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La résilience comme moteur : alors qu'il était considéré comme l'un des grands espoirs du motocross français, Axel Allétru a gravement chuté lors des Championnats du monde 2010. Le verdict est sans appel : à 20 ans, Axel est paraplégique. Il raconte en exclusivité.
Regardez L'invité de Céline Landreau avec Céline Landreau du 01 novembre 2024.

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Transcription
00:00RTL Matin, Céline Landreau et Thomas Soto
00:03Il est 8h18, ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, on connaît tous l'adage.
00:06Et bien Céline, ce matin vous avez été bluffée vraiment par un garçon qui aurait pu baisser les bras,
00:11abandonné après un accident dramatique, mais sa devise à lui, c'est toujours rebondir.
00:15Il en a d'ailleurs fait un livre avec Peggy Olmy, il s'appelle Axel Alétru et il est votre invité ce matin.
00:20Bonjour et bienvenue.
00:21Bonjour Axel Alétru.
00:22Bonjour.
00:23Thomas le disait, votre histoire c'est celle d'un destin brisé, net, comme cette colonne vertébrale
00:29dont les deux parties ne sont plus retenues que par des nerfs après un accident de motocrosse.
00:33Mais un homme qui a su se remettre debout, et cette renaissance, vous la racontez dans ce livre,
00:37est toujours rebondir avec ce sous-titre, échec, accident, et si c'était la chance de votre vie.
00:43On va revenir évidemment dans un instant sur votre parcours et tout ce que vous avez dû surmonter,
00:46mais je voudrais rebondir justement sur ce sous-titre.
00:50Votre accident, vous considérez que ça a été la chance de votre vie aujourd'hui ?
00:53Alors c'est vrai que ma vie était toute tracée avec une longue carrière devant moi,
00:57normalement dans le motocrosse, et malheureusement j'ai perdu l'usage de mes jambes.
01:01Aujourd'hui je pense que la vie m'a amené sur des choses que je n'aurais jamais pu faire auparavant,
01:06et la force je pense de mon histoire, de mon parcours, c'est d'avoir su saisir les opportunités
01:12et rebondir justement sur les choses qui me pouvaient me permettre de faire de nouveau du sport,
01:17avec le handisport, la natation, et puis recréer des aventures malgré mon handicap.
01:23Alors cet accident, il a eu lieu le 27 juin 2010 en Lettonie,
01:27lors de votre premier championnat du monde en tant que professionnel de motocrosse,
01:30vous avez 20 ans, vous êtes un des grands espoirs de la discipline,
01:33mais il y a cette ornière que vous ne voyez pas à temps.
01:37A votre retour en France après un trajet cauchemardesque, un médecin vous annonce que vous redoutiez déjà.
01:41Remarchez, ça va être compliqué, vous êtes paraplégique.
01:45Effectivement, alors la Lettonie c'était cauchemardesque, comme vous le dites, c'était vraiment très compliqué.
01:51Arrivé en France, ma première question était toute simple,
01:54j'ai posé la question au docteur en me disant, est-ce que je vais remarcher un jour ?
01:57Et là on m'a dit clairement que la cône vertébrale était très endommagée,
02:01qu'il y avait très peu de chances que je puisse me remettre un jour debout.
02:05Et là je me suis dit, ok, qu'est-ce que je peux faire ?
02:08Quelles sont mes possibilités pour pouvoir essayer de récupérer au maximum ?
02:12Et donc j'ai mis en place ce que j'appelle la technique de la visualisation,
02:16une technique où j'ai essayé de visualiser le fait de me remettre debout,
02:20récupérer des muscles trois fois trois minutes par jour,
02:23des choses qui peuvent servir d'ailleurs à tout le monde au quotidien,
02:26dans toutes sortes de situations, pas que forcément dans une situation extrême.
02:29C'est une technique d'ailleurs qui a été validée par les scientifiques,
02:33c'est quelque chose qui est un peu abstrait parce qu'on n'a pas forcément les résultats tout de suite.
02:37Mais ça permet d'entraîner le cerveau ?
02:38Mais ça permet de pouvoir essayer de réaliser des choses, créer des choses.
