• il y a 3 mois
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Philippe Fontana, avocat au barreau de Paris et auteur de "La vérité sur le Droit d'Asile" disponible aux éditions de l'Observatoire, répond aux questions de Dimitri Pavlenko.

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Transcription
00:00Il est 7h13 sur Europe. Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin l'avocat et essayiste Philippe Fontana.
00:06Bonjour Philippe Fontana.
00:07Bonjour Dimitri Pavlenko.
00:08Bienvenue sur Europe. Votre dernier ouvrage, La vérité sur le droit d'asile, paru l'an dernier aux édifices de l'Observatoire,
00:14mais ça n'a pas pris une ride. Peut-être une petite mise à jour relative à la loi immigration parue en fin d'année dernière, mais si peu.
00:20Ce droit d'asile, justement, c'est celui-là même qui a permis aux meurtriers présumés de Philippines
00:26de venir et de rester en France, en dépit du mal qu'il y a commis.
00:31Un viol d'abord en 2019 et donc vraisemblablement le meurtre et le viol de Philippines.
00:36On va prendre le temps ce matin, avec vous Philippe Fontana, de retracer le parcours de cet homme, Ta Walida,
00:42et de ce que ça nous dit de notre système d'asile en France.
00:45Avant cela, je voudrais vous faire réagir à une autre histoire.
00:48C'est dans l'actualité, ça s'est passé à Bayonne, un migrant clandestin marocain, sous OQTF lui aussi,
00:53déjà condamné à huit reprises alors qu'il n'a que 20 ans.
00:57Il vient de prendre 18 mois de prison pour avoir tabassé et volé en Réunion un homme de plus de 60 ans.
01:02Qu'est-ce que ça vous inspire, cette histoire ?
01:04Ça m'inspire qu'il n'a rien à faire sur le territoire national.
01:08Pour en revenir à M. Taha O, ce n'est pas exact, après mes informations, qu'il soit venu en France sur le fondement de l'asile.
01:18Il serait venu en France par un visa, il serait arrivé en France au mois de juin 2019,
01:23il devait repartir le 27 juillet, il est resté, il a été considéré comme un mineur isolé,
01:29donc pris en charge par le service social de l'aide à l'enfance.
01:32Il arrive avec un visa de tourisme, tout simplement.
01:34Il arrive avec un visa de tourisme, et c'est là le premier dysfonctionnement.
01:37Qu'est-ce qu'on fait d'un étranger qui reste sur le territoire national,
01:40postérieurement à l'étendue de son visa de tourisme ?
01:44Première faille.
01:45Vous êtes irrégulier si vous restez avec votre visa à expirer, vous n'avez plus rien à faire normalement.
01:49On n'a plus rien à faire sur le territoire national.
01:51Là, il est pris en charge par l'aide sociale à l'enfance.
01:53Parce qu'il est mineur.
01:54Parce qu'il est mineur, isolé.
01:56Et c'est là, fin septembre, début octobre, qu'il commet le premier fait, le premier crime,
02:01puisqu'il a été jugé définitivement, donc il ne bénéficie pas de la présomption à l'innocence.
02:06Il part en détention.
02:09Comme il est mineur, il bénéficie de l'excuse de minorité, donc la peine de 15 ans est divisée par deux.
02:13Il reçoit sept ans avec des remises automatiques de peine.
02:17On est encore dans l'ancien système.
02:19Il n'en fera que presque quatre ans et demi.
02:24Et sa levée d'écrou est prévue le 20 juin 2024 de cette année.
02:29Je me permets d'ajouter quelque chose.
02:30Comme il est mineur au moment de la commission de ce premier viol,
02:34vous dites sa peine est divisée par deux.
02:36Il évite aussi l'interdiction du territoire français.
02:39Sa peine aurait pu être assortie de cette mesure supplémentaire.
02:41Ça n'est pas le cas.
02:42Effectivement, dans le dossier, il me semble qu'il n'y a pas de peine complémentaire à la peine principale
02:47qui s'appelle l'interdiction du territoire français
02:50et qui est décidée par soit la Cour d'assises, dans ce cas-là,
02:55soit par le tribunal correctionnel.
02:57C'est ce qu'on appelait avant la double peine.
02:59Il faut dire que la loi du 26 janvier 2024,
03:03amendée par les LR au Sénat,
03:06a permis de faire tomber un certain nombre de protections absolues relatives
03:11et il me semble qu'on peut dire aujourd'hui que la double peine est revenue dans notre législation.
