Après des Jeux olympiques déjà entrés dans la postérité avec les dix médailles obtenues par le judo français, dont le troisième sacre individuel de Teddy Riner, qui en fait définitivement le plus grand combattant de l’histoire de notre discipline, et l’incroyable doublé réalisé par l’équipe mixte face au Japon, cette petite mélodie, désormais dans toutes les têtes, est de retour à l’Arena Champ-de-Mars du 5 au 7 septembre à l’occasion des épreuves de para-judo. Ils seront neuf tricolores à en découdre au pied de la Tour Eiffel, à la fois en quête de médailles mais aussi de lumière. Hajime, le podcast de L’Esprit du Judo passe en mode « Jeux paralympiques » avec, au micro de ce premier volet, le directeur du para-judo à France Judo Antoine Hays ainsi que le médaillé olympique d’Atlanta Christophe Gagliano, coach de cette équipe depuis début 2023.
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00:00Professeur, entraîneur, expert, champion d'hier et d'aujourd'hui, mais aussi judoka anonyme,
00:10le podcast de l'esprit du judo, c'est maintenant. Hajime.
00:21Après des jeux olympiques déjà entrés dans la postérité avec les dix médailles obtenues par le
00:27judo français, dont le troisième sacre individuel de Teddy Riner qui en fait définitivement le plus
00:32grand combattant de l'histoire de notre discipline, et l'incroyable doublé réalisé par l'équipe mixte
00:36face au Japon, cette petite mélodie, désormais dans toutes les têtes, est de retour à l'aréna
00:42Champs-de-Mars, du 5 au 7 septembre à l'occasion des épreuves de para-judo. Ils sont neuf. Neuf
00:48tricolores à en découdre cette semaine au pied de la Tour Eiffel, à la fois en quête de médailles
00:52mais aussi de lumière. Un double objectif que précise Antoine Hayes, directeur du para-judo à France Judo.
00:58C'est un peu notre souhait aussi, la volonté de la politique, d'avoir un maximum de représentants
01:05dans les catégories ouvertes pour les Jeux. Malheureusement on ne peut pas avoir 16 catégories,
01:11on n'en a ouvert que neuf lors des derniers championnats du monde en 2022. Ça s'est fait un
01:15petit peu aussi avec la réglementation internationale un petit peu au dernier moment, mais voilà, on a
01:20ouvert les neuf catégories, on peut présenter neuf athlètes. Les sélections c'était un peu compliqué
01:25jusqu'au dernier moment puisqu'il y a des athlètes qui visent la médaille comme Elios, Nathan, Sandrine
01:31qui vont vraiment chercher à performer et aussi ce qu'on annonçait dès le départ, il y a aussi des
01:37enjeux de représentation pour nous parce que même si le président dit que ça ne bougera pas au
01:43nombre de licenciés, qu'on est une fédération assez forte etc, nous pour autant les Jeux Paralympiques
01:49ça reste une fenêtre médiatique importante et pour nous les Jeux, au-delà de la performance
01:54sportive qu'on va chercher, ça sera aussi le moyen de faire passer des messages pour les personnes
01:59déficientes visuelles et autres, toutes les personnes qui ont un handicap de venir après pratiquer
02:06le judo, donc c'est des exemples, c'est de la représentation en plus de la performance, donc les
02:10enjeux sont vraiment doubles pour nous et c'est ça qui est intéressant. Neuf sélectionnés pour autant
02:14de parcours comme ils le rapportent en quelques mots. Elios c'est la France tranquille, Elios
02:19tout le monde le connaît maintenant et là il est numéro un mondial, il a battu tout le monde dans
02:24sa catégorie, donc voilà il arrive avec grand favori, donc c'est une grande chance de médaille
02:29pour nous et on est très confiant parce qu'il est à fond dans son projet. Nathan Petit qui a
02:36énormément progressé, en plus avec l'arrivée de Christophe Gagliano qui était sur le même profil
02:40de combattant, donc il y a une entente parfaite entre les deux et ça c'est super intéressant et
02:44on sent que Nathan monte en puissance, donc ça va être très intéressant. Après on a Sandrine
02:49Martinet qui est encore là, elle sait que ça va être compliqué parce qu'elle est attendue,
02:54elle est connue, mais là avec le public elle aussi c'est la force, elle peut se transcender sur des
03:00moments comme ça important, elle a un mental très fort donc on peut espérer aussi un beau parcours
