Vladimir Poutine réunit une vingtaine d’Etats du sud pour le sommet des BRICS+ à Kazan. Le chef du Kremlin montre ainsi qu’il n’est pas isolé. Les BRICS : le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud se sont élargis à l’Iran, l’Égypte, l’Éthiopie et les Émirats Arabes Unis. Cette nouvelle alliance devra trouver des compromis, surtout face aux nombreux différends politiques qui opposent les nouveaux pays membres. Ces pays veulent notamment réduire leur dépendance au dollar américain.
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00:00Bienvenue dans le débat, Vladimir Poutine réunit une vingtaine d'États du Sud pour le sommet des BRICS à Kazan pendant trois jours.
00:12Deux ans et demi après l'invasion de l'Ukraine, le chef du Kremlin veut montrer qu'il n'est pas isolé.
00:17Les BRICS Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud se sont élargies à l'Iran, à l'Égypte, à l'Éthiopie ou encore aux Émirats Arabes Unis.
00:26Vladimir Poutine a dit à Xi Jinping vouloir renforcer les liens avec la Chine, un facteur de stabilité mondiale, a-t-il dit.
00:33Et puis Lula, Lula a annulé son déplacement pour des raisons de santé. Le chef de l'État brésilien sera présent en visioconférence.
00:41Ce sommet des BRICS a lieu en pleine guerre en Ukraine et à deux semaines de l'élection présidentielle américaine.
00:46Alors ce sommet est-il d'abord une victoire diplomatique pour Vladimir Poutine ? Les BRICS sont-ils un bloc anti-occidental ?
00:53Un sommet alternatif, plus attractif que le G20 ? Ou encore un regroupement hétéroclite de pays émergents à la diplomatie opportuniste ?
01:01Voilà les questions que nous allons poser à mes invités. J'ai le plaisir d'avoir à côté de moi Héléna Volochine.
01:05Bonsoir Héléna.
01:06Bonsoir Stéphane.
01:07Grand reporter à France 24 et auteure de Propagande, l'arme de guerre de Vladimir Poutine.
01:11Et c'est aux éditions Autrement. Alors ça c'est le livre de Jean-Maurice Riperre, donc on va voir le vôtre.
01:17Voilà, Héléna Volochine, donc Propagande, l'arme de guerre de Vladimir Poutine.
01:21Jean-Maurice Riperre, bonsoir. Merci d'être avec nous ce soir, ancien ambassadeur de France en Chine et en Russie.
01:27Diplomatie de combat, mémoire, ça c'est votre livre, préfacé par François Hollande, et c'est aux éditions Presse de la Cité.
01:34Bienvenue. Nous avons ce soir Pascal Boniface avec nous.
01:37Bonsoir.
01:38Directeur de l'IRIS et auteur de 50 idées reçues sur l'état du monde, et ça c'est paru chez Armand Colin.
01:45Nous attendons un quatrième invité qui va nous rejoindre dans quelques minutes.
01:48Il a un peu de retard, Alexandre Kateb, économiste.
01:52C'est l'événement diplomatique le plus important organisé en Russie.
01:56En tout cas, c'est ce qu'a affirmé le conseiller de Vladimir Poutine.
01:59Avant d'en discuter, je vous propose de faire un point en image avec Anna Perera.
02:05C'est le plus gros sommet diplomatique sur le territoire russe depuis l'invasion de l'Ukraine.
02:10Le sommet des BRICS, réunion des puissances censées pouvoir concurrencer l'hégémonie occidentale.
02:15Visé par un mandat d'arrêt émis par la Cour pénale internationale depuis mars 2023,
02:20Vladimir Poutine est limité dans ses déplacements à l'étranger.
02:23En tant que pays hôte, c'est l'occasion pour lui de démontrer l'échec de la politique occidentale,
02:28de sanctions contre son pays, et de prouver qu'il n'est pas si isolé à l'international.
02:35Je tiens à vous féliciter.
02:37Au cours de ces 15 années d'existence, notre association des BRICS s'est forgée un rôle particulier.
02:42Aujourd'hui, de nombreux pays du monde souhaitent rejoindre l'association.
02:46Je me réjouis de la discussion que nous aurons demain dans le cadre des BRICS.
02:51Cette année, l'organisation accueille quatre nouveaux membres,
02:54l'Ethiopie, l'Iran, l'Égypte et les Émirats arabes unis.
02:58Vladimir Poutine a débuté son marathon de rencontres bilatérales avec Dilma Roussef,
03:02la présidente de la nouvelle banque de développement.
03:05Le président russe a répété son souhait de réduire leur dépendance au dollar,
03:09en proposant d'échanger dans leur propre monnaie.
03:12L'augmentation des règlements en monnaie locale
03:16permet de réduire les paiements de services de la dette,
03:20d'accroître l'indépendance financière des pays BRICS.
03:23Elle aide à minimiser les risques géopolitiques au maximum,
03:26à libérer le développement de l'économie de la politique,
03:29si tant est que cela soit possible dans le monde aujourd'hui.
03:33Une idée aussi longtemps défendue par le président brésilien Lula da Silva,
03:37seul dirigeant qui ne sera présent que par visioconférence,
03:40pour des raisons de santé.
03:46D'abord, pourquoi Kazan ? Vous connaissez cette ville,
03:49elle n'a pas été choisie au hasard ?
03:51Non, Kazan, c'est l'un des pôles de rencontres multilatérales qu'il y a en Russie.
03:54Il y en a à tous les coins de la Russie.
03:56Au nord, on a Saint-Pétersbourg.
03:58Au sud, on a Sochi, qui a hérité des infrastructures des Jeux Olympiques de 2014.
04:02A l'est, il y a Vladivostok.
04:04Et puis Kazan, au centre, c'est un peu le symbole.
04:06C'est la capitale du Tatarstan,
04:08c'est un pays musulman.
04:10C'est le symbole de cette Eurasie voulue par Vladimir Poutine.
04:13Il y a un très beau Kremlin à Kazan,
04:15avec des murs blancs,
04:17hérité d'abord du Kanat Kazan.
04:19Puis, après la conquête par Ivan le Terrible,
04:21il y a des églises qui ont été construites.
04:23Il y a aussi des mosquées.
04:25C'est un peu le symbole, encore une fois,
04:27de ce multiculturalisme,
04:29de ce pays plurinational
04:31que prône Vladimir Poutine.
04:33Et l'infrastructure aussi a été aménagée
04:35pour tenir de grandes rencontres.
04:37Il y a toute l'année des forums,
04:39des festivals, des universiades,
04:41comme on aime les organiser en Russie
04:43pour la jeunesse, des compétitions.
04:45C'est une ville qui est assez vibrante.
04:47On peut aussi rappeler qu'en 2012,
04:49il y a tout un technopole,
04:51une ville universitaire qui a été construite,
04:53Innopolis, avec plusieurs milliers d'étudiants,
04:55de chercheurs qui travaillent là.
04:57C'est un peu la vitrine du futur technologique
04:59voulu par Vladimir Poutine,
05:01malgré la guerre en Ukraine,
05:03malgré l'isolement du pays,
05:05malgré les sanctions internationales.
05:07Malgré tout cela,
05:09c'est un coup politique pour Vladimir Poutine,
05:11cette organisation des BRICS,
05:13dans cette ville de Kazan.
05:15C'est sûrement un succès,
05:17d'abord de communication,
05:19le monde entier va en parler.
05:21Ensuite, qu'est-ce que ça veut dire
05:23et par quoi ça va se traduire,
05:25ce sont deux questions différentes.
05:27Je pense que d'abord,
05:29dans ce genre d'initiative,
05:31c'est sur la durée qu'on juge
05:33les envies d'élargir.
05:35Les BRICS ?
05:37Les BRICS et d'autres.
05:39Il ne faut pas oublier par exemple
05:41que la Chine et la Russie se sont mis d'accord
05:43il y a quelques années pour élargir
05:45l'organisation de la coopération de Shanghai,
05:47où sont entrés ensemble l'Inde et le Pakistan.
05:49Et si je dis ça,
05:51ce n'est pas totalement par hasard,
05:53vous voyez où je veux en venir.
