• il y a 3 mois
Sudinfo vous propose l'émission "Home Cinéma" de VOO / Be TV consacrée à l'actualité du 7ème art. A l'honneur cette semaine: Lubna Azabal. L'actrice belgo-marocaine à la carrière impressionnante parle de sa carrière et du film « Une vie rêvée » sorti début septembre.
Transcription
00:00Lumna Azabal. Bonjour. Bonjour. Alors, on ne va pas se mentir, on se connaît depuis très longtemps,
00:12Lumna. Je crois. On va parler de ton parcours. C'est trois décennies de cinéma que tu viens
00:19de traverser. Tu as travaillé avec beaucoup, beaucoup de gens. Tu joues sur les trois tableaux,
00:23tu joues sur le cinéma français, tu joues sur le cinéma arabe et dans le cinéma international.
00:29J'aimerais savoir, Lumna, si tu t'imaginais faire ce parcours-là. Jamais de la vie. Jamais de la
00:37vie. Et encore maintenant, je me dis qu'est-ce que je fous là? Je me pose toujours la question et
00:41je n'arrive même pas à me projeter dans ce que je pourrais faire après. Non, jamais. En fait,
00:45il y a presque parfois un petit malentendu. Les gens te voient comme... J'ai l'impression d'être
00:50là par malentendu. Non, mais non, parce que ton talent, tu es une grande actrice, Lumna. Mais
00:56les gens souvent pensent que tu es un peu volontaire, que tu es un peu un peu combattive.
01:01Mais au fond, j'ai l'impression qu'il y a énormément de fragilité et que parfois tu es un peu perdu dans
01:09la grande tempête. Je ne suis absolument pas combattante. Je crois que dans ceux qui me
01:13connaissaient vraiment bien dans ma vie, tous les jours, c'est des pare-feux. Je me mets un
01:19milliard de pare-feux, ça c'est sûr, de protection, mais je suis ultra émotive et ultra sensible et je
01:25peux tomber à n'importe quel moment, sauf que j'essaie de faire en sorte de ne pas le montrer.
01:29J'aimerais qu'on parle un petit peu de ton enfance à Bruxelles. L'Ultimatum, ce bar-restaurant où on
01:38s'est rencontrés il y a trente ans. Tu venais de partir de chez tes parents, tu vivotais. De
01:43l'Ultimatum à loin d'André Téchiné, qui est ton premier film. Je fais abstraction du film de
01:48Mahmoud Benhamoud, les siestes grenadines. Est-ce que c'est grâce aux siestes grenadines que Téchiné
01:54a vu le film et que tu as fait loin ? J'étais au conservatoire, c'était ma première année au
01:59conservatoire et c'est un copain de classe qui m'a dit qu'il lui avait un agent déjà à Paris et
02:06qu'il me dit il y a mon agent qui cherche quelqu'un de typé qui pourrait faire ses farades. Je lui ai
02:11parlé de toi, c'était Georges Lambert. Georges Lambert c'est un agent à l'ancienne. Je crois
02:17qu'il a eu les plus grands acteurs à l'époque. Jusqu'à Paris, il me fait des photos dans sa
02:26cour à l'agence comme ça. Il les envoie à Michel Nassry qui est l'assistant, le bras droit d'André
02:32Téchiné. Et j'ai très vite une réponse de Michel Nassry qui dit ok, André aimerait bien lui faire
02:40passer des essais. Comme je m'emmerdais un peu au conservatoire, c'est pas que je m'emmerdais,
02:44c'est que j'avais l'impression que je n'avais pas ma place. Pour moi, être acteur, c'était pas moi,
02:49je ne me voyais pas là-dedans. Et puis, je n'y croyais pas. Je ne croyais même pas à ceux qui
02:54jouaient devant moi, donc je n'y arrivais même pas. J'ai passé mon temps à avoir des fourrures au
02:57conservatoire parce que je trouvais tout drôle et ridicule. Quand je lisais du Shakespeare,
03:01j'avais découvert des auteurs. C'était vraiment la seule chose qui me fascinait, c'était Shakespeare,
03:07Racine et même pas Molière, c'était vraiment Shakespeare et Racine que j'ai adoré. Parce que
03:11au conservatoire, la fonction qu'on me donnait, c'est la petite bonne derrière qui arrive dans
03:15les check-off, qui sert le truc et qui repart comme ça. D'ailleurs, Fabrizio faisait la même
03:19chose. On était tous les deux un peu derrière, au fond, planqués. On n'avait pas le droit à de
03:27beaux rôles. Tu connaissais André Téchinet ? Tu connaissais son travail ? À l'époque, c'était un
03:33réalisateur qui était très coté. Aujourd'hui, il est un saint vieux monsieur. Moi, je passais
03:39mon temps très souvent chez le vidéoclub. À l'époque, il y avait les vidéoclubs. J'avais
03:44mon petit vidéoclub et je passais mon temps à regarder des films aussi. Il faisait partie des
03:48cinéastes dont j'aimais bien l'univers. Je savais extrêmement bien qui c'était.