03:04de sa part. Après on a Priscille Alézé, donc elle est un peu plus légère dans sa catégorie,
03:09mais c'est pareil, elle a ses premiers Jeux, elle est enthousiaste, elle suit bien le programme,
03:14elle écoute bien les consignes, donc très bien, on est très contents. Cyril Jonard, il y a 20 ans
03:20il gagnait les Jeux à Athènes, on espère la même chose à Paris et ça terminerait sa somptueuse
03:25carrière dans sa catégorie de J1, il fait partie des favoris. Même blessé il gagne les championnats
03:32du monde, il a tout de suite repris ses repères donc on a continué, on a programmé ses entraînements
03:38en fonction aussi de son âge et de ses capacités, donc là il arrive serein et il peut aussi nous
03:45faire quelque chose. Après on a Armindo Rodriguez, donc lui c'est un petit peu la petite surprise
03:50parce qu'il était au départ prévu qu'il soit en moins de 60 kg, mais il y a un an et demi et en
03:56fait il a pris en masse musculaire et tout, donc le régime devenait plus compliqué, il est à 69 kg
04:02donc lui c'est la jeunesse, on est déjà sur 2028 avec lui et l'expérience des Jeux à Paris
04:09c'est un plus, donc pour nous c'est très important, puis il apprend très vite donc il y a un truc à
04:15faire avec lui, donc ça peut être une très bonne surprise. On a Anatole Rubin qui lui s'accroche
04:20depuis maintenant deux ans et demi, il fait toutes les compétitions, il s'investit assez
04:24exceptionnellement, c'est son investissement qu'on récompense et voilà il n'a pas eu la chance de
04:28faire une médaille encore internationale, mais tout est possible dans cette catégorie,
04:33parce qu'ils sont tirage au sort 8, donc on y croit, Anatole peut nous sortir le combat d'une journée.
04:41On a Jason Grandry, c'est pareil, lui ça a été comme Nathan, une belle progression,
04:47on a été le rechercher, il est sorti maintenant sur chaque sortie internationale, il monte sur
04:51la boîte, donc ça c'est quelqu'un qui s'investit, il a fait d'énormément de sacrifices pour en
04:56arriver là, j'espère que ça sera récompensé de la plus belle des manières lors de ses Jeux
05:02Paralympiques. Et on a Nasser Zorgani, c'était le dernier qualifié, il est devant Béranger sur la
05:15ranking list, c'est pareil, ils sont 8 dans sa catégorie, même un peu moins, ça peut être son
05:23jour. Il sait qu'il vient de loin, mais il peut faire quelque chose, parce qu'on va le préparer
05:29de sorte à ce qu'il soit vraiment prêt le jour J. Ils sont 9, ils vont faire le maximum,
05:34après on sait qu'on aura 3 médailles, c'est le minimum, et après 5 c'est bien, et plus,
05:41ça serait formidable, moi je voudrais bien 9 médailles, ça serait formidable, une carte en
05:46plein ça serait bien. Entre les plus expérimentés et ceux qui s'avanceront sans rien la perdre,
05:51c'est un collectif à deux vitesses que le staff a dû gérer depuis des mois. C'est pas évident du
05:56tout, même au sein du groupe, même entre nous, le staff, on essaie vraiment d'avoir une
06:01programmation un petit peu individualisée, entre ceux qui font préparation physique,
06:04d'autres techniques, etc. Mais comme on a renforcé le staff, donc c'est plus intéressant,
06:07on a aussi des partenaires à disposition, donc ça nous permet, et puis on force ceux qui ont un
06:13petit peu moins de pratique à redoubler l'effort par rapport à ceux qui ont un peu plus d'expérience,
06:21et de nous solliciter, etc. Parce qu'on sait très bien que ça va aller très vite, et qu'ils ne doivent
06:26pas lâcher l'affaire, parce qu'on leur offre une belle opportunité, non seulement sportive,
06:32mais aussi personnelle, parce que les Jeux à Paris, ça va changer leur vie, on le sait,
06:37ça va changer leur vie, donc il faut qu'ils puissent en profiter, on fait tout pour les
06:42accompagner en tout cas. C'est aussi notre rôle nous, par rapport aux Olympiques, on est là aussi,
06:46on a un rôle d'accompagnant qui est important. Ils ont tous un parcours complètement
06:52singulier, puisqu'en plus leur handicap est singulier, chacun a sa problématique,
06:59sa décision, sa vie, son parcours. Certains ont 20 ans, d'autres 25, d'autres 45,
07:07une mère de famille, etc. Donc on doit jongler entre tout ça, et nous proposer un cadre.