03:17C'est-à-dire par exemple, on avait eu le cas avec Mogouchkov, le tueur du professeur Darras.
03:22Vous étiez inexpulsable si par exemple vous étiez arrivé en France avant l'âge de 13 ans,
03:27bien que clandestin.
03:28Voilà, ou que vous étiez marié avec une Française,
03:31que vous résidiez sur le territoire national pendant plus de 10 ans ou de 20 ans.
03:34Donc ces protections étaient amoindries, surtout pour les personnes qui ont été condamnées
03:39pour un délit qui mérite 5 ans, passible de 5 ans de prison.
03:44C'est-à-dire même si vous en faites 6 mois avec sursis,
03:46comme il est passible de 5 ans de prison, vous êtes expulsable.
03:49Donc la loi immigration de décembre dernier a levé un certain nombre d'exemptions.
03:54Mais reprenons le fil du parcours de Tahawalida.
03:58Fin juin, il sort de prison.
04:00Il n'aurait pas pu, il n'aurait pas dû être expulsé à ce moment-là, à sa sortie de prison ?
04:05Deuxième dysfonctionnement, le préfet de Lyon.
04:08Pourquoi le préfet de Lyon ?
04:09Parce que le centre de détention, c'est-à-dire la prison où était cette personne,
04:14dépend du préfet de Lyon.
04:16Donc le préfet de Lyon, au début, décide de prendre un arrêté d'expulsion.
04:21Il réunit la commission, la commission d'expulsion,
04:24on est obligé de la saisir et on est obligé d'auditionner la personne.
04:28Eh bien cette commission est reportée début juillet.
04:31Donc le préfet change de pied et décide de prendre un arrêté de reconduite à la frontière,
04:36obligation de quitter le territoire français.
04:38C'est une mesure moins forte que... ?
04:40C'est une mesure similaire.
04:42L'un, c'est un éloignement, lorsque vous êtes en situation irrégulière.
04:46L'autre, c'est une expulsion, que vous soyez en situation régulière ou irrégulière,
04:50lorsque vous êtes un trouble pour l'autre public.
04:53Quelle est la différence éloignement-expulsion ?
04:55C'est une différence de fondement.
04:57L'un, vous êtes...
04:58Ça revient au même, au final.
04:59Ça revient au même.
05:00Éloignement-expulsion, c'est quasiment la même chose.
05:02Donc on s'y prend un peu tard, il est déjà sorti de prison...
05:04On s'y prend très tard, parce que l'arrêté du préfet est du 17 juin,
05:08et il sort en prison trois jours plus tard.
05:10On lui notifie l'arrêté le lendemain, 18 juin,
05:14et on prévient, quand c'est l'autorité préfectorale,
05:17le consulat marocain de Dijon, le 18 juin.
05:20Et là, deuxième...
05:22Alors, premier dysfonctionnement, le préfet aurait dû beaucoup plus s'anticiper,
05:26suivant les instructions de Gérald Darmanin, ministre à l'époque,
05:29circulaire du 12 avril 2021.
05:31Lorsque les personnes sont en prison et qu'elles sont en situation régulière,
05:34vous ferez en sorte...
05:36Vous anticipez.
05:37...de tout prévoir, le routing, les demandes de reconnaissance
05:41et de laissé-passer, pour que cette personne soit mise dans un avion.
05:45Donc le préfet, là-dessus, il a commis une grave erreur,
05:48il y a un dysfonctionnement.
05:49Deuxième dysfonctionnement, les Marocains disent,
05:52ce n'est pas le préfet qui doit solliciter le document de voyage...
05:57Le fameux laissé-passer consulaire.
05:59Mais c'est la direction générale des étrangers en France,
06:01c'est-à-dire l'administration centrale.
06:02C'est-à-dire le ministère de l'Intérieur.
06:04Tenez-vous bien, il va s'écouler un mois avant que la DGEF...
06:09Juste parce que ce n'est pas le bon guichet qui a fait la demande.
06:11Exactement.
06:12Mais c'est incroyable.
06:13...présente cette demande aux Marocains.
06:14Ça a changé quoi, honnêtement ?
06:15Le préfet a le droit quand même de demander.
06:17Parce qu'on ne fait pas un mois.