03:54Ce que tu dis, c'est la chance de ma vie. Je vais faire ce film et peut-être que tout va changer.
03:59Non, jamais.
04:00Tu as traversé ça d'une manière complètement impulsive.
04:03Oui, c'est toujours ce que j'allais faire à côté. C'est André qui m'a poussé. C'est quand j'ai fait
04:08le deuxième film et je lui ai parlé.
04:10Les temps qui changent.
04:11Les temps qui changent. C'est lui qui m'a dit « Arrête de penser à ce que tu pourrais faire d'autre. »
04:17Oui, mais tu avais fait déjà plein de films.
04:19Entre les deux, tu avais fait plein de films.
04:21Je ne prenais pas du tout les choses au sérieux. Même la façon dont je lisais un scénario,
04:26ce n'est pas comme je le lis maintenant. La façon dont je travaille les personnages,
04:29ce n'est pas comme je le fais maintenant. C'était le temps de faire autre chose,
04:32de trouver réellement ma voie.
04:37Ceci dit, les metteurs en scène s'intéressent à toi. Je pense à ce grand film qui est « Incendie ».
04:43Maseriye ! Maseriye !
04:47Est-ce que « Incendie » de Denis Villeneuve qui arrive en 2010, est-ce que c'est un tournant dans ta carrière ?
04:52Là, je prends conscience de ce que c'est que la chance de faire ce métier.
04:58Et ce n'est pas un métier, c'est vraiment une passion. Je réalise que c'est une passion, que c'est une chance.
05:02Monsieur ! Monsieur !
05:06J'aime pouvoir aller en dehors de moi, aller loin et explorer des choses,
05:13et donner vie à ces choses-là. Il y a des corps, il y a des voix.
05:16Et probablement, à faire exploser certains tabous, à mettre de la lumière là où je suis noire.
05:23Il y a tout ça qui commence à m'animer.
05:28Avant, quand tu faisais tes premiers films, il y avait quelque chose qui t'échappait ?
05:31Tu as l'impression que ça t'échappait un petit peu ?
05:33Avant, je me le laissais faire. Il me disait, il faut faire ça, je fais ça, je fais ça, je fais ça.
05:37Voilà, la scène, c'est tu marches de là et tu vas là.
05:40Là, maintenant, je me dis, ben non, quand j'arrive sur un plateau, j'ai besoin de renifler le plateau, j'ai besoin de voir.
05:45Aïmé Charbel pensait qu'en parlant et en lisant des livres, on pouvait s'assurer de la paix.
05:51Et j'ai compris ce qu'il disait.
05:55Mais la vie m'a apporté beaucoup de choses.
06:00Maintenant, qu'est-ce que tu vas faire ?
06:04Je vais apprendre à mon ennemi ce que j'ai appris de ce monde.
06:07Ton expérience est assez incroyable.
06:09Donc, on a dit, je pensais 40 films, tu m'annonces le doute, le double, pardon.
06:15Ça fait beaucoup, beaucoup, beaucoup d'expériences, ça fait beaucoup de tournages, ça fait beaucoup de rencontres.
06:19Nawaz, est-ce que quelqu'un connaît ou a déjà entendu parler d'Abu Nawaz ?
06:26Non.
06:29Alors, Abu Nawaz, c'est né au 8ème siècle.
06:32Il est considéré comme l'un des plus grands poètes arabes satiriques de son temps.
06:38Il est musulman.
06:39Et il aimait aussi bien les hommes que les femmes.
06:45Je vais parler de Hamal, de Jawad Rali.