07:12Le cadre, c'était d'aller à l'INSEP faire judo technique, d'aller à l'Institut du judo,
07:16parce qu'on a aussi le niveau en dessous, et ça permet de pratiquer judo, et d'autres sont
07:22éparpillés à droite à gauche, ce n'est pas évident, mais on essaie de trouver des solutions,
07:25et avec la fédération, avec l'ANS, on trouve les moyens aussi pour les accompagner, ce qui n'est
07:30pas forcément évident, mais on souhaite que vraiment, l'héritage des Jeux, ça doit être ça
07:36aussi. Ça doit pouvoir continuer avec à peu près le même fonctionnement, et réajuster en fonction
07:41des individus qui auront essayé. Parmi les novices de ces Jeux paralympiques se cache tout
07:45de même un personnage bien connu du judo français, en la personne de Christophe Gagliano, pour qui les
07:51Jeux, olympiques cette fois, n'ont plus vraiment de secret. Médaillé de bronze à Atlanta en 1996,
07:56c'est avec la casquette de responsable des masculins qu'il a vécu l'édition de Tokyo
08:00il y a trois ans. Venu en renfort dans le staff des coachs à partir du début d'année 2023,
08:05il revient sur cette nouvelle expérience, et cette échéance d'envergure qui se profile.
08:10Je suis un peu caméléon, c'est-à-dire que j'ai bossé à l'étranger, j'ai bossé avec les juniors,
08:14j'ai bossé avec les féminines, donc j'ai toujours eu cette habitude de ne pas m'enfermer sur un type
08:22de public. Après, les circonstances ont été un peu différentes, donc il a fallu un peu,
08:29alors je dirais pas se forcer, mais un peu aller plus vite dans le temps d'adaptation,
08:34parce qu'en plus je suis arrivé en janvier de l'an dernier, 2023, ce qui fait qu'on est à un an
08:43et demi de l'échéance, on n'a pas trop de temps à perdre, donc j'ai essayé de le rapporter tout
08:52de suite de la plus-value, de le rapporter mon expérience du haut niveau, et notamment du très
09:00haut niveau olympique-paralympique, et puis essayer d'être une aide supplémentaire pour le staff qui
09:14était déjà en place. Je me suis mis à leur disposition, après j'ai amené quelques petits
09:20plus, mais sans tout transformer, parce que c'était pas le but, le but c'était de s'appuyer sur
09:26quelque chose qui était déjà en train de se mettre en place, et qui tenait déjà bien la route dans
09:31l'encadrement avec Antoine, et avec Cyril, donc voilà, c'était un plus pour eux d'avoir quelqu'un,
09:44une présence en plus. J'ai essayé d'insister sur la partie technique quand même, parce que
09:51c'est quand même ma valance principale, et puis même si c'est les paras, ça reste hyper important,
10:02et donc on a mis en place une séance technique hebdomadaire, qui était un rendez-vous pour les
10:11parisiens ou pour les provinciaux qui étaient présents sur certaines semaines. J'ai essayé
10:18aussi de prendre en charge les séances techniques sur tous les regroupements, ou sur beaucoup de
10:23regroupements. Bon, il y a Cyril qui travaille avec moi bien sûr, mais comme j'arrivais, l'idée
10:29c'était de s'en servir. Et puis après, sur les événements, un peu plus de sérénité parfois,
10:37peut-être, parce que la gestion de l'événement je connais, la gestion du jour J je connais,
10:44ça va être pareil pour les Jeux. Peut-être que ma présence va permettre au staff et aux athlètes
10:52aussi de s'appuyer sur mon expérience. Mais comment transmettre avec ses combattants
10:58pour qui la vue fait plus ou moins défaut ? Il y en a certains pour qui je peux démontrer,
11:02donc il y a cette difficulté et cette particularité que je suis obligé de démontrer. Il y en a même
11:09avec qui je suis obligé d'utiliser les mains, notamment avec Cyril Jeunard, parce que lui,
11:14non seulement il est non-voyant, mais il est malentendant. Sur le tapis, quand il n'a pas ses
11:21appareils, si je lui dis « avance plus ta jambe », il faut que je lui prenne la main et que je
