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Dans son édito du 16/11/2024, Jules Torres revient sur le procès de Marine Le Pen sur les assistants parlementaires européens du RN.

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Transcription
00:00Oui, il fut un temps, Anthony, où la politique était l'art du compromis, du verbe haut et des décisions tranchées.
00:04Aujourd'hui, elle semble avoir glissé vers l'art du prétoire, plus que dans l'hémicycle ou aux urnes.
00:10C'est devant les tribunaux que se joue une part grandissante de notre vie publique.
00:14La justice s'infiltre partout et les dossiers judiciaires rentrent dans les campagnes électorales comme des scorpions sous un oreiller.
00:21Cette judiciarisation de la politique, que certains saluent au nom de la transparence,
00:26elle agit comme une machine à broyer notre démocratie.
00:29Prenez l'affaire Fillon en 2017, un candidat présidentiel donné gagnant,
00:33pulvérisé par une enquête médiatique et judiciaire initiée à trois mois de l'élection.
00:37On a vu plus neutre comme calendrier.
00:38Et que dire des réquisitions visant Marine Le Pen ?
00:41La question ici n'est pas de dire si Marine Le Pen est coupable ou innocente.
00:45La justice, évidemment, doit suivre son cours.
00:48Mais une sanction politique par voie judiciaire, ça laisse des traces.
00:51Car soyons honnêtes, la suspicion, encore plus que les faits, empoisonne, affaiblit et tue.
00:56La démocratie mérite beaucoup mieux que ça.
00:58D'ailleurs, comme pour François Fillon en 2017,
01:00le procès de Marine Le Pen pourrait bien redistribuer les cartes de la prochaine élection présidentielle.
01:03Oui, et c'est bien tout le problème.
01:04Car en démocratie, la légitimité politique, elle se mesure dans l'isoloir et non pas dans les prétoires.
01:09Et pourtant, la France, elle glisse lentement vers une situation
01:12où l'avenir d'un dirigeant se joue moins devant les électeurs que devant les juges.
01:16Marine Le Pen risque donc cinq ans d'inéligibilité et cinq ans de prison.
01:20Au-delà de l'affaire personnelle, c'est un coup porté à l'idée même de souveraineté populaire.
01:24Car priver une candidate de compétition pour des millions d'électeurs,
01:27c'est jouer avec le feu.
01:28Aujourd'hui Marine Le Pen, demain qui d'autre ?
01:30Que reste-t-il de la liberté politique si une inéligibilité prononcée
01:34élimine les figures majeures du débat public ?
01:37D'autant qu'il y a une menace qui plane.
01:39Faut-il agir dans la précipitation sans se préoccuper de l'appel
01:43ou du pourvoi en cassation qui pourrait suivre ?
01:45Les juges ne devraient pas devenir les arbitres de la compétition électorale.
01:49Montesquieu, qui avait quelques idées sur la séparation des pouvoirs,
01:52nous avait pourtant prévenu.
01:53Quand la justice se mêle trop de politique, elle perd sa neutralité.
01:57Le risque est immense.
01:58En érigeant les juges en gardiens de la vertu politique,
02:00on nourrit une défiance à leur égard.
02:02Pire, on transforme chaque élu en cible et chaque magistrat en suspect.
02:06Tout cela, au final, affaiblit notre démocratie et la confiance des citoyens.
02:10Alors expliquez-nous, Jules, que faut-il faire ?
02:12Est-ce qu'il faut tolérer certains abus pour préserver la politique
02:14ou risquer d'affaiblir la démocratie en la livrant au tribunal ?
02:18Je n'ai pas toutes les réponses, mais en tout cas, j'en ai une.
02:20La justice, elle doit rester à sa place,
02:22garant de l'état de droit et non acteur politique.
02:24Tout ne peut pas se régler devant un juge.
02:26Parfois, il faut laisser les électeurs trancher.
02:28C'est une question de bon sens,
02:29mais c'est aussi une question de survie pour la démocratie.
02:32Quant aux élus, eux, ils doivent se réapproprier la responsabilité politique.
02:35Cela passe par une éthique claire,
02:37vigilance absolue sur l'argent public,
02:39tolérance zéro pour les conflits d'intérêt
02:41et une responsabilité devant les citoyens et non pas devant un tribunal.
02:46Et si la sanction politique dépend des juges,
02:49que reste-t-il de la souveraineté populaire ?
02:51Car des magistrats en robe noire,
02:52ils ne peuvent pas remplacer des électeurs dans un isoloir.
02:55La politique, c'est le souffle, c'est la passion,
02:57c'est la confrontation des idées, pas un exercice de plaidoirie.
03:00Quand chaque querelle se transforme en procès,
03:02on étouffe la vie publique.
03:04En installant les juges au cœur de l'arène politique,
03:06on fait de la démocratie un espace de suspicion permanente.
03:09Il est temps de retrouver un équilibre,
03:11des juges dans les palais de justice, des élus dans l'arène politique.
03:14Car au bout du compte, le seul véritable tribunal,
03:17c'est celui de l'histoire et son jury, c'est le peuple souverain.

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