06:49Rali, pardon, tu es le personnage de Hamal qui se bat contre un obscurantisme galopant.
06:55C'est votre humanité qui m'intéresse.
06:57Pas votre foi.
07:00Parce que la foi est un lien strictement intime entre le croyant et son dieu.
07:05C'est un peu baisé, mais c'est toujours le cas, je pense.
07:10Bon, si il y en a d'autres qui veulent partir, c'est tout de suite.
07:13Il y a une relation très étroite qui s'installe avec le metteur en scène.
07:17J'aimerais savoir, est-ce que c'est quelque chose que vous avez échafaudé tous les deux ou c'est venu pendant le cours du tournage ?
07:25J'ai eu plusieurs versions de scénarios.
07:27Donc forcément, à chacune des versions, je lui disais ce que j'en pensais.
07:31Et il y a des choses qui me semblaient parfois trop caricaturales ou complètement fausses.
07:36Ou des choses qui me semblaient plus justes et que je trouvais qu'il fallait qu'on pousse plus là-dedans.
07:42Et puis, quand on a commencé le tournage, là, ça s'est fortement accentué, la collaboration.
07:48Pourquoi ? Parce que c'est un metteur en scène de documentaire ?
07:51Et que tu penses qu'il t'a laissé beaucoup de place dans le processus de création ?
07:55Ta gueule, toi !
07:55Oh là, elle dégoûte !
07:56Putain, ces comportements de kouffle, c'est pas le musulman, ça !
07:59Pour la énième fois, Alain n'a rien à faire dans ma classe ! Tu le comprends, ça ?
08:03J'ai réécrit, mais tout le monde le sait, j'ai écrit la plupart... Enfin, c'est toutes mes séquences, en fait.
08:10Tous mes dialogues.
08:13J'ai redistructuré certaines séquences, j'ai coupé, je faisais des montages dedans.
08:20Parce qu'en fait, l'idée, c'était... On est dans un sujet extrêmement touchy, extrêmement sensible.
08:28Et... Moi, l'islamisme, c'est mon combat de toujours.
08:34Et c'est pas parce que... D'ailleurs, quand on dit une femme libre, je trouve ça un peu... Je trouve ça même faux.
08:39C'est juste un être humain normal, juste une femme qui veut donner cours, un prof.
08:45Qui prétend à une forme de laïcité et de liberté.
08:49Laïcité, c'est pas... C'est la liberté de chacun de pouvoir ou pas croire, ou ne pas croire, exercer, ne pas exercer...
08:59Tout d'un coup, il y a cet obscurantisme qui enferme une certaine jeunesse dans quelque chose
09:04qui est terriblement dangereux, vénéneux, malsain et criminel.
09:08En tout cas, ce que je peux vous dire, c'est que c'était isolé et exceptionnel.
09:12Moi, Nabil, je suis désolée, je vais te contredire, mais...
09:16Je ne pense pas que ce soit isolé et exceptionnel. On parle quand même d'une gamine qui s'est fait agresser physiquement,
09:22qui s'est fait menacer, harceler, tout ça en l'espace de trois jours.
09:25Trois jours.
09:27Parce qu'on la soupçonnerait d'être quoi ? D'être homosexuelle.
09:30Moi, il me semblait qu'il fallait qu'on parle de ça sans jamais, aucun moment...
09:35Ça, c'était tellement important pour moi,
09:38jeter l'opprobre sur 95% de gens qui sont croyants et qui n'ont jamais rien demandé,
09:46et qui font de mal à personne, et qui vivent leur religion tranquillement.
09:50C'est juste un crépage de chignons entre camarades de classe.
09:53Vous savez très bien que la plupart, ils ne savent même pas la portée de ce qu'ils disent, de ce qu'ils font.
09:57Mais c'est vrai !
09:59Tu parles d'eux comme s'ils avaient quatre ans et demi. Ça va, on ne les biberne pas.
10:03Moi, si tu veux, c'est aussi un film... Je me suis dit un jour, mes parents vont s'en prendre,
10:07vont se faire massacrer dans la rue jusque parce que, par exemple, ma mère porte le voile.
10:11Parce qu'il y a un moment, il va y avoir quelqu'un qui va se dire, je ne peux plus, voilà.
10:17Et ça va se transformer en ça.
