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Dans la série dramatique « La Maison », nous retrouvons Lambert Wilson et Amira Casar, tous deux nommés aux César, dans le monde complexe de la haute couture. À l’occasion de la sortie de la fiction ce 20 septembre 2024 sur Apple TV+, le duo a répondu à nos interrogations. Rencontre.

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Transcription
00:00En tant qu'acteur, on vous renvoie en permanence la notion de votre image.
00:03Et on a beau fermer les écoutilles, ne pas s'en préoccuper, ne pas être sensible à ça,
00:08on vous ramène en permanence cette notion.
00:11Ton image, c'est ça.
00:12Non, non, tu peux pas faire ça. Ton image est comme ça.
00:14Moi, je dis aux gens, ne me parlez pas de mon image.
00:20Vincent, Victor, le duc, c'est avant tout une maison familiale.
00:26Cette maison est aussi fragile et précieuse que la dentelle qu'il fabrique.
00:33Elle ne tient qu'à un fil.
00:42La possibilité d'être l'un avec l'autre, c'est ça.
00:45Surtout, savoir qu'on allait passer cinq mois ou six mois ensemble.
00:49On s'entend très bien et on se connaissait.
00:51Et puis, on rêvait de travailler ensemble parce qu'on adore la musique, on adore la poésie.
00:55Lambert m'a dirigé déjà dans un festival de poésie.
00:58Et puis, je crois que le scénario est très fort.
01:00Les personnages sont forts, l'histoire est forte.
01:03C'est sur des familles dysfonctionnelles, c'est sur des fissures, des êtres fissurés.
01:07Puis, il y a un aspect social qui est quand même la mode et les craints,
01:10mais l'aspect social est très important.
01:12Et l'écriture, non ?
01:13L'écriture en numéro un est surtout une écriture qui se concentre sur le destin
01:18de deux familles qui n'en font qu'une.
01:19Et avec toutes les tentacules qui vont tenter des passerelles
01:26pour trahir, pour se venger.
01:28Pour ça, c'est un matériel dramatique et génial.
01:32Et surtout parce qu'il y a des sujets de société qui apparaissent.
01:36Les rapports entre des jeunes générations et des anciennes générations.
01:40Rapport au monde moderne et à la communication.
01:43Et aussi...
01:44L'héritage.
01:44Oui, l'aristocratie et les rôturiers, arrivés, arrivistes,
01:51nouveaux arrivants dans le monde de l'argent.
01:53Donc, il y a comme ça des thèmes de fond qui sont des thèmes de société.
01:56Et ça, c'était super attirant.
01:58C'est vrai que, par exemple, socialement, on a deux pôles.
02:01On a les parvenus bourgeois qui ont les crelons
02:05et on a le côté où il faut absolument sauver l'artisanat, sauver une maison.
02:10Sa pérennité, penser à cette pérennité,
02:12à quelque chose que ça dure, que ça ne fissure pas,
02:15que ça ne soit pas des actionnaires qui viennent briser une tradition ancienne.
02:20Donc, je pense que ça, c'est intéressant.
02:26En tant que fille qui hérite du pouvoir allant de muse,
02:30la trajectoire est intéressante parce que la muse est dans une situation gênante,
02:34inconfortable, parce qu'elle est toujours redevable à son maître,
02:37à celui qui la façonne.
02:38Perle vient d'un milieu très humble, anglais, il le lui fait sentir.
02:43Et après, elle construit, elle prend le pouvoir.
02:45Et quand le pouvoir lui est donné et qu'enfin, on lui cède un poste important
02:49qu'elle mérite, qu'est-ce qu'elle va faire avec le pouvoir ?
02:52Et je trouve que c'est intéressant parce qu'elle va aller vers une jeunesse écologique,
02:56vers une jeunesse qui va révolutionner la mode, qui est très actuelle.
02:59Et je crois qu'aucune série a parlé de ça jusqu'à aujourd'hui.
03:02Qu'est-ce qu'on fait avec les chutes, avec les déchets, avec le recyclage ?
03:06Alors, en ce qui concerne le rapport au monde des médias et aux réseaux sociaux
03:11et l'incapacité à s'adapter à cette nouvelle technologie, à l'Uber-communication,
03:17ça, c'est vraiment pour moi quelque chose dans lequel je me suis complètement identifié
03:22parce que j'ai ce problème-là.
03:23Je pense que c'est très particulier pour les gens d'une génération
03:26qui ont été vraiment à cheval entre des époques totalement contradictoires,
03:31avant même l'arrivée du fax,
03:33j'ai connu des téléphones où il n'y avait même pas de numéros,
03:36où on faisait « cling, cling » comme ça et on passait par un standardiste,
03:40quand j'étais petit par exemple, à ce qu'on connaît aujourd'hui.
03:43Donc ça, c'était particulièrement pour moi un aspect du personnage
03:47dans lequel j'ai pu me projeter, ça, c'est sûr.
03:49Et puis aussi le fait d'arriver à un certain âge
03:50et puis d'avoir accédé la place à une autre génération, oui, tout simplement.
