• il y a 4 mois
Avec Philippe Migault, directeur du centre européen d’analyses stratégiques et Dominique Trinquand, ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU et auteur de livre « Ce qui nous attend » aux éditions Robert Laffont

Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry
______________________________________

Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/
______________________________________

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr

##LES_GRANDS_DEBATS_DU_MATIN-2024-08-02##

Category

🗞
News
Transcription
00:00Nos invités qui nous font le plaisir d'être avec nous ce matin, je vous les présente, le général Dominique Trinquant, bonjour.
00:06Bonjour.
00:07Et merci d'être avec nous ce matin sur Sud Radio, ancien chef de la mission militaire française auprès de l'ONU, auteur du livre
00:12Ce qui nous attend aux éditions, Robert Laffont, et puis Philippe Migaud, bonjour.
00:16Bonjour.
00:16Et merci d'être avec nous ce matin, directeur du centre européen d'analyse stratégique.
00:21L'invitation est donc lancée, le président ukrainien est prêt à accepter un sommet pour la paix avec la Russie.
00:26Zelensky l'a annoncé dans une interview accordée à plusieurs médias français.
00:30Il affirme que l'Ukraine et le monde entier, je le cite, sont d'accord pour que la Russie soit invitée à ce prochain sommet de la paix.
00:37Philippe Migaud, est-ce que cette invitation vous surprend et que faut-il comprendre à cette invitation ?
00:43Non, cette invitation n'est pas surprenante dans la mesure où l'Ukraine est dans une situation extrêmement difficile.
00:49Je vous rappelle d'ailleurs que ce qu'a dit Vladimir Zelensky exactement, enfin Vladimir Zelensky, pardon, oui, Vladimir Zelensky,
00:55c'est que le monde entier veut la Russie à la table des négociations, donc il est difficile pour l'Ukraine de faire autrement.
01:01Donc en gros, ce qu'il dit...
01:03C'est-à-dire tout le monde, c'est...
01:05C'est-à-dire les alliés des Ukrainiens, c'est-à-dire grosso modo les Etats-Unis et l'Union Européenne.
01:11Donc très clairement, ce qu'il dit en filigrane, c'est qu'on est en train de lui dire qu'on ne sort pas de cette crise,
01:17qu'il serait temps d'arrêter les frais, de venir à la table des négociations,
01:20d'autant plus que sur le terrain, la situation militaire tourne à la déconfiture pour les armées ukrainiennes.
01:28Alors une déconfiture, comment dirais-je, modérée, le terme est peut-être un peu fort.
01:32Mais enfin concrètement, ce sont les Russes qui ont l'initiative depuis des mois,
01:35les Russes qui conquièrent de plus en plus de territoires, lentement mais sûrement,
01:39et l'armée ukrainienne qui n'arrive plus à freiner la progression russe.
01:43Donc Zelensky est bien obligé de faire des concessions,
01:47un, parce que ses alliés le veulent, deux, parce qu'il est dans une conjoncture politique extrêmement compliquée.
01:52Pourquoi ? Parce qu'on voit bien qu'aux Etats-Unis, quand même,
01:55le pourcentage de chances depuis que Donald Trump a pris une balle et que Joe Biden s'est retiré de la course,
02:01le pourcentage de chances que Donald Trump arrive à la Maison-Blanche est loin d'être négligeable.
02:06Il pourrait très bien se retrouver en janvier prochain avec Trump à la Maison-Blanche,
02:09privé de son principal allié américain, isolé complètement vis-à-vis de Vladimir Poutine
02:15parce que ce n'est pas l'Union Européenne qui peut prendre le relais des Etats-Unis.
02:18Général Dominique Trinquant, par rapport à ce que disait à l'instant Philippe Migaud,
02:22comment on explique cette invitation lancée ?
02:24Est-ce qu'effectivement, militairement, l'Ukraine est dans une mauvaise situation aujourd'hui ?
02:29Oui, alors je ne reprendrai pas du tout le terme de déconfiture
02:32parce que je rappelle que la Russie avance, mais avance pied à pied,
02:37petitement et avec beaucoup de pertes.