05:55Il est évident qu'au fur et à mesure
05:57qu'on élargit une organisation,
05:59elle devient plus difficile à gérer
06:01Il y a deux aspects,
06:03il y a les aspects économiques.
06:05Il n'est pas surprenant que des pays
06:07émergés ou émergents
06:09souhaitent coopérer ensemble
06:11contre l'Occident,
06:13pourquoi pas dans le discours
06:15de Vladimir Poutine,
06:17la réalité va être plus complexe
06:19parce que si les BRICS élargis
06:21ont l'intention de remplacer le G20,
06:23vous allez avoir un problème
06:25parce que dans le G20,
06:27vous avez beaucoup plus de pays,
06:29il y a là quelque chose
06:31qui est un peu étrange.
06:33Donc tout ça, l'aspect politique
06:35du sommet va être quand même
06:37beaucoup fait d'incantation
06:39de mon point de vue.
06:41– Pascal Boniface, la porte-parole
06:43du Kremlin lui dit qu'il veut
06:45nouer des relations qui se basent
06:47sur le droit international
06:49et non pas sur des règles établies
06:51par des pays en particulier,
06:53notamment par les États-Unis.
06:55Donc c'est de l'anti-Occident.
06:57Il dit vouloir baser sa politique
06:59sur le respect du droit international
07:01puisque ça n'a pas tout à fait été le cas
07:03lorsqu'elle a envahi l'Ukraine.
07:05Mais c'est le discours effectivement
07:07de dire que ce sont les États-Unis
07:09qui violent le droit international
07:11avec la guerre d'Irak
07:13et la Russie ne parle pas
07:15de ses propres violations.
07:17En même temps, je ne suis pas sûr
07:19que tous les pays soient d'accord.
07:21Ils sont d'accord sur un point
07:23que les Occidentaux ne fixent pas
07:25des relations plus indépendantes,
07:27plus libres, et notamment le Brésil,
07:29l'Inde d'ailleurs, et même la Chine.
07:31Et en fait, il y aura peut-être
07:33un petit souci à ce sommet
07:35entre Chinois et Russes,
07:37c'est la présence de militaires
07:39nord-coréens pour se battre
07:41aux côtés des Russes en Ukraine
07:43parce que je ne suis pas sûr
07:45que les Chinois soient ravis
07:47de cette alliance entre la Corée
07:49du Nord et la Russie
07:51qui nécessairement inquiète
07:53et qui est confirmée par les Nord-Coréens.
07:55Oui, mais on sait qu'il y a quand même
07:57un axe, il y a une alliance,
07:59Poutine est allé à Pyongyang.
08:01Donc, en fait, c'est pour ça
08:03que ce n'est pas un bloc,
08:05même la Russie et la Chine
08:07n'ont pas tout à fait les mêmes intérêts
08:09et les BRICS, au fur et à mesure
08:11qu'ils vont s'élargir,
08:13ce sera aussi de plus en plus flou.
08:15Ceci étant, ce qu'ils ont en commun,
08:17c'est un partenariat pour que
08:19les Occidentaux ne fixent pas
08:21de ce plateau fondateur du cabinet
08:23Multipolarity. Vous tombez bien,
08:25c'est BRICS. Donc, on disait,
08:27la première expression des BRICS,
08:29c'est Jim O'Neill, un économiste
08:31de Goldman Sachs. Ça, c'était en 2001,
08:33si je ne me trompe pas. Ensuite,
08:35il y a eu les BRICS. Il n'y avait pas de S
08:37puisqu'il n'y avait pas l'Afrique du Sud.
08:39Ça, c'était 2009 à Ekaterinbourg,
08:41en Russie. Et ensuite, les BRICS
08:43sont devenus BRICS avec l'Afrique du Sud
08:45en 2018. Et maintenant, il y a encore
08:47quatre pays en plus. Alors,
08:49qu'est-ce que sont ces BRICS,
08:51finalement ? Les BRICS, en fait,
08:53portent une dynamique
08:55séculaire qui s'est accélérée
08:57au XXIe siècle,
08:59de désoccidentalisation de l'économie
09:01mondiale et de rééquilibrage
09:03de puissances entre
09:05les grands pôles existants comme
09:07l'Europe, les États-Unis ou le Japon
09:09et ce qu'on appelle les puissances
09:11émergentes, notamment la Chine
09:13qui a porté tout ce mouvement,
09:15mais d'autres pays comme le Brésil,
09:17l'Inde et la Russie qui,
09:19pour différentes raisons, s'est agrégée
09:21à cet ensemble. Donc,
09:23c'est cette volonté de désoccidentaliser
09:25l'économie mondiale et l'ordre économique et
09:27financier international. 44%
09:29de la population mondiale, 28%
09:31du territoire mondial et 27% du PIB.
09:33Donc, au-dessus, c'est plus
09:35que le G7. La Thaïlande,
09:37la Malaisie, maintenant la
09:39Turquie, l'Azerbaïdjan, ce sont des demandes
09:41d'adhésion de tous ces pays.
09:43Pourquoi est-ce que c'est attractif ?
09:45Les pays sont attirés par
09:47les nouvelles dynamiques qui sont portées
09:49par les BRICS, notamment les nouveaux instruments
09:51monétaires et financiers qui sont
09:53en cours de création et qui
09:55pourraient un jour concurrencer
09:57le dollar. On n'est pas loin
09:59de ça encore, de la concurrence ?
10:01On est loin d'une remise en cause
10:03de la suprématie du dollar.
10:05En revanche, il y a des solutions
10:07techniques qui sont élaborées
10:09et qui constituent une sorte de dédollarisation
10:11par le bas, qui permettent
10:13à ces pays de conduire des transactions commerciales
10:15et financières entre eux, sans
10:17passer par des banques correspondantes
10:19aux Etats-Unis ou en Europe, et donc
10:21sans être soumises aux sanctions.
10:23Le premier objectif, c'était ça,
10:25de réduire le risque des sanctions
10:27qui, on le sait, peuvent toucher demain
10:29d'autres pays comme l'Inde,
10:31le Brésil, etc.
10:33Et ça, c'est essentiellement pour la Russie, avec en plus
10:35un renforcement des sanctions
10:37aujourd'hui de Janet Yellen, puisque le secrétaire
10:39au Trésor a affirmé que les Etats-Unis
10:42allaient encore renforcer les sanctions,
10:44non seulement sur la Russie, mais aussi
10:46sur les pays comme, justement, la Chine,
10:48peut-être, en tout cas les pays qui aident
10:50la Russie dans le conflit en Ukraine.
10:52Moi, je suis honnête,
10:54j'ai un problème avec le mot
10:56désoccidentalisation, parce que
10:58on ne peut pas tout à fait faire
11:00comme si le système international
11:02ne dépendait que des Etats-Unis.
11:04Il y a un truc qui s'appelle les Nations Unies,
11:06qui a une Assemblée Générale, et qui,
11:08simplement, a dégagé, on l'a vu au moment des votes
11:10d'Ukraine, une immense majorité
11:12contre la Russie et contre ce que faisait Vladimir Poutine.
11:14140 voix, je le rappelle,
11:16sur 183.
11:18Je finis.
11:20Deuxièmement, il y a une organisation économique
11:22qui n'est pas le G7. Celle qui compte
11:24aujourd'hui, c'est le G20.
11:26Et le G20, il y a, vous le savez,
11:28beaucoup de pays du Sud.
11:30Ensuite, quand on parle de monnaie,
11:32moi, je pense que c'est extrêmement intéressant.
11:34Le jour où l'Arabie Saoudite
11:36acceptera de vendre
11:38en Yuan, en rouble,
11:40ou en lire turc,
11:42dans certains cas,
11:44vous dites le Yuan, nous sommes d'accord.
11:46Quand il s'agira de la lire turque
11:48ou du rouble russe,
11:50moi, j'ai quand même un léger soupçon.
11:52Donc je pense que,
11:54pour moi, en compte tenu
11:56de tout ce qui a été dit, au fond,
11:58il y a trois réunions des BRICS.
12:00Il y a celle de la Russie, dont l'objectif
12:02est simplement de montrer que Vladimir Poutine
12:04reste un grand dirigeant du monde.