11:26fasse le mouvement sur lui, et qu'il sente comment je répartis mon poids de corps, comment je bouge mes
11:32jambes. On fonctionne comme ça à tâton presque. Il y a Jason Guyot qui est son assistant, qui nous
11:42aide beaucoup, qui est hyper précieux parce qu'il le connaît bien, il arrive à bien communiquer avec
11:50lui. Après Cyril, c'est un mec qui connaît bien le judo, c'est impressionnant. J'ai des années
11:58d'expérience de judo et il m'impressionne. Il connaît bien le judo, il se connaît bien physiquement,
12:06et puis il a des bonnes bases, même s'il a un profil un peu rugueux, mais il a des très bonnes
12:11bases de judoka. Donc ça aide, ça aide bien. Et puis moi, ça m'oblige à adapter mon niveau
12:17d'enseignement, si tu veux. Je ne parle pas et je ne démontre pas la même chose à Elios, par exemple,
12:26qui a un niveau de pratique qui est similaire au valide, en tout cas national valide. Et Armindo,
12:36qui a trois ans de judo. Pour certains, il faut reprendre des basiques, mais en même temps,
12:42il faut quand même avancer sur la compétition, sur la partie efficacité, efficience. Donc voilà,
12:48pour moi, c'est ça qui est riche. C'est que j'adapte en permanence mon enseignement et ma façon
12:55de communiquer et de transmettre. Et que pense-t-il de la garde installée,
12:59l'une des principales spécificités du para-judo ? Ce que ça éclaire chez moi, c'est que le travail
13:07en saisie, c'est un point faible chez les valides. C'est-à-dire que la phase d'approche, la phase de
13:15Kumikata, de bagarre de garde, qu'on appelle la bagarre de garde, elle a un peu annulé la partie
13:21Kumikata pure, en saisie, avec tout ce que ça implique en termes de sensibilité, de subtilité,
13:27de ressenti dans les mains. Et on a souvent affaire à des gens qui font lâcher, qui font
13:35péter les mains, plutôt que d'essayer de trouver des solutions en restant en saisie. Et comme moi,
13:40actuellement, je travaille sur la filière aussi, parallèlement sur les aspects techniques qu'on
13:46essaie de restructurer pour la filière. Ça fait partie des choses sur lesquelles on insiste,
13:53de ne pas lâcher les mains pour les jeunes, et d'être capable d'évoluer en gardant les mains
14:01posées, en posant un Kumikata solide et affirmé, et ensuite en évoluant autour, sans passer par des
14:10lâchers de garde qui sont parfois stériles. Et là, en travaillant avec les paras, tu t'aperçois
14:18qu'eux, une fois qu'ils sont en saisie, ils n'ont pas le choix, parce que déjà, il ne faut pas qu'ils
14:22fassent lâcher. Et s'ils font lâcher, il faut qu'ils s'attaquent tout de suite. Donc ça, c'est une
14:27subtilité qu'on peut utiliser. Mais par contre, il n'y a pas toute cette phase d'approche. Tout se
14:32joue dans la saisie, dans la capacité à sentir les tensions et à jouer avec. 28 ans après son
14:40formidable parcours d'Atlanta, voici les précieux conseils qu'il va continuer de distiller à chacun
14:45jusqu'à leur entrée en piste. Quand tu es sur un événement comme ça, il y a un espèce de
14:50sentiment de liberté, dans le sens où tout est possible. Et en plus, tout est dans tes mains.
14:56C'est cette espèce d'impression de liberté et de plénitude qui doit vraiment les habiter.
15:08Il va y avoir des moments durs, mais à chaque fois, c'est eux qui ont la main, c'est eux qui sont
15:12maîtres d'œuvres. Et ça, ça doit être un truc qui doit être inspirant. D'être maître de son destin,
15:18à un moment donné, c'est quelque chose qui, parfois, n'est pas... C'est un moment rare. Et
15:26ça, il va falloir qu'il l'ait vraiment. Et je pense que ça sera un peu notre... En tout cas,
15:31pour moi, pour ma part, ça sera vraiment l'axe de ma communication avec eux. Se sentir libre,
15:37et vraiment utiliser cette liberté.