Mercosur : La France dans le piège européen ?

Europe 1

ABONNEZ-VOUS pour plus de vidéos : http://www.dailymotion.com/Europe1fr Chaque matin dans son édito, Alexis Brézet, directeur des rédactions du Figaro, revient sur l'actualité politique du jour. Ce mardi , il revient sur la question épineuse du traité du MERCOSUR. Retrouvez "L'édito politique" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-edito-eco LE DIRECT : http://www.europe1.fr/direct-video                                                                  Retrouvez-nous sur :                                 | Notre site : http://www.europe1.fr                                 | Facebook : https://www.facebook.com/Europe1                                 | Twitter : https://twitter.com/europe1                                 | Google + : https://plus.google.com/+Europe1/posts                                 | Pinterest : http://www.pinterest.com/europe1/

Transcript

00:007h-9h, Europe 1 Matin.

00:02Les éditos politiques sur Europe 1 avec Le Figaro.

00:05Bonjour Alexis Brezet.

00:06Bonjour Dimitri, bonjour à tous.

00:07Alors après une première série de manifestations réussies hier,

00:10Alexis, les agriculteurs ont annoncé d'autres mobilisations

00:13contre le projet de traité de libre-échange avec le Mercosur.

00:16Est-ce que vous pensez qu'ils peuvent gagner ?

00:18Si on parle de la France, Dimitri, ils ont déjà gagné.

00:22Et haut la main.

00:23Le Premier ministre, la ministre de l'Agriculture,

00:25le ministre du Commerce extérieur,

00:27le ministre de l'Industrie,

00:29le gouvernement au grand complet a fait savoir sur tous les tons

00:33que ce traité était inacceptable.

00:36Même Emmanuel Macron qui, en 2019,

00:39lorsque la Commission l'a négocié, saluait un « bon accord »,

00:43eh bien Macron a changé d'avis.

00:44« Pas question pour la France de l'accepter », dit-il.

00:47Du moins, tant que des engagements précis n'auront pas été pris

00:50pour garantir à l'agriculture française

00:53qu'elle ne sera pas demain submergée de poulets dopés aux antibiotiques,

00:57de bœufs engraissés aux activateurs de croissance

01:00ou de maïs brésilien gavé de pesticides interdits en Europe.

01:04Ajoutons que tous les partis politiques,

01:07chez nous, de LFIRN, partagent la même hostilité.

01:10Et je ne vous parle pas des sondages d'opinion réalisés auprès des Français

01:12qui tous font apparaître une majorité écrasante en faveur du rejet.

01:17Pouvez-vous me citer un sujet, Dimitri,

01:19qui fasse l'objet d'un tel consensus ?

01:22Il n'y en a aucun.

01:23Dans ce pays où l'on se divise sur tout et le reste,

01:26le Mercosur est une exception rarissime.

01:29Il fait l'unanimité.

01:31Contre lui, bien sûr.

01:32Alors si tout le monde en France est contre l'accord avec le Mercosur,

01:34où est donc le problème, Alexis ? Nous n'avons qu'à dire non.

01:37Le problème, Dimitri, vous le savez bien,

01:39c'est que ce n'est pas la France qui décide, mais l'Europe.

01:42Depuis le traité de Lisbonne ratifié, rappelez-vous, par le Parlement français en 2007,

01:48après le rejet du référendum constitutionnel de 2005.

01:52Depuis Lisbonne, donc, les négociations commerciales,

01:55comme une cinquantaine d'autres sujets,

01:57ne sont plus de compétences nationales, mais de compétences européennes exclusives.

02:02C'est la logique du grand marché.

02:03À tarifs européens, négociations européennes.

02:06Alors, nos politiques qui l'ont voté semblent le découvrir.

02:09Enfin, c'est un peu tard.

02:10Concrètement, même s'il y a discussion sur la nature du Mercosur

02:14qui ne traite pas exclusivement de matière commerciale,

02:17concrètement, tout laisse à penser que le traité avec l'Amérique latine

02:21sera soumis à ratification par la voie exclusivement européenne,

02:25devant le Conseil de l'UE tout d'abord à la majorité qualifiée,

02:29puis devant le Parlement européen à la majorité simple.

02:32Et donc, dans l'immédiat, si la France veut bloquer l'adoption du traité,

02:36elle n'a qu'une solution, réunir en Conseil de l'Union

02:40une minorité de blocage composée d'au moins quatre pays membres sur 27,

02:45rassemblant à eux quatre au moins 35% de la population de l'UE.

02:49Et cette minorité de blocage, cela vous paraît-il possible de la réunir, Alexis ?

02:54C'est possible, Dimitri, mais ça va être difficile,

02:56parce que l'Allemagne veille au grain,

02:58et pour elle, qui voit ses débouchés en Chine se tarir,

03:01le Mercosur, c'est une planche de salut.

03:03L'Espagne et le Portugal, pour des raisons culturelles évidentes,

03:06y sont très favorables.

03:08La Pologne hésite, mais l'Italie semble basculer du côté du non.

03:11Et la Hongrie pourrait être tentée de faire pareil.

03:14L'alliance du bloc central français et des souverainistes européens,

03:17voilà qui serait savoureux.

03:19Au fond, cette affaire n'est pas sans rappeler une autre crise européenne

03:22il y a presque 60 ans,

03:24dont l'enjeu côté français était déjà la politique agricole

03:28et déjà l'abandon du principe d'unanimité au profit de la règle majoritaire.

03:33A l'époque, le général de Gaulle était allé au bout du bras de fer

03:36en pratiquant la politique de la chaise vide, et la France avait gagné.

03:40Mais voilà, depuis 1965, les choses ont bien changé.

03:44Notre pays n'est plus l'homme fort de l'Europe,

03:46la première puissance exportatrice,

03:49le modèle d'équilibre politique et financier qu'il était.

03:52Alors qu'elle est percluse de dettes et de déficits,

03:55que sa compétitivité est en berne,

03:57son industrie en charpie, son gouvernement paralysé,

04:01la France est évidemment mal placée pour donner à ses voisins des leçons de frugalité.

04:07C'est la cruelle leçon du Mercosur,

04:09on ne menace pas de pratiquer la chaise vide quand on est déjà au piquet.

04:14L'édito politique sur Europe, merci Alexis Brez.

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