02:39Simplement, l'Ukraine est loin de ses objectifs qui étaient de rétablir
02:43et de reprendre les frontières internationalement reconnues en 1991.
02:47Je pense que la première réunion qui a eu lieu en Suisse,
02:50on s'en souvient, réunion sur la paix dans laquelle les Russes n'étaient pas présents,
02:54a permis de faire le point et les alliés, justement, de l'Ukraine
02:58ont probablement fait passer le message en disant
03:00écoutez, vous n'atteindrez jamais l'objectif de rétablir les frontières internationalement reconnues.
03:05Donc il s'agit de discuter.
03:07Ce qui rejoint la position que le président Zelensky avait déjà annoncée
03:12alors de façon subliminale dans une université il y a plusieurs mois,
03:16dans laquelle il avait dit, vous savez, reconquérir le Donbass,
03:19ça va être extrêmement difficile et le garder encore plus difficile
03:23parce qu'il n'y a plus que des populations pro-russes.
03:25Donc tous ces éléments conduisent le président Zelensky à changer de position,
03:30ce qui n'est pas facile parce que je rappelle qu'il y a une loi
03:33qui a été votée à la Rada qui lui interdisait de négocier avec M. Poutine.
03:37Donc là, lorsqu'il dit tout le monde veut y aller, les occidentaux,
03:41nos soutiens et donc on est bien obligés d'y aller,
03:43ils cherchent à se couvrir vis-à-vis de la Rada d'une certaine façon.
03:46Du côté russe, les Russes, c'est intéressant, n'ont pas refusé du tout.
03:51Ils ont dit on va étudier la situation.
03:54Il y a des chances que la Russie accepte, éventuellement pour l'Avrof,
04:00peut-être plus que pour Poutine, pour le ministre des Affaires étrangères,
04:02ce serait ça ?
04:03Je pense que les Russes ne sont pas non plus dans une situation brillante.
04:07Ils ont retiré 9 des 13 responsables du ministère de la Défense russe.
04:13Ça prouve quand même qu'il y a un petit problème.
04:15Ils sont obligés d'apporter des armes d'Iran et de Corée du Nord.
04:19Donc là aussi, il y a un petit problème.
04:21Ils ont perdu beaucoup de monde.
04:22Simplement, le président russe, après avoir tout à fait initialement,
04:26il y a deux ans et demi, vouloir annexer l'Ukraine,
04:29maintenant veut annexer les 4 oblastes qu'il a décidé en septembre 2022,
04:33qu'ils faisaient partie de la Russie.
04:35Or, il n'y est pas.
04:36Aujourd'hui, il n'y est pas.
04:37Alors, Donetsk, ça avance.
04:39Il a des chances peut-être d'avoir l'oblaste de Donetsk complètement.
04:43Luhansk, un petit peu aussi.
04:45Mais en revanche, les deux autres, Zaporizhia et Kherson,
04:48il a peu de chances de les avoir.
04:49Donc lui aussi, il faut qu'il avance sur le terrain pour être en position
04:53plus confortable pour négocier.
04:56Mais j'ai peur qu'il ne puisse pas pouvoir annoncer
05:00qu'il est capable de négocier avec des zones territoriales
05:05des 4 oblastes conquises.
05:06Donc, il va falloir qu'il révise également son jugement.
05:09Philippe Migaud, sur deux points.
05:11Est-ce que la Russie est susceptible d'accepter ?
05:14Est-ce qu'il y a des chances que la Russie accepte de se rendre
05:17à ce sommet de la paix ?
05:19Et puis, juste d'un mot aussi, Vladimir Poutine qui, précisons-le,
05:22vient de doubler aussi la prime des volontaires
05:24qui rejoignent le front ukrainien.
05:26C'est-à-dire que la situation n'est peut-être pas si facile pour la Russie.
05:30Alors, il faut regarder les choses sous plusieurs angles.
05:32Je reviendrai d'abord sur ce que disait le général à l'instant,
05:34qui parle d'une avance pied-à-pied de la Russie.
05:37Il a raison.
05:38Il a raison.