12:06Et ça s'intègre parfaitement
12:08aux stratégies de l'initiative ceinturée-routes,
12:10ce qu'on appelle chez nous les nouvelles routes de la soie.
12:12Et puis, il y a le besoin
12:14des pays émergés
12:16de se montrer partout où il se passe quelque chose
12:18parce que quand on est des grands pays aujourd'hui
12:20comme l'Indonésie, comme le Brésil,
12:22comme la Thaïlande, on a envie d'en être.
12:24Et c'est tout à fait normal.
12:26Et vous, vous êtes pays émergés, non pas pays émergents.
12:28Oui, c'est ce que je pense qu'il faut arrêter de dire, émergents.
12:30On va écouter, justement, Xi Jinping,
12:32le président chinois,
12:34ce qu'il s'est exprimé à l'arrivée,
12:36tout simplement à Kazan.
12:39Le monde subit
12:41des changements profonds sans précédent
12:43depuis un siècle.
12:45Et la situation internationale devient
12:47chaotique et entremêlée.
12:49Mais je suis fermement convaincu
12:51que l'amitié profonde qui unit
12:53la Chine et la Russie,
12:55de génération en génération, ne changera pas.
12:57La responsabilité de servir le peuple
12:59ne changera pas.
13:01Et d'avance, il y a tout de même
13:03un rapprochement idéologique
13:05quand même entre la Chine et la Russie.
13:07On a cette impression que Vladimir Poutine
13:09et Xi Jinping ont quand même une vision idéologique
13:11contre l'Occident.
13:13Oui, il y a un vrai rapprochement idéologique.
13:15Un an après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine,
13:17la Chine a présenté un plan de paix en 12 points
13:19où la Russie n'était pas qualifiée
13:21d'agresseur de l'Ukraine.
13:23Tout au long de cette guerre,
13:25le discours chinois est quand même
13:27d'inverser les responsabilités,
13:29surtout le discours qui est orienté à l'intérieur de son pays,
13:31d'appeler ça effectivement
13:33une opération militaire spéciale,
13:35très semblable pour ce qui concerne Taïwan,
13:37en disant qu'il faudrait
13:39une opération militaire spéciale,
13:41quasiment de dénazification de la péninsule.
13:43Donc, effectivement,
13:45la Chine joue un peu sur les deux tableaux
13:47parce que le 29 mai, elle a quand même voté
13:49une résolution condamnant l'invasion de l'Ukraine.
13:51Mais dans le même temps, en septembre,
13:53par exemple, il y a eu des exercices militaires
13:55conjoints entre la Russie et la Chine
13:57dans toutes les mers du monde,
13:59sans précédent depuis une trentaine d'années.
14:01On a eu Andrei Belousov
14:03qui est rendu en Chine et qui a réitéré
14:05cette volonté de coopération militaire
14:07le jour même où la Chine démarrait des exercices militaires
14:09avec un scénario de reprise
14:11de Taïwan au large des côtes de Taïwan.
14:13Il y a aussi toute l'aide militaire
14:15apportée par la Chine à la Russie,
14:17malgré justement les sanctions,
14:19avec les composants électroniques,
14:21avec les moteurs pour les drones, les missiles balistiques.
14:23Il y a d'abord le discours chinois
14:25qui a tendance à jouer un peu la neutralité
14:27en disant qu'il faut la paix dans le monde,
14:29qu'il faut résoudre le conflit
14:31par la voie diplomatique, mais il y a de l'autre côté
14:33les discours orientés vers les auditoires nationaux
14:35et la coopération militaire
14:37qui est en train d'accroître
14:39et qui est assez inquiétante.
14:41Pascal Boniface, il y a un rapprochement tout de même
14:43assez clair dans le discours.
14:45Oui, depuis assez longtemps.
14:47C'est vrai que beaucoup disent qu'on a rejeté un peu
14:49la Russie dans les bras de la Chine.
14:51C'est qui le chef des briques ? C'est la Chine ou la Russie ?
14:53C'est la Chine. La Russie n'a pas le poids.
14:55Elle n'a pas le poids économique de la Chine.
14:57En fait, la Russie est devenue faible
14:59par rapport à la Chine et la guerre en Ukraine
15:01a aussi affaibli. Elle a gagné territoire,
15:03mais elle a affaibli la Russie. Ce qui fait que
15:05dans la relation bilatérale, le rapport
15:07de force entre Pékin et Moscou est
15:09beaucoup plus à l'avantage de Pékin.
15:11Et sur les 20 dernières années, c'est sidérant
15:13combien ces pays étaient économiquement sur le même niveau.
15:15Et là, le PIB chinois, c'est 10 fois
15:17le PIB russe.
15:19Donc, ces deux grandes puissances, parce que ce sont
15:21deux pays nucléaires qui sont membres permanents
15:23du Conseil de sécurité, mais ils ne pèsent pas
15:25du même poids. Par ailleurs, la Chine
15:27veut commercer avec l'Europe, avec les Etats-Unis.
15:29La Chine n'est pas dans la même
15:31position. Elle exporte des produits
15:33industriels. Elle n'exporte pas que du pétrole
15:35qui peut aller un peu n'importe où. Elle exporte
15:37des produits industriels et des produits de consommation
15:39qui peuvent surtout aller dans les
15:41pays riches dont elle a besoin. Par contre,
15:43ce qui est certain, c'est que les Chinois ne peuvent pas
15:45accepter un échec de Poutine,
15:47parce qu'ils ne veulent pas voir un régime
15:49pro-occidental à Moscou
15:51qui serait à ses frontières.
15:53Je crois qu'ils n'ont pas apprécié la guerre
15:55en Ukraine qui vient un peu perturber
15:57les plans. Pour eux, ils vont devenir n°1
15:59sans la guerre et donc la guerre vient un peu
16:01renforcer les Occidentaux. Ce n'est pas une bonne chose.
16:03Ça augmente le prix de l'alimentation,
16:05ça augmente le prix de l'énergie, mais
16:07même s'ils n'apprécient pas, ils ne lâcheront pas Poutine
16:09parce que si Poutine devait partir,
16:11ça serait, pour la Chine,
16:13le cauchemar, c'est un régime pro-occidental
16:15en Russie. Et ça, ils ne peuvent pas l'accepter.
16:17Mais Alexandre Katev, le problème, en fait,
16:19pour en revenir à ces briques, est-ce que c'est plutôt
16:21une sorte de lien
16:23idéologique-politique entre tous ces pays
16:25ou est-ce que c'est un lien économique ?
16:27Parce que là, quand on parle de la Chine, on voit bien
16:29qu'il y a une idéologie commune, un soutien même
16:31assez fort de la Chine
16:33à la Russie, mais en même temps,
16:35on sait très bien qu'elle est le premier partenaire commercial des États-Unis.
16:37Donc, difficile.
16:39Elle pourrait peut-être même
16:41faire l'objet de sanctions si,
16:43effectivement, il y avait un renforcement des sanctions américaines
16:45liées à la guerre en Ukraine.
16:47Donc, c'est compliqué, en fait.
16:49Sans faire de mauvais jeux de mots,
16:51je dirais que les deux dimensions
16:53géopolitiques et économiques sont imbriquées.
16:55Et c'est bien ce qu'on observe
16:57aujourd'hui dans le contexte post-guerre
16:59en Ukraine, notamment avec
17:01cette économie des sanctions et, en retour,
17:03l'économie de la
17:05résilience ou de la résistance qui a été
17:07mise en place par la Russie,
17:09qui est observée d'ailleurs de près par d'autres
17:11grandes puissances également, y compris la Chine,
17:13qui verrait un scénario
17:15se répéter s'il y avait demain
17:17un conflit en mer de Chine avec Taïwan.
17:19Et donc, en fait, il y a aujourd'hui
17:21toutes sortes de scénarios qui sont élaborés. Dans ce cadre-là,
17:23ce qui importe, c'est de trouver
17:25ce genre de viatique, de
17:27solutions qui permettent, en cas de crise
17:29profonde, de continuer à commercer,
17:31de continuer à financer des projets d'investissement.
17:33Mais sans les Etats-Unis ?