10:19Et si on n'en parle pas, si moi, qui suis de culture musulmane, je ne suis absolument pas pratiquante,
10:26on s'en fout, mais si nous, on ne réagit pas et qu'on ne dit pas « not in our name »,
10:36qui va le faire ?
10:37Oui, c'est le combat de Jawad aussi.
10:39C'est son combat, il a bien raison de le faire et c'est aussi mon combat parce que,
10:43moi, j'ai l'impression d'être... Ce n'est pas à chaque fois qu'on me met une gifle, qu'on me salit,
10:49qu'on salit mes parents, qu'on salit mes aïeux.
10:51Il ne s'agit pas ici de faire deux groupes ou des groupes.
10:55Ceux qui croient, ceux qui ne croient pas, les blancs, les noirs.
10:58Ceux qui ont la foi, ceux qui n'ont pas la foi.
11:00Il s'agit de tolérance.
11:02Je parle de tolérance, du vivre ensemble.
11:07C'est de ça dont il s'agit et vous êtes tous concernés par rapport à ça, tous.
11:13Ce film est réalisé par un réalisateur de documentaire.
11:20Je pense que le tournage a été mouvementé, on va dire.
11:24Le film a eu un écho certain, vous parlez d'un sujet délicat.
11:28J'aimerais savoir sur le film pour lequel on se voit aujourd'hui,
11:32Une vie rêvée de Morgane Simon, qui a un deuxième long métrage,
11:35est-ce que ça modifie ton jeu ?
11:38Est-ce que tu improvises plus ?
11:40Je sais que Valéria, une clé d'esquille, improvise énormément.
11:43Est-ce que c'est quelque chose que tu as adopté aussi ?
11:46Valéria, effectivement, elle est en création permanente.
11:49Il y a le texte et puis il n'y a plus le texte.
11:52Le texte, il faut le bazarder parce que c'est l'inattendu, l'imprévu.
11:55Valéria le joue avec tout ce qu'elle ressent.
11:57Et moi, c'est génial, j'ai adoré faire ça.
12:00C'est aussi quelque chose que j'ai appris avec Tony Gatliff.
12:03Quand je fais Exile avec Tony, le scénario, c'est cinq pages.
12:07Le film se crée au fur et à mesure des idées.
12:11Le film, c'est un road movie.
12:14Chaque jour, en fonction, il avait envie de s'arrêter là.
12:17Tout d'un coup, il a une idée, il crée.
12:20Il faut être prêt, il faut être là.
12:22On a juste une thématique, Romain et moi, et il faut y aller.
12:25Pour resituer une vie rêvée, c'est une histoire d'amour
12:28entre une mère et son fils, on va dire.
12:30Une mère qui est complètement larguée,
12:32donc interprétée par Valéria Bourguigny-Tébeski.
12:34Mais qui est larguée, puis qui va rencontrer une autre femme.
12:36Oui, qui est larguée, oui.
12:37Et qui est toi.
12:38Tiens.
12:39C'est quoi ?
12:40C'est pas exactement ce que tu m'as demandé, mais...
12:42C'est cause de notre merde, la transaction.
12:44Tu devrais me dire merci !
12:45T'es un exemple de tout ce qu'il faut pas faire dans la vie.
12:47T'es raté !
12:48Il faut que t'arrêtes là !
12:49Oui, Serge, c'est moi.
12:51Je voulais savoir comment ça allait.
12:52Bisous.
12:54Qu'est-ce qui va pas ?
12:55J'ai travaillé toute ma vie.
12:57Et j'ai rien.
12:58Aucun plaisir.
13:00Faut se créer son bonheur à soi, chérie.
13:02J'aimerais savoir, est-ce que le scénario était...
13:05était comme le film, ou très différent ?
13:08Dans le scénario, il y avait des séquences qui duraient...
13:10Une séquence qui durait dix pages, hein, donc...
13:12Et dans les dix pages, bah...
13:14Ça s'invente... On réinventait tout, tout le temps.
13:17Puis t'avais Morgane qui nous parlait,
13:19qui nous disait...
13:21« Pose-lui ça, Loulou. Demande-lui ça. »
13:24« Valéria, vas-y. »
13:26Quand quelqu'un a cette dose de créativité,
13:28tu restes pas, toi, petite acte comédienne...