05:39Territorialement, la Russie a repris depuis octobre dernier
05:44l'équivalent de la moitié du Luxembourg.
05:46Ce n'est pas grand-chose.
05:47Mais ce n'est peut-être pas comme ça qu'il faut compter.
05:49L'unité de mesure n'est peut-être pas le nombre d'hectares qui reprennent.
05:51C'est-à-dire, c'est quoi ?
05:52L'unité de mesure, c'est le nombre d'hommes qui tombent en Ukraine
05:55et le nombre de matériels perdus.
05:57Je vous donne quelques chiffres pour dire pourquoi je parlais de déconfiture.
06:00Après, j'ai modéré mon propos.
06:01Le général avait raison.
06:02La déconfiture, c'était un peu fort.
06:03Mais tout de même, quand le général dit que la Russie est dans une situation compliquée
06:08parce qu'elle reçoit des armes de l'Iran, de la Corée du Nord ou de la Chine,
06:13le problème, c'est qu'un obus de 152 mm fourni par la Corée du Nord ou la Chine,
06:19c'est 1 000 dollars.
06:21Un obus de 155 mm produit dans une usine occidentale, c'est 4 000 dollars.
06:26La Russie, intrinsèquement, est capable de produire à peu près 3 millions d'obus neufs par an
06:32et de remettre à niveau des stocks à hauteur de 1 500 000 supplémentaires.
06:37Donc, 4 500 000 obus par an.
06:39L'OTAN, les Etats-Unis et l'Union Européenne, on est à peu près à 1 500 000 obus par an
06:46avec un coût de production beaucoup plus élevé.
06:50Donc, la Russie, non seulement a une forte production,
06:52mais elle bénéficie de la production nord-coréenne à bas coût,
06:55de la production chinoise, éventuellement, à bas coût sur certains produits discrets.
07:00Et concrètement, la Russie, quand les Ukrainiens tirent un obus, les Russes en envoient 7.
07:06Donc, ils ont une écrasante supériorité du point de vue des feux.
07:10Ils détiennent la supériorité aérienne avec des frappes très lourdes,
07:15avec des bombes rustiques qu'on appelle les FAB 1500, les FAB...
07:18Ça sera le cas avec l'arrivée des F-16 aussi ?
07:20Ça ne changera rien à l'arrivée des F-16.
07:22D'abord, les F-16, pour l'instant, sont dans la partie ouest de l'Ukraine.
07:25Ils ne sont pas du tout engagés au combat.
07:27Si, cette année, on a une douzaine de F-16 qui arrivent,
07:31ça ne changera pas fondamentalement la question.
07:34Donc, en fait, très concrètement, la Russie a la puissance de feu,
07:37et la Russie a l'avantage du nombre.
07:39Pourquoi ? La Russie, c'est 146 millions d'habitants.
07:41Avec une pyramide des âges plus jeunes que celle de l'Ukraine,
07:44l'Ukraine, c'est 34 millions d'habitants.
07:47Donc, en fait, ce qu'il faut compter, ce n'est pas le nombre d'hectares,
07:49c'est le nombre d'Ukrainiens qui tombent, et combien de temps ils vont pouvoir tenir.
07:52Sur, maintenant, les deux autres points que vous évoquiez,
07:55est-ce que Vladimir Poutine peut venir à la table des négociations ?
07:58Poutine ou Lavrov, peu importe.
08:00La question, c'est, quelles sont les conditions
08:05que l'on met pour que la Russie vienne ?
08:07Si on reste comme en mi-juin, en Suisse,
08:11où on avait dit que la condition, c'est l'intégralité territoriale
08:16de l'Ukraine, il n'y a pas la peine de se déplacer.
08:18La Russie, actuellement...
08:20J'ai l'impression qu'il a un peu nuancé son propos, Vladimir Zelensky, non ?
08:23Ce qu'il dit, c'est que...
08:25Mais justement, c'est ça qui est intéressant,
08:28c'est que depuis la mi-juin, et c'est là qu'on voit qu'il est vraiment en difficulté,
08:31y compris sur le terrain, c'est que depuis la mi-juin, son discours s'est réfléchi.