17:35C'est ça l'idée, c'est une autonomisation
17:37tout de même. Si un jour il devait y avoir une rupture,
17:39une coupure en deux du monde,
17:41eh bien, ces solutions permettraient
17:43jusqu'à un certain point, en fait, de garantir
17:45un certain nombre de mécanismes de
17:47positionnement élémentaire
17:49des économies de ces pays. Sachant que
17:51les BRICS sont dominants dans les matières
17:53premières, dans l'énergie, et
17:55aujourd'hui en technologie, avec la Chine
17:57qui a fait des prouesses dans ce domaine,
17:59on ne peut pas dire qu'ils sont vraiment très en retard par
18:01rapport au bloc occidental. Et cette banque,
18:03dirigée par Dilma Rousseff, qu'on a vue, qui était
18:05l'ancienne présidente brésilienne,
18:07qui, en fait, fait partie de ces BRICS,
18:09parce que ce n'est pas une institution, il faut le dire,
18:11mais il y a cette banque,
18:13est-ce qu'elle a un impact ? Il me semble
18:15que c'est 4 milliards de prêts, 4 milliards de dollars par an,
18:17donc c'est tout petit.
18:19C'est anecdotique à ce stade, mais c'est surtout
18:21quelque chose qui est en devenir
18:23aujourd'hui. D'ailleurs,
18:25les statuts, tout ça évolue en permanence.
18:27Et même
18:29les technologies et les mécanismes financiers
18:31sous-jacents, parce qu'il ne s'agit pas de répliquer
18:33ce qui existe dans les autres pays ou
18:35dans les institutions comme la Banque mondiale.
18:37L'idée, c'est d'innover, de proposer des solutions
18:39alternatives, basées sur la blockchain,
18:41sur les technologies numériques,
18:43et ne pas forcément reproduire une offre
18:45qui existe déjà, comme celle de la Banque mondiale, par exemple.
18:47– Mais, donc, c'est dirigé contre les États-Unis, quand même.
18:49– Ce n'est pas dirigé contre les États-Unis,
18:51mais c'est un mécanisme, je vois ça
18:53plutôt comme une défense qu'une attaque.
18:55– Jean-Maurice Ruppert, je vous vois au pied.
18:57– Ce qui est très compliqué,
18:59c'est que pour examiner
19:01ce qui se passe exactement,
19:03il faut quand même en revenir aux fondamentaux
19:05et au contexte. Et pardon d'être toujours
19:07l'oiseau de mauvaise augure, mais
19:09la réalité d'une partie des pays
19:11qui viennent et qui sont attirés,
19:13c'est qu'ils ont été en partie ruinés,
19:15ou ils sont tombés
19:17sous la coupe financière de la Chine
19:19à travers l'initiative
19:21ceinture et route, qui ne sont pas des prêts au développement.
19:23Toutes ces banques, elles prêtent
19:25de l'argent à un taux élevé,
19:27plus élevé que celui des
19:29Européens, par exemple. Donc, une partie
19:31de ces pays sont tenus, passez-moi l'expression.
19:33Il ne faut pas sous-estimer ce que ça représente.
19:35Quand vous ne pouvez pas rembourser…
19:37– Donc, ils sont contraints, là, lorsqu'ils font partie publique ?
19:39– Ils sont contraints, mais ils sont obligés
19:41de rester au plus près
19:43de ce qui se passe,
19:45de ce que veulent les Chinois,
19:47parce qu'ils ne peuvent pas se permettre, tout simplement,
19:49que les Chinois leur demandent de rembourser leur dette.
19:51– Ou peut-être la présence de l'Ethnie d'Asie du Sud-Est,
19:53qui peut-être…
19:55– Oui, alors, par ailleurs, il ne vous a pas échappé
19:57que parmi les pays qui sont candidats,
19:59ce n'est pas le cas de tout le monde,
20:01mais enfin, ce ne sont quand même pas des grandes démocraties.
20:03Donc, moi, je veux bien qu'on dise toujours
20:05que c'est contre les États-Unis,
20:07etc., et ceux qui sont là,
20:09parmi ceux-là, la Corée du Nord, oui.
20:11Mais donc, si vous voulez,
20:13pour faire un bloc anti-occidental avec un sud global,
20:15il faudrait quand même que ces pays soient aussi
20:17un minimum d'accord entre eux,
20:19ce qui, évidemment, n'est pas le cas.
20:21Je n'ai pas besoin d'expliquer que,
20:23depuis que l'Inde et le Pakistan sont entrés
20:25dans l'organisation de Shanghai,
20:27on ne parle plus de politique, c'est impossible.
20:29Comment voulez-vous faire ?
20:31Et de penser qu'un jour, l'Inde et la Chine
20:33vont faire un tandem, puisque c'est quand même
20:35aujourd'hui, c'est l'Inde, ce n'est pas la Chine.
20:37Économiquement, ce n'est pas le cas.
20:39Donc, tout ça, il faut aller au-delà des mots,
20:41quand même, il faut voir la réalité.
20:43Donc, avant de pouvoir s'en prendre aux États-Unis,
20:45et par ailleurs, c'est extrêmement important
20:47ce que vous dites, je crois,
20:49la Chine a besoin de l'Occident.
20:51La Chine, c'est faite
20:53avec les règles du capitalisme international
20:55prônées par les Occidentaux,
20:57Anthony.
20:59– Mais là, est-ce qu'elle n'a pas un positionnement,
21:01Pascal Boniface, qui, justement, la pousse
21:03sur l'Occidentale ?
21:05– Non, enfin, il faut distinguer
21:07le positionnement chinois et russe.
21:09Malgré les déclarations de l'amitié solide
21:11comme l'Europe éternelle, etc.,
21:13ils n'ont pas les mêmes intérêts.
21:15Et disons que la Chine est un peu obligée
21:17de soutenir la Russie, parce qu'elle ne veut pas
21:19un effondrement de la Russie, mais le comportement russe,
21:21elle le trouve très ératique.
21:23J'imagine que l'affaire Prigogine,
21:25ils ont dû halluciner en Chine,
21:27de voir l'affaire Prigogine, c'est pas comme ça
21:29que ça serait passé chez eux.
21:31La Russie n'a pas vraiment tenu son pays.
21:33Mais une fois encore, il ne faut pas que la Russie tombe.
21:35Et la Chine se présente un peu,
21:37c'est vrai qu'au sein des BRICS, c'est quand même
21:39la grande puissance, elle a un PIB bien plus important
21:41que tous les autres.
21:43Et la question de l'élargissement,
21:45la Chine aimerait bien élargir ce club,
21:47parce que plus il serait élargi, plus elle sera au cœur
21:49d'un système plus gros.
21:51– Donc elle a intérêt à élargir la Chine.
21:53– Oui, alors que les autres estiment, et ils n'ont pas tort,
21:55que plus on s'élargit, moins l'identité sera forte.
21:57Disons que les cinq premiers, ça a du sens.
21:59Il y aura effectivement des différences,
22:01mais quand même des grands pays.
22:03Ajoutez pêle-mêle l'Iran et l'Arabie Saoudite,
22:05l'Éthiopie, elle est gérée.
22:07– L'Arabie Saoudite n'y est pas encore, mais il y a l'Islam.
22:09– Oui, elle devrait intégrer.
22:11L'Argentine a fait de l'opting-out.
22:13– Et puis la Turquie.
22:15Si elle rentrait ?
22:17– Je ne sais pas s'ils vont décider d'un nouvel élargissement
22:19ce coup-ci, mais si la Turquie rentre,
22:21ça prendrait une signification différente
22:23parce que la Turquie est membre de l'OTAN.
22:25On sait qu'Erdogan aime bien jouer les chauves-souris.
22:27Je suis rat, je suis oiseau,
22:29mais là quand même,
22:31ça serait vraiment un coup
22:33vraiment extraordinaire
22:35de la part des BRICS,
22:37un coup extraordinaire de la part de la Turquie.
22:39Je ne sais pas s'ils le feront,
22:41parce que ça serait quand même
22:43une sorte de pied-de-nez aux autres membres de l'OTAN.
22:45Le président Macron a voulu
22:47être invité au sommet des BRICS le dernier.
22:49On lui a dit non, t'es trop occidental,
22:51on ne veut pas de toi.