02:44Et aujourd'hui les gens font beaucoup de sport,
02:48mais combien de personnes finalement s'occupent du muscle principal qui est notre maison mentale, le cerveau ?
02:53Alors la rééducation, elle est longue, elle passe par des étapes cruciales
02:56qu'on ne soupçonne pas d'ailleurs réapprendre à se tenir assis,
03:00puis debout, avancer entre des barres parallèles.
03:02Et puis en novembre 2011, près d'un an et demi après votre chute,
03:05vous faites vos premiers pas sans béquilles chez vos parents, vous remarchez.
03:09Sensation extraordinaire on imagine ?
03:12On ne se rend pas compte, mais déjà la première fois de me remettre debout dans l'eau,
03:15c'était un énorme espoir pour moi, pour les gens qui m'entouraient,
03:19pour l'équipe, pour le kiné, mes parents.
03:22Et ensuite, évidemment, les choses avancent petit pas à petit pas
03:27parce que c'est vraiment des progrès qui sont infimes.
03:30Mais en novembre 2011, j'arrive finalement à me remettre debout.
03:33Et là, ça a été une énorme consécration
03:36parce que les diagnostics pessimistes des médecins étaient vraiment assez formels.
03:40Donc me remettre debout, c'était quelque chose d'extraordinaire, un soulagement.
03:43Mais malgré tout, même si je suis debout, je reste avec un handicap
03:47et avec 80% des muscles des jambes en moins.
03:50Vous décidez de vous mettre à la natation parce que vous êtes un sportif de haut niveau,
03:54vous avez besoin de cette adrénaline-là.
03:56Vous participez au championnat de France et tout de suite vous êtes médaillé.
03:59Alors j'avais plusieurs choix. J'avais 22 ans à l'époque et je me dis
04:03qu'est-ce que je fais ? Est-ce que je reprends les études ou est-ce que je continue le sport ?
04:07Après tout, le sport c'est toute ma vie.
04:09Et là, je me dis pourquoi pas démontrer que malgré le handicap,
04:12je peux devenir ne le fois un champion.
04:14Malgré ce qui m'est arrivé, de nouveau avoir une carrière.
04:17Et j'avais vu à l'époque sur YouTube un athlète qui m'avait énormément inspiré,
04:21un athlète que vous devez connaître non pas pour ses performances,
04:25mais pour ce qu'il a fait, c'est Oscar Pistorius.
04:27Mais avant qu'il fasse ce qu'il a fait, il m'avait énormément inspiré sur ce point-là
04:31où il avait fait les finales aux Jeux Olympiques avec les valides
04:34alors qu'il est double amputé de jambes.
04:36Je me suis dit pourquoi pas, moi, refaire du sport.
04:38Et là, je me suis lancé dans la natation en e-sport et ça a été un énorme succès.
04:42Vous rêviez des Jeux, malheureusement un changement de catégorie brise votre rêve.
04:46Vous tentez le karting, trop violent.
04:48Mais les sports mécaniques, à vous lire, on a l'impression que c'est un peu une drogue.
04:51Et en 2016, vous découvrez le buggy, un véhicule tout-terrain léger.
04:54Et comme vous êtes un homme de défi, vous vous dites je vais faire le Dakar.
04:58C'est vrai.
05:00Je raconte dans mon livre, j'ai eu la chance d'avoir des parents qui m'ont toujours laissé le choix.
05:07Dès tout petit, mes parents ne m'aidaient pas de barrière, pas de limite.
05:11Mes parents me laissaient prendre des risques très jeune.
05:14Et je pense que cette philosophie de vie, je l'ai toujours eu en moi.
05:17Et même après l'accident, je me suis dit pourquoi pas revenir dans les sports mécaniques
05:21et notamment faire le rallye le plus dur au monde qui est le rallye Dakar.
05:24Que vous terminez et que vous gagnez, évidemment.
05:27Vous avez 34 ans aujourd'hui, Axel Alétru. Vous allez vous arrêter où ?
05:32Parce qu'on précise que vous avez refait du motocross.
05:35C'est vrai. J'ai voulu boucler la boucle et remonter sur une moto pour faire une épreuve qui est mythique dans le Nord,
05:41qui est l'enduropal du Touquet. 600 000 spectateurs, 1300 pilotes sur la plage.