08:34Aujourd'hui, il dit qu'il sera très, très, très difficile
08:37de concéder des terrains, mais il ne dit plus que c'est impossible.
08:40Et tout ça, c'est dû à quoi ? C'est dû au fait que la Russie avance sur le terrain.
08:44Donc, les pertes ukrainiennes sont lourdes,
08:46la Russie avance.
08:48S'ils prennent le carrefour routier et ferroviaire de Pokrovsk,
08:52qu'ils visent actuellement, ils sont à moins de 18 km aujourd'hui,
08:55ça va totalement changer la donne dans le Donbass.
08:58Et concrètement, on ne peut pas du tout exclure
09:02que la Russie arrive éventuellement en janvier prochain,
09:05parce qu'on ne sait pas s'il va y avoir une ouverture de négociation
09:08avant la nomination du nouveau président des Etats-Unis.
09:11Si la Russie arrive en janvier prochain avec une carte de guerre
09:14qui a encore augmenté des possessions supplémentaires,
09:16elle sera encore plus en position de force.
09:18Général Dominique Trinquant, ça vous fait réagir ces propos à l'instant ?
09:22D'abord, pour l'instant, l'invitation est lancée pour le mois de novembre,
09:26correspond effectivement à l'élection présidentielle américaine.
09:29Ensuite, vous me permettrez de pas rentrer dans le calcul des obus,
09:34du nombre d'obus au mètre carré.
09:36On n'est plus en 14-18, et si vous voulez,
09:38ce n'est pas le nombre d'obus que vous mettez au mètre carré,
09:40c'est le nombre d'obus que vous mettez sur une cible,
09:42et ce n'est pas exactement la même chose.
09:44L'artillerie qui est utilisée à l'ouest n'a rien à voir avec l'artillerie
09:49qui est utilisée du côté de l'est.
09:52Sur les populations, évidemment que l'Ukraine est dans une situation plus difficile,
09:56d'abord parce qu'elle n'a pas mobilisé au départ sa jeunesse,
09:59qu'elle commence seulement à le faire, avec des difficultés, il faut le reconnaître.
10:04Ce qu'il y a de terrible, pardonnez-moi,
10:07ce qu'il y a de terrible, c'est que la jeunesse russe, les Russes,
10:10alors souvent, c'est vrai, pas des Slaves, ethniquement Slaves,
10:14mais les Russes comme les Ukrainiens souffrent terriblement.
10:18Ce sont deux pays qui se sont saignés,
10:20et pardonnez-moi, mais la faute en revient quand même à celui qui a initié cette guerre.
10:26Alors c'est à lui de changer sa position, et je suis d'accord,
10:29il ne changera de position que quand il aura la capacité de dire qu'il a gagné quelque chose.
10:35Mais justement, sur le changement de discours,
10:38il est quand même peut-être révélateur aussi d'une attitude très profonde de Volodymyr Zelensky.
10:44Là, on est vraiment sur un changement de discours.
10:46Non mais ça, je suis tout à fait d'accord.
10:49On en revient un petit peu, si vous voulez, à la position qui était celle de l'Ukraine en avril 2022,
10:55il faut se souvenir de la négociation qui a eu lieu en Turquie,
10:58dans laquelle, en clair, on arrivait quasiment à un cessez-le-feu,
11:02avec des négociations ultérieures sur les lignes territoriales.
11:05Et d'ailleurs, le langage de M. Zelensky stratégiquement a complètement changé,
11:09puisqu'il a dit qu'il fallait qu'il revoie, mais globalement avec ses voisins,
11:14donc pas seulement avec la Russie, les problèmes de limites territoriales.
11:18Donc il est vraiment en train de changer sa position,
11:21et changer sa position parce qu'il se rend bien compte qu'une Ukraine exsangue,
11:26c'est-à-dire avec une population qui a été tuée, qui est aujourd'hui à 34 millions,
11:31il faudrait rappeler qu'avant 90, l'Ukraine était à 50 millions.
11:34Donc ça veut dire qu'elle est saignée depuis de nombreuses années.
11:39Donc c'est ça le problème essentiel du président Zelensky,
11:42arriver à sauver la population ukrainienne et non pas le territoire.
