Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Mercredi 13 novembre 2024 : la comédienne Audrey Lamy. Elle est à l'affiche du film de John Wax "En tongs au pied de l'Himalaya".
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Court métrageTranscription
00:00C'est votre rencontre avec le réalisateur Cédric Lapiche qui a fait basculer votre vie d'actrice avec votre premier rôle dans son film Paris, c'était en 2003, il y a 21 ans, au Conservatoire National Supérieur d'Art Dramatique à Paris.
00:15Et puis il y a eu ce rôle déterminant dans votre rencontre avec le public français, évidemment à travers la sitcom Scène de Ménage sur M6, aux côtés de Louis, Denis et Lion,
00:26avant d'enfoncer définitivement le clou grâce à cette banlieue aux arts très irascible dans la comédie à succès Tout ce qui brille, choréalisée par Géraldine Nakach et Hervé Mimran.
00:38Une performance remarquée, saluée d'ailleurs par une nomination au César, suivront des rôles dans Les Adoptés de Mélanie Laurent, Police de Maïwenn, avec cette scène incroyable qui a marqué les esprits tant elle a été bluffante,
00:50cette performance dramatique qui m'avait marquée aussi. C'était particulier cette séquence, on en parlera si vous voulez après, mais c'était une expérience.
00:59Avant d'occuper une grande place dans des films variés avec des comédies sociales finalement, il y en a beaucoup, comme Les Invisibles de Louis-Jean Petit qui raconte le quotidien des flammes SF.
01:09Il y a eu La Brigade aussi qui met en lumière le quotidien des jeunes migrants.
01:13Aujourd'hui vous êtes à l'affiche du film En Tongue au pied de l'Himalaya de John Wax. C'est une comédie douce amère qui nous plonge dans le quotidien d'une maman qui est totalement célibataire parce que fraîchement larguée, on ne va pas se mentir.
01:24Elle cherche un boulot stable, elle touche à l'alcool et elle doit s'occuper de cet enfant qui est atteint d'un TSA, d'un trouble du spectre autistique.
01:32John Wax, le réalisateur, a confié que lorsqu'il vous a envoyé le scénario, vous avez répondu en moins de deux heures.
01:39C'est la réponse la plus rapide.
01:42Je n'ai jamais lu aussi vite et je n'ai jamais donné une réponse aussi rapide.
01:48J'étais sûre de moi, j'étais sûre de lui, j'étais sûre de l'histoire et j'étais hyper enthousiaste de jouer ce rôle.
01:55Avec John, on s'était rencontrés sur le film de Fabrice Eboui qui s'appelle Coexister et on s'était vraiment appréciés.
02:01Il m'avait dirigé sur le tournage et il m'avait dit un jour j'écrirai un film en pensant à toi, j'ai trop envie qu'on retourne ensemble.
02:08Quelques années après, j'étais en plein déménagement, il m'appelle et il me dit ça y est, le grand jour est arrivé.
02:12Tu as le scénario qui s'appelle En Tongue aux pieds d'Himalaya sur ta boîte mail.
02:16Ne me fais pas poireauter une semaine parce que j'ai hâte de savoir ce que tu en penses et je ne te dis pas surtout de quoi ça parle.
02:22Comme John Wax, il vient quand même pas mal de la comédie avec tout simplement Noir, Coexister, Barbak, tout ça.
02:28Je m'attendais vraiment à lire une comédie et je lui écoute, je suis dans les cartons, laisse-moi deux jours, je te rappelle.
02:34On raccroche, je regarde si j'ai bien reçu le mail, je commence à lire et je lâche les cartons pour lire la suite.
02:39Une heure et demie après, j'étais conquise, j'étais séduite.
02:43Je me suis dit que ça s'appelle un coup de cœur quand tu n'arrives pas à décrocher une histoire, c'est qu'il y a un intérêt.
02:49Et ça m'a beaucoup plu, je n'avais même pas besoin.
02:51Alors que d'habitude, je lis plusieurs fois les scénarios, j'appelle mon agent, je me pose 12 milliards de questions.
02:55Là, je n'ai appelé personne à part lui en lui disant un immense oui et un grand bravo et un grand merci pour le rôle que tu m'as écrit.
03:02C'est emprunté à une vraie histoire qui a été racontée sur scène et qui racontait le vrai quotidien de cette maman qui doit trouver des solutions pour son fils
03:12et qui doit réussir aussi à vivre en tant que femme d'un autre côté.