22:53Et la Turquie, elle, viendrait jouer un peu ce rôle
22:55qu'Erdogan s'imagine
22:57en tant que pont entre les Occidentaux,
22:59les pays de l'OTAN et les BRICS.
23:01Ça serait un plus pour un pays qui est par ailleurs
23:03en difficulté économique,
23:05mais diplomatiquement, ça serait un plus pour la Turquie.
23:07– Et puis intéressant de revenir sur Vladimir Poutine,
23:09Elena, puisqu'il n'avait pas pu se rendre
23:11au dernier sommet des BRICS qui avait lieu
23:13justement en Afrique du Sud.
23:15On va écouter le président sud-africain.
23:17Mais parce qu'il a une procédure contre lui
23:19de la CPI, et là, bien sûr,
23:21il se targue d'être quand même
23:23au milieu de ces BRICS, et cette fois,
23:25c'est chez lui que ça se passe, alors qu'il a toujours
23:27cette procédure contre lui de la Cour internationale pénale.
23:29– Cour pénale internationale, oui,
23:31pour la déportation des enfants ukrainiens.
23:33Effectivement, il fait l'objet d'un mandat d'arrêt.
23:35Là, la Russie a la présidence des BRICS+.
23:37Donc, effectivement, Vladimir Poutine en profite.
23:39On a un discours qui est extrêmement
23:41maximaliste du côté de Moscou.
23:43Quand vous regardez les chaînes de télévision russe,
23:45c'est vraiment un Bretton Woods qui a lieu à Kazan.
23:47– Ah, c'est ça, c'est le Bretton Woods.
23:49– Parce que la Russie, aujourd'hui, a un objectif,
23:51et on est sur des mots, monsieur l'ambassadeur,
23:53c'est clair, c'est très en décalage
23:55avec ce que sera la réalité de l'issue
23:57de ce sommet, mais en tout cas,
23:59on est sur une refonte
24:01du système financier international
24:03vu de Russie, et à l'ordre du jour
24:05pour Moscou, le principal
24:07enjeu, c'est une dédollarisation
24:09des échanges et des transferts de capitaux.
24:11Bon, la Russie prônait pour
24:13une monnaie unique au sein des BRICS,
24:15ça a l'air complètement irréaliste, mais en tout cas,
24:17le ministère russe des Finances
24:19a présenté un plan
24:21en 48 pages
24:23intitulé BRICS Bridge,
24:25et là, il s'agirait d'avoir
24:27des échanges en monnaie nationale
24:29avec une plateforme numérique dédiée.
24:31La Russie, on le rappelle depuis le début
24:33de la guerre à grande échelle, a 95%
24:35déjà de ses échanges qui se font en yuans.
24:37Vladimir Poutine a exigé d'être payé
24:39en roubles pour le gaz
24:41qu'il exporte, parce que
24:43la Russie n'a rien
24:45à perdre et a tout à gagner,
24:4722 milliards de dollars
24:49d'avoirs russes gelés, coupés du système
24:51SWIFT, coupés de tous les systèmes
24:53qui passent par les Etats-Unis avec les banques correspondantes.
24:55Donc là, la Russie a tout intérêt
24:57à trouver un système alternatif
24:59et comme la Chine d'ailleurs aussi,
25:01par rapport au système SWIFT et par rapport
25:03au fait que les transactions se fassent en yuans
25:05et ne pas risquer de sanctions.
25:07On va rappeler aux téléspectateurs qu'elle est sortie
25:09de SWIFT au moment des sanctions,
25:11de ce système de transactions.
25:13À l'exception de quelques banques
25:15qui ont le lien, qui continuent
25:17à pouvoir transacter avec les banques
25:19occidentales,
25:21y compris
25:23la banque du groupe
25:25Gazprom, je crois. Donc on voit
25:27qu'il y a quand même des exceptions qui permettent
25:29pour un certain nombre de
25:31secteurs et de matières premières
25:33de trouver un chemin vers les marchés,
25:35parce que tout simplement, l'Occident ne peut pas
25:37se permettre que la Russie
25:39soit coupée de ses marchés
25:41compte tenu de son poids, notamment
25:43au niveau énergétique.
25:45Et elle parle justement, la Russie, pour rejoindre ce que
25:47vient de dire Elena, de la plateforme
25:49BRICS Pay. Donc ça serait
25:51un paiement en monnaie numérique destinée à contourner
25:53le dollar. Ça, ça existe déjà ?
25:55C'est quelque chose qui existe au stade expérimental.
25:57Il faut dire qu'il y a des systèmes
25:59de paiements nationaux aujourd'hui dans
26:01les grandes
26:03nations des BRICS, aussi bien en Russie
26:05qu'en Chine,
26:07en Inde, qui en fait
26:09sont autonomes, qui permettent de se passer
26:11de systèmes comme ceux de Visa,
26:13Mastercard, etc. L'idée, c'est
26:15d'interconnecter ces différents systèmes nationaux
26:17pour créer cette espèce de
26:19réseau et d'écosystème qui
26:21pourraient porter une architecture financière
26:23nouvelle. Donc là, vous parlez au conditionnel,
26:25on n'y est pas du tout, ou ça progresse
26:27tout de même ? On progresse,
26:29on est au stade de pilotes
26:31aujourd'hui. C'est pas vraiment encore
26:33un déploiement à grande échelle. Est-ce que ça sera
26:35déployé cette année, l'année prochaine ?
26:37On ne sait pas, mais en tout cas,
26:39clairement, les premiers tests ont été positifs,
26:41et notamment, il y a des institutions comme la Banque des Règlements
26:43Internationaux, la BRI,
26:45qui en fait ont été partie
26:47prenantes dans des projets qui aujourd'hui
26:49sont intégrés
26:51dans ce concept-là de
26:53BRICS Bridge,
26:55et de BRICS Pay,
26:57et qui montrent que ça fonctionne.
26:59Et donc, on pourrait voir
27:01demain ce type de système
27:03être déployé à plus grande échelle.
27:05Au final, c'est quand même un objectif politique,
27:07d'après vous, monsieur l'ambassadeur,
27:09de changer, d'essayer de dé-dollariser
27:11l'économie,
27:13de trouver des systèmes alternatifs ?
27:15De trouver un forum
27:17international qui ne soit pas les Nations Unies,
27:19et j'insiste là-dessus, parce que c'est
27:21quand même important. Il y a une institution
27:23internationale où ces discussions
27:25devraient avoir lieu. Il y a un Conseil
27:27économique et social qui est censé coordonner
27:29l'ensemble des activités.
27:31Il y a le G20, etc. Donc ça montre, quoi,
27:33l'impuissance des Nations Unies ? C'est ce que vous voulez dire ?
27:35Malgré les divergences entre la Russie
27:37et la Chine, et là je rejoins complètement
27:39ce qu'a dit Pascal Boniface,
27:41leur intérêt commun,
27:43c'est de faire comme si c'était extrêmement
27:45important. Et encore une fois, la Russie,
27:47parce que ça dédiabolise
27:49Vladimir Poutine,
27:51et la Chine, parce que ça lui
27:53permet de pousser son idée,
27:55encore une fois, de système international,
27:57mondial, alternatif
27:59aux Nations Unies. Parce que c'est très bien
28:01de dire anti-occidental.
28:03Ça fait plaisir à beaucoup de Français
28:05et d'Européens anti-américains,
28:07basiquement, pardon de le dire crûment.
28:09Mais c'est pas ça le sujet de la Chine.
28:11En même temps, le secrétaire général des Nations Unies est présent, là.
28:13Il est présent.
28:15Ça, c'est la tradition.
28:17Mais encore une fois, ce que veut la Chine,
28:19c'est un système international
28:21alternatif dans lequel,
28:23et là je rejoins complètement ce qui a été dit,
28:25la Chine a besoin des États-Unis.
28:27La Chine, elle veut un monde qui tourne autour
28:29de deux pays, les États-Unis et la Chine.
28:31D'ailleurs, c'est intéressant de penser
28:33qu'en ce moment même, c'est la semaine
28:35de la réunion annuelle
28:37du FMI à Washington.
28:39Vous avez tous les ministres des Finances du monde entier
28:41qui sont présents à Washington en ce moment.