11:47Et c'est là un changement radical dans sa position.
11:50Général Dominique Trinquant, vous restez avec nous, dans un instant votre réponse.
11:54Philippe Migaud, directeur du Centre européen d'analyse stratégique,
11:58si vous n'étiez pas d'accord avec les propos du général,
12:01justement, vous réagirez dans un instant.
12:03Et puis notre question du jour, je vous le rappelle,
12:05sur notre compte Twitter Sud Radio, le président Volodymyr Zelensky,
12:07qui déclare donc que le monde entier, dont l'Ukraine,
12:09souhaite inviter la Russie au sommet de la paix en novembre.
12:12Vladimir Poutine doit-il accepter cette invitation ?
12:14Votez, vous réagissez sur notre compte Twitter Sud Radio.
12:16On fera un point tout à l'heure avec vous, Laurie Leclerc.
12:18Et puis vous nous appelez 0800 26 300 300.
12:20A tout de suite.
12:21Sud Radio.
12:22Parlons vrai.
12:23Parlons vrai.
12:24Sud Radio.
12:25Parlons vrai.
12:26Le Grand Matin Sud Radio.
12:288h-10h.
12:29Benjamin Glez.
12:30Sud Radio.
12:319h28.
12:32On poursuit les débats.
12:33Notre question du jour et vos appels au 0800 26 300 300.
12:37Laurie Leclerc, notre question du jour.
12:38C'est notre débat.
12:39Le président Volodymyr Zelensky déclare que le monde entier,
12:41dont l'Ukraine, souhaite inviter la Russie au sommet de la paix.
12:44Ce sera en novembre.
12:45Vladimir Poutine doit-il accepter l'invitation ?
12:47Ça donne quoi sur les réseaux sociaux ?
12:48C'est oui à 65%.
12:50Non à 25%.
12:51Sans avis, vous êtes à 10%.
12:53On poursuit les débats.
12:54Nos invités ce matin, Général Dominique Trinquant,
12:56ancien chef de l'émission militaire française auprès de l'ONU,
12:59auteur du livre « Ce qui nous attend », c'est aux éditions, Robert Laffont.
13:02Et puis, également présent avec nous, Philippe Migaud,
13:04directeur du Centre Européen d'Analyse Stratégique.
13:07On parle de la situation, notamment sur le terrain.
13:10On parle également de Vladimir Poutine,
13:13qui a décidé de doubler les primes pour, justement,
13:16qu'il y ait davantage de volontaires qui puissent s'engager sur le front ukrainien.
13:20Vous vouliez réagir, là-dessus, sur ces points-là,
13:22sur ce que disait le Général Dominique Trinquant, juste avant la pub ?
13:26Oui, il y a deux points.
13:27Parce qu'en fait, on a tendance à projeter des schémas sur les Russes qui sont faux.
13:32Et puis aussi, toujours dans l'éternel débat des Occidentaux,
13:36de la qualité contre la quantité.
13:38Quand le Général, tout à l'heure, disait qu'on n'est plus en 14-18,
13:40ce qui compte, c'est l'endroit où l'obus tombe.
13:42Prenons l'exemple d'un obus.
13:43L'obus Excalibur, américain, 155 mm, guidé, avec une précision métrique.
13:48Super ! Quand il est arrivé, il a fait de gros dégâts.
13:50Sauf que les Russes, aujourd'hui, ont à peu près compris
13:52comment brouiller une bonne partie des systèmes européens,
13:55parce que ce sont de très bons pratiquants de la guerre électronique.
13:58Aujourd'hui, l'obus Excalibur, il n'a plus la même précision
14:00parce qu'il ne tombe plus au même endroit.
14:01Et ça, c'est quelque chose qui est avéré.
14:04Donc, on a une adaptation des Russes à la qualité du matériel européen.
14:10Par rapport à la...
14:11Une capacité, du coup, d'adaptation.
14:12Une capacité des Russes à s'adapter.
14:14Et en plus, ensuite, il y a une chose.
14:16Le général parlait de 14-18, et il parle de la qualité contre la quantité.
14:19Mais je rappelle juste une chose.