03:17En fait, c'est le seul en scène de Marie Odile Weiss.
03:20Effectivement, ce seul en scène devient un film.
03:23Alors là, on s'est concentré sur une année parce que c'était trop compliqué de faire 11 années.
03:28Marie Odile, dans son seul en scène, traite du diagnostic jusqu'à la 14e ou 15e année de son fils.
03:36Et donc, c'est vrai que pour raconter une histoire et pour tenir un film d'une heure et demie, c'était trop long.
03:42Ça aurait été trop chronique.
03:43Donc, on s'est concentré sur une année de scolarité avec mon fils, avec Andrea.
03:50Elle était là aussi pour le petit garçon qui joue mon fils.
03:53Il est impressionnant, ce petit garçon.
03:55Il y a un petit garçon dans le film qui joue le rôle de l'autiste.
03:58Eden Lopez, il s'appelle.
03:59Exactement.
04:00Il est impressionnant.
04:01C'est-à-dire qu'à un moment donné, en tant que spectateur, on se pose la question de savoir si lui-même n'est pas touché par le TSA, par ce trouble du spectre de l'autistique.
04:11Honnêtement, c'est une question qui revient assez souvent.
04:17Parce que là, on est maintenant en fin de tournée, mais on a fait pas mal de dates en avant-première.
04:22La première question à chaque fois, c'était qui est ce petit garçon ? Est-ce qu'il est autiste ou pas ?
04:26Parce que c'est tellement bluffant ce qu'il fait.
04:28Évidemment, on ne pouvait pas prendre un autiste pour des raisons.
04:31Il y avait des scènes de crise dans le film.
04:33Donc, on ne peut pas mettre un autiste en situation de crise.
04:35Sinon, c'est de la maltraitance.
04:36Il aurait dû se blesser en plus.
04:38Comment ?
04:39Il pourrait se blesser.
04:40Oui, bien sûr.
04:41Mais il faut quand même trouver un enfant de 7 ans qui soit capable d'incarner, de jouer.
04:46Il y avait toutes les infos qu'il devait retenir.
04:49Le seul truc, c'était vraiment ma plus grande frayeur.
04:53J'étais sûre de moi sur l'histoire.
04:56J'étais sûre de moi sur mon personnage.
04:57J'étais sûre de John Wax.
04:59J'étais sûre de l'objet du projet.
05:01Mais il y a un truc qui m'effrayait terriblement.
05:03C'est que j'ai dit à John, qui on va choisir ?
05:05Mais il faut qu'on trouve un petit garçon qui soit exceptionnel.
05:08Parce que tout repose sur lui.
05:10Si on ne croit pas en lui, on ne croit pas au sujet, on ne croit pas au film.
05:13Et là, c'est la catastrophe.
05:14Donc, il faut vraiment qu'on trouve un génie.
05:18Parce qu'il doit savoir jouer.
05:20Il doit retenir toutes les indications des gestes à répétition, des gestes répétitifs.
05:26Du fait qu'il faut regarder le sol, du fait qu'il a peur du bruit.
05:30La peur du bruit, le regard qui se perd comme ça.
05:34On a l'impression que c'est extrêmement compliqué.
05:37Parce que c'est vraiment de la dentelle.
05:41Marie-Odile qui était là tous les jours, c'est trop.
05:43Un tout petit peu moins.
05:44C'est vraiment une musique.
05:45Baisse un peu, augmente.
05:47Je me suis dit, comment il va faire ?
05:49Comment il va faire pour retenir tout ça ?
05:51Je me souviens les premiers jours.
05:52Il y a John qui lui dit, tel geste, tel geste.
05:55On change le texte au dernier moment.
05:56Parce que de temps en temps, il faut aussi s'adapter avec le décor et avec plein de choses.
06:00Je me suis dit, comment il va faire pour retenir tout ça ?
06:02Moi, il me dit ça, j'oublie la moitié des infos.
06:05Vous connaissez le texte par cœur très vite d'ailleurs.
06:07Ça, c'est parce que je suis complètement angoissé.
06:09Je suis complètement stressé.
06:11Je le connaissais déjà trois mois avant.
06:14Je pense à un truc comme ça.
06:15On comprend à travers votre filmographie que vous êtes très attaché au fait, maintenant en tout cas,
06:24de faire des films qui racontent quelque chose.
06:26Limite pour que ça change aussi le regard d'une façon positive auprès du public.
06:35En fait, c'est marrant parce que je sors d'une journée presse, j'inquiète.