28:43Janet Yellen a dit qu'elle allait renforcer
28:45les sanctions. C'est quand même intéressant,
28:47Pascal Boniface, de se dire qu'effectivement,
28:49il y a ce grand rout en Russie,
28:51vraiment au centre de la Russie.
28:53C'est vraiment une ville. Et puis en ce moment,
28:55à Washington, vous avez ce grand rout de tous les banquiers
28:57centraux, mondiaux,
28:59tous les ministres des Finances. Il y a probablement
29:01une représentation chinoise aussi, j'imagine,
29:03au FMI. Donc,
29:05on est quand même dans deux mondes.
29:07Est-ce qu'ils se font concurrence,
29:09qu'ils sont interdépendants, tout en étant
29:11politiquement extrêmement opposés ?
29:13Oui, concurrence. C'est vrai que la New Development Bank,
29:15la banque des BRICS, était censée
29:17faire concurrence à la Banque mondiale et au FMI.
29:19Mais elle n'a pas les moyens.
29:21Elle n'a pas les mêmes sommes. Mais c'est pour donner
29:23une alternative, plus qu'une concurrence, de dire qu'il n'y a plus
29:25le monopole de l'aide au Tiers-Monde,
29:27de l'aide au Pays du Sud, du FMI,
29:29de la Banque mondiale. Qu'il y ait une réunion en même temps
29:31des Ministres des Finances pendant qu'il y a ce sommet,
29:33c'est la vie internationale. Il y a des réunions partout,
29:35tout le temps. – C'est juste que c'est intéressant
29:37cette coïncidence. – Oui, c'est une
29:39coïncidence. Mais en fait, ce ne sont pas les mêmes sujets.
29:41Oui, il y aura des discussions
29:43sur le dollar, sur la façon de
29:45contourner le dollar. Parce que, surtout,
29:47ce que veulent les BRICS, c'est de ne plus être soumis à des sanctions.
29:49Et c'est vrai que même le Brésil a été
29:51soumis à des sanctions. Et c'est là où la Russie
29:53peut jouer un peu sur du velours. C'est qu'elle peut dire
29:55« Je suis victime de sanctions, mais comme vous. »
29:57– Renforcée aujourd'hui par Washington.
29:59– Oui. Et ces grands
30:01pays ne supportent plus
30:03les sanctions parce que, pour eux,
30:05c'est un monde ancien où certains décident
30:07qui a raison, qui a tort, sans
30:09consultation, etc. Et Obama disait
30:11lui-même que les États-Unis sont shootés aux sanctions.
30:13Il y a un nombre de sanctions de plus en plus
30:15fortes. Et dès qu'il y a un désaccord, on fait les sanctions.
30:17– Et sont-elles efficaces ? Là, justement,
30:193% de croissance, c'est le chiffre du FMI
30:21pour la Russie aujourd'hui.
30:23– Non, parce qu'elles sont contournées. Parce que le problème des sanctions,
30:25c'est qu'elles sont occidentales et pas mondiales.
30:27Les sanctions marchent bien quand elles sont globales.
30:29Quand tous les pays du monde
30:31sanctionnent l'Afrique du Sud, elle est obligée de céder.
30:33Et elle ne peut pas faire autrement. Mais là, la Russie
30:35contourne. Il n'y a plus SWIFT,
30:37mais elle a contourné le règlement interbancaire
30:39entre pays. Elle a contourné cela.
30:41Et donc, les sanctions sont contournées.
30:43Et il y a eu tellement de sanctions qu'entre la Corée du Nord,
30:45l'Iran, les Russes, il y a des professionnels
30:47du détournement, du contournement
30:49de sanctions. Et donc, ça s'érode
30:51au fur et à mesure. Trop de sanctions, tu les sanctions.
30:53– Elena Voloshyn,
30:553% de croissance, un peu plus de 3%.
30:57C'était la révision du FMI aujourd'hui. Donc finalement,
30:59la Russie, elle n'est pas en récession.
31:01Enfin, ce n'est pas une catastrophe. Elle a réussi
31:03à s'adapter avec ses nouveaux alliés, justement.
31:05– Non, pour le moment, l'économie de rente fonctionne effectivement.
31:07La Russie puise dans son fonds fédéral de réserve.
31:09Après, il y a quand même
31:11des économistes qui ont des pronostics à moyen terme
31:13qui ne sont pas très optimistes. Parce qu'aujourd'hui,
31:15c'est une économie qui tourne entièrement
31:17orientée vers l'économie de guerre. Je crois que c'est
31:1960% du budget. Enfin, il y a encore
31:21de la partie qui n'est pas tenue secrète
31:23du budget fédéral
31:25qui est orientée vers
31:27l'industrie militaire et vers l'effort de guerre.
31:29Et donc, en fait, c'est de l'argent qui part en fumée
31:31finalement. Donc là, ça tient
31:33pour le moment. Mais les économistes ne sont pas
31:35très optimistes sur la perspective
31:37à moyen terme. – Alexandre Kateb.
31:39– Oui, j'aurais une petite divergence
31:41là-dessus. Parce qu'en fait, tous les investissements
31:43qui sont aujourd'hui
31:45injectés dans le secteur, le complexe
31:47militaro-industriel, ça bénéficie
31:49aussi à l'industrie
31:51de manière plus générale.
31:53On a vu un redémarrage d'un certain
31:55nombre de secteurs. Les sanctions ont aussi
31:57aidé, en quelque sorte, puisque
31:59la Russie ne pouvait pas importer un certain nombre
32:01d'équipements, de pièces, y compris dans le secteur
32:03automobile, qui s'était effondré en
32:052022, mais qui a redressé la pente
32:07progressivement et
32:09aujourd'hui qui est quasiment
32:11autonome, en s'appuyant bien sûr sur la Chine.
32:13Mais ce que je veux dire, c'est que finalement
32:15la Russie vit une sorte de
32:17mini-renaissance industrielle
32:19qui est comparable d'une certaine manière à ce qu'on avait
32:21connu après la seconde guerre mondiale aux États-Unis
32:23où l'économie de guerre avait stimulé,
32:25avait dopé le secteur industriel
32:27américain. – Mais dans quel secteur industriel ?
32:29– Dans l'ensemble des secteurs, parce que tous les secteurs
32:31sont liés. Vous savez, il y a
32:33des liens entre différents secteurs,
32:35des inputs et des outputs,
32:37et on sait très bien que quand vous dopez un secteur,
32:39eh bien, ça entraîne aussi vers
32:41le haut les autres secteurs. Donc il y a cet effet
32:43qui est… Est-ce qu'il est durable ?
32:45On ne sait pas, mais en tout cas,
32:47on l'a constaté sur la production
32:49industrielle,
32:51un véritable essor
32:53suite à
32:55cette crise. – Monsieur l'ambassadeur ?
32:57– Oui, non, je ne veux pas contester, mais enfin,
32:59la Russie,
33:01sauf que de ma part, ne vend plus de centrales nucléaires,
33:03la Russie est quasiment
33:05sortie de l'espace
33:07qui était deux points très très forts de la Russie,
33:09et il faudrait parler des Russes.
33:11Donc ce phénomène qu'on décrit,
33:133% de croissance, c'est de l'argent qui va
33:15dans la poche des dirigeants, chez les oligarques,
33:17et pour financer la guerre.
33:19Pendant ce temps-là, la société russe
33:21se déglingue de plus en plus,
33:23et comme je le dis à chaque fois, rappelez-moi la dernière fois,
33:25excusez-moi, malgré ce rebond,
33:27rappelez-moi la dernière fois que vous avez acheté un produit
33:29made in Russia. – Un mot
33:31du président sud-africain, c'est le seul
33:33pays d'Afrique qui fait partie
33:35de ces BRICS, il a été ajouté
33:37au BRICS, et le S de BRICS,
33:39l'Afrique du Sud,
33:41le président sud-africain Ramaphosa
33:43qualifie la Russie, lui,
33:45d'allié, et je cite, d'ami
33:47précieux, on l'écoute.
33:49– Nous continuons
33:51à considérer la Russie
33:53comme un allié précieux,
33:55comme un ami précieux,
33:57qui nous a soutenus depuis le début,
33:59depuis l'époque de notre lutte contre
34:01l'apartheid, jusqu'à aujourd'hui.