14:21Quels sont les militaires qui avaient le meilleur armement
14:24pendant la Seconde Guerre mondiale sur le sol ?
14:26C'étaient les Allemands.
14:28Sauf que quand les Allemands ont produit 1700 chars Tigre et Tigre 2,
14:32les Russes, en face, ont produit 3800 chars Staline et 64 000 T-34.
14:37Et ce que je veux dire, c'est qu'au bout d'un moment,
14:39quelle que soit la qualité, c'est la quantité qui l'emporte.
14:43La quantité.
14:44La quantité.
14:45Et la quantité, au point de vue des hommes, au point de vue des obus,
14:48au point de vue de la supériorité aérienne,
14:50elle est côté russe.
14:51Donc je ne pense pas du tout que la Russie soit dans une situation
14:54aussi difficile que le général veut bien le dire.
14:56Et ça se double.
14:57Vous parliez de la prime des 4000 euros.
14:59Cette prime de 4000 euros, d'ailleurs, ce n'est pas une prime de 4000 euros.
15:02C'est une prime de 8000 euros.
15:03Je m'explique.
15:04Il y a une prime de 4000 euros qui est fournie, payée par Moscou,
15:08par le Kremlin,
15:09et les régions d'où viennent ceux qui vont signer,
15:12doublent la mise.
15:13Donc en fait, la prime, elle est de 8000 euros.
15:15Mais qu'est-ce que ça veut dire ?
15:16Pourquoi est-ce qu'on est obligé de payer davantage ?
15:19Ce n'est pas parce que les gars veulent plus se battre.
15:21C'est parce que le taux de chômage actuellement en Russie,
15:23il est de 2,1%.
15:25Que les salaires, sur un an, ont augmenté de 22%.
15:29Donc un, on est dans une situation de plein emploi.
15:31Deux, on est dans une situation où les salaires sont...
15:33Il y a des manifestations quand même du côté russe,
15:36d'une partie de la jeunesse, qui n'est pas anodin.
15:39Alors, tout à fait.
15:41Il est bien évident qu'on n'a pas un bloc monolithique
15:45derrière le Président Poutine.
15:47Ça, c'est bien évident.
15:48Il est bien évident, notamment, que la jeunesse,
15:50dans les grandes villes, Moscou, Yekaterinbourg,
15:52Pétersbourg, a toujours été contestataire.
15:55Elle l'est davantage en cas de guerre,
15:57parce que celle qui risque d'être mobilisée en premier,
15:59c'est elle.
16:00Donc il est bien évident qu'on n'a pas une union sacrée,
16:02contrairement à ce qu'on pourrait s'imaginer.
16:04Mais la situation économique de la Russie,
16:06concrètement,
16:07lui permet de continuer la guerre sur le long terme,
16:10alors que ce n'est plus le cas de l'Ukraine.
16:12Je vous rappelle que l'Ukraine,
16:13on parlait récemment du fait qu'elle était
16:15à la limite du défaut de paiement.
16:17La Russie, elle est à 15% d'être publique.
16:19Général Dominique Trinquant,
16:21notamment pour revenir sur la question de la quantité,
16:23en termes d'armement, la quantité russe
16:25face à la qualité de l'armement occidental, en face.
16:30Alors, simplement, je ne vais pas rentrer,
16:32si vous voulez, dans un débat moi qui suis cavalier,
16:34dans un débat d'artillère.
16:36L'obus Excalibur, il est très très peu utilisé.
16:39Ce n'est pas ça qui compte.
16:40C'est la capacité à pouvoir observer,
16:43tirer rapidement un obus qui va rapidement en cible
16:46et pas un obus guidé finalement.
16:48Parce que les Excalibur, je rappelle qu'ils étaient faits
16:50pour tirer sur des chars et non pas sur l'infanterie.
16:52Donc, il s'agit de la capacité à tirer précisément
16:56et rapidement sur une position.
16:58Mais un sujet qui me paraît plus important,
17:01c'est la situation en Russie
17:03et l'intérêt du président Poutine
17:05de venir à une négociation.
17:07Puisque c'est ça la question de fond que vous posiez.