06:19Selon les usages, c'est la DGEF, puisque la DGEF s'est exécutée.
06:25Au final, est-ce que les autorités marocaines, dans cette histoire,
06:27sont-elles de mauvaise volonté ?
06:28Non, pas de mauvaise volonté, mais elles ont tardé.
06:30Si on n'avait pas eu ce mois de perdu,
06:33je pense que M. Tahar serait au Maroc aujourd'hui
06:39et que Philippine de Carlan serait toujours vivante.
06:42On a raté l'expulsion de Tahar Walida.
06:45Ou le préfet de Lyon, M. Pavlenko.
06:47Vous pensez que c'est...
06:48Vous ciblez nommément, quand même.
06:50Oui, parce que moi, ma parole est libre.
06:52Je ne dépends pas de l'administration,
06:54je connais un peu les tenants et aboutissants.
06:57J'étais auditeur de l'Institut des hausses-études du ministère de l'Intérieur.
06:59Donc, à un moment donné, il ne faut pas qu'il y ait une dilution des responsabilités dans l'administration.
07:04Justement, c'est au ministre de l'Intérieur,
07:06après enquête, après audition,
07:08parce que je suis attaché au principe du contradictoire,
07:10de décider si cela mérite une sanction.
07:12Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur,
07:14mardi, lorsqu'il est venu sur Europe 1,
07:17a dit qu'il faut changer les règles.
07:19Changeons-les.
07:20Qu'est-ce qu'on change comme règles dans ce système-là ?
07:22Parce qu'apparemment, il n'y a pas eu tellement de dysfonctionnement.
07:24Il y a eu, si vous avez raison de le dire,
07:26des demandes qui ont été formulées peut-être un peu tard,
07:28mais en soi, toutes les étapes ont été accomplies.
07:31Alors, il y a une difficulté,
07:33c'est que le juge a parfaitement appliqué la loi dans toute sa rigueur.
07:36Et justement, la loi du 26 janvier 2024.
07:39Il faut comprendre que la rétention administrative
07:42d'une période maximum de 90 jours n'est pas linéaire.
07:46Vous avez d'abord une rétention de 4 jours,
07:48ensuite, le juge décide ou pas d'une première prolongation de 26 jours,
07:52ensuite, d'une deuxième prolongation de 30 jours,
07:55ensuite, exceptionnellement, d'une première période de 15 jours,
07:59et ensuite, encore plus exceptionnellement, d'une dernière période de 15 jours.
08:03Là, on était dans la dernière période.
08:05Donc, le préfet de Lyon, toujours lui, sollicite du juge des libertés de Metz.
08:11Pourquoi Metz ? Parce que c'est là où il y a le centre de rétention.
08:13Il y a très peu de centres de rétention en France.
08:15Il n'y a même pas 2 000 places.
08:16Donc, au lieu d'avoir un centre de rétention dans Lyon,
08:18si c'était plus facile pour les escortes,
08:20pour le travail de l'avocat, du préfet,
08:24eh bien, on se retrouve à Metz.
08:25Et là, le juge applique l'article L742-5 dans toute sa rigueur,
08:30parce que cet article stipule qu'en fin de course,
08:35il faut que le trouble à l'ordre public,
08:37qu'il définit très bien dans son ordonnance,
08:39son ordonnance est parfaitement motivée,
08:41le trouble à l'ordre public doit intervenir dans les 15 derniers jours.
08:45Donc, en rétention.
08:47Et, nouveau dysfonctionnement,
08:49le préfet Lyon, à mon sens,
08:51aurait dû interjeter appel de cette ordonnance,
08:54s'il sentait qu'il y avait un hiatus.
08:56Parce que, par exemple, la Cour d'appel de Paris
08:58a rendu une décision le 18 juin,
09:00qui est beaucoup moins claire que celle du juge de la liberté de Metz.
09:05Merci beaucoup pour vos lumières, Philippe Fontana,
09:07sur cette affaire philippine.
09:09Je rappelle le titre de votre ouvrage,
09:11« La vérité sur le droit d'asile »
09:13paru aux éditions de l'Observatoire,
09:15sur le sujet des laissés-passer consulaires,
09:17qui est vraiment le miroir des faiblesses diplomatiques françaises.
09:19On y reviendra dans 20 minutes à 7h40
09:21avec notre spécialiste police-justice,
09:23William Molinier.

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