13:30« Non, non, mon texte, c'est quoi, la ligne ? »
13:32« Mais non, il faut revenir... » Non !
13:33Vraiment, on avait plus l'impression de jouer,
13:35on se parlait.
13:36Valéria comme moi,
13:37on est de la même école à ce niveau-là.
13:39Vraiment.
13:40T'as quoi de peur ?
13:41D'être heureuse.
13:42Deux comédiennes, deux actrices
13:44qui sommes vraiment au service du scénario
13:46et du réalisateur.
13:48Tu travailles beaucoup dans le cinéma franco-belge,
13:50dans le cinéma arabe
13:52et dans le cinéma international.
13:53Qu'est-ce que tu préfères ?
13:54C'est le mouvement, c'est l'alternance,
13:56c'est...
13:57C'est les univers différents,
13:59c'est des personnages, bah oui, différents,
14:01c'est...
14:02Qu'est-ce que je peux encore exploiter ?
14:04Comment je peux l'exploiter ?
14:05Ne me fais pas perdre mon temps, Valkellen.
14:07Dis-moi qui a tiré sur ces gens,
14:08qui a buté ce môme ?
14:09Jamais j'aurais fait ça !
14:11C'est toi, Valken.
14:13C'est toi et personne d'autre qui étais sur ce parking
14:15juste après avoir braqué la banque.
14:16Toi et personne d'autre.
14:17Non, c'est pas moi.
14:18Moi, c'est tout ce travail de laboratoire
14:20qui me plaît à chaque fois, quoi.
14:39J'ai une dernière question pour toi, Leblanc.
14:42On parlait de tes trois décennies de cinéma.
14:46J'aimerais savoir comment tes parents voient ça.
14:49Est-ce qu'ils sont fiers ?
14:51Est-ce que...
14:52Je sais que ton papa est parti il y a...
14:55Il y a deux ans.
14:56Il y a deux ans.
14:57Mais comment ils te regardaient
15:00par rapport à ton parcours quand même assez insensé ?
15:03Je crois qu'il était très fier,
15:05mais...
15:07avec beaucoup de pudeur.
15:09Et ta maman ?
15:10Ma mère, elle est très fière aussi,
15:12et elle...
15:16Elle me le dit.
15:17Mais on est une famille pudique.
15:19Est-ce qu'ils s'imaginaient quelque chose ?
15:21Non, pas du tout.
15:22La terreur de ma mère, c'est que...
15:24Parce que pour elle,
15:25quand je l'avais annoncée il y a plus de 30 ans
15:28que je...
15:29T'allais faire actrice ?
15:31Elle s'est dit, ça y est,
15:32ma fille va mourir SDF dans la rue.
15:34Elle s'est vraiment dit ça.
15:36C'est l'image qu'elle avait.
15:37Elle, pour elle, acteur, c'est...
15:39SDF dans la rue.
15:42Et là, elle voit le chemin que j'ai accompli.
15:46Évidemment, elle est terriblement faire
15:48quand elle me voit en Maghreb,
15:49quand elle sait que je suis à Cannes,
15:51présidente du cours,
15:52quand je reçois mes prix,
15:54le fait que je voyage,
15:55le fait que...
15:56Et puis elle voit mes films,
15:57elle les aime beaucoup.
15:58Oui, parce que tu tournes dans plein de choses
16:00très, très différentes.
16:01Je lui dis, mais quoi, tu peux le dire quand même
16:02que t'es fière ou pas ?
16:03Puis elle est...
16:04Mais oui, ma fille, t'es une grande actrice,
16:06oui, je sais,
16:07mais c'est difficile.
16:09Tu sais, pareil,
16:11on vient des invisibles, nous.
16:14On vient du monde des invisibles,
16:16donc il n'y avait rien
16:17qui était prédestiné à ça.
16:20Donc quand elle a cette copine au Maroc,
16:23elle dit, ouais, j'ai vu ta fille à la télé,
16:24évidemment,
16:25je ne sais pas ce qu'elle raconte,
16:27mais je sais qu'elle est fière.
16:28Bravo, Léna.
16:29Vraiment, je t'aime beaucoup.
16:31Moi aussi.
16:32Merci beaucoup, Léna.
16:33Je t'aime beaucoup.
16:39Sous-titrage Société Radio-Canada

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