34:03Nous sommes vraiment
34:05ravis d'être ici,
34:07et de savoir que nous allons avoir
34:09des discussions importantes ici,
34:11à Kazan, au sein de la famille des BRICS.
34:13Merci beaucoup
34:15de nous avoir accueillis.
34:17– Pascal Bonitza,
34:19c'est un peu le...
34:21– C'est le langage convenu.
34:23– Oui, mais l'Afrique du Sud
34:25et ses liens avec la Russie,
34:27qui remontent justement à l'apartheid,
34:29elle n'a pas voté, justement,
34:31contre la Russie au moment de l'invasion nucléaire.
34:33– Non, parce que les Sud-Africains
34:35disent du temps de l'apartheid,
34:37les Occidentaux étaient pour l'origine d'apartheid,
34:39et c'est l'Union soviétique qui aidait
34:41l'ANC pour résister.
34:43Donc ça a créé des liens,
34:45et puis l'Afrique du Sud se voit aussi
34:47comme un grand pays leader du Sud,
34:49et donc ne veut pas copier
34:51l'attitude des Occidentaux.
34:53En même temps, elle connaît de graves problèmes économiques,
34:55il y a un problème de corruption qui est très fort,
34:57elle a du mal à s'en remettre,
34:59et elle s'est fait doubler,
35:01donc elle essaie d'un peu
35:03de trouver sur le plan diplomatique
35:05le dynamisme qu'elle a perdu sur le plan économique,
35:07d'où d'ailleurs sa plainte devant
35:09la Cour nationale de justice par rapport
35:11à Israël, en prenant ce rôle
35:13de leader, etc.
35:15Mais bon, là on est quand même
35:17dans le langage diplomatique convenu,
35:19c'est les propos qui sont toujours un peu
35:21les mêmes, mais c'est vrai que
35:23en Afrique, la Russie n'est pas
35:25mal accueillie, ça c'est clair,
35:27et qu'elle est, bon gré mal gré,
35:29elle a plus d'appui en Afrique que dans d'autres parties du monde.
35:31– Alors tous les pays africains n'avaient pas voté contre.
35:33– Non mais je pense qu'il faut,
35:35pardon de reprendre la parole,
35:37mais je pense que c'est en effet du langage diplomatique
35:39comme l'est probablement la grave maladie
35:41qui a atteint le président brésilien
35:43juste alors qu'il allait prendre l'avion.
35:45– Il paraît qu'il va mieux,
35:47c'est ce que je dis dans les dépêches.
35:49– Nous disons la même chose.
35:51– Il aurait faim cette maladie
35:53pour ne pas se rendre en Russie ?
35:55– Je ne sais pas, je constate que
35:57je pense que c'est très compliqué
35:59quand on est brésilien,
36:01si c'est affiché comme
36:03une opération anti-américaine,
36:05c'est un peu compliqué pour les brésiliens,
36:07surtout 15 jours avant les élections américaines.
36:09Je pense qu'ils préfèrent attendre 15 jours
36:11pour voir ce qui va se passer.
36:13– Donc c'était une prudence.
36:15– Je pense que par rapport au sud,
36:17c'est quand même frappant de voir que,
36:19compte tenu de l'ambition de la Chine,
36:21cette absence de l'Afrique est quand même remarquable.
36:23Je partage tout à fait ce que dit Pascal Boniface,
36:25c'est qu'ils ne sont pas la plus grande puissance
36:27aujourd'hui en Afrique.
36:29– C'est le Nigerien ?
36:31– Le Nigerien, quand vous regardez le rôle
36:33que jouent maintenant aux Nations Unies
36:35des pays comme le Kenya,
36:37quand vous voyez l'Égypte, ça va de soi,
36:39nous on le considère comme africain,
36:41pas les autres.
36:43Il faut aussi simplement rappeler
36:45que ces opérations ont un caractère anti-occidental
36:47et là, la Russie et la Chine se rejoignent
36:49parce que ça consiste quand même
36:51à se faire désaffiler dans des pays
36:53où il y a une délicatesse avec la démocratie
36:55et les droits de l'homme quand même.
36:57Quand on dit que les Russes ne sont pas sans influence en Afrique,
36:59en effet, ils ont fomenté des coups d'État
37:01au Mali, au Niger, au Burkina Faso
37:03et quant aux Chinois, ils tiennent financièrement.
37:05L'Éthiopie, pardon de le dire,
37:07est devenue financièrement un vassal de la Chine.
37:09Aujourd'hui, tout le monde le sait.
37:11Comme, je ne sais pas,
37:13le Laos ou d'autres pays
37:15en Asie du Sud-Est.
37:17C'est quand même ça la réalité quotidienne,
37:19il ne faut pas l'oublier.
37:21Je peux dire deux mots sur cette question
37:23de la dette chinoise.
37:25En fait, il faut quand même
37:27bien avoir conscience
37:29que dans ces différents pays, notamment en Afrique,
37:31il n'y a pas eu de développement pendant
37:33des décennies avant que la Chine
37:35ne vienne et finalement ne finance
37:37tous ces projets d'infrastructure
37:39qu'auparavant personne ne voulait financer.
37:41Ni les pays occidentaux,
37:43ni les institutions multilatérales comme la Banque mondiale
37:45ou autres.
37:47Et donc, même s'il y a eu des dérapages
37:49et il y a eu des abus,
37:51il y a eu quand même un véritable effet bénéfique
37:53d'accélération du développement
37:55dans un certain nombre de pays,
37:57notamment à travers la construction de ces infrastructures.
37:59Et aujourd'hui, en revanche,
38:01la Chine n'est pas dans le même état de santé financière
38:03qu'avant.
38:05Donc, il y a un frein qui est mis sur un certain nombre
38:07de projets. D'ailleurs, je pense à tort
38:09parce que c'est le moment pour les Chinois,
38:11à mon avis, d'accélérer
38:13l'expansion
38:15justement de ces projets.
38:17Il y a 3 000 milliards de dollars de réserve
38:19qui pourraient demain être gelés.
38:21Et donc, il faut utiliser cet argent
38:23avant qu'il soit trop tard. C'est mon sentiment.
38:25C'est ce que dit le FMI. Allez-y, rapidement.
38:27Regardez les chiffres et vous verrez que sur 10 ans,
38:29la Banque européenne d'investissement a dépensé plus
38:31d'argent dans les infrastructures au Sud et pas dans les mêmes
38:33conditions financières que la Chine.
38:35C'est la première chose. Et la deuxième chose,
38:37c'est que regardez ces investissements du développement.
38:39La moitié ont été pris en gestion
38:41directe par la Chine parce que,
38:43comme les pays ne pouvaient pas rembourser,
38:45la Chine a transformé ces investissements
38:47en possessions. Et tous ces ports
38:49en Afrique servent évidemment
38:51le propos chinois. Et tout le monde sait très bien
38:53que sous les ports civils, il y a des ports
38:55militaires qui sont en train d'être construits.
38:57Toutes les stations de télécommunication
38:59qui sont construites, ce n'est pas pour le développement de l'Afrique.
39:01En tout cas, ils ont réussi à convaincre ces pays
39:03à dealer avec eux, si je puis dire.
39:05La conversion de la dette
39:07en investissement, c'est une pratique qui est vieille comme le monde
39:09et qui a été également faite par les pays
39:11occidentaux, y compris les États-Unis, au moment de
39:13la crise de la dette des années 1980.
39:15Donc ce n'est pas quelque chose de si nouveau que ça.
39:17La guerre en Ukraine, en tout cas,
39:19elle est bien sûr au centre de ce
39:21grand rout des BRICS.
39:23Et c'est Narendra Modi,
39:25le Premier ministre indien,
39:27l'autre grande puissance des BRICS,
39:29qui en a parlé. On l'écoute.
39:31Votre Excellence,
39:33nous sommes en contact
39:35constant à propos du conflit entre la Russie
39:37et l'Ukraine.
39:39Comme je l'ai
39:41déjà dit,
39:43nous croyons que les conflits ont vocation
39:45à être résolus uniquement
39:47de manière pacifique.