06:38Hier, c'est la journée où on fait plein de promos et tout ça.
06:41Et il m'a dit un peu la même chose par rapport aux Invisibles à Brigade.
06:44Mais finalement, quand je suis rentrée chez moi, je me suis dit, à chaque fois, j'ai fait ce choix-là.
06:47Parce que même à son niveau, mais par exemple, Marum, le film de Frédéric Kiring,
06:51qui est une grosse comédie pour les enfants, donc très colorée, très BD, très familiale.
06:57On traite quand même aussi un sujet où son fils est victime de harcèlement scolaire.
07:01Alors bon, d'accord, la maman va se venger en leur donnant des tartes au caca.
07:05On est sur un autre registre.
07:07Mais finalement, je me suis rendue compte, même avec Rebelles, avec le film de Maïwenn.
07:13En fait, vraiment, je suis sûre, ce qui m'intéresse le plus, c'est de raconter des belles histoires.
07:19Des histoires intéressantes, que ce soit de la grosse comédie bien populaire, que ce soit la comédie sociale.
07:25Même du Disney, quand vous prêtez votre voix moche et méchante.
07:27Bien sûr, parce que j'ai vraiment ce truc-là qui m'aide souvent à prendre des décisions quand j'ai du mal à les prendre.
07:34C'est, est-ce que j'ai envie d'aller voir ce film au cinéma ?
07:38Est-ce qu'en tant que spectatrice, j'ai envie de mettre, je ne sais pas, 13, 15 euros pour aller voir ce film ?
07:43En sachant que chez moi, j'ai un canapé, je suis bien équipée, j'ai un bel écran.
07:47Non mais vraiment, est-ce que j'ai envie d'aller voir ce film ?
07:50Et du coup, ça m'aide dans mes choix et dans mes décisions.
07:53Le film de John Wax, concrètement, au bout de deux heures, quand je l'ai lu, j'ai envie de le faire.
07:58J'ai envie de raconter cette histoire parce que tu ne sors pas de là en disant, c'était inintéressant, je n'ai pas compris le sujet.
08:04Mais on sait ce qu'on va voir.
08:05Le propos, il est clair.
08:07On a compris quelque chose, on a appris quelque chose.
08:11Et surtout, on a ri et on a chialé.
08:13Moi, c'est ce que j'aime.
08:14Dans scène de ménage, vous aviez un rôle très affirmé, Audrey.
08:17Elle ne se laissait pas faire.
08:19Ah ben non, non, non.
08:20Elle était complètement victime, parfois.
08:22Et ce qui est incroyable, à travers ce film en tong au pied de l'Himalaya, c'est qu'on découvre cette douceur qui fait partie de vous.
08:30Et on se rend compte qu'il fallait du temps pour donner ça, qu'il vous fallait du temps pour lâcher prise.
08:36Vous le ressentez, ça ?
08:37Oui.
08:38Et il y a encore du travail à faire, je pense.
08:39Non, mais c'est marrant que vous parliez de ça.
08:41Parce que je disais encore, franchement, il y a quelques jours à ma sœur, il faut qu'on apprenne encore plus à lâcher prise.
08:49Ce n'est pas quelque chose que je fais volontairement.
08:52Alexandra est pareil.
08:53Oui, mais évidemment.
08:54On n'est pas sûr pour rien.
08:55On se ressemble sur beaucoup, beaucoup de choses.
08:57Beaucoup, beaucoup de choses.
08:58Mais elle aussi, elle apprend maintenant.
08:59Parce qu'on se coach maintenant.
09:00On se dit les choses.
09:01Non, mais c'est vrai.
09:02Avec une nièce au milieu, Chloé.
09:03Comment ?
09:04Avec une nièce au milieu.
09:05Oui, Chloé, mais pareil.
09:07On peut se faire des soirées jusqu'à 4h du matin en se disant, il faut qu'on lâche prise.
09:11Et c'est vrai.
09:12C'est vrai parce qu'on se remet souvent en question.
09:17Ce qui est génial avec ce métier, c'est qu'on apprend tout le temps, tous les jours.
09:20C'est un peu comme au théâtre.
09:21Comme si on jouait tous les soirs pendant des années, des années, des années.
09:24On se dit, tiens, demain, je vais essayer ça.
09:25Tiens, demain, après-demain, j'essaie ci.
09:27Tiens, j'ai jamais testé ça.
09:29Donc, ça n'arrête jamais.
09:31Et pour ça, c'est génial.