17:09Moi, je crois qu'il va falloir que le président Poutine,
17:12d'abord, puisse faire montre de gain.
17:16Sinon, pourquoi aurait-il fait la guerre ?
17:19Donc, c'est les fameux quatre blats qui doivent être annexés.
17:22Mais deuxièmement, globalement,
17:24le président Poutine, lui, a intérêt à ce que la guerre continue.
17:27On parlait de la population russe.
17:29Eh bien, en étant en guerre,
17:31ça permet de mettre une pression sur la population russe
17:34et de maintenir l'état de son régime tel qu'il est aujourd'hui.
17:38Et donc, l'intérêt de la continuation de la guerre stratégiquement
17:42est intéressant, non seulement en Ukraine,
17:44qui, pour le président Poutine, est un épiphénomène,
17:47mais sur le combat global contre l'Occident qu'il mène,
17:51il a intérêt à maintenir cette tension permanente
17:54que procure la guerre.
17:56Général Dominique Trinquant, Philippe Migaud,
17:58on va au standard tout de suite.
17:59On a des appels au 0826-300-300.
18:01Richard de Toulouse est avec nous.
18:02Bonjour Richard et bienvenue.
18:04Oui, bonjour à vous.
18:06Réaction à ce débat, Richard,
18:10sur cette invitation de l'Ukraine de Volodymyr Zelensky
18:14en direction de la Russie pour ce sommet pour la paix ?
18:18En juin, il n'a pas été convié.
18:22Donc, en fait, il a toute l'attitude pour refuser cette fois-ci
18:26puisqu'on sent bien qu'il y a une forme d'empressement aujourd'hui
18:31avec les élections américaines qui arrivent à grands pas.
18:33Donc, je pense que là, on est à...
18:38Trump, bien sûr, il a son attentat,
18:40donc maintenant, il va falloir faire les glides.
18:43Je pense que la guerre...
18:46C'est le gain d'élection.
18:47La guerre est en train d'une autre tournure.
18:49Merci beaucoup, Richard-Philippe Migaud.
18:53La guerre est en train de prendre une autre tournure ici, très clairement.
18:57Oui, concrètement.
19:00On voit très bien sur le terrain,
19:04et il suffit d'ouvrir la presse internationale,
19:08les articles se suivent par centaines
19:10sur le fait que si la Russie prend Pokrovsk,
19:13Pokrovsk, c'est un réseau routier et ferroviaire important,
19:16vous avez quatre routes qui en partent.
19:18Ces quatre routes, ce sont des axes logistiques
19:20qui alimentent les forteresses, entre guillemets,
19:23de Chassiviar, de Toretsk, de New York,
19:26parce qu'il y a un village qui s'appelle New York en Ukraine.
19:28Vous avez quatre routes qui alimentent tout ce qu'ils trouvent au sud
19:34et au nord-est et au sud-est de Kramatorsk et de Slavyansk,
19:38qui sont les grandes villes qui restent à conquérir dans le Donbass.
19:42Et si les unités ukrainiennes qui sont déjà sur le recul
19:47dans cette partie de l'Ukraine contre la Russie
19:50ne reçoivent plus de ravitaillement,
19:52ne reçoivent plus de renfort,
19:53ne reçoivent plus de munitions,
19:54ne reçoivent plus de médicaments,
19:55ne reçoivent plus de vivres,
19:56ou en reçoivent moins,
19:57elles vont être encore plus en difficulté.
19:59Donc si la Russie prend Prokhorovsk,
20:02elle marque un coup non pas décisif,
20:05ce ne sera pas la fin de la guerre,
20:07mais elle mettra l'Ukraine dans une situation extrêmement compliquée
20:11dans le Donbass,
20:12avec une carte de la guerre qui risque de s'améliorer
20:14concrètement d'ici le mois de novembre.
20:16Le général disait que l'invitation pour cette conférence est au mois de novembre.
20:20Voilà, les choses risquent d'ici le mois de novembre de considérablement se dégrader.
20:24Comment voyez-vous la suite d'ici ce sommet pour la paix, en novembre ?
20:30D'abord, je reviens à l'intervention de votre auditeur.