05:45Déjà, rien qu'au départ, c'était déjà une énorme victoire par rapport aux assurances.
05:50Sur une moto thermique.
05:52Adapter la moto, ne pas avoir d'équilibre avec mes jambes.
05:56Mais j'ai pu réaliser le fameux all-shot et partir deuxième devant les 1300 pilotes.
06:00Donc ça, ça a été quelque chose d'extraordinaire.
06:02Je pense que ça a été sincèrement le projet le plus dangereux de ma carrière.
06:06Donc je l'ai fait une fois. C'est bien, mais je ne vais pas essayer de retenter le diable.
06:10La moto, c'était une passion familiale.
06:12Votre père lui-même faisait de la compétition.
06:14Vous racontez avoir rêvé enfant le voyant tracer son sillon dans le sol meuble.
06:18Dans votre livre, d'ailleurs, la figure paternelle est cruciale.
06:20Il vous pousse constamment, mais petit déjà, à vous dépasser.
06:24Sans lui, sans cette rage, j'allais dire même cette hargne de réussir qu'il vous a inculqué,
06:29vous auriez pu remarcher, vous pensez ?
06:31On ne le saura jamais.
06:32Je pense que c'est plein de facteurs qui font qu'aujourd'hui, j'ai cette chance de pouvoir être debout.
06:37Mais cette chance a été créée avec cette fameuse technique de la visuation,
06:41avec une éducation de mes parents, avec cette force mentale que j'ai pu développer.
06:46Aujourd'hui, j'ai eu aussi la chance d'avoir une kiné qui a été extraordinaire,
06:50qui m'a accompagné dans tout ce parcours.
06:52J'ai eu un entourage qui a été très positif.
06:54Et j'en parle aussi, c'est important.
06:56Parce que ce livre est vraiment pour tout le monde, pas que pour les personnes handicapées.
06:59Quand on lit ce livre, on se dit que c'est très important, avec l'éducation,
07:03de former déjà nos enfants à préparer l'avenir.
07:06Et je pense que j'étais très bien préparé.
07:08Vous parlez de l'entourage, des enfants.
07:10Vous soulignez le rôle de votre compagne aussi dans ce livre.
07:12Vous racontez que vous pouvez prendre vos deux enfants, vos deux fils, sur votre fauteuil.
07:15Que c'est vous qu'on félicite, et à juste titre évidemment, pour vos exploits.
07:18Mais que quand vous vous baladez, c'est elle, votre compagne, qui porte les sacs.
07:21C'est vrai. Effectivement, j'ai la chance d'avoir ma compagne qui me suit dans tous mes défis.
07:26Qui accepte aussi que je puisse faire ces défis.
07:28Et qui réalise de grandes choses tous les jours.
07:32Parce que c'est vrai que le handicap, il y a beau avoir des défis, il y a beau avoir des victoires, etc.
07:36Le handicap me rattrape au quotidien.
07:38Il faut être réaliste. Je suis en fauteuil roulant.
07:41Je me déplace avec difficulté. J'ai des douleurs.
07:44Parfois je suis plus fatigué qu'une personne normale.
07:47Il faut savoir que je dépense 300% de plus d'énergie par jour qu'une personne valide.
07:51Dans juste une vie quotidienne.
07:53Donc je suis vraiment fatigué.
07:55Donc l'avoir avec moi au quotidien, c'est énorme.
07:58Axel Alétru, je rappelle le titre de votre livre,
08:00« Et toujours rebondir ».
08:02On a mal avec vous pendant le premier chapitre.
08:04On partage vos sentiments d'injustice, l'inquiétude de votre mère.
08:07Et on en sort admiratif de votre résilience.
08:10« Et toujours rebondir », c'est chez Albain Michel.
08:13Merci d'être passé nous voir dans RTL.
08:15Merci à vous.
08:16RTL qui a fait trois heures de route, parce que vous conduisez aussi.
08:19Alors oui, effectivement, il existe des choses adaptées pour pouvoir conduire.
08:24Donc voilà, je peux être autonome.
08:26Vous n'avez jamais peur ?
08:27Si, je ne reste qu'un humain, c'est normal.
08:29Parce que le pire est à venir.

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