03:54C'est vrai qu'il y a eu des moments où j'ai eu l'impression
03:56que j'étais un peu dans l'extrême-droite,
03:58à céder la place à une autre génération, oui, tout simplement.
04:01J'aime bien quand il y a des choses,
04:03quand il y a de la chair à ronger sur l'os, non ?
04:07Et je voulais quelque chose, je cherchais un moment donné dans ma vie
04:10d'un matériau avec de la profondeur.
04:13Et là, je me suis dit, il y a de la profondeur.
04:15Et forcément, il y a le trajet vers le personnage qu'on ramène à soi
04:19et où on va, c'est dans les deux sens.
04:22Ce n'est pas aussi rationnel que ça.
04:23Je pense que la création d'un rôle, ce n'est pas forcément rationnel.
04:28Il y a des choses inconscientes qu'on met dedans.
04:31Il y a des choses, par exemple, par rapport aux origines de Perle.
04:35Travailler sur quelqu'un qui a un complexe social,
04:38c'est intéressant aussi d'être obligé de s'adapter et finalement d'être façonné.
04:42Parce qu'aujourd'hui, il n'y a plus de raison d'avoir un complexe social.
04:46Il n'y en a plus de raison.
04:47Il y a eu des révolutions.
04:49Ne compte que le mérite, en tout cas dans mon monde à moi,
04:51dans ma construction mentale à moi et émotionnelle.
04:54J'aime le mérite.
04:55Je vis pour l'amour du travail bien fait.
04:57Et là, je me disais, avec les partenaires qu'on avait, avec les rôles qu'on avait,
05:01il y a vraiment presque un matière théâtrale à exploiter, à explorer.
05:11En tant qu'acteur, on ne parle que de ça.
05:13On vous renvoie en permanence la notion de votre image
05:16et on a beau fermer les écoutilles, ne pas s'en préoccuper, ne pas dire,
05:21ne pas être sensible à ça.
05:22On vous ramène en permanence cette notion.
05:25Ton image, c'est ça.
05:26Non, non, tu ne peux pas faire ça.
05:27Ton image est comme ça.
05:28Et c'est un cauchemar.
05:31Ça existe, je pense, autant chez les acteurs dans le monde dramatique
05:35des acteurs et des metteurs en scène que dans la mode.
05:37Pour moi, c'est exactement la même chose.
05:39Et c'est très difficile.
05:40Moi, je dis aux gens, ne me parlez pas de mon image.
05:43Ne me définissez pas mon image.
05:44Je ne veux pas savoir quelle est mon image.
05:46Je crois qu'on cherche à éclater toutes les frontières
05:51et les cages dans lesquelles on peut nous enfermer
05:53parce qu'on est beaucoup plus vaste que ça.
05:55Il faut juste nous donner le matériau et faire confiance aux acteurs.
05:57Mais c'est vrai aussi ce que tu disais hier.
05:59On est toujours confronté à une génération qui va arriver,
06:03qui va apprendre le texte très, très vite, qui est peut-être plus malin.
06:06Donc, on est toujours sur les qui vivent parce que c'est ça qui est intéressant.
06:10C'est qu'on est toujours dans une perpétuelle remise en question.
06:13Et c'est fatigant parce que le jeu n'est pas une science exacte.
06:16C'est quelque chose que vous pouvez prendre des mauvaises habitudes
06:18d'un metteur en scène.
06:19Vous travaillez avec tel metteur en scène.
06:21Chaque, finalement, chaque metteur en scène a sa façon de travailler
06:25comme chaque créateur.
06:26Et je pense que, en fait, Perle a compris ça.
06:29C'est l'adaptation qu'il faut être darwinienne.
06:31Il faut s'adapter à son époque.
06:33Mais en même temps, il ne faut pas se prostituer à son époque non plus.
06:36Moi, je ne suis pas sur les réseaux sociaux.
06:37Je n'aime pas ça.
06:38Bon, Perle, elle le fait, mais c'est Perle.
06:40Moi, je n'aime pas ça.
06:40Nous deux, on est en dehors de ça.
06:42Et beaucoup de gens que j'admire ne sont pas sur les réseaux sociaux
06:44parce que ça se dilue, ça dilue.
06:47On est des dinosaures.
06:49Non, même des jeunes.
06:50Il y a beaucoup de jeunes qui souffrent des réseaux sociaux
06:51parce que je pense que frustragramme, moi, j'appelle Instagram
06:55Instagram frustragramme, crée beaucoup de malaise.
07:00Même chez les jeunes, il y a des suicides,
07:02il y a des terribles, des histoires de dénonciations.
07:05C'est affreux.
07:06Et je trouve qu'on gagne à garder un peu son mystère d'être humain,
07:10sa discrétion.
07:12Et aujourd'hui, si on est discret, on est vu comme élitiste.
07:15Ben non, la discrétion, c'est magnifique.
07:18On choisit à qui on donne.
07:20De l'autoprotection, c'est tout.
07:21Un petit peu, oui.

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