20:34Il est évident que les élections aux Etats-Unis sont un facteur important.
20:40C'est pour ça que la réunion est prévue au mois de novembre.
20:42Ce que souhaiterait M. Zelensky, c'est que...
20:45D'ailleurs, ce sera avant les élections ou juste après ?
20:49Écoutez, pour l'instant, on n'en sait rien.
20:51Les élections, c'est le 4 novembre.
20:52Donc, si on fait une réunion en novembre, ça risque d'être en même temps.
20:55Et donc, la réunion aura lieu alors que les résultats sont programmés, probablement.
21:00Et ce que je pense, c'est que le président Zelensky, ce qu'il souhaite,
21:04c'est que si M. Trump était élu, il n'arrive pas les mains vides.
21:08D'ailleurs, M. Zelensky dit « Vous voyez, j'ai ouvert la porte.
21:11Il y a une négociation en cours et c'est à partir de là qu'il faut partir. »
21:14Pour ne pas partir au mois de janvier, puisque je rappelle que M. Trump ne sera
21:19qu'au mois de janvier, il a une position « trumpiste »
21:22qui considérerait qu'en 24 heures, il règle le problème en disant
21:26« Vladimir, tu t'arrêtes là où tu es, c'est très bien.
21:28Et toi, Vladimir, j'arrête de te payer si tu continues la guerre. »
21:35Donc, je pense que la position de M. Zelensky, c'est d'arriver avec quelque chose
21:39dans le panier avant que le président Trump n'arrive en place.
21:44Maintenant, il faut bien dire que...
21:46On risque d'avoir une intensification des combats sur le terrain d'ici-là.
21:56De la part du président Poutine, il a intérêt à avancer au maximum
22:00avant que les négociations ne commencent, c'est une évidence.
22:03Mais pour M. Zelensky, sa stratégie est triple.
22:071. Tenir là où il est. 2. Frapper dans la profondeur.
22:103. Engager des négociations pour avoir quelque chose à proposer
22:15si M. Trump était élu.
22:17Pour conclure rapidement, Philippe Migaud, sur ce débat, revenons au sujet principal.
22:22Est-ce que la Russie doit accepter cette invitation ?
22:25Est-ce qu'en l'état actuel des choses, elle peut le faire ?
22:29Ce qui est sûr, c'est que si la Russie disait non pour une ouverture des négociations,
22:38elle passerait pour celle qui est inflexible et qui refuse de faire la paix quoi qu'il en soit.
22:44C'est une position difficile à soutenir, ne serait-ce que vis-à-vis de ses alliés,
22:48comme la Chine, qui en a un peu marre de cette guerre,
22:51qui nuit au commerce international alors que la croissance chinoise ralentit.
22:54Maintenant, c'est aussi dans le camp des Occidentaux.
22:58Volodymyr Zelensky n'est pas en train de proposer une ouverture de négociations,
23:03il le fait sous la pression de ses alliés.
23:05Il l'a très clairement laissé entendre dans ses interviews.
23:08Mais si on dicte les règles que la Russie devra accepter avant d'arriver à la table des négociations,
23:15si on dit oui, on va ouvrir les négociations,
23:17mais les conditions pour que ça se fasse, ce sont celle-ci, celle-ci, celle-là,
23:21et qu'elles ne sont pas acceptables pour la Russie,
23:24évidemment, Poutine aurait tort d'accepter.
23:27Donc soit on a une négociation ouverte, avec toutes les options sur la table,
23:32soit si cette négociation est assortie d'un certain nombre de réserves,
23:38il est bien évident qu'il y a des risques, il refuse.
23:42Un grand merci Philippe Migaud d'avoir été avec nous ce matin sur Sud Radio,
23:45directeur du Centre Européen d'Analyse Stratégique.
23:47Merci beaucoup aussi à Général Dominique Trincant d'avoir été avec nous ce matin sur Sud Radio,
23:52ancien chef de la mission militaire française auprès de l'ONU.
23:54Je rappelle votre ouvrage, ce qui nous attend, c'est aux éditions.
23:57Robert Linfont, dans un instant.

Recommandations