39:49Nous soutenons
39:51totalement les efforts visant
39:53à rétablir rapidement la paix
39:55et la stabilité.
39:57Tous nos efforts
39:59placent l'humanité au premier plan.
40:01L'Inde est prête
40:03à offrir tout le soutien nécessaire
40:05dans les temps à venir.
40:07Il y en a pour la Chine. Alors l'Inde,
40:09en particulier l'Inde,
40:11Narendra Modi est allé en Ukraine,
40:13est allé en Russie.
40:15Il souhaite jouer un rôle de paix,
40:17c'est ce qu'ils disent,
40:19dans ce conflit.
40:21Les deux veulent se poser en négociateur.
40:23L'Ukraine n'est pas au centre de ce sommet des BRICS.
40:25La Russie voudrait justement mettre ça sous le tapis.
40:27Mais c'est Narendra Modi
40:29qui l'a ramené sur la table.
40:31Je me suis déjà entretenue
40:33avec des diplomates indiens
40:35qui me disaient qu'ils étaient prudents
40:37de se fâcher justement avec la Chine,
40:39curieusement et paradoxalement,
40:41parce que cette proximité idéologique
40:43non affichée ouvertement de la Chine
40:45avec la Russie. Mais l'Inde,
40:47je pense qu'elle est à conscience
40:49et a moins de perméabilité par rapport au discours russe
40:51qu'un autre pays comme l'Afrique du Sud,
40:53qui carrément dit que la Russie
40:55était bienvenue
40:57de se protéger de l'OTAN
40:59en protégeant ses frontières
41:01et en envahissant l'Ukraine.
41:03L'Inde n'a pas la perméabilité par rapport à ce discours.
41:05On entend un Narendra Modi
41:07qui est extrêmement prudent.
41:09Effectivement, il était en juillet à Moscou.
41:11Ensuite, le mois prochain, il était à Kiev.
41:13Il veut se poser en négociateur.
41:15Maintenant, il y a beaucoup de négociateurs
41:17qui sont prêts à le faire. Mais même Volodymyr Zelensky,
41:19le président ukrainien, dit
41:21si les alliés de la Russie faisaient pression
41:23ne serait-ce qu'économiquement sur la Russie,
41:25ils pourraient très bien ramener la paix
41:27en Ukraine. Aujourd'hui, on entend le discours
41:29de tous les négociateurs potentiels,
41:31aussi bien la Chine que l'Inde,
41:33qui disent qu'il faut la paix dans le monde
41:35et qu'il ne faut pas la guerre.
41:37La Russie le dit aussi.
41:39En fait, il n'y a pas vraiment de plan.
41:41En attendant, on a juste les positions russes
41:43et ukrainiennes, chacun
41:45qui campe sur ses positions. Vladimir Poutine
41:47qui dit qu'il arrêtera
41:49de faire parler les armes le jour où
41:51les 4 régions, 5 avec la Crimée
41:53qu'il a déclarée comme annexée, y compris celles
41:55dans les frontières qui n'ont pas
41:57encore été envahies militairement par son armée,
41:59seront reconnues comme étant russes.
42:01Et Volodymyr Zelensky qui dit que nous,
42:03on veut retrouver notre intégrité territoriale
42:05et on veut soit intégrer l'OTAN,
42:07soit pouvoir développer l'arme nucléaire parce qu'on a besoin
42:09de garanties de sécurité. Là, les deux positions
42:11sont complètement irréconciliables. Mais effectivement,
42:13il y a des négociateurs potentiels parce qu'on sait
42:15qu'il y a l'élection américaine qui vient,
42:17parce qu'on sait que l'Ukraine
42:19va se retrouver en position de faiblesse
42:21très rapidement et que là, ce sera le moment
42:23de négocier. – Justement, négocier avec
42:25l'Inde, peut-être avec la Chine
42:27qui pourrait jouer le rôle d'intermédiaire,
42:29de médiateur pour une paix.
42:31– Non, je ne crois pas. Enfin, moi, je rejoins
42:33Elena depuis longtemps. Pour qu'il y ait
42:35des négociations de paix, il faut qu'il y ait
42:37des discussions qui soient basées sur quoi ?
42:39Vous savez, la paix en Ukraine,
42:41elle peut revenir en 20 secondes.
42:43Il suffit que Vladimir Poutine téléphone
42:45aux généraux de terrain et leur demande
42:47de rentrer en Russie. – Ça, il ne le fera pas.
42:49– Non, il ne le fera pas
42:51et Zelensky ne cédera pas.
42:53Donc, je crois qu'il ne faut pas
42:55parler de négociations maintenant.
42:57Un jour viendra, peut-être, j'espère,
42:59nous l'espérons tous. – Et donc, ces pays
43:01se placent comme médiateurs ?
43:03– Oui, c'est effectivement intéressant de voir
43:05que Pénachy et l'Inde se mêlent d'une guerre européenne,
43:07ce qui est tout à fait nouveau
43:09et ce qui est très flatteur pour eux,
43:11parce qu'effectivement, c'est aussi une pierre
43:13dans le jardin des Européens, des Américains,
43:15faute du vide. Alors, il y a un plan
43:17chinois qui est très simple, c'est cesser le feu.
43:19Mais cesser le feu, donc, c'est très avantageux
43:21pour les Russes s'ils gardent les territoires
43:23qu'ils ont conquis depuis deux ans.
43:25Comment ça va se terminer ?
43:27Ça va dépendre de l'élection américaine,
43:29mais on peut penser quand même
43:31qu'il y aura un ralentissement de l'aide,
43:33quel que soit le scénario
43:35de l'élection américaine.
43:37Brutal, si c'est Trump, progressif
43:39si c'est Kamala Harris.
43:41Et on voit bien que l'Allemagne a déjà dit
43:43qu'ils allaient mettre deux fois moins d'aide
43:45à l'Ukraine l'an prochain.
43:47Et Zelensky, qui ne voulait pas parler
43:49de négociations auparavant, commence à en parler.
43:51Il parle d'un plan de la victoire,
43:53d'une négociation qui était associée
43:55à défaites auparavant et utilisée par Zelensky.
43:57Donc, est-ce qu'il y aura un arrêt des combats
43:59sans traité ou sans accord de fait
44:01l'an prochain ?
44:03Mais en tous les cas, il y a peut-être
44:05un cesser le feu en vue,
44:07surtout s'il y a une diminution
44:09de l'aide occidentale à l'Ukraine.
44:11Un dernier mot, puisqu'il n'en reste plus beaucoup de temps.
44:13Est-ce que les BRICS, Alexandre Kateb,
44:15ont de l'avenir ? Est-ce que là, ça va s'institutionnaliser
44:17un peu plus ?
44:19Pour le moment, on a très peu de visibilité
44:21là-dessus parce qu'il y a
44:23deux stratégies ou deux impératifs
44:25contradictoires. D'une part,
44:27une marche vers une plus grande institutionnalisation
44:29qui donnerait une certaine crédibilité
44:31à ce groupement au niveau international
44:33et qui lui permettrait de dialoguer notamment
44:35avec le G7, mais aussi
44:37avec les institutions de Bretton Woods, etc.
44:39D'autre part,
44:41comme on dit, on ne sort
44:43de l'ambiguïté qu'à ses dépens.
44:45Cette stratégie de garder
44:47un maximum de flexibilité permet
44:49d'élargir
44:51le centre d'intérêt des BRICS, d'accueillir éventuellement
44:53de nouveaux membres sans
44:55susciter des controverses
44:57qui émergeraient irrémédiablement
44:59si des institutions venaient à être mises en place
45:01entre l'Inde et la Chine,
45:03entre le Brésil
45:05et la Russie, etc.
45:07C'est une sorte de statu quo
45:09dont on ne sait pas comment ces pays vont sortir,
45:11mais ça ne les empêche pas d'avoir une certaine
45:13aura au niveau international.
45:15Merci beaucoup d'avoir participé
45:17à cette émission Alexandre Kateb, Elena Voloshin,
45:19Pascal Boniface, Jean-Maurice Riperre.
45:21Merci à vous tous de nous avoir suivis.
45:23Vous retrouvez l'émission sur les réseaux sociaux
45:25également en podcast.
45:27Je vous dis à demain.