récemment lorsqu'il a déclaré
02:59que l'islam est incompatible avec la démocratie, car sous nos lois, il triompherait toujours.
03:04Alors, évidemment, on peut penser différemment de Boilem Sansal.
03:06D'ailleurs, d'autres écrivains français qui viennent du Baghreb ne pensent pas comme lui.
03:10Mais on n'arrête pas un homme pour cette idée, sauf à vouloir prouver une fois pour toutes qu'il avait hélas raison.